Le médecin m'a donné quelques médicaments puis nous a laissé seuls. Je n'arrivais toujours pas à le croire. Quelqu'un était en train de m'empoisonner. Quelqu'un que nous connaissions bien, ou pas d'ailleurs. Mais pourquoi ? Et pourquoi moi ? Parce que j'avais tué le Ministre de notre pays ? Certainement. Donc la taupe avait peur de moi, et voulait me nuire. Mais comment la trouver ? On ne pouvait pas interroger tout le monde. Et même si l'on interrogeait des personnes, rien ne nous dira qu'on arriverait à coincer cette taupe. Elle mentira, quoiqu'il arrive. Il faudrait la coincer, la piéger, comme une vulgaire taupe qui sème le trouble dans notre beau jardin.

Yoongi posa une main sur la mienne, ce qui me calma instinctivement.

- Je vérifierai chacun de tes repas. J'irai en cuisine et je surveillerai tout le monde, je te le promets.

- Merci, Yoongi. Dis, tu crois que la taupe sait que nous savons qu'elle existe ?

- Si c'est le Président en personne qui te l'a dit, alors oui. Il n'y a pas de doute.

- Alors elle sait qu'on la cherche, ai-je lâché. Elle doit être encore plus méfiante que d'habitude. Le Président n'a pas dû choisir n'importe qui. Cette personne doit être sournoise, attentive à chaque détails, et elle a sûrement un moyen de communication avec l'Elysée. Nous aussi, il faut qu'on soit attentif. A tout et à tout le monde.

L'ancien rappeur hocha la tête pour montrer son accord. Dans la salle, les gens se réveillaient peu à peu. Namjoon et Sangmin sortirent des toilettes, les joues rouges et les cheveux un peu ébouriffés. Cela me rappelait que je devais avouer la vérité à Yoongi. Je pris une grande inspiration. Cela n'allait pas être simple du tout.

- Yoongi, il faut que je t'avoue quelque chose...

Il me fixa de ses yeux sombres, curieux d'entendre ce que je m'apprêtais à dire.

- Tu sais, quand on a tous cru que tu étais mort. J'ai eu une grande dépression, je ne savais plus vraiment ce que je faisais. Et... Et j'ai couché avec Samuel. Parce que je me sentais trop seul et je n'arrivais pas à me faire à l'idée que tu ne m'embrasserais plus, que tu ne me toucherais plus... Donc je me suis imaginé toi à la place de lui. Et je me suis rendu compte dès le moment où nous étions en train de le faire que je faisais une grosse erreur. Si tu savais comme je regrette.

Son visage s'est assombri. Il a lâché ma main d'un geste sec. J'attendais une réponse, n'importe quoi. J'étais prêt à tout entendre. Cependant, il n'a rien dit du tout. Il s'est levé puis s'est dirigé vers la fosse. Je l'ai suivi du regard. Comment pouvait-il partir sans rien me dire ? Je venais de lui avouer que je l'avais trompé ! Peut-être qu'il ne se faisait pas à l'idée. Je me sentais cruel, et triste. Est-ce que je le faisais souffrir ? Je le suivais du regard. Il se dirigeait vers son père, qui venait de doucement sortir du sommeil. Les poings serrés, je voyais bien que Yoongi était énervé. Son père lui adressa quelques mots lorsqu'il s'arrêta devant lui. Il le saluait sûrement. Yoongi lui répondit, et sans que je ne m'y attende, il le frappa. Je sursautais sur le canapé. Il venait carrément de lui donner une gifle. Son père posa une main sur sa joue et le regardait avec stupeur. Je me levais et descendis le plus vite possible. Mais qu'est-ce qui lui prenait ? Est-ce que c'était parce que son père m'avait giflé le jour "de sa mort" ? Il se vengeait ? Lorsque je le vis se diriger vers Samuel, j'en avais la confirmation. Il le prit par le col et le plaqua au mur derrière lui.

- Yoongi !

Des gens se retournaient pour voir se qui se tramait. Samuel était terrorisé.

- Yoongi, laisse-le, ce n'est pas de sa faute !

Je tirais sur son bras pour qu'il le lâche, mais ça ne suffisait pas. L'ancien rappeur se pencha vers l'oreille du jeune, et lui glissa quelques mots.

- Tu touches encore à son cul, t'es un homme mort.

Il lui donna alors un gros coup de poing dans le ventre. Samuel se replia sur lui-même et tomba au sol. Yoongi n'y était pas allé de main morte. Il se tourna vers moi, toujours avec cette rage peinte sur le visage. Il m'effrayait, moi aussi.

