✧ Un petit texte sur Oswald Faye, un futur personnage important de Asters, qui a déjà fait son apparition dans les premiers chapitres.

Ce texte peut se lire indépendamment de l'histoire, et peut servir de prélude au personnage ✧

Installé sur la chaise à l'assise de cuir fatiguée, Oswald Faye observait distraitement la rue à travers la vitrine du bistrot. La pluie qui ruisselait sur le verre brouillait en étoiles colorées les feux de circulation et de stop. Les voitures freinaient au rouge avec un bruit de glissement mouillé. Emmitouflés dans leurs manteaux, bien abrités sous leur parapluie, les passants s'empressaient.

Oswald porta à ses lèvres son café noir. Le breuvage chaud et amer enveloppa sa langue de ses arômes. Le café et le temps pluvieux étaient à l'image de son humeur du jour : sombre, lourde.

Depuis ce matin, l'Aster ruminait. Il avait rêvé de la moire chamarrée des projecteurs, de salles combles, de musique à faire vibrer les os. Il avait rêvé de tonnerre d'applaudissements percés de sifflements stridents. Il suait sous son costume de scène, l'euphorie battant à ses tempes.

Seule la grisaille de son appartement et l'humidité des rues saucées par l'intempérie l'attendaient au réveil. Une nouvelle journée débutait, tiquait comme une trotteuse sur le cadran de sa vie, et il n'était pas plus près d'assouvir ses ambitions que dix ans auparavant, quand il s'était laissé embrigadé parmi les Cebalraï.

Malgré toute l'inimité que les confréries d'Asters lui inspirait, la Constellation apparaissait comme une solution avantageuse, à l'époque. Un moyen pour lui de développer ses compétences et de s'enrichir assez pour continuer à œuvrer vers son but. Mais la poudre aux yeux s'était dissipée, le nœud coulant s'était resserré autour de sa gorge, et il était demeuré piégé sous la botte de Cebalraï.

Oswald reposa sa tasse en avisant un véhicule haut de gamme déposer son passager sur le trottoir d'en face. Il regarda l'homme voûter le dos sous la pluie et s'engouffrer en hâte dans la porte tambour de l'hôtel. Pour la première fois depuis son réveil, une once de satisfaction tira un sourire à l'Aster.

En tant qu'Oswald Faye, il était pied et poing lié.

Mais le Charlatan, lui, disposait d'une bien plus vaste marge de manœuvre pour s'emparer de ce qui lui était dû.