Logbook#22 : Yeosang
— Je sais, dit soudainement Seonghwa.
Yeosang releva la tête avec un sourire. Les deux hommes avaient profité d'une pause de Yeosang pour goûter les différents fruits et légumes que l'abordage du Tempête, le matin-même, leur avait offert. Seonghwa ne les avait jamais cuisinés et cherchait des idées de recettes pour les consommer.
— Laisse-moi deviner quel trésor d'imagination tu as trouvé, dit Yeosang avec humour. Une compote ?
Seonghwa se tourna vers lui, les sourcils frondés d'incompréhension.
— Ah, non ! Je ne parle pas de ça... Je sais pour toi..., lâcha-t-il enfin en s'appuyant contre le fourneau.
Le regard de Yeosang se fit glacé. Rien de ce que Seonghwa puisse savoir sur lui n'était bénéfique pour Yeosang.
— Je sais que tu ne sais pas lire.
Yeosang se précipita sur la porte, pour vérifier que personne n'écoutait, puis sur les fenêtres. Eta soit louée, elles étaient correctement fermées. Après tout, lorsque la mer était d'huile, comme à ce moment, on entendait presque tout ce qui se passait dans la cuisine depuis le poste de navigateur. Seonghwa avait parfaitement capté ce que Yunho et Jongho pensaient de lui, la dernière fois...
Un peu rassuré, Yeosang se reposa sur sa chaise. Quelle était le meilleur moyen pour faire taire Seonghwa ? Le supplier ? L'acheter ? Le tuer ?
Dès que cette dernière pensée lui traversa l'esprit, Yeosang la regretta. Seonghwa était particulier, soufflant le chaud puis le froid en une fraction de seconde, mais Yeosang savait que le chef, derrière sa façade d'homme intéressé, avait bon fond. Et il le considérait comme un ami, il ne pourrait jamais lui faire de mal...
Quoiqu'un ami ne le menacerait pas ainsi... N'est-ce pas ? Non, non, Wooyoung ne l'aurait pas fait...
Seonghwa l'avait-il vraiment menacé ?
Yeosang était perdu et bafouilla :
— Ne le dis à personne...
— Je te propose un marché, Yeosang. Je t'apprends, et en échange, tu me dois une faveur.
— Laquelle ?
La voix de Yeosang était plus posée et il s'en félicita.
— Tu le sauras en temps voulu, ajouta Seonghwa en penchant la tête sur le côté.
L'intonation de Seonghwa n'était pas particulièrement menaçante. Elle n'était même pas différente de d'habitude, vraiment. Mais Yeosang n'aimait pas trop le tour que prenait la conversation. Il n'avait même pas envie d'apprendre, d'abord ! Pas même un tout petit peu...
— Et si ça ne m'intéresse pas de savoir lire ?
— Je ne sais pas, dit Seonghwa. Je n'avais pas imaginé que tu refuses. Je me tairai. Probablement.
Il haussait les épaules comme si cette information était mineure, insignifiante même, et Yeosang serra les lèvres, agacé. C'était beaucoup pour lui, d'avoir cette incapacité dévoilée, il ne pouvait le permettre.
— Mais qu'est-ce que ça change ? Que je sache ou pas, ça ne te regarde pas !
— Pourquoi tu ne veux pas ?, demanda simplement Seonghwa.
— Parce que je me débrouille très bien sans ça !
Yeosang savait qu'il mentait Il avait besoin de Wooyoung, pour toutes ces fois où il avait lu ou écrit pour lui. Mais Yeosang savait mentir, il n'en laissait rien paraître avec brio. Du moins, Wooyoung ne s'en rendait jamais compte, et il était la personne qui le connaissait le mieux.
— Ah oui ? Et le phare abandonné ?, reprit le Chef.
Yeosang leva un sourcil sans comprendre.
— Ce phare, qui représente le centre géographique du monde sur les cartes de navigation, continua Seonghwa. C'est le phare d'Egalité...
Yeosang comprit soudain. Seonghwa lui avait tendu un piège. Il se sentit trahi.
— Comment...
...as-tu su ? Mais les mots s'étranglèrent dans sa gorge.
— La première fois, tu m'as apporté de l'huile à la place du jus de pomme..., dit Seonghwa en détournant le regard, ayant le bon goût de paraître un peu embarrassé.
— Je ne veux pas, reprit Yeosang.
— Je veux juste t'aider, dit Seonghwa en baissant le feu sous la soupe.