- Toi, tu vas venir avec moi.

Il me pris par le bras et m'emmena avec lui je ne sais où. À première vue, nous nous dirigions vers les toilettes. Il me poussa de force dans la cabine et ferma la porte à clé. Me fixant avec toute sa colère, j'avais l'impression d'être une souris coincée par un chat.

- Je veux que tu me dises, dans les moindres détails, ce qui s'est passé.

- Je... Je ne me rappelles plus très bien, tu sais. Ça s'est passé tellement vite. Je n'ai même pas joui !

- Je t'ai demandé de m'expliquer !

Il me poussa contre le mur et plaqua tout son poids sur moi de sorte que je ne puisse plus bouger. Ma respiration et mon rythme cardiaque s'accélérèrent. Yoongi me faisait vraiment peur.

- Je... Je l'ai embrassé.

- Comment ?

- Il était contre le mur et il ne bougeait pas.

À ces mots, nous changions de place. Yoongi me prit par les poignets et me plaqua sur lui. Il posa ses lèvres sur les miennes, mais le baiser n'avait pas de goût. Il voulait simplement reproduit la scène. En se détachant, je fixais mes mains. Et je réalisais que je tremblais.

- Ensuite ?

- Il m'a avoué qu'il était vierge.

Ce détail ne passa pas inaperçu. Cela semblait le mettre encore plus en colère. J'aurais pu oublier cet élément de l'histoire.

- Après.

- Je... me suis mis au lavabo.

Young m'y poussa avec force, si bien que je cognais mon front contre le robinet. Je ne pus retenir un cri de douleur. J'allais tomber à la renverse, mais Yoongi prit une nouvelle fois mes poignets et posa mes mains sur le bord du lavabo. Il devina très vite la suite.

- Ensuite, il a fait ça pas vrai ?

Il a baissé mon pantalon ainsi que mon boxer. Encore un peu sonné, ma vision se brouilla légèrement quand je vis son reflet dans le miroir.

- Yoongi...

Ma plainte ne l'arrêta pas pour autant. J'entendis sa braguette s'ouvrir. Un liquide chaud coula sur mon front. Je saignais.

- Yoongi, tu ne sais plus ce que tu fais. S'il te plaît...

Il ne m'écoutait toujours pas. Les larmes coulaient sur mes joues. Borné sur son idée, j'ai senti le bout de son membre sur mon postérieur. Une pulsion m'a fait levé d'un bond. Mon mouvement l'a fait reculer. J'ai remis mon pantalon en lui jetant un bref coup d'oeil. Il ouvrait grand les yeux, comme s'il se réveillait enfin. J'ouvris la porte et sortis de la petite pièce. Il fallait que je m'éloigne le plus possible de lui. Pleurant toujours, je ne voyais pas du tout où j'allais. J'aurais dû retourner vers les ARMYs, mais mes pas m'entrainèrent ailleurs. Je me retrouvais dans un couloir sombre. Au bout de celui-ci, je me laissais glisser le long du mur, puis colla mes genoux à mon torse. Je n'arrivais pas à me calmer. Je tremblais toujours, et j'avais froid. Des frissons me parcouraient le corps. J'entendis alors des pas. Quand je relevais la tête, Yoongi était à ma hauteur. Il s'agenouilla, plus inquiet que jamais.

- Vas-t'en ! Vas-t'en ! lui criais-je dessus en faisant un geste de répulsion avec mon bras.

- Je suis vraiment désolé, Jimin. Je sais vraiment pas ce qui m'a pris...

En le voyant dans cet état, pendant une seconde, j'ai cru qu'il allait pleurer. En tout cas, il avait les larmes aux yeux. Mais ça ne pardonnait en rien sa faute. Il allait poser une main sur mon épaule, mais je le repoussais.

- Ne me touche pas ! Tu... Tu allais me...

Je n'osais même pas dire le mot tellement cela me semblait invraisemblable. J'avais la nausée. Il voulait me punir pour ce que j'avais fait. Me punir en commettant une faut grave, un crime. Mon coeur s'affola. Je me tournais vers lui, écarquillant les yeux.

- Yoongi... Est-ce que c'est toi, la taupe ?

Il a haussé les sourcils, surprit par cette question.

- N-Non ! Bien sûr que non ! Pourquoi est-ce que tu penses ça ?

- Tu m'as fait du mal, et... et cela ne semblait pas te déranger.

Je me collais un peu plus contre le mur. Je voulais m'enfuir, mais il me gênait le passage. Un visage familier est alors apparu derrière lui.

- Je crois qu'il vaudrait mieux que tu le laisses, Yoongi.

