5
Il courrait sur la plage. La méditerranée l'avait finalement attendu, il essayait de rattraper Leila. Quoi qu'il fasse, cette dernière avait toujours une longueur d'avance. Il ne parvenait pas à s'approcher d'elle. Il avait beau l'appeler, la supplier et courir toujours plus vite, il n'arrivait pas à réduire la distance qui les séparait. Il savait que le monde derrière lui n'existait plus, mais il devait absolument réussir à enfin la toucher.
Il s'arrêta. Il était hors d'haleine, de la sueur perlait en grosses gouttes qui achevaient leur course dans le sable chaud. La jeune femme s'arrêta elle aussi et elle se retourna en lui dévoilant son magnifique visage.
« Pourquoi tu me fuis ?
-Pourquoi tu me cours après ? »
Il avait oublié cette raison durant sa folle et inutile course. Cette raison aussi importante soit-elle, était enfoui quelque part dans sa mémoire défaillante. Toute cette course était inutile.
« Je voulais juste que tu sois près de moi.
-Pourquoi tu penses que je veux être près de toi ? »
Elle n'avait pas le droit de dire ça après tous les efforts et toute la souffrance qu'il portait avec lui. Il fallait que tout ceci ait un sens, toutes ces horreurs ne pouvaient pas avoir été commise dans le vent. La seule survie ne justifiait en rien tout ça.
L'alarme sonna. Elle emplit le monde, elle était partout mais ne venait de nulle part. Elle était juste là. Elle alertait les populations d'un danger imminent. Il n'y avait pas de danger pour le moment. La plage était déserte.
« Antoine, dit Leila, REVEILLE-TOI !!! »
« Antoine réveille-toi ! L'alarme sonne. »
Non ce n'était pas possible, l'alarme ne sonnait que dans son rêve pour l'empêcher d'être avec Leila. Pourquoi pensait-il toujours à elle alors qu'il avait passé la nuit avec une autre femme ? Il devait se réveiller.
Il entendit très clairement le son de l'alarme qui dominait tout en ce moment. Le danger était imminent. En tant que garde, il avait peut-être quelque chose à faire, une position à défendre. Non, on ne lui avait pas encore affecté de tour de garde.
Il lui fallait avant tout son Famas. Si une horde débarquait, il risquait d'avoir besoin de toute sa puissance ce feu. Ses pensées s'ordonnèrent. Il ne pouvait pas sortir à poil dans le froid de la matinée.
Le soleil semblait être sur le point de se lever, à travers le tissus de la tente, il vit que la lumière emplissait la vaste clairière. Dehors, des cris montaient, ils se faisaient de plus en plus pressant. Des hurlements de survivants terrorisés se mêlait à des grognements d'infectés. Ils ne pouvaient pas déjà être dans le camp c'était impossible
Alors qu'il enfilait son caleçon, les premiers coups de feu éclatèrent à l'extérieur. Comment la situation en était-elle arrivée là ? Qu'avait fait les éclaireurs ? Normalement, tout avait été fait pour que ce genre de situation n'arrive pas. On ne devait pas être mis devant le fait accomplit si chacun faisait bien son travail.
« Habille-toi en vitesse Julia, ça a l'air de chauffer méchamment à l'extérieur.
-OK, mais on fait quoi pour se protéger ? S'ils sont dans le camp ?
-S'ils sont dans le camp, c'est le moment de prier. »
Enfiler des vêtements lorsqu'on est allongé dans une tente, était une véritable gageure. Pour compliquer le tout, ils étaient à deux sous la toile de leur nouvelle maison. L'idée paraissait beaucoup plus séduisante la veille quand ils avaient couché ensemble.
Finalement, même s'il n'était pas tiré à quatre épingles, Antoine acheva de s'habiller tant bien que mal. Il attendit quelques instants supplémentaires que la jeune femme finisse de se préparer.
À l'extérieur en plus des détonations des Famas et des cris plus ou moins humain, s'ajouta le tonnerre des canons des chars d'assaut. Le sol tremblait sous leur tir et sur l'explosion de leur obus.
