CHAPITRE 105 - Empereur
IMPERATRICE DOUAIRIERE MIREXIA (Mère d'Aurelian)
L'annonce du héraut fendit l'air avec éclat :
— Sa Majesté Impériale est arrivée !
À ces mots, un silence sacré s'abattit sur la cour impériale. Les courtisans, parés de leurs plus riches atours, se prosternèrent d'un seul mouvement, front contre les dalles froides du palais. Je me redressai légèrement, scrutant l'entrée monumentale avec une attention fébrile.
Et enfin, il apparut.
Mon fils.
L'Empereur.
Aurelian franchit les hautes portes du palais avec une légèreté presque enfantine. Ses pas étaient rapides, son allure presque sautillante, dénotant d'une insouciance qui, malgré moi, m'arracha un sourire. À sa droite, le Ministre Jo-Gar marchait avec son habituelle droiture, son regard affûté balayant la foule inclinée. À sa gauche, le Grand Conseiller Raymund Morinth avançait lentement, sa silhouette drapée dans des étoffes sombres, l'air plus grave encore qu'à son habitude.
Derrière eux, une poignée de soldats au port altier suivait, renforçant la solennité de cette procession.
Aurelian souriait. Ce sourire... naïf, presque niais. Je reconnaissais bien là l'enfant que j'avais élevé. Trop doux. Trop candide pour ce trône. Pourtant, mon cœur se serra de soulagement. Il était rentré. Il était sauf.
Plus près de moi, les courtisans restaient prosternés, leurs fronts toujours plaqués contre les dalles de marbre. Je n'y prêtais aucune attention. Délaissant toute réserve, je me précipitai vers mon fils.
Le serviteur tenant mon parasol eut toutes les peines du monde à suivre mon allure. Je sentis la soie de mes jupes effleurer le sol dans ma hâte. J'attrapai les mains d'Aurelian, serrant ses doigts avec force.
— Votre Majesté Impériale ! soufflai-je, le cœur battant. Vous êtes enfin rentré !
Il baissa la tête avec un sourire timide. Un salut maladroit.
— Impératrice douairière, répondit-il d'une voix douce, presque gênée.
Je forçai un sourire plus contrôlé, chassant les émotions qui menaçaient de me trahir.
— Le voyage a dû être éprouvant, repris-je d'un ton plus posé, mais vous avez triomphé.
Il ne répondit pas, se contentant d'un hochement de tête.
— Allons sans tarder au palais impérial. Les ministres et les Puris Castralis vous y attendent. Le trône ne souffre pas d'attente.
Mon regard glissa vers Jo-Gar, également enfin de retour. Mon bras droit. L'absence de cet homme avait été un vide cuisant dans la gestion des affaires du palais. Il m'offrit une révérence sobre, puis emboîta le pas à Aurelian.
Nous franchîmes les immenses portes de la salle du trône. Le silence s'y fit plus pesant encore.
Je pris naturellement place au premier rang. Pourtant, Raymund Morinth avança à mon niveau. D'un pas lent et mesuré, il s'installa à mes côtés, me lançant un regard pesant, presque défiant.
Je ne tournai pas la tête vers lui, mais mes lèvres s'étirèrent en un sourire froid. « Nous étions donc égaux désormais, Conseiller ? »
— Votre Majesté Impériale, soufflai-je en inclinant légèrement la tête vers Aurelian. Montez sur le trône.
Il hésita. Ses yeux cherchèrent ceux de Raymund. Une demande d'approbation silencieuse.
Raymund esquissa un geste lent de la tête, lui indiquant d'avancer.
Qu'est-ce donc que cette mascarade ? Depuis quand mon fils, empereur par droit de sang, quémandait-il le consentement du conseiller ?
Aurelian s'avança enfin, gravissant lentement les marches du trône. Mais au lieu de s'y asseoir avec assurance, il se posa maladroitement sur le coin.
Pathétique.
Raymund, toujours aussi impassible, laissa filtrer une pointe d'agacement dans sa voix.
— Mettez-vous à l'aise, Majesté. Ce trône est vôtre désormais.
Léger sursaut. Aurelian glissa lentement jusqu'au centre du siège impérial.
Raymund monta alors d'un pas mesuré sur l'estrade, juste en dessous du trône. Sa voix résonna dans la vaste salle.
— Que chaque courtisan vienne présenter ses félicitations. Un nouvel empereur de Drevania est monté sur le trône.
— Longue vie à Sa Majesté Impériale ! proclama d'une voix éclatante l'harmonnanceur.
— Longue vie à Sa Majesté Impériale ! reprirent en chœur les courtisans, relevant la tête dans un même mouvement.
Leur loyauté semblait mécanique. Une récitation sans ferveur, sans chaleur.
Les prosternations reprirent aussitôt, un ballet parfaitement orchestré.
