ALTHEA

La nuit était tombée sur le camp. J'attendais, tapis dans l'ombre, que les derniers murmures de la journée s'estompent et que chaque soldat se retire dans son sommeil. C'était le moment que j'avais choisi, celui où la solitude me permettrait de me livrer tout les soir à un entraînement secret.

Dès que les échos des pas se furent évanouis, je me faufilai hors de ma cachette, mes pieds effleurant à peine le sol. Devant moi, la cour d'entraînement semblait abandonnée, peuplée seulement par les cibles et les arcs laissés par les soldats. Le clair de lune filtrant à travers les branches des arbres éclairait faiblement les lieux.

Avec une détermination silencieuse, je sélectionnai un arc parmi ceux alignés contre le mur. Je choisi une flèche, la positionnai, et me tournai vers la cible la plus éloignée. L'arc se tendit sous la force de mes doigts, la corde vibra contre mon oreille. Je respirai profondément, cherchant à me concentrer, à faire abstraction de tout, sauf de ma cible.

Les premiers soir de mon entraînement furent ponctués par de nombreux échecs. Chaque flèche tirée manquait sa cible, me laissant avec un sentiment d'insuffisance et de frustration. J'étais déterminée, mais l'arc ne semblait pas coopérer et être une extension naturelle de mon corps, comme je l'avais espéré.

Une nuit, après une série particulièrement désastreuse de tirs, la déception m'accabla. Assise dans l'obscurité, je laissai les larmes couler. Un mélange de colère et de tristesse. C'est à ce moment précis que quelque chose s'éveilla en moi. Une sensation nouvelle et puissante commença à m'envahir. Mes sens se mirent à vibrer d'une intensité que je n'avais encore jamais ressentie. C'était comme si chaque souffle du vent me guidait.

Je me relevai et pris de nouveau l'arc. Mais cette fois c'était différent. J'étais plus loin de la cible et pourtant je la voyais de façon plus nette, comme si elle était proche de moi. Je sentais une connexion profonde entre la cible, l'arc et moi-même. La nuit ne semblait plus être un voile d'obscurité mais un allié, me dévoilant chaque détail autour de moi.

Je positionnai la flèche, et au moment de la lâcher, mon intuition et mes sens amplifiés convergèrent. La flèche s'envola avec une précision parfaite, se plantant au centre de la cible avec une aisance stupéfiante.

Je restai là, immobile, réalisant que quelque chose d'extraordinaire venait de se produire. Ce n'était pas seulement l'adresse ou la technique que j'avais acquis au fil des entraînements ; c'était plutôt comme si un pouvoir latent c'était manifesté comme l'autre jour. Un sixième sens qui transcendait la simple perception.

Je m'arrêtai un instant, regardant mes mains, me demandant ce que ce changement signifiait. Était ce le pouvoir dont ma mère m'avait parlé ? Celui qui sommeillait en moi ?

Ces derniers mots m'arrivèrent en tête :

Tu es l'héritière d'une lignée très spéciale, Althea. Ancienne et puissante. Sache que ta destinée est grande et qu'elle t'attend.

Et si, cette lignée me conférait des pouvoirs ? 

Elle m'a aussi dit : Mets toi en quête de ton ascendance et tu trouveras ta voix.

Pour l'instant je n'ai pas réussi à trouver mon père après des jours de recherche. J'ai fouillé Drevania au peigne fin, sans le retrouver. Il serait peut-être grand temps que je me mette en quête de mon ascendance. Il faut que je réussisse à entrer dans la bibliothèque impériale et que je trouve des informations dans les livres anciens.

Je respirai profondément, sentant l'air frais de la nuit remplir mes poumons. Peut-être que demain, ou dans les jours à venir, j'aurais des réponses. Mais pour l'instant, il fallait que je me concentre sur cet arc, ces flèches, et cette force qui grandissait en moi.

Les nuits suivantes, je continuai à explorer et à aiguiser ce don mystérieux. Chaque nuit mon adresse s'améliorait, me rapprochant de la maîtrise que je cherchait. Chaque flèche tirée était un pas de plus dans la maîtrise de ce nouveau pouvoir. Un mélange d'instinct et de quelque chose de plus profond, de plus ancestral. 

Je n'étais pas seulement animé par le désir de m'entraîner, c'était une quête, une manière de me rapprocher de l'héritage que ma mère m'avait laissé et de la destinée qui m'attendait. Ce n'était plus seulement de l'entraînement ; c'était une transformation. J'étais en train de devenir quelqu'un que je n'avais jamais été. Une personne puissante. Et avec cette puissance, venait la promesse de vengeance et d'un destin que je commençai seulement à comprendre.