Le katana en bandoulière Antoine sorti de la tente, Julia le suivit de près. Ce fut un spectacle de folie pure qui s'offrit à leurs yeux. Les infectés envahissaient le camp de réfugiés, mais au lieu d'arriver là où les chars d'assaut avaient été posté, ils entraient par tous les côtés. Tous les vivants vaguement armés essayaient en vain d'endiguer le flot de mort-vivants qui assaillait le camp. Par-dessus tous les bruits de la bataille qui se déroulait ici, la sirène d'alarme continuait à sonner à tue-tête.
Un infecté courait vers Julia en slalomant parmi les tentes. C'était visiblement un jeune homme en survêtement de sport salit et usé qui avait une blessure très moche au cou et un teint blafard maladif.
Antoine saisit son katana, même s'il dégainait le plus rapidement du monde et frappait dans le même temps, il n'aurait jamais le temps de sauver Julia. Alors que l'infecté bondissait pour mordre Julia, il y eut un coup de feu et dans une giclé de sang, le monstre fut projeté au sol avec une partie du crâne en moins.
« Alors sœurette ? Bien utile d'avoir un frère geek qui s'y connaît en jeu de tir. »
Portant fièrement son Famas encore fumant, Samuel souriait un peu trop bêtement. Il ne semblait pas blessé, mais du sang et des bouts de gelée rouge maculé ses vêtements.
« Où sont les parents ? Dit Julia.
-Ils sont à la tente de quartier, y'a des militaires qui les protègent.
-Et pourquoi toi t'es pas à la tente du quartier à protéger papa et maman ?
-Je suis venu te chercher !
-Bon les jeunes, coupa Antoine, on n'a pas trop le temps pour les retrouvailles fraternelles, on va se bouger les fesses. Je dois aller chercher mon Famas, toi t'amène ta sœur à la tente du quartier, je vous rejoins dans quelques minutes. »
Julia voulu protester, mais son frère la tira par le bras, elle lança un dernier regard d'encouragement à Antoine avant de suivre Samuel.
Trois monstres fonçaient déjà sur Antoine. Le premier avait été une adolescente en pleine croissance qui se promenait à présent sur la surface du globe en pyjama et surtout sans espoir de pouvoir grandir un jour. Le second avait récemment été un militaire, malheureusement pour lui, il avait aussi récemment perdu un bras qui devait servir de déjeuner à une famille d'infecté. L'infecté militaire avait ce qui semblait être un pistolet à sa ceinture. Le dernier était un homme visiblement amateur du culturisme en plus d'être chauve et très moche. Il devait faire dans les deux mètres et tout en lui respirait la force brute. Ses biceps avait la taille des cuisses d'Antoine. Et avec ces points, il semblait pouvoir briser un crâne sans trop de difficultés. Il avait apparemment été blessé à l'épaule mais seulement superficiellement. L'adversaire le plus dangereux était ce monstre-là
Antoine dégaina son katana et le prit à deux mains. Il ne maîtrisait que très peu cet arme finalement et il se demandait s'il ferait le poids contre autant d'adversaire. Pour la première fois depuis quelque temps, il sentait que ses chances de mourir étaient salement plus élevées que ses chances de vivre.
Le culturiste arriva en premier, Antoine pensa une seconde à laisser le monstre s'empaler contre son épée mais il n'aurait jamais le temps de retirer le katana avant l'intervention des deux autres.
Il ne pouvait pas le combattre en un contre un à la loyale. Il devait trouver une astuce pour le blesser sérieusement et rapidement. Alors que Monsieur Muscle arriva en premier au niveau du jeune homme, Antoine fit un pas de côté le plus rapidement possible. Il frappa le monstre dans le bras gauche qui se détacha de son corps. La lame du Katana pénétra sans difficulté dans ses côtes et en sortie comme un couteau dans du beurre chaud.
Antoine se jeta sur le militaire infecté qui arrivait en second, il frappa de taille de bas en haut. La lame racla sur le sol et pénétra profondément dans le monstre en déchirant son uniforme et ses chairs. Le sang s'envola à la suite du katana. Les boyaux du monstre se rependirent au sol comme autant de serpent libérés de leur vivarium.
