11 | Aveux
« Léa !? Viens mettre la table s'il te plait !
_ Grumf oui M'man ! »
Je fis glisser ma chaise roulante vers la porte de ma chambre et d'un pas lent m'élançait dans les escaliers. Je hélais mon frère pour qu'il me donne un coup de main, sans pour autant obtenir de réponse. Marmonnant dans ma barbe, je trainais les pieds vers la cuisine, sous les reproches de ma mère qui désespérait de ne pas me voir réviser. Je lui répondais dans un grognement et ouvrit le tiroir pour en sortir les couverts.
« 'mange quoi M'man ? Lança Rémi mon magnifique petit frère aux yeux bleu.
_ Tu ne penses décidemment qu'à ton estomac... Ne fait pas rentrer le chat ! Il est trempé ! »
Le félin s'agglutinait contre mes jambes, espérant me faire tomber. Je le repoussais en pestant contre ce dernier. Mon pantalon était sale désormais ! Merci Monsieur le Chat !
Lorsque mon père arriva alors que nous étions déjà réuni, le pot aux feu fumant au centre de la table, il s'approcha pour tenta de me faire une bise affectueuse. Je détestais ça et fronça les sourcils devant son comportement gâteux.
« Ah tu pue le cochon ! Vas te laver ! M'exclamais-je pour le taquiner.
_ Pas avant d'avoir avalé quelque chose, alors on manque quoi? Demanda-t-il en jetant un œil à l'autocuiseur, ah... »
Mon frère se vanta d'être propre sur lui pour montrer à mon père qu'il n'était pas des plus odorants. Je secouais la tête de dépit, décidemment il allait passer la vie dans cette porcherie qui n'était pas la sienne ! Il était bien trop gentil. Tout ça pour sois disant aider le voisin.
La télé en marche, j'avalais goulument les légumes cuits que j'avais pris soin de réduire en purée avec ma fourchette. Je tournais les yeux de temps en temps vers l'écran et demanda brusquement si je pouvais sortir la bouteille de Coca. J'avais l'impression de ne pas en avoir bu depuis des lustres.
« Cela fait maintenant cinq mois que nous sommes sans nouvelles de la jeune Léa Châtel, adolescente de 18 ans... »
Je refermai le réfrigérateur brusquement et la bouteille en main me dirigea vers la salle à manger. Je devais avoir mal entendu... J'ai cru un instant qu'on parlait de...
« Partie en voyage en Egypte avec sa famille , elle n'a plus donné aucun signe de vie alors qu'elle et sa grand-mère visitaient d'anciennes ruines. Les enquêteurs s'interrogent si il ne s'agirait pas d'un enlèvement dût à des terroristes... »
C'était moi ! Je lâchais la bouteille, et jeta un œil à mes parents qui continuaient de manger tranquillement sans pour autant s'inquiéter de ce qui se passait à l'écran. Je leur demandais s'ils avaient entendu et de regarder le téléviseur affichant une horrible photo de classe prise il y a un an.
« Cesse de parler, assis toi Léa.
_ Mais... Ecoute !
_ Léa-chan. »
Dans un sursaut je me redressais, le cœur battant, le souffle court. Mon regard parcouru la pièce où je venais de m'éveiller. C'était complètement hideux, du blanc partout ! Je n'étais plus chez moi, mais dans une chambre d'hôpital. Quel rêve... Bizarre ?
Je pris mon visage d'une main, et la passa dans mes cheveux. Berk ! Ils étaient tout poisseux ! Toute engourdie je remarquais à l'instant que je portais un appareil respiratoire que j'enlevais rapidement. Portant une horrible blouse verte pâle, d'où des fils passaient à travers les manches, je constatais que j'étais bien en vie. Du moins c'est qu'affichait la ligne verte qui dessinait de petites bosses dynamiques. Un peu trop dynamiques d'ailleurs.
Je les enlevais faisant sonner l'appareil m'y reliant. J'allais me dévêtir de la couverture, et remarqua mes jambes nues qui... Combien de temps je dormais moi ? Beaucoup trop en tout cas pour ne pas avoir eu le temps de me les épiler.
Je secouais mon épaule gauche, mon bras et ma main ne répondaient pas. Etrange... je ne m'alarmais pas, j'ai dû m'endormir sur le côté c'est tout. Telle une romaine, j'enroulais difficilement l'édredon blanchâtre à ma taille avec mon bras valide et sauta de mon lit pour me diriger vers l'unique fenêtre.
Je reconnus l'urbanisation moderne de Domino City. Je soupirais de soulagement. Il y a quelques instants j'étais chez moi, dans un rêve banal virant à une prise de conscience... Mais j'étais contente d'être de retour ici, bien qu'en danger de mort. Mais qu'est ce que je faisais dans une chambre de repos ?
Il y avait un autre lit, je me demandais qui était mon voisin. Il fallait que je trouve un pantalon au plus vite. Il y avait un petit canapé très moche recouvert d'un tas de manteau. Je fus flatté de voir qu'ils y avaient quelques visiteurs, à moins que ces vêtements appartiennent à des proches de mon colocataire.
« Wow Nelly ! »
Je sursautais quand je vis Sugoroku dans la même tenue que moi, debout dans l'entrebâillement de la porte. Il tenait deux tasses d'où une légère fumée s'échappait. Je ne comprenais plus rien à la situation. Mon bras droit était crispé sur ma jupe de fortune, afin de la maintenir en place, les rayons de soleils chauffaient ma nuque, et je remarquais à l'instant que la machine cardiaque continuait son chant infernal.
« Monsieur Mûto ? Il vous est arrivé une bricole ?
