Chapitre 33 ou comment faire partie d'un commando d'attaque [PARTIE 2]
Je me tournai vers le groupe. Horace me regardait bizarrement et les deux autres étaient regroupés autour du lit où ils avaient déposé l'homme. Ils semblaient inquiets. Je me rapprochai d'eux et Jack jeta un rapide coup d'œil vers moi.
- Nous ne pouvons nous permettre de perdre du temps. Chaque seconde est précieuse, ils risquent de se rendre compte de l'ascenseur. Nous devons y aller, maintenant. El', nous reviendrons pour toi après.
- Je reste ! s'exclama aussitôt la femme.
Agenouillée sur le lit près de l'homme comme Evan l'avait été près de moi, elle ne le lâchait pas. Jack leva les yeux au ciel.
- Écoute je sais que c'est dur, mais nous avons besoin de...
- Non. Je reste. Imagine que n'importe qui rentre dans cette pièce. Explique-moi comment il fait pour se défendre. Tu dis toujours que notre plus grande différence avec les gardes du gouvernement, c'est notre fraternité. Nous ne laissons jamais l'un des nôtres seul. Je reste.
L'homme hésita un instant puis finit par acquiescer. Puis il se tourna vers nous.
- Petite, tu sais comment aller chez la directrice ?
- Bien sûr. Le chemin est assez long et nous allons croiser plein de monde. Heureusement que nous nous fondons vraiment dans la masse.
Les deux hommes jetèrent un coup d'œil à leur aspect général. Nous étions équipés comme les gardes sans leur uniforme, nous avions de la crasse partout suite à notre escalade dans l'ascenseur et le visage déformé d'Horace n'arrangeait rien. Heureusement pour eux, c'était la « gamine » qui allait sauver leurs petites fesses. J'avais déjà pensé à ça.
J'allai dans le dressing et fouillai un moment dans mes affaires et celles d'Evan. Je finis par trouver ce que je cherchais. Deux longues vestes, dont une à capuche qui serait idéale pour masquer le visage d'Horace et toutes deux assez larges pour masquer leurs armes. Je me saisis également d'un manteau à moi agrémenté d'une capuche et revint dans la chambre. Je jetai les vestes aux hommes et enfilai la mienne. Je fis glisser mon fusil par terre — trop encombrant — me contentant de mes deux pistolets et de mon couteau. Puis j'approchai de la porte. Désormais, c'est moi qui donnai les ordres.
- Horace, mets la capuche. Tu devras rester la tête baissée pour ne pas qu'on te voie. Et Jack... Faudrait que t'as l'air un peu sympa, mais je suis pas sûre que ce soit dans tes cordes. Il va falloir qu'on joue la comédie ou ceux que nous croiserons vont trouver ça louche.
Sans attendre leur réponse, je sortis et m'engageai dans le couloir. J'entendis Jack promettre à ceux qui restaient là qu'il reviendrait les chercher, puis il m'emboita le pas. Horace suivit le mouvement et nous marchâmes tous les trois vers les quartiers de la directrice. Je frissonnai. Comme il m'était étrange d'être de retour ici ! Je me sentais bizarre, et tous mes sentiments étaient extrêmement confus. J'essayai de e concentrer sur des pensées simples :
Retrouver la directrice
L'obliger à arrêter les combats
La tuer potentiellement
Tuer Evan s'il est sur notre chemin.
Et c'est là que ça se compliquait à nouveau et que je me perdais.
- Cyanna ! souffla Horace en voyant mon trouble. Concentration !
J'acquiesçai vivement. Nous marchâmes un moment en silence, jusqu'à entendre des pas et des voix au loin. Aussitôt, je me transformai. C'était maintenant qu'il fallait jouer le jeu. Je me tins droite, relevai la tête et éclatai d'un rire jovial.
- C'est n'importe quoi ! Ces gens sont vraiment des sauvages, pas étonnant qu'ils soient au dernier étage !
Un groupe de quatre nobles arrivèrent devant nous. Ils parlaient entre eux avec cet air suffisant qui les caractérisaient si bien. Jack essaya tant bien que mal de faire un rire joyeux en relevant la tête, mais il fallait bien avouer qu'il n'était pas très convaincant. Je gloussai :
- Oh allez les gars, faîtes pas cette tête ! La garde nous protège, on n'a pas de soucis à se faire !
Nous passâmes devant le groupe, qui nous adressa des sourires amusés. Une seconde plus tard, ils étaient derrière nous. Jack perdit aussitôt son sourire et ses traits se crispèrent à nouveau. Pour ma part, j'oubliai également mon air jovial et soupirai un bon coup. Je guidai les deux hommes de couloir en couloir et, à chaque fois que nous croisions des gens, nous refaisions notre joyeuse comédie. Sans vouloir m'avancer, je crois que nous avons été assez convaincants. Au bout de minutes douloureuses, nous arrivions dans le couloir de la directrice. Je me plaçais entre les deux hommes.