Antoine évita la vindicte du militaire pour passer à l'adolescente morte vivante qui pensait certainement avoir plus de chance que ses deux amis. Le jeune homme jeta un regard derrière lui par pur instinct. Le culturiste était juste derrière lui, il avait son lourd poing droit prêt à frapper. Sans perdre une seconde, Antoine abandonna tout projet d'occire l'adolescente, il se jeta au sol pour esquiver la violente attaque du monstre. Ce dernier trop presser de frapper un humain rata sa cible et embouti le visage de l'adolescente.
Le son d'os et de dent brisé était réellement ignoble. Le culturiste se retourna vers le vivant pour lui sauter dessus. À vrai dire son projet était plus de se laisser tomber sur le jeune homme pour l'écraser de son poids. Antoine leva son katana. Cette fois-ci, il n'avait plus le choix, il devait laisser cet idiot d'infecter s'empaler sur sa lame.
Comme prévu, le katana rentra d'estoc dans la tête monstrueuse du culturiste. Malheureusement pour Antoine, la lame se coinça dans le crâne du monstre. Le jeune homme lâcha son arme, il roula au sol et laissa la masse de son ennemi s'écrouler dans une marre de sang.
Le militaire qui n'avait plus de tripes bondit sur Antoine, ce dernier pour seule réponse frappa de ses deux pieds alors qu'il se trouvait toujours au sol. Le militaire recula dans un grognement et il glissa sur ses tripes.
Antoine se releva, pourquoi n'y avait-il personne pour l'aider quand il en avait le plus besoin ? Il avait envie de hurler à la face du monde pour qu'on vienne l'aider mais il savait qu'il risquait surtout d'attirer encore plus de monstres assoiffés de sa chair.
L'adolescente défigurée tenta de le mordre, mais avec son absence de dent l'opération se risquait de se solder par un échec. Antoine la repoussa sur une tente et elle s'écrasa parmi les toiles sans comprendre comment s'en défaire.
Le vivant s'approcha du soldat qui tentait de se relever tant bien que mal. D'un coup de talon, Antoine lui brisa le nez et quelques dents. Le militaire chuta sur le dos et le jeune homme posa son pied sur son coup pour l'empêcher de mordre.
Antoine dégaina le pistolet du soldat, il retira la sécurité de l'arme, et explosa le crâne de militaire à bout portant. L'adolescente qui venait de se relever mais qui emportait avec elle une partie de la tente reçue le même sort.
Le jeune homme retourna vers le culturiste. Il retira son katana du crâne de la chose. Il reçut pour récompense une giclée de sang. Sans rengainer son arme, il continua sa route. Il y avait des mort-vivants partout. Une vielle infectée aux cheveux ébouriffés croisa son chemin, elle avait un manteau autrefois blanc avec des points noirs. Son manteau était à présent gris et taché de sang. Antoine lui tira une balle dans le front :
« Bien fait pour toi Cruella, fallait pas prendre les peaux des dalmatiens. »
De toute manière avec la fin du monde le blanc et noir à petit pois était passé de mode.
Antoine arriva enfin dans sa tente, Il rangea katana et pistolet et prit son Famas qui était beaucoup plus approprié en la circonstance.
Jean était là avec sa famille. Il tirait de temps à autre sur des infectés, tandis que sa femme et sa belle-sœur s'occupait des contaminés les plus imprudents à coup de machette. Il y avait un joli tas de cadavre autour des gitans.
« Eh Antoine ! Comment ça va ? Toujours vivant ?
-Comme tu peux le voir ces enfoirés ne m'ont pas encore eu. Je vais à la tente de quartier.
-Très peu pour nous ! On va se barrer d'ici, on reste pas avec ces gadjos. On repart dans la caravane et adios les militaires !
-Je ne suis pas sûr que vous pourrez partir du camp en caravane, tout doit être bouché maintenant.
-On a survécu à un millénaire de persécution, de vindicte populaire et au nazisme, alors c'est pas un petit virus de la fin du monde qui va faire peur aux gitans. Content de t'avoir rencontré, Antoine ! Si tu survis la porte de ma caravane te sera toujours ouverte.