— Si tu veux faire de la charité, répliqua Yeosang amèrement, je suis sûr que je peux trouver quelqu'un d'autre qui ne sait pas lire sur ce navire...
— Exactement, continua Seonghwa aussitôt. Ce n'est pas honteux ni grave de ne pas savoir lire ! La moitié de la population d'Iloe ne sait pas, et c'est le pays le plus développé.
— Eh ben voilà ! Ils le vivent bien, je le vis, c'est parfait !
Yeosang souriait, mais il savait que ses yeux le trahissaient. Seonghwa abandonna son appui sur le fourneau pour venir s'asseoir face à Yeosang et lui prendre les mains.
— Mais est-ce que ça ne serait pas mieux pour toi si tu savais lire et écrire ? Tu pourrais modifier tes cartes, ajouter tes propres annotations, partager ton savoir... Peut-être même créer toi-même la carte d'un lieu encore inexploré !
Yeosang repensa à Wooyoung encore, qui voulait trouver un trésor inédit et marcher sur un nouveau territoire. Wooyoung. Si avide d'exploration. Si sociable. Si aisément ami avec tout le monde. Ils passaient de moins en moins de temps ensemble, ces derniers temps... Resterait-il avec Yeosang s'il apprenait à écrire ? Après tout, étaient-ils liés par autre chose ? Et si finalement, ce lien ne suffisait même pas ? Et si Wooyoung laissait Yeosang derrière lui de toute façon ? Non. Ça ne se passerait pas ainsi. Ils étaient proches. Son meilleur ami ne l'abandonnerait jamais... N'est-ce pas ?
Yeosang en avait si peur. Si peur. La simple pensée de se retrouver sans Wooyoung un jour lui tordait l'estomac. Les larmes lui montèrent aux yeux, et il les imputa à sa fatigue. Depuis son arrivée sur le ATEEZ, il n'arrivait pas à dormir avant de longues heures, lorsqu'il ne tombait pas à cause de la boisson. Il n'était pas en état d'avoir cette conversation.
— J'ai un rêve, reprit Seonghwa quand Yeosang croisa son regard. Je veux ouvrir un restaurant. Un grand restaurant, connu et reconnu de tous. Que les clients apprécient mon talent à sa juste valeur, et qu'ils se battent pour manger à ma table. Et toi, Yeosang ?
Le regard de Seonghwa s'était enflammé d'anticipation, d'impatience joyeuse, mais une petite once d'appréhension assombrissait son regard. Derrière son apparente confiance en lui, il avait un peu peur. Cela conforta Yeosang un instant. Puis il se sentit un peu jaloux de cette force de Seonghwa, un peu inférieur à lui. Yeosang baissa les yeux sur ses mains et les referma sur celles de Seonghwa.
— Je veux juste que rien ne change, murmura-t-il difficilement.
Des sanglots contenus faisaient trembler sa voix. Maudite fatigue, qui l'empêchait de montrer que sa décision était ferme. Il voulait juste que Seonghwa reconnaisse son vœu, qu'il le valide et laisse Yeosang tranquille avec cette histoire. Y réfléchir l'emmenait dans des endroits qui ne lui plaisaient pas du tout.
Seonghwa hocha la tête. Et retira ses mains pour croiser les bras. Yeosang eut l'intime conviction qu'il l'avait déçu, et il eut aussitôt mal au cœur. Comme si on le lui avait écrasé sous une enclume. Comme s'il restait encore quelque chose à écraser après cette conversation.
— Très bien. Si c'est ce que tu veux. Ma porte te reste ouverte, bien sûr. Si tu changes d'avis, ce sera à toi de faire le premier pas, je ne le proposerai plus.
Yeosang l'observa, en tentant de cacher à quel point il était blessé par ce rejet.
— Ça n'arrivera pas, prit-il la peine de répondre.
— Très bien, répéta Seonghwa. C'est toi qui vois. Penses-y...
— Non.
Seonghwa hocha la tête avec son drôle de sourire agacé, qu'il portait souvent. Il ne l'avait encore jamais adressé à Yeosang. Le chef se passa la langue sur les lèvres avant de se lever pour retourner en silence à la préparation de la soupe.
Yeosang se sentit congédié. Il ne serait pas resté de toute façon. Il n'en avait aucune envie.
Reniflant bruyamment, il boucla sa ceinture et rassuré par le poids familier de sa gourde (que Seonghwa accepta de remplir) et de son sabre à la taille, il sortit. Il devait trouver Wooyoung, lui raconter ce qui c'était passé et se rassurer.
