Althea

Dans l'obscurité de ma chambre à l'auberge, une nuit avant mon départ pour Valthura, un bruit soudain me tire de mon sommeil. Mon cœur bat la chamade, mes sens en alerte. Sans perdre un instant, je saisis mon épée, la lueur de l'acier tranchant reflétant la faible lumière de la lune qui filtre à travers la fenêtre.

Avec prudence, mes yeux s'habituent peu à peu à l'obscurité, scrutant chaque recoin de la chambre. Les ombres semblait danser sur les murs, créant des formes étranges et menaçantes. Mais je ne suis pas du genre à me laisser impressionner par des illusions nocturnes.

Approchant du placard, je sens mon pouls s'accélérer. D'une main ferme, j'ouvre brusquement la porte, prête à tout affrontement. A ma grande surprise, un soldat se tient là, dissimulé, en train de ronfler. Je récupère mon pot de chambre et décide de lui balancer sur la figure afin de le réveiller. Il sursauta et me regarde paniqué. Sans hésiter, je le braque de mon épée, ma voix ferme bien que teintée d'une curiosité méfiante :

—   Qui es-tu ? Et que fais-tu caché dans ma chambre ?

Le soldat, visiblement effrayé, lève les mains en signe de reddition, balbutiant des mots hâtifs.

—   Je...je suis désolé ! je ne voulais pas...Je me suis trompé de chambre.

Sa réponse me semblait peu convaincante. Je garde mon épée pointée vers lui, mes yeux ne quittant pas les siens.

—   Un soldat qui se trompe de chambre ? Peu crédible. Parle, ou je serai forcée d'employer d'autres moyens pour obtenir des réponses.

Il avale difficilement, son regard fuyant trahissant un mélange de peur et de culpabilité :

—   S'il vous plaît, ne criez pas. Je...je me suis échappé.

Sa réponse m'intrigua. Je le fixe, l'épée toujours en main.

—   Un échappé ? De quoi ? Pourquoi devrais-je te croire ?

Il semble nerveux, son regard fuyant sur ma tenue féminine et sur le déguisement d'homme qui pendait sur la chaise. J'avais oublié ce gros détail.

—   Je...je suis le prince héritier de Drevania.

Je ris sarcastiquement.

—   Et moi, je suis la reine de Azurinia. Arrête tes sottises. Tu es un déserteur. Et tu sais ce que l'on fait au déserteur ? On les décapite sur la place publique !

Quelque chose dans son regard m'interpella. Il avait l'air sincère. Il portait l'armure de l'empire mais ne se tenait pas comme les soldats experts de leur garde. Il était prostré, apeuré. Il avait l'air désespéré. De plus, il avait remarqué mon déguisement.

—   Vous... pourquoi êtes-vous déguisé ?

—   Cela ne te regarde en rien. Et toi, pourquoi tu déserte ? N'as-tu pas honte ? Les êtres comme toi sont méprisables.

—   Je vous en prie, ne me dénoncez pas. Si on me retrouve je serai assassiné. Je ne suis pas un déserteur. Si vous me protégez, vous serez grandement récompensé ! Et puis moi aussi je peux vous dénoncer, vous savez que l'on exécute également les femmes et les hommes qui s'habillent en sexe opposé dans l'empire?

J'étais prise au piège, je décide alors de jouer une carte et de bluffer.

—   Dans mon pays tout le monde sait que je me déguise car cela fait partie de mon travail. Je suis un agent infiltré et par conséquent j'ai l'accord de sa majesté. Je ne crains donc rien, par contre, toi, tu as beaucoup plus à perdre, comme ta vie par exemple. Mais je ne vous dénoncerai pas. Vous n'en valez pas la peine. J'ai un long voyage à entreprendre qui est beaucoup plus important.

Il baissa la tête, ne sachant quoi répondre.

—   Je vous remercie. Je ne ferai pas de bruit. Je... je dois rejoindre quelqu'un dans la forêt. J'irai dès que les soldats auront quitté Lylh Serine.

—   Je te laisse nettoyer le crottin et le placard. Tu as jusqu'à l'aube pour finir. Nos chemins se sépareront demain. Ne me quitte pas des yeux, tant que je n'aurais pas décidé d'entreprendre mon voyage.