- Vous voyez ? C'est là.
Je leur désignai une porte, qui se distinguait bien par sa taille supérieure et par les deux gardes plantés devant. Je continuai à avancer vers eux comme si de rien n'était.
- Il y a au moins trois gardes de plus à l'intérieur.
- Ok, répondit Horace. Dès qu'on arrive devant, on tire et on entre.
- On tire dans les jambes, corrigeai-je, et on entre.
Il acquiesça. Je serrai la main sur les pistolet dans mes poche, les doigts légèrement tremblants. Ensuite, tout se passa très vite. Nous arrivâmes devant les gardes et, plutôt de continuer notre chemin comme ils s'y attendaient, nous sortîmes nos armes. Je tirai en direction des jambes des hommes en même temps que mes deux compagnons et les gardes se retrouvèrent à terre. Horace vint les assommer pour ne pas qu'ils donnent l'alerte. Tout aurait très bien pu se passer. C'était sans compter sur le groupe de six gardes que nous n'avions pas vus et qui venaient de tourner à l'autre bout du couloir. Ils réagirent rapidement.
- Hé, vous ! Lâchez vos armes, tout de suite !
Ils étaient encore loin, mais se mirent à courir vers nous, leurs armes levées. Je me précipitai vers la porte et l'ouvrit. Horace entra et je fis signe à Jack de le suivre. Mais l'homme resta campé sur ses pieds.
- Allez-y. Je vais les retenir un peu. Il nous faut du temps.
- Ils sont trop nombreux ! protestai-je. Et tu es trop exposé ! Tu vas...
- Hé, gamine.
Jack se retourna vers moi. Derrière son épaule, je voyais les gardes se rapprocher de plus en plus. Ils seraient bientôt à portée de tirs. Il avait les traits tirés et le regard grave.
- Oublie ce que j'ai dit tout à l'heure. Tu es quelqu'un de bien. Tu es imprévisible, mais tu sais réfléchir. Il ne reste plus que toi et Horace maintenant. Vous devez arrêter cette guerre. C'est clair ?
- Oui, mais..
- Je mise sur toi à mon tour, Cyanna. Fais les bons choix.
Sans que je ne puisse protester encore plus, il me poussa à l'intérieur et referma la porte d'un coup sec. Presque aussitôt, j'entendis des coups de feus de l'autre côté. Face à la cloison, je pris une longue inspiration. Je devais utiliser ce temps précieux qu'il venait de nous offrir. Quand je me retournai, j'eus un mouvement de recul. Horace était au milieu de la salle. Son fusil reposait à ses pieds et ses mains étaient croisées sur sa tête. En face de lui se trouvaient trois gardes, fusils levés. L'un d'eux arrêta de viser Horace et pointa le canon de son arme sur moi.
- Lâche ton arme immédiatement. Tu es cernée.
Il n'avait pas tort. La pièce dans laquelle nous étions était celle qui jouxtait le bureau de la directrice. C'est là que se trouvaient les gardes du corps et ceux qui attendaient pour une entrevue. Il n'y avait que deux portes, une derrière moi menant au couloir où retentissaient les tirs et l'autre, derrière les gardes, menant au bureau de la directrice. Il était facile de croire que nous étions coincés. Du moins, pour quiconque ne nous connaissant pas, moi et Horace. Lentement, j'abaissai mon pistolet vers le bas dans un geste de résilience.
- Ok, doucement... je vais mettre mon arme par terre. Je venais juste voir Myriam.
J'insistai bien sur le dernier mot en jetant un coup d'œil discret à Horace. Mais, étant dos à moi, je ne pus voir sa réaction.
- Je crois que nous nous sommes trompés, répliqua-t-il alors. Myriam n'est pas là.
Il avait compris. Comme souvent, il était sur la même longueur d'onde que moi. Quand on parlait stratégie, tout du moins. Délicatement, je laissai tomber mon pistolet par terre. Le deuxième, dans mon autre poche, était à portée de main. Mais je levai les bras bien en évidence.
Myriam... Horace se souvenait comme moi d'elle. C'était une sale brute que j'avais combattue il y a des années, alors que je devais tout juste avoir onze ans. Elle faisait au moins deux fois ma taille et trois fois mon poids. Elle était bien plus forte et puissante. Mais j'étais bien plus maligne.