Wooyoung était au poste de vigie. Carrément inaccessible pour Yeosang. Poppy s'arrêta à côté de lui et le regarda, songeur.
— Ça va ?, demanda-t-elle.
— Oui et toi ?, répondit machinalement Yeosang.
— Er, non. Je crois que le charpentier et le doc' se sont disputés. Le doc' tient le fort dans la voilerie, et ma sœur est occupée, donc Jongho me fait faire d'innombrables voyages pour aller chercher ses affaires. Parce qu'il ne veut pas voir Yunho, je suppose.
— Poppy !, cria Jongho.
— Oh, j'en peux plus, marmonna-t-elle à Yeosang. J'ai d'autres choses à faire !, répondit-elle à Jongho en s'éloignant pour parler à Mingi.
Jongho regarda autour de lui, à la recherche de sa nouvelle victime et Yeosang se retourna pour ne pas croiser son regard.
— San, dit-il. San, j'aurais besoin de ton aide !
Ravi d'entendre que Jongho s'était décidé sur quelqu'un d'autre, il passa tranquillement devant son installation extérieure pour entrer dans les quartiers de l'équipage. Avec Wooyoung indisponible, rien d'autre à faire et encore trente minutes à tuer, la meilleure chose à faire semblait dormir.
Lyris, le bas du visage caché comme à son habitude, monta sur la dunette et se tient aux côtés de Yeosang, qui tenait la barre. Ce dernier fronça les sourcils, surpris, mais resta muet. Bientôt, Poppy les rejoint. Elle ne dit mot. Puis Phileas, mais son silence ne surprit personne. Le premier à briser la série fut San, qui se laissa théâtralement tomber au sol, aussi essoufflé que s'il avait couru un marathon.
— J'en peux plus. Il a aucune pitié, dit-il à la cantonade avant de reprendre son souffle.
A ses côtés, les pirates répondirent d'un hochement de tête et Yeosang sourit, amusé. Il ne posa aucune question, ayant l'impression de participer à un jeu du silence, mais espéra vivement que San allait s'expliquer. Il semblait être le maître du jeu.
— Urgh, j'ai réussi à lui échapper une fois, mais il m'a retrouvé... Quelle horreur...
Un murmure d'approbation collectif.
— J'ai bien essayé de lui montrer mes mains comme excuse, -désolé pour vous, les gars, mais je n'allais pas m'en priver, juste pour la jouer à la loyale avec vous...
Un grognement cette fois, pour la forme. Juste histoire de se plaindre un peu de l'avantage de San sur les autres.
— Mais il m'a répondu...
Cette fois, pas même une respiration ne se fit entendre dans la petite foule, pendue aux lèvres de San.
— Il m'a répondu que ce n'était pas parce que j'étais blessé que je ne devais pas m'investir, et qu'il ne s'était jamais arrêté malgré les coupures, les cloques, et les échardes... Et puis... Et puis, il a eu les yeux dans le vague, donc j'en ai profité pour partir... Mais..., San continua, maintenant son public en haleine. Mais il l'a remarqué, et il a commencé à me courir après en disant que personne d'autre ne pouvait l'aider !
Exclamation de stupeur dans la foule, et Yeosang retint difficilement un éclat de rire.
— J'ai bien dû faire trois fois le tour du pont supérieur et du pont inférieur pour réussir à le semer en me cachant dans la cuisine !
Cette fois, une certaine révérence s'inscrit dans le regard de ses compagnons. La cuisine était un lieu maudit, territoire du sévère et insupportable Seonghwa. Yeosang n'avait pas du tout cette opinion du chef cuisinier, mais cela dit, il fut tout de même un peu surpris.
San se releva pour proposer un morceau de porc séché à tout le monde.
— Profitez-en bien, dit-t-il en mordant dans son propre morceau. J'ai bien peur que ça ne soit mes derniers... J'ai rien vu venir mais Yunho m'a « emprunté » tous les autres... Je ne sais pas du tout combien j'en retrouverai.
Lyris tourna la tête pour boire et remit son écharpe sur sa bouche en faisant passer une fiole d'alcool, quelque chose de fort que Yeosang ne connaissait pas. Chacun en avala une gorgée. Ils étaient si solennels, Yeosang n'osa pas interrompre la drôle de cérémonie qui se déroulait sous ses yeux. Et puis, ça lui faisait plaisir d'en faire partie. San récupéra la fiole en dernier et la leva.
