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4. Dîner froid

De tout le manoir Crawford, la salle à manger principale devait être la pièce la plus imposante. De plafond haut, en son centre trônait une longue table qui, à vue d'œil, semblait capable d'accueillir une vingtaine de convives. Par dessus le meuble, une nappe pourpre brodée de motifs dorés paraissait donner des allures royales à la grande salle. De somptueuses tapisseries ornaient les murs, et une quantité impressionnante de bibelots prenaient la poussière sur des commodes placées aux alentours.

Un silence mortuaire régnait, aussi lourd que du plomb, tandis que mari et femme se dévisageaient, assis l'un en face de l'autre au milieu de l'immense table. Alston et sa barbe flamboyante, ainsi que ses sourcils froncés, donnaient constamment l'impression que cet homme était fâché, empli d'une colère muette qu'il refoulait sans y parvenir totalement. Doris, quant à elle, resplendissait de son habituelle désinvolture typique des nobles Dames de la cour d'Arcadia. Voilà quelques semaines qu'elle ne courait plus les réceptions aussi régulièrement qu'avant, mais elle n'en perdait pas de sa superbe pour autant.

"Ce dîner n'est pas mauvais, finit par lâcher l'homme politique, après avoir mâchonné un morceau de viande avec circonspection. Je ne sais pas ce qu'est ce plat, mais c'est plutôt bon.

— Tu remercieras le talent de notre nouvelle cuisinière, qui nous vient des provinces de l'ouest d'Arcadia."

Un sourcil roux se haussa sur le visage bronzé de l'homme ; son épouse ne pensait pas qu'il aurait une quelconque réaction, puisqu'il avait toujours cette agaçante habitude de rester plongé dans un mutisme pesant. Visiblement, ce soir-là, il avait envie de discuter. Et ce fait ne plaisait aucunement à la blonde, bien au contraire.

"Nous avons eu des changements dans notre personnel ? Je n'en ai pas été averti, observa-t-il simplement, parfaitement calme.

— Oh, ne me fais pas rire, Alston ! (Elle avait dit ça avec beaucoup de dédain dans sa voix claire et mélodieuse.) Tu passes dix fois plus de temps hors de ce manoir qu'à l'intérieur, qu'as-tu à faire des domestiques qui y travaillent ? Si je me suis permis de renvoyer l'ancien cuisinier - je crois qu'il s'appelait Rámon mais je n'en suis même plus certaine -, c'est parce qu'il tenait des propos inacceptables à l'égard des filles de cuisine qui l'assistaient."

Doris frisonna lorsqu'un ricanement rauque et dépourvu d'émotion répondit à sa remarque. Ce son grinçant et désagréable lui hérissait le poil à chaque fois qu'elle l'entendait ; elle avait presque l'impression que ses cheveux clairs pouvaient se dresser sur sa tête à tout moment, et que son crâne pouvait explo-

Elle prit une grande inspiration, puis resta résolument penchée sur son assiette, sa fourchette maintenue à quinze centimètres de sa bouche. Elle n'avait plus faim du tout, malgré son appétit habituellement important. La Dame allait se lever, mais d'un raclement de gorge agacé, son mari lui signifia qu'il n'en avait certainement pas fini avec elle.

"Et toi, dis-moi donc... Pourquoi sembles-tu accorder autant d'attention au sort des domestiques ? Leurs propos entre eux importent peu, tant qu'ils font correctement leur travail.

— Ta philosophie n'est pas la mienne, Alston Crawford, cracha-t-elle. Contrairement à toi, je n'ai pas de travail qui rythme mes journées, et je n'ai souvent rien de mieux à faire que de côtoyer notre personnel - mon personnel, puisque tout ce qui concerne les domestiques est de mon ressort, en tant que maîtresse de maison. Ces gens travaillent pour nous, ce ne sont pas de vulgaires objets ou machines."

Cette fois, ce ne fut pas un ricanement grinçant qui répondit, mais bel et bien un rire tonitruant, qui pourrait presque secouer les murs et les meubles de la pièce tant il était fort. Les muscles de Doris se raidirent instantanément, et elle eut l'impression que des sueurs froides se déversaient dans son dos, sans pitié. Elle afficha une moue nonchalante, afin de dissimuler son trouble et se redonner une contenance. Alston continuait à rire, de ce rire sans joie, sans humanité. Lorsqu'enfin il daigna s'arrêter, ses prunelles vertes se fixèrent sur le visage blême de son épouse.

"Tu vas m'écouter une bonne fois pour toutes, Doris. Je suis ton époux, et...

