Chapitre 4
Musique : Love and Hate - Camylio
Assise devant les flammes qui semblent petit à petit s'affaiblir, je reste silencieuse, tout comme lui. À première vue, je ne connais que son nom. Downs. Le professeur, l'a mentionné un peu plus tôt dans la journée. Je reconnaîtrais également ses iris parmi tant d'autres, ils sont d'un bleu profond.
Dorénavant, je sais aussi qu'une partie de lui est écorchée d'une quelconque manière. Je ne sais pas si c'est conséquent, cependant une chose est certaine, c'est qu'il semble attendre, comme moi, que le feu s'éteigne.
La musique accompagne le calme qui s'est instauré entre nous depuis quelques heures maintenant. Une mélodie que je connais bien débute, je me laisse porter par les notes qui me sont familières.
Mon regard s'arrête sur le petit bar où plus personne ne se trouve, excepté le barman qui termine son service en essuyant les verres qui ont servi.
Puis, sans vraiment m'en rendre compte, mon attention dévie ensuite sur celui qui se tient à mes côtés. Ses yeux m'observent déjà et le reflet des flammes dansantes les rendent encore plus captivants. Nos prunelles s'étudient mutuellement, essayant certainement de décrypter ce que l'autre ressent.
Pourtant, rien à faire, je n'arrive pas à déceler ce qu'il peut bien penser, ni même ce qu'il peut ressentir. C'est comme s'il était habitué à dissimuler tout ce qu'il ressent. Je détourne alors mon regard, craignant que lui, puisse apercevoir ce que moi, j'éprouve.
Le feu diminue encore, au fur et à mesure que le temps file. Si bien qu'il ne reste bientôt que quelques braises et cendres. L'aube commence à se faire une petite place parmi le ciel nocturne, et tout ne devient alors qu'un souvenir de plus. Les quelques stands qui restaient ont fini par plier bagage.
Le brun à mes côtés semble exténuer, comme moi. Son regard est perdu parmi les braises encore fumantes. Je me redresse, puis lève les yeux vers les couleurs rosées du matin. Je rêvasse, comme j'ai pris l'habitude de le faire. L'étudiant à mes côtés ne tarde pas à se relever, il est proche de moi, frotte son pantalon pour chasser les derniers grains de sable et s'enfuit presque aussitôt, toujours silencieux.
Je décide de faire de même, restant à l'écart pour ne pas qu'il croit que je le suis. Je regarde une dernière fois le soleil qui se dresse à l'horizon de l'océan, puis je continue mon chemin. Avant que nous nous séparions lui et moi, dans une direction opposée, je m'arrête encore un petit moment et étonnement, il fait de même, en m'adressant cette fois son attention. Je lui adresse un faible sourire, qu'il remarque, mais qu'il ne prend pas la peine de me rendre. C'est à cet instant que l'on comprend que rien ne change et qu'une nuit n'est rien dans le quotidien que nous nous forçons à vivre un peu mieux le jour. Il restera le même type arrogant, et je resterai la même fille solitaire.
Je marche jusque chez moi, et entre dans cette maison encore affreusement silencieuse. Je m'en vais de ce pas au lit, lorsque j'ai ôté mes chaussures et remplacé ma tenue par un pyjama, beaucoup plus confortable. Nous avons cours aujourd'hui, mais je ne m'y rendrais pas. Je m'endors quelques instants après, sur une note que je n'aurai pas mieux espérée. J'ai pu me libérer de ce poids qu'était tout ce chagrin, je sais que je n'en ai pas encore fini, que mon manque d'elle n'est pas près d'en terminer. Ce soir, c'était ma manière à moi de lui dire au revoir comme je l'aurais voulu. C'est aussi la première fois que je sortais sans elle, depuis son décès. J'aimerais pouvoir lui dire en revanche, que ce n'est plus pareil sans elle.
* * *
J'émerge doucement, mon regard s'attarde instinctivement sur le réveil. Nous sommes en fin de matinée.