Puis, la voix grave et assurée de Jo-Gar s'éleva :
— Vive l'Empereur ! Vive la grande dynastie de Drevania !
— Vive l'Empereur ! Vive la grande dynastie de Drevania ! scandèrent les autres, la voix emplissant la salle dans une clameur contrôlée.
Je glissai un regard lent vers Raymund. Un sourire fin ourla mes lèvres.
Il me rendit ce regard, mais le sien était dur, comme une lame dégainée.
Pendant ce temps, Aurelian, lui, paraissait détaché, presque absent. Ses doigts effleuraient distraitement le tissu brodé du coussin du trône, comme un enfant découvrant un nouveau jouet.
Je me retournai lentement vers lui. Un sourire doux, maternel, se dessina sur mon visage.
Il leva les yeux vers moi, et malgré son apparence empesée de souverain, il me rendit ce sourire avec chaleur.
Mais sous ce masque, je savais.
Ce n'était pas Raymund Morinth que je devais craindre.
C'était l'Empereur lui-même. Même s'il était mon fils.
**********
Une fois les félicitations achevées, nous quittâmes la grande salle du trône pour marcher sous les hautes colonnades du palais impérial. Le marbre poli réfléchissait la lumière du jour, et chaque pas résonnait dans la cour silencieuse. La brise tiède du matin effleurait les tentures de soie suspendues aux balcons, mais la douceur de l'air n'apaisait en rien l'inquiétude croissante qui me serrait la gorge.
Je ralentis le pas, laissant les courtisans se disperser, et me tournai légèrement vers Jo-Gar, fidèle à mon ombre.
— La fête du couronnement doit se tenir sous peu, annonçai-je d'une voix claire. Veillez à ce que tout soit parfait. Pas de faux pas. Préparez-la sans faute.
Jo-Gar inclina la tête, ses mains croisées derrière le dos.
— Oui, Votre Altesse Impériale.
Mais avant que je ne puisse ajouter un mot, la voix glaciale du Grand Conseiller Raymund Morinth s'éleva, coupant l'air comme une dague bien aiguisée.
— Avant cela, dit-il avec lenteur, Sa Majesté Impériale doit se marier.
Je me raidis. Ses mots s'étaient abattus comme un couperet.
— Se marier ? répétai-je, l'étonnement perçant dans ma voix.
Raymund tourna lentement la tête vers moi, son regard acéré ancré dans le mien.
— En effet. Sa Majesté a exprimé le souhait d'épouser ma petite-fille, Thalia, et de faire d'elle son Impératrice.
Un silence glacé s'installa, rompu seulement par le bruissement discret des étoffes. Mon regard se fixa sur Aurelian.
— Votre Majesté... dis-je lentement. Est-ce vrai ?
Mon fils, toujours avec ce sourire qui m'échappait, leva les yeux vers moi, presque insouciant.
— On m'a dit que Thalia était d'une grande beauté. Et puis... je deviendrai le gendre du Grand Conseiller. C'est... génial, non ? Preuve que je peux accomplir deux choses en même temps : être Empereur et gendre.
Je restai une instante muette. Un frisson glacé me parcourut.
Génial ? Était-ce là toute sa réflexion sur une alliance avec le Grand Conseiller ? Était-il donc si naïf ?
Je m'avançai d'un pas, le dos droit, le regard dur.
— C'est moi qui accorde les places aux femmes au sein du palais. Vous avez choisi une Impératrice sans même m'en avertir ?
Aurelian déglutit, ses traits soudain moins assurés.
— J'ai juste pensé que...
— Votre Majesté Impériale, le coupai-je sèchement, je n'ai jamais rencontré Thalia. Vous bafouez mon autorité en décidant seul.
Le Grand Conseiller se redressa de toute sa hauteur, un sourire froid étirant ses lèvres.
— Vous rejetez ma petite-fille ? Sa voix s'enroula comme un serpent autour de mes oreilles. C'est m'insulter, Altesse. Est-ce vraiment ce que vous voulez ?
Je ne cillai pas. Il cherchait à me provoquer.
— La maison impériale obéit à des règles établies depuis toujours. Des règles que même vous, Conseiller, ne pouvez transgresser.
Raymund esquissa un rictus. Ses yeux brillaient d'une malice venimeuse.
— Ne vous inquiétez pas, murmura-t-il. Je veillerai à suivre les règles.
Il pivota avec une lenteur calculée.
— Allons-y, Votre Majesté.
Aurelian lui emboîta le pas, le regard fuyant, évitant soigneusement de croiser le mien. Je restai là, figée, la rage grondant dans mes veines.
Jo-Gar se rapprocha, sa voix basse et grave.
— Le Grand Conseiller sort déjà ses griffes.
Je ne quittai pas Raymund des yeux, le regardant s'éloigner comme un vautour prêt à fondre sur sa proie.