Tae était impassible. Il voyait parfaitement que quelque chose ne s'était pas passé comme prévu, et il voulait absolument me protéger. Le noiraud finit par se lever, sans quitter son air inquiet. Il me quitta, et se retourna une dernière fois pour me regarder. Taehyung s'agenouilla près de moi pour constater la blessure sur mon front.

- On va aller soigner ça. Allez viens.

Il se releva et me proposa sa main. Je l'acceptais, me relevant à mon tour, difficilement. Mes jambes tremblaient toujours, m'empêchant de marcher correctement. Une fois dans la fosse, je m'assis sur le lit de Taehyung. Yoongi n'était pas dans le secteur.

- Calme-toi..., me dit-il doucement en voyant que je tremblais, et en posant ses mains sur mes épaules. Tu veux me raconter ce qu'il t'a fait ?

Son visage était sérieux. Il prit un coton et une bouteille d'eau, puis me tapota le front.

- J'ai tout raconté à Yoongi. Il a été gifler son propre père, puis il a frappé Samuel dans le ventre. Ensuite, il m'a emmené dans les toilettes pour me punir, et il a failli me...

Je n'arrivais toujours pas à laisser franchir ce mot de ma bouche. Une nouvelle larme coula. Taehyung comprit, car il n'y avait pas besoin de mots pour comprendre.

- Tu avais tort, Tae. Tu pensais qu'il allait me pardonner, mais c'était tout le contraire. C'était cent fois pire. Je ne l'ai jamais vu comme ça, il était si violent. Je ne voyais que de la haine et de la colère dans ses yeux et sur son visage. On aurait dit qu'il était... possédé...

- Penses-tu qu'il est la taupe ?

J'haussais les épaules.

- Je ne sais pas du tout. Peut-être. Mais j'espère vraiment que non.

Nous nous sommes tus. Après m'avoir nettoyé le front, Taehyung grimaça, m'annonçant une mauvaise nouvelle.

- Je crois que ce n'est pas qu'une simple égratignure. Tu es ouvert, il faut te recoudre et tes faire des points.

Il se leva pour aller chercher le matériel nécessaire, mais je le retins par le bras.

- Non ! S'il-te-plait, ne me laisse pas seul...

Voyant que j'étais aussi effrayé qu'un gosse qui avait vu un clown, il se rassit, et demanda à Jungkook d'y aller à sa place. Il resta donc avec moi et me réconforta. Si j'étais ouvert, cela signifiait que j'allais avoir une cicatrice. Super. Cette blessure me rappèlerait à jamais cet épisode terrifiant de ma vie. Je ne comprenais toujours pas pourquoi Yonngi avait agi ainsi. Le jour où je me suis étranglé avec son collier, il s'était senti si coupable. Là, il s'est montré inquiet, mais je n'avais pas vraiment l'impression qu'il avait de regrets. J'espérais me tromper, mais je n'allais pas lui poser la question pour connaitre la réponse. Tout ce que je voulais, c'était l'éloigner de moi et de ma famille.

~

Le soir tomba vite. Mon front me lançait terriblement, et me causait quelques migraines. Je n'ai pas vu Yoongi de la journée, sauf ce soir, où il est monté dans les gradins pour se coucher. Il me fixait intensément. Même de loin, je voyais son visage rouge. Il avait pleuré. Je fuyais son regard et m'allongea sur le lit qu'on m'avait prêté. Je n'avais pas beaucoup mangé aujourd'hui. Et il valait mieux, si c'est grâce à la nourriture qu'on m'empoisonnait. Mes mains passèrent sous mon oreiller. Les gens dormaient paisiblement, et des lumières çà et là éclairaient au minimum l'immense pièce. Quelque chose de dur se présenta sous mes mains. Je me redressais, et retirais mon oreiller pour découvrir l'objet. C'était un cahier. Mais pas n'importe quel cahier. Cela me rappelait la lettre de Yoongi. Le cahier de Jungkook. Je me précipitais pour l'ouvrir. Il y avait là des tas de dessins à l'encre noir, de toutes les formes, de toutes les tailles. C'était des tatouages. Quelques pages plus loin, je découvris des textes, écrits de la main de Yoongi. Je reconnaissais son écriture rapide. Ces textes étaient des chansons, ou des poèmes. La plupart portait sur ce que nous étions en train de vivre. D'autres parlaient de son envie de revenir sur scène, de retrouver son public. Puis, vers le milieu du cahier, l'écriture changea. Les textes n'étaient plus des chansons ou des poèmes. C'étaient des informations confidentielles. Des informations confidentielles sur notre groupe. Comme par exemple, l'heure où nous étions parti de Corée, et l'heure où nous sommes arrivés sur le territoire français. Le nombre de personne dans le groupe coréen, et le nombre de personnes dans le groupe français. Il y avait là les noms de tout le monde, sans oubli. Et le mien était entouré deux fois en rouge. Mon coeur s'accéléra. C'était le cahier de la taupe.