— Et quoi ? Ça veut dire que je dois me soumettre à ta volonté et me laisser engrosser juste pour assurer ta descendance ? (Elle se tut un instant, n'ayant pas l'habitude de se montrer vulgaire.) Je ne suis pas un objet, moi non plus, Alston. Je suis un être humain, j'ai des sentiments et des droits."

Le visage basané de l'homme parut se crisper un moment, mais sa physionomie, constamment de marbre, ne permettait pas réellement de s'en rendre compte. Il passa une main nerveuse dans ses cheveux flamboyants, trifouillant rageusement ses mèches rousses en désordre. Il avait envie de cogner sur quelque chose, cela se voyait ; Doris espérait en silence qu'il ne s'en prendrait à personne. Il n'avait qu'à ruiner le mobilier, elle s'en moquait bien !

S'installa alors un silence répugnant, si intense qu'elle le ressentait dans ses moindres vaisseaux sanguins, s'infiltrant dans tous les pores de sa peau de porcelaine. Son regard presque ambré avait perdu son habituelle étincelle qui le rendait si vivant ; l'homme à qui elle était mariée depuis des années la mortifiait. Elle s'en aperçut lorsqu'elle sentit ses mains trembler, sa fourchette peser de plus en plus lourd dans sa main, pour finalement tomber dans son assiette. Un fracas métallique, puis plus rien.

Puis le silence se brisa de nouveau lorsque le grand rouquin recommença à couper nonchalamment sa viande. Le son du couteau contre la porcelaine de l'assiette rendait folle la blonde, qui avait envie de hurler toute sa douleur et sa haine, de dire ses vérités à ce type abject qui lui pourrissait la vie dès qu'il rentrait au manoir. Contrairement à beaucoup de nobles Dames, Doris ne tirait pas de satisfaction ni de fierté à être mariée avec un parlementaire ; et ancien colonel dans l'armée, qui plus est, cela accroissait son prestige. Non, elle n'en tirait que du mécontentement et de la lassitude.

Elle ne le trouvait même pas attirant, avec ses cheveux hirsutes et son visage couvert de barbe, qui lui donnait des airs sauvages et indomptables. Elle aimait davantage les hommes soignés et soucieux de leurs manières ; un rustre comme lui n'avait que faire des politesses et de la bienséance, évidemment. Mais elle s'y était attendue avant de l'épouser ; les mariages arrangés arrangeaient rarement les mariés, comme le disait un dicton populaire de la ville basse. La voix grave d'Alston se fit de nouveau entendre, au grand désarroi de sa femme.

"Tu n'en as pas assez de faire la prude, enfin ? On était censés consommer ce mariage il y a des années ! Huit ans, et ça n'est pas encore fait ! Je n'ai pas ta patience, et ton organisme ne l'aura pas non plus. Passée la quarantaine, tu ne pourras plus enfanter.

— Eh bien j'ai hâte d'y être, rétorqua-t-elle froidement, ayant retrouvé un peu de son assurance. Je n'ai certainement pas l'intention de me laisser faire par un homme plus vieux que moi de dix ans, et aussi peu soigneux qui plus est. (Un sourire de défi se peignit sur son visage angélique.) J'ai un minimum de goût.

— Crois-tu que ton petit jeu suffira ? Il faudra bien que tu en passes par là si tu ne veux pas être déshonorée à la cour ! grommela-t-il, furieux comme en témoignait la soudaine rougeur de son visage.

— Je me fiche bien de l'honneur. Ça ne sert à rien de s'en encombrer."

Le roux allait répliquer, mais elle ne lui en laissa pas le temps. Elle se leva de table, appelant au passage son valet, qui accourut rapidement, son habituel air calme l'apaisant un peu. Alston ne se laisserait certainement pas faire ; il la suivit jusqu'à ses appartements, d'un pas rapide et lourd. Elle ne chercha pas à l'éviter, et se laissa tomber dans son moelleux canapé rouge, un bras placé derrière le dossier avec désinvolture. Ses mèches d'un blond platine luisaient à la lueur du lustre somptueux accroché au plafond.

L'homme gardait les dents serrées et la mâchoire crispée, se retenant de laisser exploser sa colère.

"Howard", souffla calmement Doris.

Le domestique leva les yeux dans sa direction. Son visage ne laissait paraître aucune émotion, comme à son habitude ; sa pâleur était, en soirée, encore plus flagrante, et ses cheveux bruns clairs se teintaient de légers reflers dorés.

"Que puis-je pour vous, Dame Crawford ?"

Il avait prononcé le nom avait un certain dédain dans la voix, non sans un regard éloquent en direction du rouquin. Celui-ci détourna les yeux, amer.

"Préparez-nous un thé, voulez-vous. La conversation risque de durer."

Howard rajusta sa cravate bleue et acquiesça ; ça promettait d'être divertissant.

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