-Bonne chance. »
Sans perdre une seconde supplémentaire, Antoine fonça vers la tente de quartier. Dans tous les endroits du camp, il put apercevoir des scènes de boucherie et d'orgie de sang. Les infectés faisaient d'ignobles festins avec les civils qu'ils arrivaient à attraper bien trop facilement. Pendant ce temps, la sirène sonnait toujours, dans le lointain les tanks rajoutaient du bruit par-dessus les haut-parleurs. L'odeur de la poudre hantait tout le camp de réfugiés. Toute personne armée faisait usage de son arme plus qu'il ne le fallait. Il n'y avait pas une seule seconde sans qu'un coup de feu ne retentissait.
Pendant ce temps-là l'aurore lançait ses rayons à un monde en proie au chaos le plus pur. Il y avait quelque chose de beau à voir que malgré l'agonie bruyante de l'humanité, le soleil continuait à se lever tous les matins. C'était une idée étrange que de se dire que bientôt l'humanité aurait bêtement disparu et que tout ceci allait se faire dans l'indifférence totale de la nature. L'homme n'aurait fait qu'un court passage sur cette terre et tout finirait par se résorber.
Aucun infecté, ne fut vraiment menaçant à l'encontre d'Antoine. Le camp était peut-être bien protégé après tout. Le flot d'infectés semblait presque se résorber...
Le jeune homme arriva à la tente du quartier. Deux militaires et Samuel en gardait l'entrée. Lorsqu'il vit Antoine, Samuel lui fit de grand signe en souriant assez bêtement.
« T'as réussi ! C'est Julia qui va être contente. Elle est à l'intérieur en train de chanter avec les autres culs bénis.
-J'ai rencontré quelques infectés, mais ils semblent qu'il n'y en ai pas beaucoup à vrai dire.
-On s'est bien débrouillé, je dirais, j'en ai eu vingt et un depuis tout à l'heure. Et toi ?
-J'en ai eu quatre.
-Petit joueur ! »
Antoine entra dans la tente de coordination du quartier 10. Une petite dizaine de personnes se trouvaient là. Ce qui attira en premier son regard et ses oreilles fut les cinq hommes et femmes qui se tenait par la main et qui chantait un chant religieux.
« Plus près de toi seigneur ! Plus près de toi seigneur ! PLUS PRES DE TOI SEIGNEUR !!! »
Les paroles ne semblaient guère compliquée, il suffisait de répété à l'infini : « plus près de toi seigneur » et d'être vaguement dans le ton ou d'avoir la foi.
Lorsque Julia aperçu Antoine, elle arrêta de chanter et se jeta sur son amant de la veille. Elle le couvrit de baiser et le serra très fort dans ses bras. Elle semblait vouloir le retenir. Les deux parents de la jeune femme lançaient un regard bienveillant à leur fille. Antoine risquait de devoir prochainement aborder l'épineux sujet de son futur voyage dans le Sud. Mais rien ne pressait pour le moment.
« Fermez là, hurla l'adjudant, j'ai un appel du quartier général ! »
Les chanteurs baissèrent d'un ton mais ils continuèrent leur récital en chuchotant. L'impression qui se dégageait de cette litanie, mit Antoine un peu plus mal à l'aise. À l'extérieur des gens mourraient et à l'intérieur des gens se préparait à mourir de manière violente dans les prochaines minutes.
« Putain de bordel de merde !!! Vous déconnez j'espère. »
Apparemment l'adjudant ne recevait pas de bonnes nouvelles. Comment la situation pouvait-elle empirer.
« OK, que le seigneur nous protège. C'était un plaisir de servir sous les ordres du général. »
Les nouvelles semblaient finalement pire que dans le pire des scenarii que l'on pouvait s'imaginer. D'ailleurs Antoine ne s'imaginait pas grand-chose lorsqu'il pensait à ce que l'adjudant allait annoncer.
« Mesdames et messieurs, c'est la fin, le général vient de me dire qu'il a appris que de source sûr plusieurs centaines de milliers d'infectés étaient à nos portes. Je ne suis même pas sûr que les tanks puissent les stopper.
