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2- D'un témoin émotif et d'enfants différents


Seine-Saint-Denis, Le Blanc Mesnil,

Résidence Notre Dame, appartement de Leïla Pasteur.

Samedi 30 janvier 2019


— Le docteur Gruber est mort ? Oh mon Dieu !

La mère du jeune Noah Pasteur chancelle sur le pas de sa porte. Tandis que le lieutenant Hachem lui offre le secours instinctif de son bras, Jannek enregistre par réflexe le défilé d'émotions sur le visage constellé d'éphélides de la frêle trentenaire. Un bref éclair d'inquiétude a troublé ses iris noisette quand ils se sont présentés. Presque aussitôt, il s'est mué en surprise horrifiée à l'annonce du décès du psychiatre. Une surprise teintée d'incompréhension.

— Mais quand est-ce arrivé ? reprend-elle. Je l'ai vu hier encore, il allait parfaitement bien !

— Sa secrétaire a découvert son corps ce matin dans la cour du CMP, la renseigne Nadjet.

— Oh, c'est Geneviève qui l'a trouvé ? La pauvre, elle doit être bouleversée ! Que s'est-il passé ? Un accident ? Une crise cardiaque ?

— Ni un accident, ni une mort naturelle, intervient le commandant d'un ton sec.

— Que... Vous voulez dire qu'on l'a... tué ? Ce n'est pas possible !

Leïla Pasteur blêmit, vacille de nouveau et, l'espace d'un instant, semble à deux doigts de s'évanouir. Nadjet anticipe le malaise. Elle déploie sa carrure généreuse et d'un geste bienveillant mais ferme, resserre sur son bras son étreinte rassurante.

— Vous devriez vous asseoir, suggère-t-elle.

La jeune femme hoche la tête ; avec un sourire reconnaissant, elle se laisse guider vers le canapé écru et s'effondre parmi les coussins colorés, la main serrée sur sa poitrine comme si elle manquait d'air.

— Je... Excusez-moi, balbutie-t-elle, c'est... tellement brutal.

Sur le seuil de la pièce à vivre, Jannek demeure en retrait, impassible. D'un coup d'œil, il jauge l'ambiance des lieux : un appartement modeste, égayé d'opulentes plantes vertes, des meubles nordiques de série aux tons naturels, une porte-fenêtre garnie de rideaux légers qui ouvre sur un petit balcon couvert de neige. Tout est propre, impeccablement rangé, joli. À l'image de la propriétaire, lumineux et fragile. Un cocon d'harmonie au cœur de la ville moche, que leur intrusion et l'évocation de la violence font tout à coup vaciller. Il observe les réactions de la femme, son émotion palpable, son regard de biche effarouchée, son inquiétude. Il songe qu'il devrait la rassurer.

Il préfère laisser son adjointe gérer en mode flic bienveillant, elle est beaucoup plus à l'aise que lui dans cet exercice, il le sait très bien.

— Nous avons besoin de votre témoignage, explique justement Nadjet d'un ton apaisant, la secrétaire du docteur Gruber nous a indiqué que vous aviez rendez-vous hier en fin d'après-midi. Vous et votre fils faites donc partie des dernières personnes à l'avoir vu en vie.

— Misère, c'est vrai ! Vous ne pensez pas que...

Leïla Pasteur porte sa main à sa bouche, écarquille des yeux de nouveau angoissés. Jannek ne perd pas une miette de ses expressions, tâchant d'en déduire le cheminement de ses pensées, de deviner la raison de son effroi. Est-ce la crainte d'avoir pu croiser l'assassin, ou celle d'être soupçonnée ? Le lieutenant Hachem doit se poser les mêmes questions et lui adresse un regard perplexe. D'un signe discret il lui enjoint de continuer l'interrogatoire.

— Nous voulons juste savoir si vous avez remarqué quelque chose d'anormal, s'empresse-t-elle de préciser.

— Anormal ? Non, tout était comme d'habitude.

— En dehors du docteur, y avait-il d'autres personnes au CMP ?