— Je ne le permettrai pas, soufflai-je, tant que je serai en vie.
Jo-Gar baissa la tête, prudent.
— Mais c'est Raymund Morinth. Il supervise la cour... et l'armée.
Je tournai la tête vers lui, mes yeux durcis par la détermination.
— Et moi, dis-je d'un ton glacé, je suis l'Impératrice douairière. Veuve de l'Empereur défunt. Mère de l'Empereur régnant. Et je ne lui faciliterai rien.
**********
Général Caius Dravell
La nouvelle s'était répandue comme une traînée de poudre. Aurelian était de retour au palais impérial. Une information trop capitale pour rester inerte. Avec Alexandre à mes côtés, nous avions pris la décision de laisser nos troupes poursuivre la besogne que nous avait confiée le Grand Conseiller : l'extermination du peuple Mordrethi.
Je savais pertinemment que Raymund Morinth nous passerait un savon pour avoir abandonné la campagne. Mais je ne pouvais pas me permettre de laisser Aurelian sous l'emprise de ce serpent. Ce garçon était bien trop malléable. Il fallait intervenir.
De plus, je devais à tout prix faire en sorte qu'il épouse ma nièce. Lier ma famille au trône impérial consoliderait mon pouvoir. Et je n'étais pas homme à laisser passer une telle opportunité.
Nous avions rejoint Drevania discrètement, évitant les regards indiscrets. Nos corps fatigués réclamaient du repos, et nous trouvâmes refuge dans une auberge, le temps de reprendre des forces.
À l'aube, nous avions traversé les souterrains du palais, des galeries oubliées qui serpentaient sous les fondations.
Arrivés devant les quartiers impériaux, nous fûmes accueillis par Tam, son Puris Castralis, qui, d'un simple hochement de tête, nous laissa entrer.
La porte s'ouvrit lentement, et le spectacle me laissa interdit.
Aurélian était là, vêtu d'une robe de chambre blanche brodée de fils dorés. Il s'étirait mollement, les paupières encore lourdes de sommeil. Il avait l'air d'avoir dormi comme un enfant repu.
Ce gosse... toujours aussi déconnecté de la réalité.
Je serrai les dents.
— Pourquoi ne pas nous avoir parlé de votre mariage ? lançai-je d'un ton sec.
Je l'avais appris en entendant les ragots à l'auberge. J'espérais que c'était de simples commérages mais il me regarda d'un air las, croisant les bras comme un adolescent ennuyé.
— Pourquoi ne pas m'avoir posé la question ? répondit-il d'un ton désabusé.
La patience me manqua. Je fis un pas vers lui.
— Moi, Caius Dravell, grondai-je, je vous ai sauvé la vie ! Vous devez me consulter ! Vous me devez cela !
Aurelian soupira, haussant les épaules.
— Eh bien, je le ferai à l'avenir. Ah, au fait, quand comptez-vous faire venir votre nièce ?
Mon sang ne fit qu'un tour.
— Oubliez ça.
— Comment ça, oubliez ? répliqua-t-il en fronçant les sourcils. Je suis empereur et vous m'aviez dit que sa beauté faisait chavirer les cœurs les plus endurcis. Je vais sans doute avoir besoin de plusieurs concubines.
— Je ne peux pas laisser Thalia tourmenter ma nièce.
Aurelian haussa un sourcil.
— Vous connaissez Thalia ? s'étonna-t-il.
— Et vous ? La connaissez-vous au moins, avant de vouloir l'épouser ? lui demanda Alexandre qui était resté silencieux jusque-là.
— Non. Pourquoi ? Comment est-elle ? Pourquoi demandez-vous cela ? demanda Aurelian.
— On dit qu'elle est d'une beauté renversante. Mais... elle a un caractère épouvantable.
— Épouvantable ? répétai-il lentement.
— Insupportable. Irrespectueuse, d'une jalousie maladive. Et son grand-père veille sur elle comme un vautour sur sa proie.
— Elle agit comme un poulain sauvage, ajouta Alexandre, un sourire en coin.
Aurelian se frotta le menton, songeur.
— Un caractère incontrôlable... répéta-t-il avec un air dubitatif.
Je soupirai bruyamment.
— Vous aurez le Grand Conseiller au conseil la journée, et Thalia dans vos appartements le soir. Je ne sais pas comment vous comptez gérer cela. Alors les concubines, n'y pensez même pas.
Aurelian se laissa tomber dans son lit, se recroquevillant.
— Je n'ai jamais de chance ! gémit-il.
Je le toisai avec froideur.
— Votre Majesté Impériale, secouez-vous ! Vous êtes l'Empereur du Grand Empire, pas un enfant capricieux !
Mais il ne m'écoutait plus.
— J'étais mieux quand j'étais à Valeria... avec Alden.
