Il est plutôt rare que la mère d'Éric me rende visite. Elle sait que la voir est plutôt pénible, en raison de son trou béant à la place du coeur.

La première fois que je l'ai vue, j'avais 9 ans, cette énorme plaie m'avait causer des cauchemars pendant près d'un mois.

En la voyant, je ne cachais pas mon étonnement.

Elle me sourit, rejetant ses longs cheveux blonds en arrière. Je m'adressais à elle :

-Asseyez-vous,si vous voulez.

Elle déplaça ma chaise de bureau face au lit et s'assit dessus. Elle souriait toujours. Puis, elle m'expliqua l'objet de sa visite, de sa belle voix claire et éthérée, comme un souffle, si différente de celle de son fils :

-J'espérais ne pas te déranger, mais Éric m'eut dit que tu ne faisais rien de particulier.

-En effet.

-Donc,je suis venue te parler. De tes parents.

Je la regardais, bouche bée. Je devais avoir mal compris. Elle a bien dit mes parents ?

Comme si elle avait lu mes pensées, elle continua :

-Oui,j'ai bien connue tes parents. Surtout ton père, il n'y avait qu'avec lui que j'arrivais à parler, ta mère n'étant pas comme toi. Mais son aura était verte, alors que celle de ton père avait le bleu caractéristique des maudits et le peu de mauve des médiums.

-Dites,que signifie l'aura verte ?

-Elle est synonyme de grand pouvoirs, principalement liés à la nature.

-C'est-à-dire.

-Je ne sais pas. Mais ton oncle a la même. J'ai pu le constater le peu de fois que je l'ai vu. Celle de ton cousin aussi est verte. Mais elle a aussi une forme particulière, comme celle de ta tante.

-Quelle est la couleur de celle de tante Lison ?

-Elle est grise comme celle des dragons. Si je suis bien sûre d'une chose,c'est que ta tante est...

-Arsenic,est-ce-que tout va bien ?

C'était tante Lison. De toute évidence, elle venait de m'entendre parler à voix haute. Et si elle avait entendu la mère d'Éric me répondre ?

J'espère que non. Sinon, je crois que j'aurais décrocher un aller simple pour un asile de fous. Tante Lison est très, très paranoïaque en ce qui concerne la santé mentale des personnes de son entourage. Je m'empressais de lui répondre que tout allait bien. Ce à quoi elle me répondit :

-Tu es sure ? Parce que je t'entends parler toute seule.

-Téléphone!

-Et tu t'es mise sur haut-parleur ?

Et merde !

-Oui,c'est plus pratique quand je fais mes devoirs.

-D'accord.

Je l'entendis repartir vers la salle de bain. Puis, je vis que la mère d'Éric avait disparut. Double merde.

Je décidais enfin de faire mes devoirs, ou du moins ce qui en restais.Histoire que tante Lison ne croit pas que je l'ai roulée.

Bon,rien à faire. Je ne savais plus quoi faire. Je n'avais pas envie de continuer les mémoires d'Hector Desloups. Plus de devoirs. Je n'avais pas envie de lire, ni de jouer ou de chercher des trucs sur mon ordinateur. Pas envie de télé tout de suite. Peut-être  que Gaël aurait envie de faire un basket ?

Je me suis mise à le chercher dans toute la maison, pour le trouver dans le salon, sur le canapé, les yeux levés vers le plafond. De toute évidence, il était dans un état d'ennui total. Je lui dis d'une voix monocorde :

-Salut.

-Salut.

Sa voix était tout aussi monocorde et triste que la mienne.

-Basket?

-Non.

-Sport?

-Non.

-Ennui mortel ?

-C'est déjà le cas. Et toi ?

-Pareil.

-Bon,tu sais quoi ? On va regarder un film.

-Ok. Quoi comme film ?

-Film d'horreur ?

-Boarf.Vu la dose de frissons que ça nous colle, ça vaut pas le coup.

Gaël et moi passions notre temps à rire devant les films d'horreur.

-Alors quoi ?

-Euh...............

-Ouais,bon, va pour un film d'horreur.

 Après tout, on allait pas en mourir. Mais, c'est vrai qu'il était sans doute sage d'essayer de rire un peu.