_ Euh oui, enfin, c'est un peu compliqué mais... Tu es... Ah viens là que je te serre dans mes bras. »
Il posa les tasses sur sa table de chevet et s'approcha précipitamment vers moi. Je ne comprenais pas du tout ce qui lui prenait, il s'inquiétait à ce point pour moi ? Il est vrai que j'ai fais un malaise pour une raison que j'ignorais sur le moment mais de là à prendre cet air si heureux...
« Yûgi veillait sur toi, il n'est pas là ? Murmura-t-il en jetant un regard circulaire.
_ Il veillait sur... »
La pile de manteau se mit à remuer, et quelques mèches de cheveux s'en dégageaient suivit de petites mains qui tâtonnait les alentours. Le regard endormis, Yûgi leva les yeux vers moi et me fit un sourire timide.
« Coucou. Baillât-il. »
Prenant conscience de ma présence, il écarquillait les yeux incessamment.
« Léa-chan ! »
Il accourut dans ma direction et se précipita dans mes bras en pleurs. Je ne bougeais pas ne voulant pas faire tomber ce qui me recouvrait les jambes. Interloquée je demandais à mon ami ce qui me valait tout ce chagrin.
« On pensait que tu n'allais plus te réveiller ! J'ai veillé sur toi dès que je pouvais, j'ai eu si peur Léa-chan ! Même Ojii-san voulait te débrancher !
_ Yûgi je ne sais pas... Que quoi ? Monsieur Mûto ! M'écriais-je en lui lançant un regard sévère.
_ C'est le médecin ! Assura le vieillard. C'est lui qui disait que ton réveil n'était pas assuré !
_ Mais tu l'as suggéré ! Espèce de monstre ! Pleura Yûgi se blottissant contre moi.
_ Je... J'ai du mal à vous suivre... Avouais-je. Je pensais m'être juste évanoui. Et vous que vous est-il arrivé ? Demandais-je de nouveau à Sugoroku.
_ Bon je vais chercher le médecin. Suggéra-t-il pour éviter toute explication. »
Décidemment, je devais avoir raté quelque chose. Depuis combien de jours je dormais moi ? Le garçon m'invita à s'assoir près de lui, il poussa quelques affaires, et me prit les mains. Je rougissais subitement par ce geste, pourquoi s'amusait-il à de telle familiarité ? Je ne me souvenais d'être devenue une amie intime.
« En fait... Après le duel contre Kaiba tu... Tu t'en souviens n'est ce pas ?
_ Oui je me souviens lui avoir promis de me faire teindre les cheveux si ... Il n'y a pas de miroir... Je n'ai pas osée rassure moi ?!
_ Non, non ! Justement parce que tu as... Tu l'as battu. »
Des images défilèrent dans ma tête, le dôme gigantesque, la voûte en verre, les cris de nos amis, les propos de Bakura, le baiser de Yûgi... Ah oui, je comprenais pourquoi il était devenu si affectueux envers moi... Il fallait que j'impose des limites désormais.
Ensuite il y avait la défaite du Pharaon puis mon duel... J'avais invoqué Râ.
« J'ai réussi... Soufflais-je. Yûgi tu te rends compte !? J'ai battu cet arrogant ! C'est génial ! Continuais-je à m'extasier en applaudissant d'une main.
_ Mais tu es tombée dans le coma, souligna le garçon le regard emplis d'inquiétude et de sévérité à la fois. Ce n'était pas drôle pour nous... Atem m'a expliqué que la carte de Râ avait puisé toute ton énergie, j'ignorais que cela était possible mais tu nous as tous fait une peur bleue.
_ Je suis désolée, j'ai été imprudente. M'excusais-je en baissant les yeux. Et ton grand père ? Pourquoi il était là ? »
Prêt à partir dans de grandes explications, le garçon croisa les bras et les yeux mis clos mis un petit temps avant de tout se remémorer. Quand il adoptait ce regard sérieux, je repensais à ce moment d'absence que nous avions eu après ce baiser volé. Il avait tout le courage nécessaire pour battre son rival, mais c'était le Pharaon... C'était le Pharaon qui avait semblé si désarmé.
« Un jour on a reçu un colis t'étant destiné. Il y avait un gant et une cassette vidéo.
_ Une cassette vidéo ? Répétais-je sachant très bien de quoi il s'agissait.
_ Un homme s'appelant Pegasus a eu vent de ta victoire face à Kaiba. Il voulait que tu viennes sur son île où un immense concours de duel était organisé. Jonouchi qui voulait devenir duelliste a sauté sur l'occasion et a voulu s'y rendre à ta place. Alors après avoir vu la lettre on a mis en marche la vidéo et là tout a dégénéré. Pegasus est apparu à l'écran, mais c'est comme s'il était présent. Et là il s'est intéressé à Atem... »
Je clignais des yeux face à ce récit qui ne m'était pas inconnu, sauf que je n'étais pas censé être le destinataire de ce colis piégé... J'eu une once de satisfaction en sachant qu'on voulait bien de moi sur l'île des duellistes. Je stoppais Yûgi dans son élan en posant ma main droite sur son épaule.
« Laisse Yûgi... je connais la suite. Il a prit l'âme de ton grand père c'est ça ? Je suis au courant.
_ Mais ... Comment tu pourrais ...
_ Je vais te devoir quelques explications...»
Je n'étais pas honnête avec ce garçon, lui qui était pourtant si gentil, dévoué... Et moi je n'étais qu'une grosse menteuse, égoïste qui profitait de la situation. Mais ce n'était pas le moment. Je préférerais tout lui avouer un autre jour, après avoir reconstruit ma mémoire comme il se devait. Une question subsistait dans mon esprit, et je me devais de la lui poser.