— Geneviève était encore là quand nous sommes arrivés, mais elle est partie presque aussitôt. Elle devait aller chez le dentiste, je crois.

— Pas d'autres patients ou des membres du personnel ?

— Non, l'équipe s'est beaucoup réduite, vous savez. La plupart des intervenants doivent se partager entre l'hôpital et plusieurs autres CMP. Le vendredi après-midi, il n'y a que le docteur Gruber qui consulte. C'est très calme en fin de journée, c'est pour ça que j'ai choisi ce créneau. Noah supporte mal l'agitation, c'est mieux pour lui. En arrivant nous avons juste croisé Clémence et son papa qui repartaient. Ils avaient rendez-vous avant nous.

La bouche du policier se tord d'une grimace imperceptible au souvenir de la salle d'attente bondée où il patientait lorsqu'il accompagnait Nikola à ses séances. L'activité du CMP était bien plus importante à l'époque. Il doute néanmoins que les besoins aient diminué, ce sont plutôt les professionnels qui manquent. Quoi qu'il en soit, les propos de Leïla Pasteur corroborent la déposition de la secrétaire.

— Et le docteur Gruber ? poursuit Nadjet. Vous l'avez trouvé dans son état normal ? Vous a-t-il semblé préoccupé ou inquiet ?

— Pas le moins du monde ! Il était exactement comme d'habitude, charmant et disponible. Peut-être un peu fatigué, mais il travaillait beaucoup. Oh mon Dieu, je m'en veux tellement ! Si j'avais su ce qui l'attendait...

— Ne culpabilisez pas, tempère le lieutenant, ce genre de drame est rarement prévisible. À quelle heure avez-vous quitté le CMP ?

— Heu... Vers dix-huit heures trente, je pense. En général, la consultation dure environ une heure, mais hier Noah était nerveux et peu attentif. Le docteur Gruber a préféré écourter la séance.

— Bien. Et en repartant vous n'avez rien remarqué de particulier dans la cour ou aux alentours du CMP ? Quelqu'un dont le comportement vous aurait paru suspect ?

— Je ne crois pas, non. Il faisait très mauvais et il n'y avait quasiment personne dans la rue. Mais je n'ai pas vraiment fait attention, j'avais hâte de rentrer.

— Pourquoi ? interroge soudain Jannek. Vous étiez pressée ? Qu'avez-vous fait ensuite ?

La jeune femme sursaute et tourne vers lui un visage apeuré, comme si elle redécouvrait tout à coup sa présence que les questions de Nadjet lui avaient fait oublier.

— Nous... nous sommes rentrés directement à la maison, bafouille-t-elle, il faisait froid et j'avais peur que Noah s'enrhume. Et puis, il était déjà tard et il avait encore ses devoirs à faire.

— Des devoirs... Votre fils va donc à l'école ?

Cette fois, elle redresse le menton et le toise d'un regard où brille une pointe de colère.

— Évidemment ! réplique-t-elle. Noah est très intelligent ! Il est scolarisé à l'Institut Andromède et Monsieur Anagbi, son maître, dit qu'il a beaucoup de potentiel.

Jannek se contente d'un bref hochement de tête, un peu ennuyé d'avoir provoqué cette réaction. Il réalise que la jeune femme a mal interprété sa question et qu'il a sans doute touché un point sensible. Comme beaucoup de parents d'enfants différents, Madame Pasteur tente probablement de se convaincre que son fils pourra mener la même vie que les autres. Et à ses yeux, la scolarité en est une preuve irréfutable. Sauf que cet Institut Andromède est un établissement spécialisé, bien loin d'une école ordinaire.

Lui aussi, autrefois, il a cru à ce mirage. Il a espéré que Nikola pourrait faire des études. Jusqu'à ce qu'il admette que les séquelles de ses traumatismes entraveraient à tout jamais ses capacités d'apprentissage. Il éprouve pour cette femme une soudaine bouffée de compassion qu'il s'empresse de réprimer. Ne pas se laisser distraire, ce n'est qu'un témoin. Il concède sobrement :

— Je n'en doute pas, l'IME* Andromède est un bon établissement.

