LEANDRE

Je tentais d'apprendre quelques notes de piano à Alden quand brusquement il se retourna et me repoussa avec une force inattendue. Surpris, je restai figé, cherchant à comprendre cette réaction soudaine. Que lui arrivait-il ? Il se leva semblant prêt à partir. J'étais confus, pensant que nous commencions à trouver un terrain d'entente. Le pointant du doigts je lui rappelai en essayant de reprendre le contrôle sur la situation :

— Où vas-tu ? As-tu oublié que tu dois m'apprendre à manier ces mini flèches à empennages ajustables ?

C'est à peine s'il daigna se retourner :

— Continuez à jouer du piano pour charmer les filles. Cela vous convient mieux.

Cette brusque méprise me laissa perplexe. Pourtant, je sentais qu'au-delà du bandit, il y avait en Alden une noblesse et une pureté d'intention qui méritaient d'être explorées. Il y avait en lui un potentiel allié, non seulement puissant, mais aussi animé par des valeurs profonde et similaire aux miennes, malgré son statut de hors-la-loi.

— Tu oublies notre accord ? Je dois te servir pendant deux semaines étant donné que j'ai perdu le duel, rappelai-je, espérant regagner son attention.

— Je n'ai pas besoin d'un suiveur. Si tu cherches absolument à avoir un maître va tenter ta chance ailleurs, répondit-il sèchement.

Je me levai, m'approchant avec détermination.

— Que dirais-tu d'être mon ami plutôt qu'un serviteur ? Je vais te confier un secret que tu ne dois révéler sous aucun prétexte. Mon ami le plus proche n'est autre que le prince héritier de Valeria.

Alden se retourna, son beau regard violet intense se posant sur moi avec une curiosité nouvelle. Je poursuivis :

— Si tu deviens mon ami, tu seras également l'ami du prince héritier. Cela te donnera une force et un pouvoir que tu ne peux pas refuser. Ensemble, nous pourrions unir nos forces et nos armées contre notre ennemi commun : Drevania. Tu ne peux pas refuser cette proposition si ?

Son regard se durcit, et devint soudainement plus sombre passant du violet intense au violent très foncé presque noir. Une lueur de défi brillait dans ses yeux :

— Allez dire à ce prince qu'il ne mérite aucun respect. Que je préférerai manger du fumier plutôt que d'envoyer mon propre peuple en tribut afin de m'asseoir sur ce trône sans valeur, cracha-t-il avec mépris.

— Tu es rempli d'amertume à l'égard de ce monde, remarquai-je doucement.

— Parce qu'il est pourri jusqu'à l'os. Chaque membre de la famille royale et ceux qui sont censé travailler pour leurs sujets, c'est-à-dire les politiciens, sont corrompus. Si vous continuez à me faire encore perdre mon temps avec vos bêtises, je pointerai mes super mini flèches droit sur votre visage, et pas sur des oiseaux ou des cerceaux.

Il tourna les talons et sortit de la chambre. Je baissai la tête, accablé par tant de haine. Mais quelque part il avait raison. Depuis le temps que j'œuvre pour arrêter cette horreur je n'ai encore jamais réussi. Pourtant je me rapprochai de mon but, je suis devenu plus fort et mon armée également. J'y arriverai avec ou sans son aide. Pour l'instant je m'occupe des bandits qui nuisent à Valeria soit en les ralliant à ma cause soit en en faisant mes ennemis et en les faisant tomber.

Une fois certain qu'il avait quitté les lieux, je pensais à haute voix :

— Quel dommage. Il gâche son précieux talent.

Me mettant à la fenêtre je le vis quitter le palais laissant ses hommes continuer à festoyer avec les miens. Je reconnaît qu'il a des qualités de Leader. Je ne perds pas espoir face au fait d'unir nos forces face à Drevania. Sa réaction reflétait sa méfiance profonde envers les structures de pouvoir et montrait sa réticence à faire partie de ce monde corrompu. Mais ce qu'il ne savait pas, c'est que moi je n'en faisait pas partie. Et je compte bien lui prouver.