« Combien de temps je suis... je dors dans cet hôpital ?
_ Mademoiselle Châtel ! S'exclama un homme en blouse apparaissant brusquement. Et bien qu'elle surprise ! Après six mois de repos vous devez vous sentir un peu pâteuse n'est ce pas ?
_ SIX MOIS ? »
Tout devint brusquement flou, j'avais l'impression de faire une chute alors que j'étais bien assise. Yûgi vit mon malaise , protecteur, il posa une main dans mon dos comme pour m'empêcher de tomber. Je ne réagissais même pas. Je pensais au temps perdu, aux jours qui s'écoulaient et qui me restaient... Non je ne pouvais pas me permettre de dormir ainsi ! Coma ou pas cela m'est égal ! Je n'avais pas le droit de dépendre de la famille Mûto ainsi durant tout ce temps !
« Quelque chose ne vas pas ?
_ Je suis un peu barbouillée, c'est normal, non ? Grommelais-je au médecin. »
Il me proposa de m'installer sur le lit afin de prendre ma tension. Tenant toujours ma couverture je le laissais faire en obéissant et il s'étonna de me voir en si grande forme. Je ne cessais de lui demander pourquoi ils n'avaient pas essayé de faire quelque chose pour me sortir de mon sommeil. Bien que je sache que cela était improbable, et que je n'allais pas avouer ma mauvaise foi, je lui crachais son incompétence et son non-dévouement, subitement devenue anxieuse.
« Et mon bras gauche ! Il est dysfonctionné ! Vous m'avez foutu quoi !?
_ Mademoiselle Châtel calmez-vous ! Gronda-t-il. Soyez heureuse d'être en vie, et de ne pas avoir été envoyé dans un autre hôpital quelque part en France. Dois-je vous rappeler que vous n'avez pas de papier sur vous ? »
Je déglutis. Oui il n'avait pas tout à fait tord. Comment avais-je pût être hospitalisé sans véritable identité ?
« Heureusement pour vous que je suis tolérant, et que cette gentille famille ait bien voulu payer vos soins... Continua-t-il en pressant de plus en plus le tensiomètre.
_ Ah oui d'ailleurs merci Monsieur Mûto. Je suis vraiment désolée...
_ Non ce n'est pas la famille Mûto, me corrigea l'infirmier. 10.6, votre tension est relativement basse, vous avez besoin de repos, m'informa-t-il avant d'ajouter quelque chose voyant bien que j'allais lui rétorquer une bêtise. Remerciez la famille Kaiba. »
La famille Kaiba ? Alors là j'étais vraiment dans un autre monde ! Comment une telle chose pouvait arriver ? C'était plus absurde que d'imaginer un Seto Kaiba avec une petite amie.
« Je supposes que vous ne voulez pas rester plus longtemps ici... Soupira l'homme visiblement dépité de me voir déjà debout. Ah oui montrez moi votre bras. »
Je tournais mon membre invalide dans sa direction et il le toucha sans pudeur, avec un air plutôt distrait. C'était étrange de voir une quelconque personne prendre votre bras et ne rien y sentir. Je remerciais Dieu d'avoir sacrifié mon bras gauche et non le droit. Merci !
Je me mis à l'écart pour prendre les vêtements que m'avait choisis Yûgi dans l'espoir que je me réveillerais un jour. Sugoroku se faisait questionner à mon sujet. Six mois ... Je pense que désormais je suis censé avoir passé mon Bac, enfin... Désormais c'était un peu tard pour y penser. Jetant un œil à mon ensemble, je souriais voyant que le garçon ne connaissait pas la technique de l'ensemble des couleurs. Je ressemblais à un clown. Je décidais de jeter la veste sur mes épaules. D'un bras ce n'était pas facile, mais je devais m'y habituer désormais.
En tee-shirt à bretelles je constatais quelque chose d'effroyable. Mes doigts coururent de mon cou jusqu'à mon épaule. Incroyable... En six mois... J'avais maigris. Même un peu trop. Je sentais comme jamais mes os à travers ma peau.
« Si on vous a fournis à manger ? Répéta le médecin fasse à ma mauvaise humeur constante. Bien sûr, le fil que vous avez enlevé de votre bras gauche et qui nous a salis tout le sol était justement destiné à vous alimenter.
_ Mouais... Bredouillais-je. Et comment expliquez-vous le fait que je sois devenue magiquement anorexique ? »
Pour toute réponse il me lança que c'était l'heure de sa pause. J'adoptais une mine défaite face aux deux membres Mûto pour montrer que j'étais désolé de ma mauvaise humeur.
Alors que nous étions sur le point de partir, sur le palier de l'hôpital, ma veste tomba, je vis le petit Yûgi se dépêcher pour la ramasser. Quel ange ! Aurais-je certainement dit, s'il n'en avait pas profité pour me passer un bras autour des épaules.
Sugoroku me lançait que Yûgi et moi avions beaucoup de chance d'avoir de si bon amis, apparemment ceux-ci étaient souvent venus nous voir. Mais leur voyage au royaume des duellistes avaient fait que leurs visites étaient rares.
« Maman à beaucoup veillé sur vous deux, minauda l'adolescent. Tu sais que Pegasus a dit qu'il avait aussi ton âme ? Il nous a tendu un piège pour prendre mon puzzle millénaire.
_ Qu'est-il devenu d'ailleurs ? Demanda Sugoroku ouvrant la marche pour rentrer à la boutique.
_ Il s'est fait arracher un œil, informais-je le plus naturellement possible. »
☥
« Après tout ce qui s'est passé avec Bakura... Tu veux tout de même l'inviter à faire une sortie ?
_ Léa, je te l'ais dit... Il a deux personnalités, comme moi et Atem.
_ Ca je sais Yûgi. Fis-je remarquant bien que le jeune garçon trouvait de plus en plus étrange que je sois tellement au courant. Mais tout ce qu'il vous a fait ! Je serais un peu méfiant non ? »
C'était officiellement les vacances. Cela faisait une semaine que j'étais rentré de l'hôpital. Jono-uchi s'étant mis à Duel Monsters, avait voulu faire bon nombre de duel contre moi, voyant bien que j'étais une adversaire de taille. Je misais ça sur la chance. Je le priais de ne pas crier mes deux défaites pour quatre duels sur tous les toits. Me montrant fièrement son Dragon Noir aux yeux Rouges, je brandis le miens légèrement plus abimé en lui tirant la langue.
Anzu, elle, m'avait expliqué la machination de Kaiba pour les duels. L'histoire des chaises électriques n'était qu'un leurre destiné à pousser Yûgi dans ses derniers retranchements, donc à faire venir le Pharaon. Kaiba ne désirait pas affronter son camarade de classe, il désirait le maître du jeu à lui seul. Elle n'était pas au courant de ce qui s'était passé réellement, ils avaient suivis le duel retranscrit en direct sur le serveur interne de la Kaiba Corporation.
« Le petit frère de Kaiba nous a payé 10000 ¥ pour nous enregistrer à crier. C'était assez bizarre, je n'aurais jamais cru que c'était dans l'intention de faire croire que... C'est vraiment tordu ! »
Honda s'était pris une veste par Miho pendant ce temps. Lui ayant avoué ses sentiments, bien que visibles, elle a refusé n'étant pas sûr de savoir ce qu'était vraiment l'amour. A cette nouvelle, j'hésitais à savoir si je n'avais pas fait fausse route en suivant les conseils de cette dernière.
« Nous avons vraiment fait connaissance avec Bakura sur l'île des duellistes, m'expliqua Yûgi. Je sais que tu l'aimes bien. C'était pour te faire plaisirs Léa...
_ Et bien merci petit Yûgi. C'est le cas en tout cas.»
Hippie jusqu'au pied, je mis un foulard dans mes cheveux pour accentuer mon look décalé. Yûgi avait l'air mal à l'aise pendant qu'il choisissait ses vêtements, il me pria de l'attendre devant l'entrée. Ma sacoche pendante à mon épaule droite, je tenais mon bras gauche qui refusait toujours de répondre. Je m'amusais à jouer avec les cailloux le temps que sa seigneurie veuille bien se dépêcher. Yûgi connaissait bien désormais l'autre Bakura, il m'avait raconté comment celui-ci avait abusé de leur naïveté en leur faisant faire un jeu de plateau légèrement obscure. Et dire que j'avais raté ça...
Mon ami sortit hâtivement manquant de trébucher, et attrapa mon bras. Après tout pourquoi pas, tant que notre relation ne dépassait pas ce stade là, je pense que je n'enfreignais pas les lois. Sous le soleil matinal, on pressait le pas soucieux de rater le bus qui nous mènerait à l'appartement de Bakura. Du gentil Bakura.
« Là, il y a une place libre ! M'interpella Yûgi alors que nous étions à bord du transport en commun. »
Courtois comme jamais, on perdit notre temps à proposer mutuellement à l'autre de s'y poser. Yûgi insistait et je faisais de même. Finalement je cédais, le priant de s'installer sur mes genoux. Ma proposition parut déplacé, son teint vira au rouge ce qui me décrocha un sourire amusé.
Descendant face à l'immeuble, j'imaginais que Yûgi et moi pensions à la même chose. Ici même on avait eu à faire tout les deux une fois au côté obscur de Bakura. Le garçon aux cheveux blancs nous attendait sur les marches du grand bâtiment. De loin on dirait vraiment une fille, je me demandais comment ce voleur de Bakura pouvait supporter de partager le corps d'un garçon si efféminé.
« C'est vraiment gentil de m'avoir invité, s'enchanta Ryô.
_ Tu es notre ami, bredouilla Yûgi. C'est normal. »
Ryô était habillé chiquement. Il portait un pantalon blanc et une chemise blanche entrouverte. On aurait dit qu'il sortait tout droit de la Fièvre du Samedi Soir. Je voyais à quel point les deux garçons semblaient complices, cela me rassurait, en aucun cas je n'aurais désiré un quelconque conflit entre eux.
Par galanterie ils me proposèrent de choisirent un endroit où aller. Je n'y avais pas songé, mais je pensais à ces grandes salles de jeux vidéo d'arcades. Ils approuvèrent mon choix et Yûgi chercha des yeux la meilleure dont il avait eu vent par rumeurs.
« Qui veut faire une Battle sur Galaga ? Les défiais-je. Personne ?
_ Moi ! S'exclamèrent les deux garçons ensemble. »
Je ne savais pas si nous étions dans ce même endroit où Anzu avait fait une démonstration à Atem de sa performance en danse. C'était bombé de monde, j'avais peur de perdre mes amis dans toute cette foule. Yûgi et moi qui faisions à peu près la même taille, étions sûrement les plus petits. Nous préférions nous repérer grâce à la grandeur de Bakura et de sa chevelure éclatante.
« Mmmh, Bakura en premier, choisissais-je à contre cœur voulant les deux adolescents. »
Nous nous mîmes face à face, insérant deux pièces dans les machines et cliquèrent sur Multiplayer. Je me remémorais ces heures de jeu avec mon père par temps de pluie. Il était le champion quand il était adolescent. Il m'a appris les meilleures techniques pour venir à bout des vaisseaux ennemis. Ce souvenir me pinça le cœur.
Yûgi appuyé contre mon fauteuil fixait l'écran, je sentais ses mèches de cheveux blondes frôler mon visage, de quoi me déconcentrer quelques centièmes de secondes. Serrant des dents, je n'imaginais pas la grimace hideuse que je devais arborer, tandis que je trucidais la manette de mon pouce. J'avais oublié le désavantage évident que représentait mon bras gauche. Je jonglais alors entre la manette et le bouton de tir d'une seule main.
« J'ai gagné, fit la main de Ryô par-dessus la machine. »
Il s'avança dans notre direction et proposa à Yûgi de le défier sur autre chose. J'écoutais la musique du jeu retentir dans ma tête, me rappelant avec nostalgie mes parties familiales. Heureusement que les deux garçons étaient là.
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« C'est vrai vous avez du RedBull ? M'étonnais-je devant le serveur du salon.
_ Ca aide les clients à se dépenser encore plus sur les jeux. Personnellement je ne suis pas très positif vis-à-vis de cette nouvelle boisson en vogue, m'informa le vendeur.
_ Je goutterais bien moi aussi, fit Yûgi ne tenant plus en place sur son siège.
_ Trois alors, fit Bakura en se levant. Excusez moi, tout ces jeux m'ont donné envie d'aller ... Enfin vous voyez. »
Je me retrouvais assise au bar, seule avec Yûgi. Je touchais du doigt les prospectus abandonnés sur le comptoir. Je sentais qu'il allait me dire quelque chose... Je poussais un soupire puis lui lança un regard interrogateur.
« Tu... Tu as retrouvé toute ta mémoire ? Demanda-t-il.
_ Je... Moi ? Oui, je crois... N'empêche je n'en reviens pas que j'ais put sortir Râ. Cette carte est incroyable, murmurais-je fascinée par la puissance que j'avais ressentie.
_ Non, elle est dangereuse, me corrigea Yûgi. Je ne veux plus que tu l'utilises. »
Il me reprochait de m'être mise en danger si idiotement, personne ne s'était autant inquiété pour ma personne, je ne pouvais m'en retrouver que bouleversée.
« Mais avant que je joue contre Kaiba est-ce que tu te rappelles... ? »
J'eu un sursaut quand le serveur posa les trois boissons énergétiques sous notre nez. Oui, oui je m'en souvenais... Un peu que je m'en souvenais ! J'étais le seul être humain normal à avoir embrassé le héros principal du manga Yu-Gi-Oh !, oui je m'en souvenais...
« Yûgi... Soufflais-je de dépit en nous servant tous les trois. Dis-moi clairement ce que tu as à me dire. Je t'écoute. »
Il baissa les yeux. Apeuré par les mots qu'il désirait avouer. Nos cœurs battaient à l'unisson, je le ressentais. Atem n'était pas loin, il guettait son hôte, tapi dans l'ombre du puzzle.
« En fait je... Je crois que je... Que je t'aime Léa... »
Il leva ses prunelles améthyste. Son silence me contraignait à devoir donner une réponse au plus vite. J'avais l'impression de replonger trois ans an arrière, quand c'était moi qui prononçait ses paroles et que subitement l'intéressé me dise qu'il était désolé. J'étais une lâche je voulais que Bakura revienne, qu'il interrompe cette attente si longue...
« Yûgi attends ! M'exclamais-je lorsqu'il posa une main sur mon tabouret pour approcher son visage du mien.
_ Mais je pensais que... Bredouilla-t-il gêné. »
Merde... Ce n'était pas que je ne voulais pas Yûgi, je ne le pouvais pas ! Mon statut d'élue de je sais pas quoi m'en empêchait. Je lui pris sa main, recroquevillant ses doigts entre les miens, et tristement je m'excusais...
« Quelque chose m'empêche de te dire que moi aussi Yûgi... Je suis vraiment désolée...
_ Si ca vient de moi ... Je suis prêt à changer ! S'exclama-t-il aussitôt.
_ Et Anzu ? Tu ne l'aimes plus ?
_ Anzu... Ca fait longtemps que je m'y suis fait. Elle ne s'est jamais intéressée à moi. »
Il prit son verre de RedBull et y trempa ses lèvres, le regard distrait. Cela me faisait de la peine de le voir ainsi. Le garçon eu une grimace en ingurgitant la boisson, mes lèvres s'étirèrent amusé sur le coup mais ce fut bref.
« Tu es la seule qui me comprends... Tu as toujours été très intentionnée envers moi. Je ne voulais plus te voir comme une grande sœur... Je... Je suis vraiment... »
Sa main se crispa sur la chaine de son pendentif, il serra les dents et en l'espace d'un instant le jeune garçon n'était plus présent. Atem leva les yeux vers moi, un regard emplis de haine.
« Léa-chan... Je pense qu'il est temps que tout cela cesse. Qu'attends-tu ? Il ne comprend pas ce qui se passe, non... Il ne te comprend pas toi ! Il t'accorde sa confiance et toi tu... Tu le laisses en dehors de tout ça comme s'il n'était qu'une simple enfant !
_ Tu peux parler, ripostais-je automatiquement et énervée. Tu ne veux même pas m'avouer ce dont j'ai besoin ! Alors tu sais quoi ? Va te faire voir ! Je vais crever toute seule dans mon coin! »
Je pris ma veste, et posa mes quelques billets sur le comptoir. Les larmes aux yeux j'étais effrayée. Comme tout être humain je tremblais à l'idée de mourir. Partant à grande enjambé, je n'eus pas le temps de voir Atem se précipiter dans ma direction pour m'agripper le poignet. Je me défis de son emprise et il se fit plus violent pour me plaquer contre le recoin du bâtiment.
Fuyant son regard, je serrais mes lèvres ne voulant pas qu'il me voit pleurer. Surtout pas Yûgi qui pouvait nous voir au travers des yeux du Pharaon.
« L'histoire n'est pas finit... Léa-chan. On a encore le temps avant de passer à ce genre d'aveux.
_ Encore le temps ? Est-ce que tu m'as regardé ? »
Je fis glisser le recoin de mon tee-shirt le long de mon épaule, voulant lui faire constater les dégâts. Oui regarde Pharaon ce que ton hésitation me fait, elle me fait mourir à petit feu !
« Pourquoi tu t'inquiètes autant pour lui d'abord ? Pourquoi je ressens tant ta peine à chaque fois qu'il me dit quelque chose de gentil ? C'est quoi ton problème ?!! »
Il colla son front contre le mien, exténué lui aussi. Comme si tout le poids du monde, comme si la culpabilité était trop lourde à porter. Je respirais fort, n'aimant pas cette position de soumission.
« Mon problème... C'est toi. Léa-chan.
_ Moi ? Me moquais-je. Qu'est ce que je t'ais fait ? Tu m'en veux d'avoir gagné contre Kaiba ? Tu m'en veux d'avoir voler ton titre de champion ? Ou c'est juste que tu as perdu ton amour propre ?
_ Si c'était ça... Fit-il en esquissant un sourire forcé. J'ai juste l'impression de devenir cinglé. Léa-chan. Tout ces gens, ces évènements... Tout se ressemble, je l'ai déjà vécu. Et puis tu arrives, tu es la seule qui n'est pas...
_ Qui n'a pas sa place ici ? Finis-je le poussant délicatement d'une main. »
J'haussais un sourcil, ignorant cette remarque qui pouvait paraitre déplacé. Il l'avait sentit et me lança un regard désolé.
« Tu n'es pas fou, c'est tout ce que je puis dire de sensé. A ta place j'aurais réagis un peu bizarrement ici, je ne veux pas dire qu'on puisse justifier les horreurs que tu ais fait mais... »
Il avait ses yeux fixés sur mon épaule osseuse. Je rabattis aussitôt le pan de mon vêtement.
« Mais après tout... Se retrouver enfermer enfermé dans un Puzzle, pendant quoi 3000 ans ? Et se réveiller au milieu d'un monde où les cartes font la loi... »
Il affirma mes propos dans un hochement de tête et changea de discussion en m'informant que visiblement Bakura nous cherchait. J'allais rejoindre mon ami aux cheveux blancs avant que le Pharaon sur un ton très doux me propose d'avouer la vérité à Yûgi. Ce n'était pas un ordre mais une faveur.
« Tu trouveras les mots... Murmura-t-il en prenant mon visage pour me déposer une bise sur le haut de la joue. Je vais rentrer, je dois parler avec ... Avec Yûgi. »
Un peu déboussolée, j'évitais de le regarder partir sachant très bien que mes pensées n'étaient plus très nettes après une telle situation. Je me jurais, me promettais intérieurement que je prendrais pleins de photos de nous tous ensemble avant de partir, je les afficherais sur la toile et que... Non je ne crois pas que c'était possible... J'allais créer un bug entre les univers. Un géant cross-over !
« Désolée Bakura... Je... J'étais partie enfin...
_ Ne t'en fait pas je pensais avoir été long moi aussi. Un drôle de garçon m'a prit pour une fille et m'a mit une main aux fesses, je ne pensais pas pouvoir m'en débarrasser. »
Je le regardais étonné et toutes mes idées se confondaient pour de bon. Je ne sais pas ce qui aurait put être le mieux entre voir Bakura se faire draguer par un garçon et la bise du Pharaon... Non, j'étais très satisfaite de cet honneur.
« Ah euh... Ta boisson va pas être très fraiche... Tu veux mes glaçons ? Changeais-je de sujet à ma plus grande surprise.
_ Oui merci je veux bien. »
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Ryô me raccompagnait chez les Mûto, nous étions restez longtemps à discuter, il m'avait apprit que son alter ego avait menacé Kaiba pour qu'il prenne en charge mes frais d'hôpital. Ebahis par cette révélation je ne pus m'empêcher de vouloir en savoir un peu plus.
« Il a ajouté, m'informa mon ami, que tu ne devais pas te méprendre. Il a fait ça uniquement pour se racheter.
_ C'est gentil venant de sa part, assurais-je. Je lui donne rien en échange par contre...
_ T'en es sûre Warui Onna ? »
Nous étions dans le bus nous ramenant jusqu'à l'arrêt le plus proche du magasin. Je fus la seule à remarquer le changement de personnalité du jeune homme. Faisant un bond sur mon strapontin de fortune, il se moqua gentiment en me tendant une sacoche. Ma sacoche.
« Tu l'avais oublié, précisa-t-il avant de demander : par contre je me demande ce que c'est que ça ? »
Sans gêne, il sortit un livre dont je n'avais pas soupçonné l'existence autre que dans ma bibliothèque. C'était le manga, le premier de la série dans laquelle j'étais plongé corps et âme. Il n'y avait aucune raison que ce dernier ait atterrit là !
« C'est toi qui a fait ça ? C'est plutôt correct. Surtout que tous ces types ont une tête qui me dit vaguement quelque chose. Je suis déçu de ne pas avoir un rôle par contre. Dit-il en me tendant le précieux ouvrage.
_ Où as-tu dégoté ça ?
_ Pendant que tu discutais avec ton petit copain, j'avoue avoir jeté un œil à ce sac que tu étais prête à oublier.
_ Ce n'est pas mon petit copain !
_ Mais avoue que tu aimerais bien. »
Je tressaillis devant la vérité de ses propos et détourna mon regard au travers de la fenêtre de l'autobus. Il n'avait pas tord, mais vis-à-vis de ma mission... Je ne faiblirais pas ! Je pressais ma main sur mon avant bras gauche. Quelle étrange sensation, c'était comme si ce membre ne m'appartenait pas. Je perdais du temps, beaucoup de temps.
« Ce n'est pas ton arr... Warui Onna ! »
Je me précipitais à l'ouverture du bus, sans me retourner vers Bakura qui s'était levé pour me retenir. Quand le véhicule s'éloignait je vis sa silhouette qui me fixait derrière le carreau. Merci Bakura, je venais de comprendre ce que je devais faire désormais.
Je courus aussi vite que je pouvais vers la boutique, je connaissais le chemin, cette fois ci je ne me découragerais pas ! Mon ombre se dessinait sur les bordures des maisons, le soleil à ma gauche éclairait faiblement la ville, prêt à se coucher il faisait du ciel une vaste étendu orangé.
Je reprenais mon souffle devant la barrière fermé indiquant le passage d'un train. Je n'avais pas couru si longtemps et pourtant je sentais toute force m'abandonner et pourtant... Face à ce crépuscule si cliché des animé japonais, je me sentais bien vivante, en piteuse état mais vivante.
J'arrêtais ma course effrénée lorsqu'en traversant le parc je le vis là, assis sur une balançoire, ses chaussures noires trainant dans les graviers. Je soufflais pour reprendre mon souffle et m'installa à côté de lui, sur le siège libre.
« Je savais que tu allais passer par là. Me dit-il les yeux rivés sur ses pieds.
_ Et tu savais que je devais te parler ?
_ A l'hôpital tu me l'avais dit, que tu avais des choses à... Enfin. Je pense que c'est le moment non ? »
Je serrais mes doigts sur la chaine froide de la balançoire et me pencha légèrement pour me balancer.
« Ate... Enfin ton autre toi t'as parlé ?
_ Oui. Tu sais quand tu étais dans le coma, il était là pour me réconforter. C'est comme si on se connaissait depuis toujours. Je sais que je ne serais plus seul, il sera toujours là. Même quand tu partiras Léa... »
Baissant la tête, je soupirais. J'aimais tellement ma vie ici. Il y a-t-il un moyen de rester là ? J'imagine que non. Etre choisi parmi des fans, c'est un fait, rencontrer vos héros favoris c'est une autre paire de manche... C'est une bénédiction mais une douleur immense sachant que l'on ne pourra plus jamais les revoir et qu'ils vous oublieront sûrement. Je préférais mourir dans ce cas là.
« Oui je partirais Yûgi... Et je ne reviendrais pas. Jamais... »
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Je fermais la porte de la chambre et me laissa tomber sur son lit. J'aidais mon bras gauche en le recroquevillant contre moi, et attrapa de mon bras valide l'oreiller du jeune garçon. Mes agissements me surprirent, j'empoignais l'objet contre mon visage, respirant l'odeur du jeune homme, et je laissais alors couler mes larmes.
Atem était là, contre le mur, il regardait au loin par le vasistas. Fantomatique comme toujours. Je repliais mes jambes contre moi me laissant aller silencieusement.
« Je conçois que ce soit dur pour lui, m'assura-t-il. Mais tu as fais ce qu'il fallait.
_ Pff, apprendre qu'on est finalement l'invention d'un japonais excentrique, que son existence n'est dût qu'à l'imagination d'un être humain... Je l'aurais mal digéré.
_ Je ne parle pas de ça. Me contredit-il. Quand tu lui as dit que tu allais mourir si jamais... Quel est le livre que tu lui as donné ? Je n'ai pas voulu le déranger en regardant.
_ Une preuve de tout ça, version papier.
_ Je vois. Je pourrais y jeter un œil ? »
Il détourna son attention vers moi, une lueur d'amusement et de curiosité dans les yeux. Je sourirais malgré moi.
« Rêve... T'as une tête de psychopathe dedans.
_ Bon dans ce cas... »
Il se posa à côté de moi, sa présence était faible, je ne le ressentais pas physiquement. Je voyais sa main transparente dans mon dos, comme s'il cherchait à me consoler. Quel fardeau je devais être. Pathétique.
« J'aimerais que tu me montres ceci, m'informa-t-il en désignant d'un doigt le classeur aux milles feuilles trainant près de mon futon.
_ Le... Mes dessins ? Traduisis-je en me levant.
_ J'ai vu que tu t'y occupais souvent. Tu avais l'air d'être une passionnée quand tu en parlais à Yûgi. Je suis curieux. »
Rougissant, flattée, je pris le dossier et me posa à côté de lui, imposant une distance raisonnable entre nous deux. Il s'empressa vite de franchir la limite pour m'inciter à ouvrir l'ensemble.
« Ce n'est peut être pas le moment... Hésitais-je. Yûgi va rentrer et... Après tout ça quoi...
_ Change toi les idées... Sinon je regarde ça à ton insu. »
Quelles menaces ! J'haussais les épaules. C'était tout les croquis que j'avais travaillé depuis mon arrivé au Japon, et ceux que j'avais fait avec Yûgi au club de manga. J'eu une frayeur lorsque Atem usa de son rire devant moi lorsqu'il vit un dessin de Yûgi version Chibi [1]. Ebahis j'oubliais de tourner les pages, il le faisait de temps en temps à ma place.
« Tu as vu comment tu te rabaisses, me reprocha le Pharaon.
_ Quoi ? J'ais le droit de dire que c'est la seule chose que je sais faire... Dessiner.
_ Ne dit pas ça... On continue ? »
De temps en temps il s'arrêtait sur un portrait me félicitant tout bas, et posait sa main sur celui-ci m'informant qu'il était entrain de le mettre dans la chambre de son âme. N'en croyant pas un mot, je lui tirais la langue pour montrer mon septisme. Ca le faisait sourire.
Mécaniquement, je tournais d'une main une page pour arriver sur l'autre. Mes yeux se portèrent sur les premières couleurs apparaissant. Je reconnaitrais ce truc parmi des milliers mais cela n'était en aucun le genre de chose qu'il fallait montrer au premier venu, et surtout pas à Atem ou à Yûgi.
Levant les yeux, l'air innocente comme jamais, je sautais cette dernière sans penser une seule seconde qu'il l'aurait remarqué.
« Tu en as oublié, me glissa le Pharaon en tapotant le classeur.
_ Tu ... Tu te trompes. Rougissais-je.
_ Je ne me trompe jamais. Qu'il y a-t-il ? Tu en as honte ?
_ Je ne sais pas qui devrait avoir honte de ça, tout compte fait. »
C'était quelque chose, enfin... Un dessin, il y montrait Yûgi et Atem. Les deux là, bien ensemble. Un peu trop même. Roulant des yeux, je fis non au Pharaon ne voulant pas montrer ce Yaoi. Ce n'était pas bon pour lui, ni pour moi. Il allait être choqué, et me faire passer pour une fétichiste des homosexuels par la même occasion. Bon ce n'était pas comme si j'avais dessiné du nu, mais tout de même !
« Tu me donnes le nom et je te montre le dessin ! Marchandais-je.
_ Ca ne prends pas... Gloussa-t-il. »
Il s'approcha doucement de moi, perdue dans mes pensées je laissais l'interdit entre les mains du Pharaon. Je ne parle pas de mon corps, mais du classeur ! Pour une raison que j'ignorais il avait réussi à l'attraper. Mon cœur battit la chamade quand il posa son regard sur cette image de lui dans une position fort ... Fort alléchante.
« Ecoute ! Dans mon monde je ne suis pas la seule à penser ça! Et crois-moi je... Je n'ais jamais dessiné de porno ou quelque chose dans le genre ! »
J'en avais lu par contre.
« Ne te fis pas à ce que tu vois Atem, c'est juste un délire ! Poursuivais-je.
_ C'est un travail remarquable. »
J'arrêtais de secouer ma seule main valide et le regardait analyser mon dessin des yeux. On y voyait Yûgi et Atem dans une position érotique mais nullement vulgaire, étreints dans une complicité qui ne regardaient qu'eux, un fantasme que je n'étais pas le seule à avoir.
Le concerné, quelques rougeurs sur les joues sortit mon œuvre de sa pochette de protection et le toucha du bout des doigts. Comment avait-il atterrit là d'ailleurs ? C'est tout aussi bizarre que l'apparition de mon jeu de cartes ainsi du manga.
« J'avoue que c'est assez dérangeant, dit-il dans un sourire crispé.
_ Je suis navrée, tu n'aurais pas dût voir ça...
_ Ki ni shinai [2], m'assura-t-il. Néanmoins tu m'auras fait rire.
_ J'ais honte...
_ Range le avant que mon hôte ne tombe dessus, ne crains pas ma réaction, mais plutôt la sienne. »
Il avait dit ça un sourire sur les lèvres. Quelle tolérance! Je sais qu'il avait eu à faire à des cinglés dans le genre Bakura qui aimait bien déterrer les morts, mais me regarder avec tant d'humanité alors qu'il venait de voir une représentation de lui en position de soumission... Excusez-moi mais je n'aurais pas été aussi sympathique !
Il me tendit le dessin, machinalement j'envoyais ma main gauche le récupérer, j'oubliais pendant un instant que celle-ci ne fonctionnait plus correctement.
« Mais comment ça se fait que tu es... Que tu es matériel ? Enfin qu'on puisse te toucher ?
_ Je l'ignore. Mais cela ne s'applique qu'à toi. Du moins c'est ce que j'ai remarqué. »
Yûgi entra à cet instant même, le manga entre ses bras. Il avait couru, sous la pluie apparemment. Nous n'étions plus que deux, le Pharaon nous laissa seul. Je l'en remerciais. Il fallait que tout s'éclaircisse.
Le petit garçon me déposa l'ouvrage sur les genoux et partit s'enfermer dans la salle de bain... Il m'évitait, je le comprenais. Je lui avais répété en vain avant de partir qu'il ne fallait pas le prendre comme cela, qu'il n'était pas qu'un simple personnage de fiction. Mais cet aveux avait fait que je ne pouvais répondre à ses sentiments. Il savait tout désormais, qui j'étais réellement, ce que je faisais ici... Et qu'il était en autre la personne qui m'empêcherait d'aller vers une mort certaine.
Le garçon revint, vêtu uniquement de son jean, la bouche barbouillé de dentifrice. Il me lançait un regard plein de compassion, ce regard violet dans lequel on plongerait indéfiniment. Il me souriait et me pris dans ses bras avant de murmurer.
« Je te crois... Léa-chan. »
[1] Chibi : Personnages de mangas dessiné de façon grossière, ou de façon très mignonne
[2] Traduction : "ne te fais pas de soucis"
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