La senteur de la jonquille
Salut ! J'ai une bonne nouvelle ! J'ai enfin une couverture digne de ce nom ! Je la dois à @BleuSaphir51. Un grand merci à elle !
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Le lendemain matin, la Reine se leva lorsque le Soleil était haut dans le ciel et que ses rayons étaient trop lumineux pour la laisser dormir plus longtemps. Elle émergea rapidement de son sommeil. Elle avait dormi d'une traite, bien trop épuisée pour pouvoir rêver, ou cauchemarder dans le cas présent au vu des derniers événements.
Enetari descendit au rez-de-chaussée pour voir si le jeune couple qui l'avait gentiment accueillie était déjà debout. Elle trouva Laurelin en train de préparer le déjeuner. Elle fredonnait la mélodie d'une chanson qu'elle ne connaissait pas.
L'odeur qui s'élevait dans l'air de la pièce réveilla l'appétit de la souveraine dont le ventre se mit à gargouiller. Laurelin sursauta et se retourna, s'arrêtant net de chantonner, puis un sourire éclaira son visage lorsqu'elle remarqua qu'il s'agissait de son invitée de la veille.
— Vous devez mourir de faim ! Je suis en train de faire du poulet cuit au vin blanc. Ohtar est parti acheter du pain à la boulangerie du coin. Vous pouvez vous asseoir, il y a des fruits sur la table pour patienter jusqu'à ce que le repas soit prêt.
— Avez-vous besoin d'aide ? proposa la Reine, bien qu'elle n'ait jamais cuisiné de sa vie et qu'elle ne saurait donc pas comment s'y prendre si la jeune femme acceptait.
— Non, ne vous en faites pas, j'ai bientôt fini.
Enetari s'assit à la même place que la veille et piqua deux raisins dans l'énorme bol où se trouvaient divers fruits comme des prunes, des abricots ou des pommes.
— Avez-vous bien dormi ? demanda Laurelin. La couverture vous a-t-elle tenu assez chaud ?
— Oui, merci beaucoup, je n'aurai pas cru pouvoir dormir aussi bien dans un autre lit que le mien, loin du château. Votre enfant fait-il déjà des nuits complètes ? s'intéressa la Reine pour faire la conversation.
Elle venait tout juste de réaliser qu'elle n'avait pas entendu de pleurs pendant toute la durée de son sommeil, ou peut-être était-elle trop fatiguée pour que ça la réveille.
— Comment s'appelle-t-il ? ajouta-t-elle.
— Je suis ravie de l'entendre ! Il s'appelle Keenan, j'ai l'impression qu'il grandit plus rapidement que la moyenne. Il a seulement deux mois, mais il ne me réveille que rarement.
La souveraine entendit la porte d'entrée s'ouvrir puis se refermer et Ohtar apparut, un morceau de pain à la main.
— Tu étais long ! fit remarquer Laurelin. Il y avait du monde à la boulangerie ?
— J'ai croisé la voisine. Elle était étonnée de me voir. Le village n'a pas encore reçu la nouvelle du coup d'État d'hier. J'ai prétexté avoir eu une journée de repos et avoir décidé de rentrer.
La Reine sourit à l'encontre du guerrier qui la regardait pour lui faire comprendre qu'il n'avait dévoilé aucune information à son sujet et que sa présence dans cette maison était toujours un secret. Enetari savait que ce genre de ragots se divulguait aussi vite qu'un incendie dans une forêt d'arbres secs, alors il ne valait mieux pas allumer de brasier.
Laurelin remplit trois assiettes avec le plat qui mijotait dans la grande marmite tandis qu'Ohtar découpait le pain en tranches pour pouvoir le tremper dans la sauce du coq au vin. Le couple s'assit à table quelques secondes plus tard, tenant compagnie à la Reine.
— Votre Majesté, un docteur va venir cet après-midi pour voir notre bébé. C'est le meilleur médecin du Royaume et il ne passe qu'à de rares occasions dans les environs. Voulez-vous le consulter par la même occasion pour votre enfant ou souhaitez-vous garder votre présence secrète en restant dans la chambre d'amis ? Ce médecin ne divulguera jamais que vous vous trouvez ici, il ne jure que par le secret médical, donc vous n'aurez pas à vous inquiéter si vous désirez le rencontrer.