— A Yunho et Jongho !, toasta-t-il avant de boire aussi. Par Eta, puissent-ils se réconcilier rapidement parce qu'on va droit vers le naufrage, si non...
Oh, bien sûr. Leur amitié était célèbre sur le navire, ils étaient les deux seuls de Soleï à se connaître avant d'arriver sur le ATEEZ. Yeosang connaissait les légendes sur le médecin rouge, qui faisait presque partie du folklore de l'île, et il imaginait sans peine que Yunho avait dû traiter Jongho à maintes reprises durant leurs apprentissages respectifs. D'où les yeux dans le vague. Manifestement, il n'avait pas décoléré depuis l'après-midi.
Le simulacre spontané de cérémonie terminée, Lyris fit descendre son écharpe sur son cou et prit la parole.
— Il y a une drôle d'ambiance depuis ce matin. Il n'y a que Raven qui cause des problèmes, d'habitude.
— J'espère qu'elle ne restera pas, avoua Poppy. Je ne la supporte pas.
Phileas hocha énergiquement la tête. Yeosang mourrait d'envie de lui demander s'il était réellement muet ou pas.
— Il y a peut-être une raison pour laquelle elle est comme ça, proposa Yeosang en grimaçant.
Après tout, il l'avait inclus dans la conversation, il avait le droit de donner son opinion. Mais tout le monde se tourna vers lui comme si un troisième œil venait de s'ouvrir sur son front et Yeosang faillit se sentir blessé. Ils étaient conscients de sa présence avant, n'est-ce pas ?
— Peut-être, insista-t-il un peu moins fort.
Poppy et Lyris se mirent à rire bruyamment, les épaules de Phileas tressautèrent et San le regarda avec un grand sourire plein de fossettes. Yeosang se demanda s'ils se moquaient de lui, mais ça ne semblait pas être le cas.
— Yeosang, c'est ça ?, demanda Lyris avec un sourire aveuglant. Ravi de te rencontrer officiellement. Lyris, Poppy, et Phileas, dit-il en présentant tout le monde. Je suis sûr que les prénoms se propagent comme une traînée de poudre sur le bateau, mais maintenant, nous voilà certains qu'il n'y a aucun malentendu !
Yeosang leur adressa un signe de tête à chacun, un sourire à Poppy avec qui il avait déjà parlé plusieurs fois, et coinça le gouvernail pour pouvoir porter son attention sur la petite troupe.
— Tu as réussi à éviter Jongho, toi ?, demanda Poppy. Je me suis rendu compte que je t'avais un peu laissé comme victime désignée, en partant comme ça...
— San a pris ta place.
Ce dernier se tourna vers Poppy, des dagues à la place des yeux.
— Alors, ça s'est passé comme ça..., dit-il froidement. Tu es la raison pour laquelle je dois retourner voir le doc'. Et je ne peux même pas ! Parce qu'il s'est roulé en boule et regarde dans le vide depuis plusieurs heures ! Je ne suis même pas sûr qu'il sache quelle heure il est !
— Tu n'avais qu'à refuser, sourit narquoisement Poppy. C'est ce que j'aurais dû faire aussi, d'ailleurs... J'ai pas un gramme de muscle malgré tous mes efforts, je vais me retrouver avec des courbatures affreuses demain... Quelle idée d'aller me faire chercher des planches ?!
Au premier abord, Poppy semblait moins fragile que sa sœur, elle avait plus de présence, aussi bien sonore que physique, plus de prestance. Yeosang fut surpris de la voir admettre aussi facilement une faiblesse. Pire même, un échec.
— Une excellente idée, sourit Lyris. Il ne faut pas abandonner !
— Je ne remercierai Jongho que si ça fonctionne alors, râla Poppy.
Elle rit, une pensée soudaine lui ayant traversé l'esprit.
— Je crois que Lolly le considère plus ou moins comme une figure parentale, rit-elle plus fort. Elle vient seulement d'arriver à la période où on se rend compte que les parents sont loin d'être parfaits, elle ne savait pas où se mettre de tout l'après-midi.
— Ce qui fait une différence par rapport à d'habitude ?, demanda Lyris avec un sourire taquin en se rapprochant de Poppy.
Les sourcils froncés, Poppy lui répondit d'un coup de poing dans le bras, que Lyris ne chercha pas à éviter. Il le regretta avec un petit cri de douleur.
— Je suis la seule à pouvoir me moquer de ma sœur.