-Bien mes enfants, dit un vieil homme chauve, je vais absoudre vos péchés pour que vous soyez propre quand vous rejoindrez notre seigneur. »
Au deuxième regard, Antoine remarqua que l'homme avait une grosse croix au cou. Il semblait être une sorte de prêtre, voire même un prêtre tout simplement.
« J'ai pas l'intention de mourir ici, lança le père de Julia, chef est-ce qu'il y a une solution ?
-Ceci n'a plus aucun intérêt, répondit froidement l'adjudant, que vous mouriez ici ou plus tard, vous allez mourir de manière très moche. Ici au moins vous êtes entouré de vos proches !
-Putain, il doit bien y avoir un moyen de quitter ce camp ? »
Antoine ne voulait pas mourir en Picardie, ce serait l'aveu de l'échec total de sa vie. Il voulait revoir la méditerranée avant d'expirer !
Ils ne pouvaient pas prendre les voitures, le parking devait être bouché de manière très moche à cette heure-ci. Il fallait réfléchir.
« Les hélicoptères, dit Samuel en entrant, ils pourront peut-être nous prendre.
-Non ! Vous êtes complètement fous ! Vous ne tiendrez pas cinq minutes à l'extérieur. Je doute fortement qu'ils aient de la place pour de simple civil comme vous !
-T'as raison Samuel, on va tenter les hélicoptères ! Dit Antoine avec l'énergie du désespoir. Que tous ceux qui veulent nous suivre vienne ! »
Les deux soldats gardant la tente, Julia, Samuel et leur parent répondirent présent. L'adjudant sortit son pistolet et le pointa vers Patrice le père de Julia.
« Vous avez fait votre service militaire vous ?
-Oui, répondit Patrice avec un soupçon d'angoisse dans la voix.
-Prenez cet arme alors ! Elle vous sera bien plus utile qu'à moi.
-Pourquoi vous ne venez pas chef ?
-Je suis condamné de toute manière, on m'a diagnostiqué un cancer de la glande thyroïde en début de semaine. Il n'y a plus d'hôpitaux pour me faire ma chimio, mon passage sur tête s'achève aussi bêtement que ça, bonne chance à vous. »
Le petit groupe sorti de la tente. Les chars d'assaut canonnaient toujours la forêt à l'autre bout du camp de réfugiés. Cependant si la terre tremblait ce n'était pas de leur faute. Une clameur montait du sud des bois. C'était comme si une immense partie des infectés de la capitale avait décidé de débarquer ici et maintenant. Ceci n'avait aucune logique, les infectés n'étaient pas aussi intelligent que cela. Ils ne pouvaient pas concevoir de plan...
Les survivants n'avaient que peu d'information sur ces monstres. Ils ne les connaissaient qu'à peine et personne ne risquait plus de faire des études sur leur comportement.
Le groupe traversa quelques tentes et quelques allées prudemment. Sur la piste atterrissage, un hélicoptère s'envola lentement. Plusieurs infectés s'accrochèrent à la carlingue. Le vol de l'oiseau de fer fut compliqué, il pencha à gauche puis à droite tandis que d'autres morts vivants prenez un malin plaisir à essayer de monter à bord. Sous le poids de tous ses monstres, l'engin vrilla sur le côté, en se rapprochant de plus en plus près du sol. Ses pales firent exploser quelque infectés qui était là au sol. Elles firent voler le tissus de quelques tentes avant de toucher le sol et de se briser. L'hélicoptère s'écrasa lourdement au sol. L'instant suivant, il explosait dans un horrible panache de flamme, quelque corps furent projetés à droite et à gauche avant de se relever couvert de feu.
« Il y a d'autres hélicoptères, dit un soldat. Avec de la chance, on ne refera pas la même erreur. »
C'était plus facile à dire qu'à faire. Avec l'armée d'infectés qui commençaient à envahir le camp, faire décoller un engin de ce poids risquait de poser un grand nombre de problèmes de logistique.