Alors qu'elle me massacrait, j'ai changé de stratégie. Après un bon uppercut dans la mâchoire, j'ai fait mine de rester à terre, sonnée. Alors qu'elle venait m'achever, sûre d'elle, je lui ai flanqué un bon coup de pied et, d'une prise habile, l'ai mise à terre. Il ne m'a fallu que quelques coups pour ensuite la mettre K.O. Et bien sûr, Horace avait assisté à ce combat. Nous en avions ensuite souvent plaisanté, arguant que nous faisions « une Myriam » quand nous faisions semblant d'être affaiblis pour frapper encore plus fort.
Lentement, le cœur battant à m'en déchirer la poitrine, je me retournai. Dans un combat classique, je n'atteignais pas ce niveau de stress. Mais dans un combat classique, je n'avais pas des fusils pointés sur moi et l'avenir de notre monde sur les épaules. Je sentis le garde approcher de moi pour me neutraliser et, du coin de l'œil, vit un autre faire la même chose avec Horace. La faille énorme de ce plan était évidente. Je m'occupais d'un garde, Horace d'un deuxième. Mais ils étaient trois. Et le dernier aura le temps de réagir avant que nous n'en venions à lui.
Hélas, la vie n'était pas un film où je pouvais mettre pose pour analyser plus largement la situation. La vie continuait, que je sois prête ou non à la suivre. Le garde arriva jusque moi et je délaissai la réflexion pour l'action. Je balançai mon coude en arrière et percutai violemment l'homme qui laissa tomber son arme. Je pivotai sur moi-même. Balayai les jambes du garde. Sortis mon arme dans le même mouvement. Et tirai dans les rotules de l'homme, qui hurla de douleur. Je l'assommai d'un coup de pied et me redressai rapidement.
Mais pas assez vite. Horace avait mis un garde à terre. Seulement un, ce n'était pas suffisant. Je levai mon arme mais ne fus pas assez rapide non plus. Le garde tira plusieurs coups en direction d'Horace. Presque au ralentis, je vis le corps de celui que je considérais comme un deuxième père voler dans les airs, s'écraser contre le mur et s'effondrer par terre dans une flaque de sang. Ensuite, je ne sus pas ce qui arriva en premier. Mon cri. Le garde qui se retourna. Mon doigt sur la gâchette. Mon tir. Je sais juste que, deux secondes plus tard, j'étais seule, debout au milieu de quatre hommes barbotant dans leur propre sang. Et parmi eux, Horace.
- Non !
Je me précipitai vers lui, horrifiée. Il avait un gilet par balle, essayai-je de me rassurer. C'est censé le protéger. Il avait un...Je tombais à genoux près de lui. S'il avait un gilet par balle, pourquoi tout ce sang ? Il posa ses yeux grands ouverts sur moi.
- C'est... c'est rien...
Il essaya de se redresser mais geignis longuement et retomba. Fébrile, j'inspectai les dégâts. Il avait reçu quatre balles. Deux d'entre elles s'étaient fichées dans son gilet, mais les autres l'avaient évité. Une l'avait touché à la cuisse. L'autre, à la limite entre le cou et l'épaule. Il y avait de la chair partout, du sang par giclées entières et des morceaux de métal. Je pâlis.
- C'est mauvais... ?
- Putain de mauvais, soufflai-je en détournant le regard.
Horace en avait affronté des choses. Mais cette balle avait décimé une partie de son cou. Sa respiration était déjà saccadée et le sang n'arrêtait pas de sortir. Je doutai que quiconque ne puisse se sortir de ça. Mes mains tremblaient tandis que j'étais tout juste en train de me rendre compte de ce qui se passait. Avant que je ne me laisse submerger par l'émotion, la main d'Horace agrippa mon bras.
- Cyanna... il faut continuer.
- Mais tu... tu... oh mon dieu tu...
- Tais-toi, me coupa-t-il d'une voix faiblarde mais convaincue. Il faut continuer, coute que coute. On ne peut pas s'arrêter là. Emmène-moi voir la directrice.
Je serrai les poings pour calmer les tremblements qui les parcouraient et ravalai mes larmes. La directrice. Se concentrer sur la directrice. Je me redressai, réussissant tout juste à me contenir et... j'entendis une porte s'ouvrir derrière moi. Mon instinct reprenant le dessus sur mes émotions, je me retournai d'un bond, mon pistolet dans la main. Un garde se trouvait devant moi.
La porte qui venait de s'ouvrir était celle du bureau de la directrice. Et ce garde, c'était Evan.
...
Hé hé hé 😉😏
Voilà que les choses se compliquent ! Et encore, vous n'avez rien vu. 😅😊
Qu'avez vous pensé de ce (long) chapitre ?
De l'équipe de Cyanna ?
De l'état de Horace ?
Et surtout, de ce qui va arriver ? 🤫😌
Merci à tous pour vos lectures, bizes. 😍
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