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Chapitre 14 : Sérieuse discussion

-Noël, je suis devant chez toi. Descends, j'aimerais qu'on parle.

Noël se dit à cet instant précis qu'il n'aurait jamais dû prendre cet appel de Pierrick en pensant naïvement qu'il allait entendre ce dont il rêvait. Pendant l'appel, il avait juste jeté un œil par la fenêtre et donc vu le noiraud dans le parc en bas de son immeuble.
C'était samedi et il était habillé assez négligeamment mais finalement, il ne fit qu'enfiler un pantalon un peu plus correct pour sortir. Sinon, il garda son haut ample et un peu vieux.
Il ne pouvait pas vraiment se défiler...Et surtout, il ne pouvait pas non plus passer sa vie à fuir. Il aurait bien aimé mais...Ce serait déraisonnable et surtout, il n'aurait de toute façon pas ce qu'il voulait, c'est-à-dire Pierrick pour lui tout seul, s'il continuait à lui faire continuellement la tête. Il pourrait aussi ne plus jamais parler à Pierrick s'il ne lui disait pas pile ce qu'il ne voulait pas entendre. Il l'appréhendait et savait qu'il allait lui en vouloir à mort...
Mais bon...Advienne que pourra !

-Salut, Noël.
-Salut, Pierrick...
Les deux partis ne savaient pas vraiment quoi se dire sans être tout de suite fortement mal à l'aise. Pierrick tenta de dire quelque chose avant de se rattraper tout de suite :
-Comment ça...Non, je suppose que ça ne va pas très bien...
-Tu supposes très bien, confirma Noël.
Son ton était agressif, mais sans ça, le plus jeune n'aurait pas supporté et il aurait fondu en larmes. Pierrick se sentit un peu attaqué par le ton de voix de son meilleur ami mais il ne fit aucune remarque. Il finit par s'asseoir sur un muret en briques rouges et lui dit :
-Je suis venu d'abord m'excuser.
-De quoi ? fit Noël, surpris, avant de se rendre compte qu'il était toujours censé lui faire la tête.
-De ne pas avoir vu toutes ces années que tu m'aimais...Je...Je n'ai pas d'excuse, Noël, mais je voudrais aussi ne pas perdre ton amitié...Elle est trop précieuse pour moi.
Noël fit la moue en croisant les bras. Il avait l'impression d'être un gosse en train de criser, mais devant Pierrick, il n'en avait strictenent rien à faire !
-Heureux de la savoir...lâcha-t-il.

Pierrick avait un peu de mal...Pas grand-monde, et surtout pas son meilleur ami, ne lui avait déjà parlé aussi froidement. En général, les gens ne se sentaient pas de lui parler méchamment parce qu'étant extrêmement doux et gentil avec tout le monde, si bien qu'on pouvait facilement prendre cette immense gentilesse pour de l'amour...C'est probablement ce qui était arrivé à Noël. Néanmoins, le plus âgé continua :
-Je voulais te dire aussi que j'ai beaucoup été tourmenté ces derniers jours...Après ta déclaration, je me sentais si mal...Surtout que je venais de me déclarer à Matei après des mois d'hésitation alors...
Noël détourna le regard. Il ne voulait plus voir celui de Pierrick, celui de chien battu qui lui donnait envie de tout lui pardonner d'un seul coup. Pierrick décida de se jeter à l'eau :
-J'ai décidé de sortir avec Matei. Quoiqu'on en dise, que ce soit mes amis ou ma famille, je veux être avec lui.
Noël sentit ses larmes monter. C'est exactement ce qu'il ne voulait pas entendre, pour le moins du monde...Il crispa ses mains sur ses bras croisés.
-Et qu'est-ce que tu lui trouves, à ce gars ? finit-il par lâcher avec un ton haineux.
Pierrick fut encore surpris par cette intonation qu'il ne lui connaissait pas. Il ne savait pas s'il était plus choqué ou plus attristé de voir cette haine que son meilleur ami avait pour lui...Il décida de lui répondre en toute franchise. C'était son meilleur ami après tout.
-Il est mignon, il est intelligent, il est gentil...Je trouve qu'il a un charme particulier propre à lui...C'est ce qui m'a plu chez lui je pense...