Je me retourne sous les draps et soupire d'aise. Quoi de mieux que de rester sous la couette, en plein hiver. Je jette un coup d'œil par la fenêtre. Ça alors ! La pluie à laisser place à la neige. Sans même m'en rendre compte un doux sourire étire mes lèvres. Je me précipite de sortir de mes draps pour enfiler des vêtements chauds, et ainsi pouvoir sortir explorer ce paysage revêtu d'un manteau blanc.
Avec Mya, quand on savait que la neige allait faire son apparition, on était folles de joie. On se précipitait au parc à côté rien que pour entendre le crépitement de nos pas s'enfonçant dans la neige.
Quand j'ouvre la porte d'entrée, le froid s'engouffre immédiatement dans mes cheveux, et me picote légèrement le nez. Je rejoins l'entrée du parc à quelques pas de chez moi. Je m'assois ensuite sur un banc après avoir frotté la neige qui trônait dessus.
Je découvre avec nostalgie le cœur que nous avons gravé, Mya, moi et Lou, maladroitement sur le dossier du banc, suivi de nos initiales. Je l'effleure du bout des doigts en fermant les paupières comme pour chasser mes larmes. Je me rappelle nettement ce jour. Nous étions en fin d'année de collège et allions devenir des lycéennes. Ce passage en classe supérieure ne nous effrayait pas le moins du monde. Nous étions prêtes pour ces années, et toutes les trois, on en a énormément profité.
Mya était mon modèle, tout comme celui de Lou. Quand elle me montrait quelque chose de nouveau, je l'imitais. C'est simple, quand les habitants de cette petite ville voyaient Mya, ils étaient à peu près certains de me voir avec, et inversement.
Mya connaissait beaucoup de monde à Strambridge, et quand elle est partie, bon nombre d'entre eux ont vu leur petit bonheur partir en fumée. Ils ont tous fini par retrouver le sourire, en acceptant le fait qu'elle se soit envolée. Mais pas moi. Les parents de Mya s'efforçaient de retrouver un semblant de vie normale, sans pleurer la soudaine disparition de leur fille. Ils sont débordants de courage et je les admire énormément pour ça. Ce sont devenu comme des deuxièmes parents pour moi, surtout concernant son père. Mya et moi passions notre temps à réparer des tas de choses avec lui. C'était un peu la figure paternelle dont j'avais besoin.
Durant l'enterrement de ma meilleure amie, ma mère n'a pas pu être présente, j'ai dû compter exclusivement sur les parents de Mya, qui m'ont soutenu en passant outre leur propre peine. Je les vois encore régulièrement, ça m'aide à garder un contact avec Mya, en quelque sorte et ses parents le conçoivent parfaitement.
Un vent froid interrompt brutalement mes pensées. La neige tombe toujours, m'offrant un paysage hivernal magnifique.
Les cris des enfants jouant dans l'aire de jeux me fait faiblement sourire. Une petite fille brune s'amuse à jeter de la neige en l'air, elle rit aux éclats, sa mère la regarde, pleine d'amour.
Mon téléphone sonne soudainement, je décroche.
- Allô ?
La voix de ma mère s'élève au travers du combiné :
- Hailey ? C'est maman, je ne serais pas là ce soir, ni cette nuit, je n'aurais pas terminé mon service.
Je mordille ma lèvre inférieure avant de répondre :
- D'accord, ça ne change pas...
Il n'y a aucune amertume dans ma voix, seulement de la déception. Cela fait un moment que je n'ai pas partagé un moment avec elle.
- Ma chérie, je...
Avant qu'elle ne s'inquiète et ne s'excuse alors qu'elle ne devrait pas, je la coupe :
- Je comprends maman, ne t'en fais pas, ce sera pour une autre fois.
Elle marque une courte pause avant de reprendre :
- Oui ma chérie, je te promets qu'on finira par trouver un moment pour nous deux. Ok ?
Je souris tristement.
- Compris, bisous maman.
Elle répond immédiatement :
- Bisous ma chérie.
Elle raccroche ensuite, réinstallant un silence apaisant. Alors que le soleil se fraie un chemin à travers les épais nuages, une ombre me fait soudainement face.
Lou...
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