— Oui, approuve Leïla Pasteur, passant de l'irritation à un sourire ravi, il a une excellente réputation ! J'étais tellement contente quand le docteur Gruber a réussi à y faire inscrire Noah !

— Ah, Gruber travaillait aussi là-bas ?

— Pas directement, mais il a... il avait une sorte de partenariat avec la directrice. Quand elle est arrivée, l'année dernière, elle l'a contacté pour lui proposer d'accueillir certains de ses patients en attente d'un lieu de scolarisation. Le docteur lui a tout de suite recommandé Noah et plusieurs autres enfants qu'il suivait.

Un partenariat ? Jannek hausse un sourcil intrigué, mais n'a pas le temps d'interroger Leïla Pasteur pour en approfondir la nature. Elle consulte sa montre et se lève brusquement.

— Avez-vous encore des questions ? s'enquiert-elle avec un regain d'inquiétude. Je dois justement aller chercher Noah à l'Institut et il va paniquer si je suis en retard.

Nadjet considère la jeune femme d'un regard perplexe.

— Les enfants ont des cours le week-end ? s'étonne-t-elle.

— Oh non ! Le samedi, l'IME propose seulement des activités thérapeutiques ou d'éveil. Noah participe au groupe de relaxation. Ces séances lui font beaucoup de bien et...

— Nous ne vous retiendrons pas plus longtemps, coupe Jannek, nous avons terminé pour le moment. On vous recontactera si nécessaire. De votre côté, si quelque chose vous revenait à propos de Gruber, n'hésitez pas à appeler le commissariat.

— Je n'y manquerai pas, assure-t-elle en les raccompagnant à la porte, visiblement soulagée.

Tandis qu'ils dévalent les escaliers et regagnent leur véhicule, le lieutenant Hachem affiche une mine morose.

— Eh bien, bougonne-t-elle, on n'est pas beaucoup plus avancé ! Le monde de cette femme a l'air de tourner exclusivement autour de son fils. Je crois qu'elle aurait pu croiser le meurtrier armé d'un couteau sans même le remarquer !

— Ou bien elle serait tombée dans les pommes et on le saurait déjà ! sourit Jannek. Mais elle nous a quand même appris quelque chose : Gruber avait un accord avec la directrice de l'IME pour y faire admettre ses patients.

— Et alors ?

— Alors, ce n'est pas la procédure normale. Pour intégrer un établissement spécialisé c'est le parcours du combattant ! Les structures d'accueil sont rares et la demande bien supérieure à l'offre. La plupart des enfants sont sur liste d'attente, ça peut prendre des années avant de trouver une place.

— Oh ! Gruber se serait arrangé pour faire passer ses patients avant les autres ?

— Possible... Et si c'est le cas, ça a pu générer des ressentiments.

— Vous pensez qu'on l'aurait tué pour ça ? se récrie la jeune femme, dubitative. Et d'une manière aussi brutale ! Juste parce qu'il aurait obtenu des passe-droits pour les gamins dont il s'occupait ?

— Je n'en sais rien. C'est une hypothèse qu'il faudra malgré tout vérifier en interrogeant la directrice de l'IME Andromède. Quant à cet acharnement... Certaines rancunes génèrent parfois une violence disproportionnée. Mais ce n'est peut-être qu'un leurre destiné à nous lancer sur une fausse piste. Et honnêtement, je préfèrerais ça à l'autre option. Celle d'avoir un tueur psychopathe dans le quartier !

Nadjet opine sobrement du chef, il n'a pas besoin de lui faire un dessin. Pas besoin de lui rappeler que, dans le coin, les morts violentes résultent plutôt d'un passage à tabac, d'un règlement de compte à la Kalach ou d'un coup de couteau dans le bide à l'occasion d'une bagarre de rue. Rarement, elles s'accompagnent de ce genre de mise en scène macabre.


*IME : Institut Médico-Educatif

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