Noël avait de la peine à entendre ces mots-là sortir de cette bouche-là...Il aurait presque envie de lui coudre la bouche avec un fil de fer ou de laine pour l'empêcher de débiter des choses pareilles. Il resserra ses bras croisés sur son buste.
-Et qu'est-ce qui te fait croire que Matei t'aime aussi ? Il pourrait aussi te repousser et tu seras au fond du trou encore plus que maintenant.
-Crois-moi, ce ne sera pas le cas ! le assura Pierrick.
Il n'avait parlé du baiser et de la déclaration de Matei comme quoi il l'aimait qu'à Massimo. Il lui avait écrit alors que Noël, il voulait lui parler en face, par respect. Et aussi parce que le jeune homme ne serait pas très heureux de ne recevoir qu'un message lui révélant ceci sans prendre de gants...
-Ce ne sera pas le cas...répéta Pierrick à un niveau de décibels très faible, comme pour lui-même.

-Et comment ça se fait que tu te sois décidé aussi vite ? Tu étais au fond de ton gouffre rien qu'hier encore...
-C'est vrai mais...Avant-hier soir, Ngôi Sao m'a envoyé un audio dans lequel Matei parlait. Il disait que je l'avais oublié, à force de ne pas lui répondre. Elle me l'a confirmé après, elle l'a enregistré à son insu.
-C'est mal, trancha immédiatement Noël en mordant sa lèvre de l'intérieur de frustration.
-Je sais mais...Elle le fait pour aider au mieux Matei, et en somme, là elle a bien réussi son coup...Elle veut son bonheur et ça, c'est beau venant de sa meilleure amie !
-Dis encore que moi, je ne te soutiens pas assez ! fit Noël avec un regard et un ton hargneux, les sourcils froncés de colère.
-Non ! s'exclama Pierrick en se levant de son siège improvisé. Ce n'est pas ce que je voulais dire ! Ngôi Sao est une fille tellement gentille et elle veut simplement tout faire pour que son meilleur ami, donc Matei, soit heureux !
-Ouais, et moi je ne suis qu'un gros abruti égoïste qui ne pense qu'à sa petite personne ! explosa Noël en haussant le ton.
-Ce n'est pas ce que je voulais dire ! se braqua Pierrick mais pourtant sans monter la voix face à son ami pourtant clairement furieux. Je dis simplement que Ngôi Sao est admirable, ne le prends pas pour toi ! Je ne t'attaque pas.
-C'est tout comme ! se renferma Noël.

Après quelques minutes dans un silence pesant, Pierrick baissa les épaules, détendant ses muscles et ses deltoïdes. Il finit par se dire qu'abandonner d'essayer de convaincre Noël que ce qu'il disait de Ngôi Sao n'était pas un message subliminal contre lui était la solution la plus sage. Actuellement, Noël n'était pas vraiment en état d'accepter tout sans broncher ni sans se braquer presque immédiatement.
Pierrick aurait aussi voulu lui dire que ce n'était pas grave si lui ne le soutenait pas, car Massimo le faisait déjà bien assez, mais il s'en abstint aussi, de peur que Noël se vexe de nouveau. D'ailleurs, Pierrick sentait bien que son ami blond était vraiment à fond pour qu'il se mette avec Matei, voire trop à fond...Mais ça ne le dérangeait pas, au final, parce qu'il voyait ainsi que son ami voulait aussi son bonheur et aussi qu'il sorte avec un garçon, et pas seulement lui-même.
Pierrick le soupçonnait même de complicité avec Ngôi Sao. Elle paraissait aussi avoir envie de les mettre ensemble et il les voyait souvent tous les deux récemment, avec un grand sourire de fourbe ou d'espion dans leur coin. Il était content que certaines personnes le soutiennent. Il en avait besoin, surtout après Noël et sa...Famille...
Ils reparleraient, son meilleur ami et lui, si un jour il arrêtait de lui faire la tête...

Pierrick se décida enfin alors à se jeter à l'eau :
-Je vais sortir avec Matei, Noël. Je me suis décidé...Hier en fin d'après-midi, en fait.
Un détail revint dans l'esprit de Noël. Il cracha à la figure de Pierrick, en décroisant les bras mais en serrant plus que fort ses poings :
-Parce que tu as sauté Matei quand vous étiez seuls dans les vestiaires ou bien ?
Pierrick fronça les sourcils. Voilà qui était plutôt rare. Mais il rétorqua avec véhémence mais sans agressivité particulière :
-Non ! Mais qu'est-ce tu vas croire ? Pour qui te me prends ? Je ne suis pas comme ça, tu es le meilleur placé pour le savoir, tu es mon meilleur ami !
-Ça ne t'a pourtant pas empêché de dire à Massimo avant moi que tu avais déclaré tes foutus sentiments à Matei !
-J'avais peur de te blesser ! Tu peux comprendre ça ?
Noël se renfrogna d'un seul coup. Les larmes lui vinrent et Pierrick vit ses yeux s'humidifer. Le plus jeune grogna entre ses dents avec un niveau de décibels revenu à la normale :
-Et bien, en tout cas, tu t'es planté...Tu m'as encore plus blessé en faisant ça comme ça en me le cachant...
Pierrick était tellement désolé. Il ne savait plus comment formuler ses regrets pour les communiquer à Noël. Même le français, la langue de l'amour qui était la reine des synonymes, avait ses limites...Il souffla alors, comme une véritable souffrance :
-Je comptais te le dire, Noël. Vraiment ! Mais...Comme tu nous as entendus ce jour-là avec Massimo...Je n'en ai pas eu l'occasion...Tout de suite après, tu me boudais...
Noël grinça des dents. Puis se détendit en inspirant et expirant plusieurs fois. Il n'avait pas envie d'écouter Pierrick lui rappeler ça parce qu'il savait que dans l'histoire, c'est lui qui était en grande partie en tort...
Il faisait une crise de jalousie qui ferait rougir plus d'un gamin immature et il crachait sa haine sur Pierrick qui, en soi, n'avait rien fait de mal ni de la mauvaise manière. Il avait juste dit des choses qu'il ne devait pas dire tout haut au mauvais moment...

-Ça va...finit-il par dire, mais toujours la haine dans la voix.
Noël retourna alors vers la porte vitrée de son immeuble et l'ouvrit. Il allait s'engouffrer dans l'immeuble quand il se retourna et lança à Pierrick, resté seul debout devant son muret dans le parc :
-Fais ce que tu veux...Au final, je contrôle pas tes sentiments et puis, même si Matei refusait de sortir avec toi, ce serait pas avec moi que tu te mettrais...Allez, salut !
Et Noël laissa la porte en verre se fermer lentement sur lui avant de remonter en ascenceur dans son appartement.

Pierrick soupira. Il resta quelques instants là, sur place, sans bouger un seul cheveu, puis il partit, mains dans les poches, en s'allumant une cigarette.
Il fuma sur le chemin du retour et quand il arriva chez lui, se laissa tomber comme une masse sur son lit tout mœlleux. Il se tourna pour se remettre sur le dos et mit ses deux mains derrière sa nuque. Il fixa le plafond et, alors qu'il réfléchissait à des choses bien trop compliquées, s'endormit...

-Je crois que Pierrick va finir avec Matei, au final...
Noël, juste après le départ de son meilleur ami, avait aussitôt appelé Massimo. Ce dernier avait reçu de Ngôi Sao l'information comme quoi Pierrick avait embrassé Matei comme pour sceller une promesse, qui elle-même avait reçu cette précieuse et croustillante nouvelle du principal intéressé qui lui avait raconté, des étoiles dans les yeux, son premier baiser...Mais Massimo n'étant pas censé le savoir, on n'oubliait pas l'espion de mèche avec l'espionne Ngôi Sao, il fit comme si de rien n'était. Et ne dit rien à Noël. Il avait peur d'envenimer encore plus les choses entre lui et Pierrick s'il lui disait que son meilleut ami avait déjà embrassé une seule fois tout doucement son bien-aimé...
-Je pense bien aussi...soupira alors Massimo à l'autre bout du fil. Les deux ont l'air de s'aimer alors ils ne pouvaient finir qu'ensemble !
-Je sais...soupira Noël. Mais je crois que je ne peux m'empêcher de me sentir affreusement jaloux...
-J'imagine, lui dit gentiment Massimo. Mais c'est normal, c'est humain. Tu es humain, Noël. Dans ton cas, je serais sûrement très jaloux aussi. Et on ne peut pas contrôler ses sentiments.
-Ça me rassure de l'entendre...lui dit Noël avec un léger sourire derrière son téléphone.
-Laissons les choses couler...dit finalement Massimo en souriant lui aussi derrière son combiné. Nous verrons ce qui se passera par la suite.
-Oui...En effet...Nous verrons ce qui se passera...soupira Noël avant de raccrocher après avoir salué son ami.

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