Les mort-vivants furent très soudainement derrière eux. Il y en une petite dizaine tout d'abords. Ce devait être les plus rapides de la confrérie des cadavres ou ceux qui avaient la plus grosse faim.
Un des deux soldats se retourna et tira quelques coups sur les plus hardies des cadavres sur patte. Antoine ne voulu pas se retourner pour admirer le résultat. Il n'était pas sportif à la base et cette course à travers le camp commençait à devenir difficile pour lui. Il n'avait rien manger de la journée et son ventre commençait à gargouiller sévèrement. Ce genre de choses n'avaient aucun intérêt pour le moment. Seule l'adrénaline l'aidait à ne pas tomber au sol. Cette adrénaline était produite par les monstres qui gagnaient du terrain sur eux à chaque seconde qui passait.
Devant eux, une grande tente assaillit par les cadavres ambulants se dressaient, elle avait une forme de prisme dodécagonal. Elle semblait ronde, mais grâce à la magie des côtés elle ne l'était pas le moins du monde. Devant cette tente, un drapeau Français se dressait face à l'adversité. Un peintre aurait pu en tirer une image patriotique. Les trois couleurs affrontant le mal qui venait de partout, il ne manquait plus qu'un air de marseillaise pour être parfaitement dans le thème.
Devant cette tente, plusieurs soldats tiraient ou se battait à coup de crosse contre les cadavres. L'espace d'un instant, Antoine eut envie de les aider. Sa conscience lui interdisait de laisser des monstres attaquer d'autres humains, mais d'un autre côté, le groupe n'avait pas une seconde à perdre. On devait laisser tomber toute mission de sauvetage suicidaire.
« C'est la tente du général, dit un des militaires.
-On l'évite ! Hurla Patrice. C'est trop risqué. »
Personne n'osa contredire l'homme. À vrai dire, tout le monde avait dû peser le pour et le contre comme Antoine. Attaquer plus de contaminé qu'il le fallait, risquait de s'avérer mortel.
Samuel se retourna, il tira deux balles sur les contaminés qui les suivaient. Il reprit ensuite sa course. Antoine commença à se sentir coupable, il n'avait toujours pas tirer une seule balle avec son Famas et il n'avait pas envie de risquer de perdre du terrain. Son passé de fumeur se chargeait très bien de lui lancer à chaque inspiration des insultes.
Le groupe arriva en vue de l'héliport. Il restait deux hélicoptères de transport qui n'avait pas encore décollé. Une poignée trop peu nombreuse de soldat faisait face à l'horreur. Les infectés débarquaient sur la piste par vague, se frayer un chemin au milieu de tous ses enfoirés risquaient de ne pas être une sinécure.
Antoine et un des deux militaires firent de grands signes aux autres vivants de l'héliport. Tout était possible à présent. Ils pouvaient, avec de la chance, être sauvé et quitter cet enfer.
Il y eut un cri de femme derrière Antoine. Le groupe se retourna, Lauriane, la mère de famille était au sol. Un infecté avait jailli sur elle et lui mordait le coup. Du sang en gros bouillons coulait au sol, c'en était fini d'elle.
Patrice prit le temps de tirer deux balles sur l'infecté et de se pencher sur sa femme. Le groupe perdait du temps.
« On n'a pas le temps, dit Antoine, c'est foutu. »
Julia lui lança un regard plein de haine. Samuel préféra ignorer le commentaire de son nouvel ami.
Un infecté en caleçon et qui avait de la terre séchée un peu partout sur son corps courrait en direction du groupe comme un dératé. Sans réfléchir une seule seconde, Antoine enleva la sécurité de son Famas. Il se mit en position de tir, il ne visa que durant une moitié trop longue de seconde et tira. La balle traça un sillon sanglant dans le coup de l'infecté. Sa tête se détacha en partie et le cadavre tomba au sol.
Un second infecté, un petit homme de couleur tout aussi rapide que le premier fut la seconde victime du Famas d'Antoine, cette fois-ci, le coup l'atteignit dans le front en faisait exploser la tête.
Les deux militaires tiraient aussi sur le groupe qui les poursuivait. Pendant ce temps-là Julia, Patrice et Samuel accompagnaient Lauriane dans sa dernière demeure. Les enfants pleuraient leur mère qui se mourrait.