— Merci de me le proposer, mais je préférerai être discrète si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
— Il ne restera pas bien longtemps, dix minutes tout au plus.
La Reine hocha la tête puis remercia le couple pour ce copieux repas chaud avant d'entamer son déjeuner.
— C'est succulent ! s'étonna Enetari. Vous savez vraiment bien cuisiner !
Laurelin rigola face au compliment de la souveraine et rougit de fierté. Sa Majesté avala une nouvelle bouchée tout aussi exquise que la première. Lorsque son plat fut terminé, elle eut l'impression d'avoir englouti l'ensemble de son assiette en l'espace de quelques secondes, oubliant momentanément les bonnes manières.
— Voulez-vous que je vous serve une autre assiette ? proposa Laurelin.
— Avec plaisir ! s'exclama la Reine. Vous cuisinez mieux que le personnel du château. C'est un vrai régal !
À la fin du repas, Enetari monta dans sa chambre afin de cacher sa présence au médecin qui devait passer voir le nourrisson du guerrier et de sa femme. Elle ne savait que faire dans cette pièce vide. Elle n'avait apporté aucun livre à lire ou aucun journal pour écrire.
Elle décida alors de s'allonger sur le lit et observa le plafond d'où apparaissaient les poutres en bois. Elle se tenta à la méditation. Elle essaya de faire le vide dans son esprit pour éviter d'être à nouveau submergée par les événements de la veille. Elle inspira profondément puis expira sur plusieurs secondes, se concentrant uniquement sur l'air qui entrait et qui sortait de ses poumons.
Des coups furent frappés sur la porte d'entrée et Enetari entendit Laurelin accueillir le médecin. Les murs étaient mal isolés et elle parvenait à saisir chaque parole échangée entre le couple et le docteur. Les trois personnes montèrent les escaliers. Les marches grinçaient à chacun de leur pas puis ils se dirigèrent dans la chambre voisine à la sienne qui devait être celle des parents et de leur nourrisson.
Laurelin et Ohtar expliquèrent rapidement au médecin ce qui était arrivé à Keenan depuis sa dernière consultation. Il ne s'était pas passé grand-chose : il mangeait bien, dormait bien, pleurait comme tous les enfants de son âge. Ce bébé avait l'air en parfaite santé, le docteur ferait simplement une visite de routine puis s'en irait. Cela n'allait pas durer plus de dix minutes, en effet.
Lorsque le médecin réveilla Keenan en le soulevant de son lit grinçant, il commença à pleurer, mais se calma rapidement, probablement bercé par les bras de l'homme. Il devait vérifier la coloration de sa peau, l'articulation de ses membres ainsi que ses postures. Il parla un instant avec les parents et leur assura que leur enfant était en bonne santé.
Ohtar et Laurelin remercièrent le professionnel de santé, lui donnèrent une petite bourse de pièces puis le raccompagnèrent à la porte.
Lorsqu'elle fut fermée et que le médecin était dehors, Enetari ressentit d'atroces contractions au niveau de son ventre, bien plus violentes et douloureuses que celles qu'elle avait pu avoir jusqu'à aujourd'hui. Elle tenta de se retenir de crier, mais la douleur était si intense que les hurlements sortirent d'eux-mêmes.
Le guerrier et son épouse accoururent, faisant trembler le sol, puis ouvrirent précipitamment la porte de la chambre, inquiets à l'idée qu'il puisse arriver malheur à la souveraine. Enetari était en train de se tordre de douleur. Laurelin se jeta sur la Reine.
— Elle saigne ! s'exclama la jeune femme. Elle doit être en train d'accoucher, mais il y a des complications ! Rattrape le médecin, vite !
Ohtar repartit à l'entrée à toute allure et Enetari l'entendait au loin appeler le docteur depuis la rue. Laurelin courut à la salle d'eau pour tremper un morceau de tissu dans un des seaux et éponger la sueur de la souveraine qui se formait au niveau de son front.
