Des semaines ont passé. Je suis toujours coincée dans cette chambre à lire tous les bouquins qui passent sous ma main. J'ai commencé progressivement à ne plus manger, au point que je rame à avaler ne serait-ce qu'un bout de pain par repas.

J'étais devenue une sorte de légume : je ne parlais plus ou peu, seulement quand mon père daignait me rendre visite, environ une fois par jour. Et encore, il faut entendre la conversation. J'avais l'impression de ne plus ressentir d'émotions, d'être devenue une machine qui ne pouvait que accomplir les fonction vitales d'un être vivant en plus de la lecture, mon seul passe-temps, le seul moyen pour moi de me sentir mieux.

Et évidement, avec ma cheville pétée, c'est pas pratique. Je dois avouer que de voir mon pied pendre mollement au bout de ma jambe n'a rien de rassurant. Et ce n'est pas pratique quand je veux me doucher ou autre. Mais bon, ici, j'ai découvert un autre truc génial : si je ne peux pas venir là où je veux, pourquoi ce n'est pas l'endroit qui devrait aller à moi ?

J'avais découvert la téléportation, mais j'avais beau essayer, je n'arrivais pas à me téléporter chez Naëdja, Mamia, ou encore chez mon oncle et ma tante. La galère.

J'ai l'impression que mon père est de plus en plus stressé. Je crois qu'il passe son temps dehors, sans doutes à massacrer. Tous les soirs, il rend visite à ma mère. Et tous les soirs, il passe son temps à s'excuser, à essayer de lui faire comprendre à quel point il s'en veut et toutes sortes de choses dans le même style.

Je crois que je n'ai pas hérité du la rancune de ma mère. Ou elle joue la comédie. Mais d'après ce que j'entends, mon père se méfie.

Au bout d'environ 3 semaines, elle est venue me voir. Mon père nous avait enfermé dans ma chambre. Et c'était le retour du silence. Il ne m'avait pas manqué celui-là.

Et enfin, au bout d'environ une demie-heure, ma mère prit la parole :

-Ça va ?

-Pourquoi ça n'irait pas ? Je suis loin de mes amis, dans un endroit que je ne connais pas, avec une cheville en compote et je ne mange pratiquement plus. Mais à part ça, tout va bien !!!

-Si tu le dis.

-Ah  oui, aussi : je subis vos conversations tous les soirs !!! Je dois bien admettre que j'ai toujours rêvé d'une vie de famille normale, ou du moins normale pour des gens comme nous, mais s'il y a bien un truc que j'avais pas prévu, c'est que mon père ait pété les plombs à ce point !!!

-Calme-toi, s'il te plaît.

Je pleurais : les émotions contenues en moi depuis près d'un mois sortant enfin de leur prison de peau. J'avais envie de hurler, mais les seuls sons qui sortaient de ma bouche étaient les sanglots qui secouaient mon corps.

Ma mère se précipitait vers moi et me prit doucement dans ses bras. Je me laissais pleurer sur son épaule, pendant qu'elle me caressait les cheveux.

-Il... Ils me... manquent..

Avais-je réussi à dire, ma voix entrecoupée de ces saletés de sanglots.

-Qui "Il" ? Éric ?

-Un... un peu tout le monde mais... mais...mais... surtout lui...

Si j'avais été dans mon état normal, je me serais giflée tant j'étais niaise.

On est restée comme ça un long moment, puis on s'est mises à se parler un peu, mais dès que j'ouvrais la bouche trop longtemps, je pleurais, les souvenirs liés à tout ça réapparaissant.

Ça continua longtemps, jusqu'à ce que mon père entre dans la chambre, à un moment où j'étais encore en train de pleurer dans les bras de ma mère. Et je crois qu'elle aussi pleurait.

(J'en ai mis du temps avant de le sortir celui-là !!!! Désolée !! Mais bon, on voit le bon côté des choses : il est là, c'est le principal. Ah, et aussi, merci pour les 1,4 k de lectures !!!! J'vous adore !!!! À la prochaine, mes petits poisons !!!!! :) )