Il s'enfonça plus encore dans les coussins, boudant comme un gamin privé de dessert.
Je tournai les talons, excédé. Alexandre me suivit sans un mot. Une fois hors de la pièce, je lâchai un soupir agacé.
— Moi qui voulais lier ma famille au trône... soupirai-je. Mes efforts sont vains.
Alexandre posa une main ferme sur mon épaule.
— Nous venons de gagner sa confiance. Ne le pressez pas. Laissez-lui du temps.
Je serrai les poings.
— Je savais qu'il était faible... mais pas à ce point.
Avant que je ne puisse ajouter un mot, une silhouette surgit de l'ombre, surgissant des recoins du couloir.
Raymund Morinth.
Sa présence fit l'effet d'un glaive froid planté dans mon dos.
— Suivez-moi, bande de crétins.
Sa voix était un ordre, tranchant et sans appel.
Alexandre et moi nous raidîmes. Le Grand Conseiller nous avait trouvés.
Et il était temps de voir jusqu'où ses griffes s'enfonceraient.
**********
Une fois arrivés dans le vaste bureau du Grand Conseiller, la lourde porte se referma derrière nous dans un claquement sec, faisant résonner le silence oppressant de la pièce. Raymund Morinth se positionna derrière son imposant bureau de chêne noirci, ses doigts croisés sur des parchemins épars. Des cartes militaires et des sceaux impériaux jonchaient la table. Son regard perçant se planta dans le nôtre. Il ne prit pas la peine de nous inviter à parler. Sa voix, aussi glaciale que l'acier, fendit l'air :
— Pourquoi êtes-vous ici ? Les Mordrethi ont-ils tous été exterminés ?
Ses mots claquèrent comme un coup de fouet. Je me redressai légèrement, réprimant l'envie de froncer les sourcils.
— Nous sommes en train de remporter la bataille, répondis-je d'un ton maîtrisé. Nous avons jugé plus judicieux de rentrer. L'armée n'a plus besoin de nous là-bas.
Un silence lourd s'installa. Le regard du Conseiller se fit plus dur, plus acéré.
— C'est moi qui décide où vous êtes utile, lâcha-t-il d'une voix glaciale. Alors retournez-y.
Ses mots me giflèrent. Un ordre sec, sans appel.
Je marquai un temps d'arrêt. Une colère sourde monta en moi, mais je la contins. Le masque devait rester intact.
— À la frontière de l'Empire ? Maintenant ? demandai-je, ma voix empreinte d'une fausse perplexité. Est-ce parce que vous doutez de mes intentions, Grand Conseiller ?
Un sourire à peine perceptible effleura ses lèvres, mais ses yeux restaient durs comme la pierre.
— En matière de politique, répondit-il lentement, je n'accorde ma confiance à personne.
Il marqua une pause, laissant le poids de ses paroles s'écraser sur nous.
— Pour moi, la politique consiste à dissiper mes doutes.
Sa froideur me glaça le sang. Aucun mot, aucune justification ne le satisferait.
Je tombai à genoux d'un geste contrôlé, inclinant la tête. Alexandre m'imita aussitôt.
— Les cieux m'en sont témoins, soufflai-je avec gravité. Je ne vous ai jamais trahi, Grand Conseiller.
Alexandre, la voix plus posée, ajouta :
— Croyez-nous. Notre loyauté envers l'Empire est sans faille.
Un silence pesant suivit. Raymund Morinth nous observa longuement, comme s'il pesait chacune de nos respirations.
Puis, il se redressa lentement, posant ses paumes à plat sur la table. Le bois craqua sous la pression.
— Exterminez les Mordrethi.
Sa voix n'était qu'un murmure, mais elle résonna dans la pièce avec la force d'un ordre impérial.
— Et cette fois, reprit-il plus fort, vous ne reviendrez que lorsque ce sera fait.
Nous restâmes un instant à genoux, laissant le silence sceller l'ordre. Je serrai les poings discrètement.
— Il en sera fait selon votre volonté, Grand Conseiller.
Sans un mot de plus, Raymund détourna le regard, comme si nous n'étions déjà plus dignes d'intérêt.
Je me relevai lentement, mon cœur battant plus fort que je ne l'aurais voulu. Alexandre se redressa à son tour, les traits fermés.
Nous sortîmes du bureau sans demander notre reste.
Mais ce jeu était loin d'être terminé.
Pas encore.
Me tournant vers mon fils je lui dis :
— Fils, promets-moi une chose.
— Quel est-elle ?
— Promet le moi d'abord.
— Je vous le promet Père.
— Si un jour je deviens aussi cupide que Raymund, plantez-moi votre épée dans le ventre.
— Cela n'arrivera pas.
— Mais si ça arrive ? Tu le feras ?
— Je vous honorerai.
— Fort bien.
Tôt ou tard, je finirai par me débarrasser de lui.
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