Laurelin savait pertinemment qu'il n'était pas normal que la Reine souffre autant pour son accouchement, et encore moins qu'elle saigneprout. Elle entendit des pas monter les escaliers et le médecin apparut dans l'encadrement de la porte.
— Que lui arrive-t-il ? demanda-t-il.
Il s'approcha de la dirigeante du Royaume et vérifia son pouls ainsi que sa température.
— Elle a perdu les eaux hier, je crois qu'elle est en train d'accoucher.
La tache rouge ne cessait de s'agrandir au niveau du pubis d'Enetari, contrastant avec le blanc de la robe qu'elle portait. Le docteur releva le bas de sa tenue. Laurelin eut un mouvement pour l'arrêter, car il s'agissait de la Reine, mais dans un moment comme celui-ci, il n'y avait pas d'autres solutions alors la jeune femme se retint.
Le sang de la souveraine était en train d'imprégner le lit. Les trois personnes présentes tentaient de faire abstraction des cris de douleur incessants d'Enetari, mais Keenan se mit lui aussi à pleurer et Laurelin dut quitter la pièce pour s'occuper de son fils.
Le médecin effectua un toucher vaginal pour essayer de situer le fœtus lorsqu'il réalisa une chose : il ne sentait pas la tête, mais bien les fesses du futur nourrisson. L'enfant n'était pas dans la bonne position, il se présentait en siège et il voulait sortir. Le docteur palpa l'abdomen de la mère, mais il n'y avait plus assez de liquide amniotique pour tenter de retourner le bébé pour qu'il se retrouve dans la bonne position.
Le professionnel de santé posa ses mains sur les hanches de la Reine, mais il comprit rapidement que le bassin de la jeune femme était bien trop fin pour pouvoir accoucher d'un nourrisson dans une telle position. Il ne restait plus qu'une seule solution. Le médecin se retourna vers Ohtar.
— Je dois lui faire une césarienne, toutes les autres options sont impossibles à réaliser, c'est l'unique solution.
Ohtar écarquilla les yeux. Ils ne pouvaient pas ouvrir le ventre de la souveraine avec un couteau ! Que se passerait-il si elle venait à mourir ? Ou si l'héritier au trône mourait ? Ou si les deux mouraient ? C'était inenvisageable !
— Il n'y a pas d'autres moyens pour tenter de les sauver tous les deux. Si je ne fais rien, le bébé décèdera, car il ne pourra pas respirer et la mère rendra l'âme de douleur ou d'hémorragie, expliqua le médecin devant la réticence du guerrier. Que voulez-vous que je fasse ?
Ohtar finit par hocher la tête. Il venait d'accepter la césarienne et regrettait déjà son choix. Mais il n'était pas docteur, seul l'homme en face de la Reine pouvait savoir ce qu'il y avait de mieux à faire dans un pareil moment. Le guerrier se mit à prier les Esprits pour que tout se passe bien. C'était la seule chose qu'il pouvait faire à l'heure actuelle, qui était en son pouvoir.
Le professionnel de santé ouvrit sa mallette et en sortit plusieurs outils qui ressemblaient à des instruments de torture aux yeux d'Ohtar. Il releva un peu plus la robe de la Reine pour découvrir son ventre et l'homme de combats détourna le regard, respectant l'intimité de la souveraine.
Le médecin se saisit d'un morceau de coton qu'il trempa dans une solution incolore. Elle s'apparentait à de l'eau, mais Ohtar devina que c'était de l'alcool qui servait à désinfecter. Le docteur le passa sur l'ensemble du bas de l'abdomen de la jeune femme qui continuait de hurler et de se tordre de douleur. La Reine avait l'impression que quelqu'un lui broyait les entrailles.
— J'aurai besoin que vous l'immobilisiez. C'est une opération qui est douloureuse et il faudrait qu'elle bouge le moins possible pour que l'intervention se passe au mieux, déclara le professionnel de santé.