Je me penchais vers mon voisin.

- Tae, à qui appartient ce lit ?!

Le garçon bailla sans ouvrir les yeux.

- C'est un lit qu'on a trouvé dans un placard, je crois...

Sans que je ne puisse lui répondre, il se rendormi. Ce lit n'appartenait à personne. Alors, qu'est-ce que ce cahier faisait là ? Est-ce qu'on l'avait mis volontairement pour que je le lise ? Ou est-ce que la taupe l'avait oublié ? En tout cas, Jungkook semblait être le prochain suspect. M'endormir avec cette idée en tête m'était pratiquement impossible...

~

Très tôt le lendemain, j'entendis du mouvement à l'extérieur. Comme quelque chose qui volait. Le bruit s'intensifia, et la chose se rapprocha. Bientôt, toute la salle fut réveillée par le vacarme. Je me précipitais vers l'entrée pour voir ce qui se tramait. En ouvrant la porte, je vis des camions remplis de soldats, et un hélicoptère était en train de se poser devant la salle. On nous avait trouvé. C'était la fin, je le sentais. Une petite cinquantaine de personnes sortit comme moi, les autres étaient restés à l'intérieur par sécurité. Lorsque l'hélicoptère aux couleurs de l'Elysée se posa sur le sol, le vent qu'il avait provoqué se calma. Le Président en personne descendit du véhicule, suivit de quelques personnes qui semblaient importantes. Je m'avançais vers lui.

- Qu'est-ce que vous voulez ?

- Si vous pensez que nous allons vous tuer, vous vous tromper. Mais si vous ne procédez pas correctement, nous serons obligés d'intervenir.

Cela ne m'apaisa qu'à moitié. Qu'allaient-ils nous faire ? Nous mettre en prison ? C'était l'hypothèse la plus probable. Le Président s'avança vers notre petit groupe. Il semblait chercher quelqu'un des yeux. La taupe ? Certainement.

- Nous voulons emmener avec nous votre soeur. Jihyuk.

Mon coeur se serra.

- Vous ne l'aurez jamais.

- Allons, il faut coopérer, Jimin. Nous ne lui ferons aucun mal.

- Il faudra me tuer pour que vous l'ayez.

- Cela ne sera pas nécessaire.

Le Président claqua des doigts, et deux hommes entrèrent dans la salle pour aller la chercher. Je voulus les en empêcher, mais deux hommes me retenaient. Je me débattais, cependant, cela ne servait à rien. Jihyuk sortit de la salle en tenant un des hommes par la main. Les larmes aux yeux, je la regardais passer devant moi, alors qu'elle me fixait aussi de ses petits yeux.

- Jiminou...

Mon coeur se brisa, et je ne pus retenir mes larmes. Elle voulut me faire un câlin, mais l'homme l'en empêcha et la tira de force. Je lui crachais dans le dos. Arrivée près de l'hélicoptère, le Président fit un petit sourire.

- Bien. Je pense que nous nous reverrons très vite. D'ici là, portez-vous bien.

Il entra dans l'hélicoptère à son tour, et l'engin tourna son hélice. Le véhicule quitta la terre ferme et s'envola vers l'Elysée. Les deux hommes me lâchèrent et retournèrent vers les camions, qui quittèrent la place à leur tour. J'avais tellement crié que je ne sentais plus ma gorge. Je me sentis tomber au sol. Putain, pourquoi elle ? Elle n'avait rien à voir là-dedans. Rien. Et c'est elle qui allait en payer les frais. Je n'ai pas su la protéger. Tout était de ma faute.

Des mains se posèrent sur mes épaules. Du coin de l'oeil, je reconnus Yoongi. Je me relevais vivement, dégageant ses mains.

- Tout est à cause de toi, Yoongi ! Tout !

Mes yeux se dirigèrent vers Jungkook, à côté de Taehyung, qui pleurait aussi.

- A moins que ce ne soit toi ?!

Il fronça les sourcils, le visage dénué d'émotion. Je fis de nouveau face à Yoongi. Il semblait triste. Mais ceci n'était qu'une couverture, j'en étais persuadé.

- Je te jure Yoongi. Si je découvre que tu es la taupe, je te tuerai de mes propres mains.