— Aïe, mais tu nous as mentis ! Tu as des muscles, tu m'as fait mal !
— Non, mais vraiment, en comparaison avec ma sœur, je suis si faible...
En guise de démonstration, Poppy lui poussa à peine l'épaule avec un sourire d'ange, et Lyris serra les lèvres avec agacement une seconde, pour exploser de rire la suivante. Yeosang surprit le regard entendu de San sur Poppy et Lyris, et le gabier lui sourit quand il croisa son regard.
— Ils n'arrêtent pas de se chamailler comme ça, lui glissa-t-il à l'oreille avant de hausser les épaules. Je ne peux pas m'empêcher de le voir... D'ailleurs, tu... Non, rien !
La cloche du repas sonna et les quatre amis laissèrent Yeosang à son poste pour aller se servir. Seonghwa apparut aussitôt, comme s'il n'avait attendu que leur départ pour le surprendre.
— Tiens, voilà ta soupe, dit-il en posant quelque chose sur la table sur laquelle était piquée une carte. S-O-U-P-E. Est-ce que... Est-ce que j'ai fait quelque chose de mal ?, demanda timidement Seonghwa. Tout à l'heure, je veux dire, continua Seonghwa comme Yeosang ne lui répondait pas. J'ai repensé à notre conversation, et je... je me demandais si je n'avais pas été trop loin ?
— Tu as été un idiot insensible, répondit Yeosang.
— Je, hésita-t-il. Ça me rappelle de mauvais souvenirs de faire ça, mais... Mais là, je suis en tort, donc... j'ai pas trop le choix... Je tiens à m'excuser. Bien sûr que je ne dirai rien si tu ne veux pas, et je ne veux pas te forcer à faire quoique ce soit. J'ai pensé bien faire... Je veux dire, je ne comprends pas pourquoi tu trouves ça si embarrassant mais j'ai essayé d'en profiter pour te pousser à accepter... Enfin bref, je suis désolé. Mais réfléchis-y quand même, s'il te plait. Ça me ferait plaisir, de t'apprendre. Bois-la tant qu'elle est encore chaude, ta soupe. Cinq lettres, S-O-U-P-E, soupe.
Yeosang se rendait bien compte qu'il essayait de lui donner envie, et ça l'aurait peut-être agacé quelques heures plus tôt. Mais il sourit à Seonghwa, qui lui rendit.
— Je dois y aller, dit Seonghwa finalement. C'est Wooyoung et San qui font le service ce soir, et j'ai le pressentiment que ça va se terminer en bataille de nourriture si je ne vais pas les surveiller...
Il descendit quelques marches, avant de les remonter.
— On est en paix ?, demanda-t-il doucement. Tu me pardonnes ?
Yeosang le serra brièvement dans ses bras pour seule réponse, et Seonghwa rosit de plaisir avant de le saluer pour reprendre son rôle de coq.
Peu de temps après, Poppy, Phileas et Lyris revinrent avec leurs repas respectifs et deux bouteilles de rhum.
— On a voulu te prendre une portion, dit Poppy en s'asseyant en face de Yeosang sur le pont, mais le coq a dit que tu en avais déjà une.
Yeosang hocha la tête et sentit un irrépressible sourire lui monter au visage : ils étaient revenus, et ça lui faisait vraiment très, très plaisir. Il bloqua la barre à nouveau, vérifia leur position sur la carte, et récupéra sa portion dans la chope métallique que lui avait amenée Seonghwa. Se faisant, il fit s'envoler une feuille de papier sur le sol. Il ne la reconnaissait pas. Intrigué, il la récupéra. Un mot, cinq lettres. Soupe, supposa-t-il.
— S-O-U-P-E, murmura-t-il en suivant le tracé des lettres du bout du doigt.
A défaut de savoir lire et écrire, il avait une très bonne mémoire auditive. Le rire si fort et communicatif de Lyris le sortit de ses pensées et il releva la tête pour voir Phileas lui tendre la main. Rangeant soigneusement le papier dans une poche de son bas, il la prit, la chope dans l'autre main et se laissa conduire vers Lyris et Poppy, qui parlaient joyeusement en l'attendant, assis devant la barre. Quelque chose avait déjà changé.
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Un chapitre un peu en avance par rapport à d'habitude, j'espère qu'il vous a plu !
On approche de la fin de la partie 1, plus que deux chapitres ! XD
Ce travail est aussi disponible, sous le même nom, sur mon compte AO3. J'en suis l'unique auteure.
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