Le guerrier s'exécuta et s'installa au-dessus de la tête d'Enetari afin de lui bloquer le haut du corps. Le médecin s'occupa du bas à l'aide de ses jambes. La Reine n'était pas tout à fait immobile, mais les conditions étaient déjà meilleures pour l'opération. Heureusement qu'Ohtar était musclé, cela permettait de garder au mieux la souveraine sous contrôle.
Le docteur lui aurait bien donné un anesthésiant, mais il manquait de temps et Sa Majesté n'était probablement pas capable d'avaler le moindre mélange. À la place, il lui donna un torchon afin qu'elle puisse le mordre, mais aussi pour atténuer ses hurlements.
Le médecin improvisé en chirurgien prit un des couteaux qu'il avait disposé sur le lit et incisa la peau d'Enetari qui poussa un nouveau cri de douleur. Des larmes ne cessaient de couler de ses yeux. Elle était totalement déconnectée de la réalité, de ce qu'il se passait autour d'elle, tout ce qu'elle ressentait était de la souffrance. L'entaille démarrait sous le nombril pour aller jusqu'au-dessus du pubis, sur environ dix centimètres.
Le sang afflua à l'extérieur dès lors que la pointe du couteau avait commencé à couper la peau en deux. Le professionnel de santé posa plusieurs morceaux de tissus sur le ventre de la jeune femme pour absorber le liquide rouge.
La Reine perdit connaissance à cause de la douleur insoutenable qui lui déchirait le ventre. Il n'y eut plus aucun bruit ni aucun mouvement de sa part. Le médecin pouvait œuvrer sans être dérangé. Bien qu'il tentait de rester concentré seulement sur l'opération, il lui était dur d'ignorer les cris de douleur de la souveraine. Il n'aimait pas faire aussi mal, mais il essayait de se convaincre que c'était la meilleure chose à faire.
Il prit une grande inspiration avant de séparer les deux côtés de l'épiderme qui se trouvait autour de l'incision. Il écarta les muscles avec ses mains. Il utilisa à nouveau la lame lorsqu'il y avait des adhérences qui lui barraient le chemin jusqu'à la cavité utérine. Le médecin fit une dernière entaille au niveau de l'utérus puis sépara les tissus et Ohtar put voir la tête du fœtus. Le docteur se saisit de l'enfant par le crâne et le sortit délicatement, libérant à la fois le nourrisson et la mère.
La Reine reprit connaissance dès lors qu'elle entendit les pleurs de son bébé. Le médecin l'inspecta rapidement pour vérifier qu'il n'y avait pas de problème d'oxygénation au niveau des membres. Lorsqu'il fut satisfait, il posa le nouveau-né sur la poitrine de la jeune femme qui le serra dans ses bras. La souveraine caressait son enfant et appréciait la proximité qu'elle avait avec lui pour la première fois.
Le docteur avait l'impression de respirer à nouveau. Cette opération était risquée, mais il avait réussi à sortir le bébé vivant du ventre de sa mère. Ses muscles se détendirent au fur et à mesure et le poids sur ses épaules s'atténua. Il avait réussi. La Reine venait de mettre au monde un héritier en bonne santé.
— C'est une fille, déclara le médecin. Avez-vous choisi un prénom ?
— Cleena, comme la déesse de la beauté et de l'amour, répondit Enetari d'une faible voix en souriant.
Le docteur prit du fil et une aiguille et commença à recoudre la jeune femme. Sa Majesté embrassa le front de son nouvel enfant qui arrêta de pleurer, bercé par la respiration lente de sa mère. Enetari avait accompli son devoir de Reine ainsi que la dernière volonté de son défunt époux. Leur fille était vivante et en bonne santé. À présent, elle pouvait s'en aller en paix, l'esprit tranquille.
La souveraine chuchota quelques mots à l'oreille du nouveau-né et ses quelques cheveux blonds qui se trouvaient sur le sommet de sa tête se teintèrent en brun et ses yeux bleus virèrent eux aussi au marron foncé.
Désormais, le bébé passait pour un bébé normal et se fondait dans la norme de la population. De cette façon, il n'aurait pas de problème dû à sa royauté. Il pourrait vivre en paix sans que les rebelles la pourchassent continuellement. Enetari ferma les yeux pour ne plus jamais les ouvrir.
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