C'était le premier gros choc pour eux. Ils n'avaient pas vu leur proche expirer sous les coups de cette abominable infection. D'ailleurs à la réflexion, Antoine n'avait pas vu lui non plus ses proches décéder. Il n'avait que peu d'espoir concernant ses parents. Ils n'avaient pas répondu à son appel lorsque les téléphones marchaient et à présent il ne risquait pas d'avoir de leur nouvelle alors que les moyens de communication avaient été coupé.
Des gouttes de sang comme de l'ambre rouge perlaient sur le coup de Lauriane. Le temps devenait de plus en plus pressant. Quelqu'un devait coller une balle dans la tête à la mère de famille si on ne voulait pas qu'elle se réveille. Ce monde était vraiment moche. Antoine prit la décision au risque de se faire détester de tout le monde.
« Je suis désolé, mais il va falloir l'achever. »
Les larmes plein les yeux, Julia regarda à nouveau Antoine. La fille pleine de désir qui avait couché avec lui n'était définitivement plus là. Si la jeune femme avait eu une arme en main, elle aurait certainement abattu Antoine sur le champ.
« C'est ma mère, tu ne peux pas lui faire ça ! »
Patrice et Samuel semblait mieux comprendre la situation, les deux soldats ne voulaient pas prendre parti et il continuait à distribuer une mort éternelle. Antoine était dans une impasse. Il pointa son arme sur la tête de Lauriane.
« Tu ne veux pas qu'elle devienne un monstre, n'est-ce pas ?
-Arrête ça tout de suite !
-Non, il faut le faire ! On ne peut pas la laisser devenir un monstre assoiffer de chair. »
Lauriane ne respirait plus. La transformation était imminente. Le groupe perdait trop de temps. Il aurait déjà dû arriver sur l'héliport avec les autres soldats à essayer de faire décoller un hélicoptère.
À peine Antoine eu pensé ça qu'un des deux derniers engins s'envola. Cette fois-ci, il n'y avait pas d'infecté pour l'empêcher de s'élever dans le ciel. L'appareil resta en vol stationnaire et avec une mitrailleuse un soldat arrosa les monstres qui s'approchait trop du second hélicoptère. Les corps déchiquetés explosaient comme autant de sac remplit d'une peinture écarlate.
« Putain, on n'a plus le temps, Julia !
-Encore un peu s'il te plaît.
-Désolé c'est pas possible. »
Alors que les pales du dernier hélicoptères commençaient à tourner. Antoine sentit son cœur se serrer. Dans le même temps, une centaine d'infectés serait sur eux d'ici une vingtaine de seconde, ils allaient envahir l'héliport. De son côté, Lauriane allait se réveiller d'ici quelques instants.
Antoine agit. Il n'avait plus le temps d'achever la mère de famille. Il courut. Sans ne rien dire à personne, il courut. Avec l'énergie du désespoir, il courut. Il savait que tout espoir était vain, mais il courut. Il n'aurait peut-être jamais la chance de revoir le soleil du Sud mais il courut. Malgré la fatigue, la faim, le poids de ses armes, il courut.
« Antoine, NON !!! »
La voix de Julia se fit de plus en plus lointaine, mais il courut. Les infectés étaient partout, les tanks ne tiraient plus, il n'y avait que l'alarme qui rappelait encore qu'il y avait eu de la vie ici, il courut. Les pales de l'hélicoptère restant accéléraient, il courut à en perdre haleine. Il avait honte de les avoir abandonné et il espérait que sa course servirait d'exemple.
Un soldat dans l'hélicoptère lui fit signe de se dépêcher. Les balles fusaient dans tout les sens. Il sentait presque les grognements des infectés derrières lui. Ce monde n'était plus pour les faibles ou pour les sentimentaux. Il arriva enfin à l'hélicoptère qui quittait déjà le sol. Il transpirait par tous les pores de sa peau et il pleurait dans le même temps. Il jeta un regard derrière lui. Samuel et un des militaires le suivait, ils étaient encore à une centaine de mètres de l'appareil.
