Irrationnelle... Déraisonnée... Insensée... Folle... Démente... Malade... Névrosée... Psychotique... Hystérique... Déséquilibrée...

Ces mots sont ancrés en moi depuis toi. Personne ne me croit, mais tu le savais, n'est-ce pas ? Tu n'avais pas besoin de porter des coups pour me briser, tu avais juste à attendre que le monde le fasse à ta place.

Trois mois, que tu m'as relâchée et je me pose toujours autant de questions. Au début, je me demandais pourquoi. Pourquoi prendre ce risque ? Pourquoi me lâcher exactement au même endroit où tu m'as emmenée ? Mais maintenant j'ai compris, tu n'as rien laissé au hasard.

Au départ, ma mère essayait de me comprendre. Du moins, elle s'efforçait de trouver la raison qui me poussait à mentir. Mais elle n'a jamais cru possible que ma vérité soit La vérité. Ma génitrice a vite baissé les bras et m'a considérée uniquement comme une menteuse tel le reste du monde. Pourtant j'étais sa fille ! Mais il faut se rendre à l'évidence, elle a préféré se fier à de vulgaires inconnus qu'à sa progéniture.

Tu sais, je suis retournée là-bas, à ce spécifique coin de rue. Banal, c'est tout ce qu'il est mais je n'ai pas pu m'approcher, j'ai toujours peur que tu m'emmènes, encore. Ce sont les ruines de mon innocence, de ma joie de vivre, de mon adolescence, de mon monde entier. Mon monde s'est écroulé, mais non quand tu m'as enlevée mais quand tu m'as libérée. Pour la première fois, on m'a jugée, froidement, durement sans essayer de me comprendre. Aux premières accusations, je me justifiais mais à un moment, un déclic s'est fait, et j'ai arrêté de me battre. Mais malgré ce nuage de cendre, parfois, une lumière apparaît, vive, mais brillante me redonnant le sourire pendant quelques secondes : cela suffit.

J'ai abandonné. J'ai tout abandonné. Absolument tout. La vie ne vaut pas la peine que je combatte. Avant, j'étais persévérante, sûr de moi. Je me battais pour ce qui m'était cher, ce que je croyais juste... Mais tout cela est fini, comme un livre, mon histoire s'est terminée ; plus rien ne m'importe, ne serait-ce de comprendre pourquoi.

Pourquoi moi ?

C'est la question qui envahit mon esprit depuis des semaines : de quoi devenir folle. J'ai cherché des réponses mais, je n'ai pas pu en trouver une seule ; toi seul pourrait me répondre. Toi, source de tous mes tourments où es-tu ? Que fais-tu ? Pourquoi je ne comprends pas ? Pour la première fois, je vois flou : avant, à mes yeux, tout était net, des paroles claires, des pensées réfléchies et maintenant, mes oreilles n'entendent que du bruit, ce qui s'ajoute à une vision brouillée, tout m'est confus et c'est absolument insupportable.

Rien ne me permet d'avancer. 

Rien ne me permet de me relever.

Rien ne me permet de t'oublier, toi, ma tourmente perpétuelle qui perdure au-delà de tout.