Chapitre 36 : Incompréhension
Matei entendit une grande inspiration à ses côtés.
Pierrick était venu le chercher à la gare, et ils étaient sur le point de rentrer.
Pierrick poussa la porte de son appartement et lança :
-Je suis de retour !
-Ça tombe bien, fit une voix féminine. Tu peux venir prendre les verres en haut de l'armoire ?
-J'arrive ! fit le jeune homme en enlevant aussi vite que possible ses chaussures pendant que Matei faisait de même, mais moins pressé.
-Pierrick, est-ce que tu peux...fit une autre voix venant de la droite, la direction des chambres à coucher.
Mélanie apparut dans leur champ de vision. Elle s'interrompit quand elle vit Matei, derrière le large dos de son cousin.
Son regard passa la joie suprême à une fusillade gratuite puis elle tourna les talons sans finir sa question. Pierrick pencha sa tête sur le côté, ne comprenant pas ce revirement soudain, puis il se précipita dans la cuisine pour aider la personne qui l'avait appelé tout à l'heure. Il revint vite chercher Matei, resté dans l'entrée sans bouger, trop timide pour faire un seul pas seul dans l'appartement lumineux.
-Viens.
Dans la cuisine exiguë, Matei vit, assis à table, deux personnes, un couple, sans doute les parents de Pierrick.
La femme portait une chemise blanche serrée autour de son cou et des bijoux brillants qui avaient l'air de coûter un certain prix. Elle avait de longs cheveux foncés et portait une jupe crayon, serrée autour de ses jambes croisées sous la table.
L'homme, quant à lui, avait de larges épaules dont Pierrick avait sans l'ombre d'un doute hérité s'il était bien son père, des yeux noirs et une petite barbiche noire sur le menton. Il avait un air malicieux, plus convivial que la femme, plus austère malgré son aura de maternité. Il avait un visage rond, le même que Pierrick.
-Papa, Maman...commença le noiraud, confirmant à Matei ses soupçons sur leur parenté. Je vous présente Matei.
-Ne sois pas si formel, enfin ! lui dit sa mère avec un sourcil froncé. Asseyez-vous tous les deux !
-Il est mon petit ami, annonça calmement Pierrick en ignorant sa remarque.
Un silence se fit dans la pièce, augmentant encore plus le malaise à cause de son étroitesse. Personne ne prit la parole jusqu'à ce que Pierrick acheva ses révélations :
-Oui, je suis homosexuel.
Autre silence, probablement de malaise...
Puis, la mère se leva et déclara avec un ton digne qui sonnait un peu faux, d'après Matei :
-Je...Je vois...Je vais aller fumer une cigarette, si vous voulez bien m'excuser. Je reviens de suite.
Elle sortit de la petite cuisine, suivie du regard par les trois hommes, un assis et deux dencore debout. Le père de Pierrick, Gilles, soupira et regarda son fils :
-Depuis combien de temps ?
-De quoi ? lâcha Pierrick avec son même ton calme.
-Vous...Sortez ensemble.
Pierrick fronça un sourcil et pris alors dans une de ses fortes mains l'épaule de Matei, qu'il ramena vers lui.
-Un peu plus de six mois.
-Je comprends mieux tes absences et tes cachotteries, soupira le père avec un regard pensif.
Un autre silence de malaise passa. Matei se sentait vraiment très mal à l'aise, se tortillant les mains, et les parents de son copain, là surtout Gilles vu que la mère était partie sur le balcon fumer un coup, ne l'aidaient pas vraiment à se sentir mieux.
-Tu l'aimes ? finit par dire Gilles pour briser le silence.
-Quelle question, bien sûr que oui ! fit Pierrick du tac au tac, instinctif dans sa réponse.
-Je vois...fit simplement le père en détournant le regard après avoir observé Matei pendant trois secondes.
Au bout de dix minutes, comme la mère de Pierrick ne revenait toujours pas alors qu'elle n'avait pris qu'une seule cigarette pour fumer, Gilles se leva et déclara :
-Je vais aller chercher Samantha...
Pierrick et Matei restèrent seuls dans la cuisine pendant une courte minute. Le noiraud rassura son petit ami quand il le regarda avec ses grands yeux verts atristés en lui disant :
-Tout va bien, Matei, ça ira. Tout va bien se passer...
Matei sentit le ton de sa dernière phrase trembler, mais il ne releva pas. Apparemment, faire son coming-out à ses parents était plutôt difficile, et sans doute ses parents avaient plus de peine à l'accepter que ses propres parents qui avaient accueilli ce fait sans problème.
Matei prit alors de sa propre initiative la main de Pierrick pour la serrer fort entre ses doigts, pour lui signaler sans parole son soutien et son amour.
Les parents de Pierrick revinrent et, alors que Matei lâcha la main de son copain, ce dernier rafermit sa prise sur son épaule. Matei déglutit, un peu angoissé par ce qui allait suivre.
Gilles tenait sa femme à l'épaule et ils se retrouvèrent face au jeune couple. Samantha était un peu plus petite que Matei et quant à Gilles, légèrement plus grand mais peut-être deux ou trois centimètres plus petit que son fils unique.
Ce fut Samantha qui, après un soupir, brisa le silence pesant de la pièce :
-Pierrick...Tu l'aimes ?
Le jeune noiraud n'hésita pas une seule seconde :
-Oui, Maman. Je l'aime.
-Toi ? Matei, c'est cela ? continua la femme avec un sourire clairement mal à l'aise. Tu aimes notre fils ?
Matei, timide, surmonta ses craintes et fit avec un ton étonnamment plus assuré qu'il ne l'imaginait :
-Oui. J'aime Pierrick.
Samantha avait l'air ennuyé. Elle regarda son mari avant de dire :
-On n'a rien contre les homosexuels, mais...Cela ne sera pas très bien perçu, dans la famille.
-Tu ne penses qu'à l'image que tu renvoies volontairement aux autres...fit Pierrick avec un air plus dur que ce que Matei imaginait.
-Tu sais, Pierrick, avec mes parents et puis...Tu n'aurais pas de descendance...
-L'adoption, ça existe, rétorqua Pierrick sans ciller.
Matei vit le père de Pierrick froncer un sourcil mais il ne fit pas de commentaire.
-Pierrick. Tu sais comment est la famille. Mais tu sais que je t'aime, non ?
-Si tu m'aimes à ce point, accepte Matei dans la famille sans faire de commentaire désobligeant, rétorqua le noiraud, de plus en plus agacé.
-Je...commença la mère. Je veux juste te protéger.
Pierrick s'emporta alors, véhément :
-Maman ! Ce n'est pas vrai, tu penses juste à ce que les gens vont voir et penser ! Cesse de songer uniquement au qu'en-dira-t-on ! Ton image t'obsède mais je ne quitterai pas Matei pour te faire plaisir. J'ai réussi à m'assumer avec une famille qui ne comprend pas les homosexuels, c'est déjà incroyable en soi. Et puis sache que si tu mets une minette dans mon lit, il ne se passera rien, je ne suis pas attiré par les filles.
Samatha parut surprise d'une aussi grande franchise dite avec autant de colère naissante dans la voix. Elle finit par se reprendre, assez vite mine de rien, et Matei se doutait que la grande grande importance, apparemment, que cette femme accordait à l'image qu'elle renvoyait aux autres, avait dû jouer dans sa rapide reprise d'elle-même.
-Pierrick, je...Je n'allais pas te demander de quitter ton...Amoureux.
Ce dernier, tout comme son petit ami, avait bien senti la très légère hésitation dans son ton de la mère de Pierrick, comme si au plus profond d'elle-même, elle ne cautionnait pas que deux garçons sortent ensemble et puissent réellement s'aimer.
-Je te dis juste que, Pierrick...finit-elle par soupirer. Réfléchis bien à toi et ton avenir.
Elle tourna les talons alors que son fils unique murmurait :
-Crois-moi, Maman, je n'ai fait que ça en imaginant ce jour...
Matei sentit sa prise se refermer légèrement sur son épaule mais il ne fit aucun commentaire.
Gilles finit par soupirer aussi avant de se planter devant son fils. Il monta alors la main, ébouriffant les cheveux de son fils coiffés à la cire et eut un petit rire, entre la nervosité et le réellement heureux.
-En tout cas, Pierrick, tu as su trouver l'amour, je suis content pour toi et fier de toi !
Le jeune noiraud sourit enfin, trop heureux pour se concentrer sur son décoiffage intensif actuel. Il souffle, touché :
-Merci, Papa, ce sont les mots que je voulais entendre...
Sur le chemin de la chambre de Pierrick, ils recroisèrent Mélanie, la cousine du sportif qui vivait là depuis longtemps mais Matei ne savait pas pourquoi. Elle regarda Pierrick avec un sourire puis toisa Matei avec un air dédaigneux et hautain. Elle leur dit, aux deux, de front :
-Moi non plus, je ne suis pas contente que vous soyez ensemble. Pierrick, je suis vraiment en colère !
Le noiraud, que Matei savait pourtant très proche d'elle, n'oubliant pas les gros cœurs rouges qu'elle lui envoyait dans ses messages et dont il avait été jaloux l'espace de dix minutes dans le passé, rétorqua avec un ton plutôt glacial :
-Mélanie, c'est ma vie, pas la tienne. Je sors avec qui je veux, celui que j'aime, et ni ton avis, ni celui de Maman, ni de personne ne changera rien.
Puis, sans un mot de plus, Pierrick continua son chemin, emportant Matei dans sa chambre dont il ferma la porte assez fortement...
-Ça va ? finit par demander le brun, inquiet, en voyant Pierrick avec un air sombre.
Le sportif se jeta sur son grand lit, sur le dos, en poussant une longue expiration.
-Enfin ! Je suis soulagé. C'était un fardeau assez lourd...
-Je comprends...fit Matei en s'asseyant à côté de son petit ami.
Ce dernier leva la main devant lui et Matei comprit sans avoir besoin d'user de futiles mots. Il prit la main de son petit ami dans la sienne et Pierrick la serra fort pour montrer une minuscule parcelle de son gigantesque amour pour lui.
-Mes parents ne sont pas vraiment homophobes...finit par dire le noiraud, répondant à la question muette générale, un bras derrière la tête en guise support, ce qui ravissait les yeux de Matei qui observait attentivement la ligne de ses muscles sollicités dans ce mouvement.
Pierrick soupira encore une fois avant de reprendre mais en regardant Matei dans les yeux :
-Ils sont plutôt du genre à ne juste pas tellement comprendre les homosexuels. Ce n'est pas vraiment homophobe. Enfin, je ne les considère pas ainsi, ils n'en ont pas les comportements.
Matei retint ses mots et Pierrick finit par dire :
-Typiquement les gens qui disent que les homosexuels ne les dérangent absolument pas mais en avoir dans leur famille, ça les trouble déjà. Ça me fait rire, tellement ce genre de comportements est cocasse...C'est un peu de l'homophobie banalisée en somme...
Pierrick éclata de rire, mais un rire qui semblait être une libération pour lui et il finit par dire, apaisé :
-Je suis heureux...J'ai enfin pu leur dire. Et ils savent que tu es dans mon cœur pour le moment et qu'ils n'ont rien à dire !
Matei sourit et s'allongea à côté de son petit ami. Il posa sa tête sur un de ses pectoraux et ferma ses yeux. Soudain, il entendit Pierrick murmurer :
-S'il te plaît Matei, détends-moi...
Le jeune brun sourit et remonta alors de sa main libre, sur laquelle il n'était pas allongé, le haut fin de son petit ami avant de poser sa paume chaude et douce sur le ventre brûlant du noiraud. Ce dernier tressaillit quand leurs peaux entrèrent en contact et il eut un bref halètement.
Matei commença alors à bouger sa main sur les abdominaux bien dessinés de son petit ami qui releva légèrement le menton, enfonçant ses cheveux emmêlés dans sa couette.
Matei en joua quelques instants, alternant entre les effleurements à un ou deux doigts et les longues caresses langoureuses avec le plat de la main sur ses tablettes de chocolat.
Pierrick finit par aplatir la main de Matei contre son ventre de la sienne en soufflant :
-Si tu continues, je ne vais pas réussir à me retenir de vouloir te faire mien...
Matei ouvrit des yeux étonnés. Normalement, Pierrick n'abordait jamais ce sujet, sachant qu'il était sensible et plutôt embarrassant pour Matei, mais depuis qu'il s'était montré nu à lui il y a quelques semaines, il ne pensait qu'à ça...
Il avait envie de posséder Matei en entier, de le faire sien, et de pouvoir clamer qu'il était son petit ami !
Après ce long silence paraissant négatif, Pierrick n'attendait plus de réponse quand elle lui parvint enfin avec une toute petite voix :
-La prochaine fois qu'on se retrouvera seuls assez longtemps, promis...
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