Il n'y avait plus de trace de Julia ou de son père. Leur corps devait à présent servir de curée pour des infectés crevant de faim. Le militaire restant fit un faux mouvement. Il tomba au sol lourdement. Il n'eut pas le temps de se relever qu'une dizaine d'infectés lui sautaient déjà dessus pour le dévorer !
Les monstres pouvaient presque toucher Samuel. Si personne ne faisait rien le jeune homme n'aurait aucune chance de s'en tirer vivant. Antoine leva son Famas. Combien de balles lui restait-il ? Il n'avait plus beaucoup de souvenir du nombre de fois qu'il avait tiré. Était-ce trois ou quatre fois ? Ceci n'avait pas la moindre importance.
Il tira. Il toucha un homme en costume cravate dans la jambe et le fit tomber. Quelques autres infectés le suivirent dans sa chute.
Il tira. Une jeune femme qui avait dû être belle de son vivant, eut l'épaule arraché et chuta en tournoyant.
L'hélicoptère était à un mètre du sol à présent. Il s'élevait lentement.
« On attend l'Abeille, cria un soldat, à l'intention du pilote. »
Antoine n'avait que faire de leur nom de code, il tira à nouveau. Un jeune maghrébin aux yeux fous et qui était habillé en bleu de travail vit une balle lui perforer la poitrine.
Samuel n'était qu'à une cinquantaine de mètre.
Antoine tira. Un homme d'âge mûr totalement nu eut la tête explosée.
Samuel perdait petit à petit du terrain. Les infectés ne connaissaient ni la fatigue, ni la lassitude, ils étaient des centaines à arriver sur l'héliport. Il ne restait que 20 mètres.
Antoine tira. La balle passa juste au-dessus de Samuel et un grand échalas de plus de deux mètres en tenu de basketteur et avec la peau diaphane eut la tête qui se détacha de son cou. L'hélicoptère était à présent à un mètre cinquante du sol.
Samuel sauta et s'accrocha à la barre de fer. L'appareil pencha. Antoine s'accrocha tant bien que mal.
« L'abeille est dans la maison ! Je répète l'abeille est dans la maison ! On décroche tout de suite. »
Sans attendre que l'hélicoptère prenne de l'altitude, Antoine régla son Famas sur rafale. Tout en se tenant d'un bras à l'armature de l'appareil. Il fit cracher son fusil d'assaut en le tenant de l'autre bras. Ces tirs ne furent en rien précis, mais il toucha quelques infectés trop pressé qui allait s'accrocher au pantalon de Samuel. Des têtes explosèrent, des membres furent arrachés mais au moins le jeune homme accroché à la barre en fer eut la vie sauve.
Un soldat aida Samuel à monter dans l'appareil.
« L'abeille revient de loin ! Mon gars si ton pote n'avait pas flingué ces infectés on partait sans toi !
-Cet enfoiré nous a abandonné ! Je n'oublierais jamais ce que tu as fait Antoine. »
L'hélicoptère survola le camp. En contrebas, la guerre était définitivement perdue. Des milliers de monstres avait pris possession du camp. Les chars d'assaut étaient entourés de plusieurs centaines de cadavres, ils ne pouvaient même plus avancer au vu du mur d'infecté sanguinolent qui bordaient.
L'alarme sonnait toujours, elle était à présent le dernier signe de vie du camp. Autour de la tour radio les infectés erraient, comme s'ils étaient attiré par cet incessant vacarme. Ils étaient là les nouveaux maîtres de la planète, bêtement attirés par une alarme que personne ne commandait plus.
« Je suis désolé, Samuel, essaya Antoine. »
Il n'eut pour seule réponse que du mépris. Il méritait peut-être ça après tout. Il avait abandonné des gens très sympathique pour sauver sa propre vie. Non, il avait sauvé sa propre vie alors que ces gens sympathiques ne semblaient pas vouloir sauver la leur. Ce qu'il avait fait était amplement justifié !
« On va où ? Demanda Antoine au soldat qui était le plus près de lui.
-On va vers le sud, mon gars. »
Antoine sourit.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro