Chapitre 24
Mélina
Je traversai rapidement le grand hall du théâtre. Mes talons claquaient bruyamment sur le carrelage blanc, résonnant tristement dans le hall vide. Je comptais les secondes. Si mes calculs étaient bons, dans dix secondes je serais dans le bureau de mon père. Trois secondes pour traverser le hall. Fait. Trois autres secondes pour mépriser intensément le bureau de la secrétaire gâteuse. Fait. Et enfin quatre secondes pour tourner à l'angle du couloir et... Mince.
Devant moi, au fond du couloir, la porte du bureau de mon père se tenait droite, fière, légèrement entrouverte. Je fronçai les sourcils. Cela n'était pas franchement habituel. Certes je n'étais venue dans ce théâtre qu'à deux reprises, mais ce fut suffisant pour comprendre que le bureau du big boss n'était pas un lieu aussi simple d'accès que son nom pourrait laisser à croire. Il fallait une clé. C'était un instrument nécessaire pour ouvrir la porte aux merveilles. J'avais la clé. Mes jambes ralentirent le rythme. Je venais d'échouer mon challenge des dix secondes.
Sans faire de bruit, je m'approchai de la porte. Un léger bourdonnement s'en échappai. Enfin, un bourdonnement, c'était surtout une façon polie de qualifier le flot d'injures qui se déversait dans le couloir. Une voix douce, légèrement grave. Une voix étouffée par un tissu. Une voix qui m'était étrangement familière. Je frissonnai.
« Putain de porte à la con ! Je te jure que je vais t'exploser. Non, pire, si tu ne t'ouvre pas sur le champ je vais tellement te niquer ta race que même ta mère la foutue porte blindée sa maman flippera sa race en voyant à quel point je t'aurais déglingué ! Aller purée ! Chazam ! Sézame ! Merde ! Putain, mais pourquoi elle est pas foutue d'apprendre à écrire l'autre aussi ?! C'est à elle que je vais défoncer le trou de balle ! Des 4 qui ressemblent à des 5 et des 1... des foutus 1 qui ressemblent à des putains de 7! Merde ! »
Charmant. Je glissai mon œil dans l'entrebâillement de la porte. Le battant de l'armoire avait été ouvert et des piles de bouquins épais s'entassaient tout autour. Au milieu d'eux, à moitié cachée derrière le volet du meuble, une silhouette encapuchonnée s'agitait tout en libérant un flot d'insultes et de coups de pied à l'intérieur de l'étagère. Je fronçai les sourcils. Les battements de mon cœur s'étaient dangereusement mis à accélérer. Non. Je devais me tromper, cela ne pouvait pas être cela. Cela ne pouvait pas...
« Ok Maurice. C'est ta dernière chance et après je ramène la dynamite. On répète : 4-3-5-1... »
Je poussai doucement la porte, risquant un pas à l'intérieur. Les piles de livres s'entassaient toujours plus loin dans la pièce. Sur la poubelle, la chaise, le bureau... Je me figeai. Le bureau. Non. S'il vous plait, non. Pas cela.
Et pourtant si. Sur le bureau, surplombant une pile d'épais dictionnaires trônait une casquette que je saurais reconnaitre entre toutes. Une casquette mickey, légèrement usée sur le devant, avec une tâche marron au niveau du coin gauche. La casquette de Gady. Et cette silhouette camouflée sous un imposant sweat couleur vomi... Cette personne au vocabulaire enchanteur et à la voix si douce. Cette personne n'était autre que celui qui hantait désespérément mon esprit. Les battements de mon cœur s'emballèrent davantage. Je croyais me liquéfier de l'intérieur.
- Eh purée, encore raté... s'exclama-t-il sur un ton agacé. Ok Momo, tu l'auras voulu, je vais chercher ma bombe atomique et je te garantis que tu vas douiller sévère ! Tu regretteras toute ta misérable vie de boite de conserve rouillée et inutile ce jour où tu auras osé me faire face !
Prononçant ses mots, l'individu encapuchonné asséna un ultime coup de pied rageur contre le meuble puis pivota sur ses talons dans un mouvement nerveux. Il sursauta en me voyant. D'abord surpris, je le vis écarquiller les yeux sous sa capuche, puis reculer de quelques pas, enfonçant un peu plus son visage dans les ténèbres, l'air honteux. Il s'affaissa sur lui-même. Un silence lourd s'installa dans la place. Mon cœur se serra tristement dans ma poitrine. Je ne m'étais définitivement pas trompée.
- Gady ? osais-je finalement prononcer d'une voix étranglée.
La silhouette devant moi hocha piteusement la tête. Une main furtive émergea du vêtement pour agripper la casquette qui gisait sur le meuble afin de la glisser sous sa capuche. Il était redevenu fidèle à lui-même, caché au fin fond des méandres sombres de son univers.
Je fis quelques pas dans la pièce, jetant un coup d'œil au meuble ouvert. Au fond de l'armoire, encastrée dans le mur, un coffre-fort. Je cru vomir. Ce ne pouvait pas être vrai. Non. Définitivement. Il y devait y avoir une explication logique derrière cela. C'était certain. Gady ne pouvait pas...
- Je suis désolé, lâcha-t-il d'une voix sourde.
Je relevai les yeux vers lui, horrifiée. Mais... Non. Pourquoi disait-il cela ? Il ne pouvait pas me dire cela. Il n'en avait pas le droit ! Je ne voulais pas ! Je ne pouvais pas y croire...
- Je suis désolé, répéta-t-il sur un ton chargé de tristesse.
Il glissa sa main sur son visage. Elle tremblait. Gady tremblait. Il semblait... abattu. Complètement abattu. La forme voutée de sa silhouette, l'obscurité angoissante de son visage, la pâleur glaciale de sa peau. Tout en lui exprimait une détresse que je ne lui connaissais pas. Une détresse profonde. Un sanglot infime et terrible de désespoir.
J'avançais vers lui. Je ne savais pas ce qu'il était venu faire ici. Je ne voulais pas le savoir. J'avais peur de comprendre. Peur de le savoir déjà. Je n'avais pas envie qu'il me le dise. Je n'avais pas envie de découvrir cette vérité-là, non. J'avais simplement envie de voir son visage. Plonger mon regard dans le sien. Entendre sa voix, cette voix joyeuse et moqueuse, cette voix dénuée d'une tristesse qui le dévorait. Je voulais le prendre dans mes bras, l'entendre rire. Voir éclater ce soleil, cette lumière. Cette chaleur que j'aimais tant. Non. Je ne voulais pas savoir la vérité. Je voulais le voir lui. Tout simplement.
Il eut un mouvement de recul. Je m'arrêtai. Il s'arrêta à son tour. Ses lèvres étaient pincées. Sa mâchoire, serrée. Une tension extrême émanait de son corps. J'eu un soupir triste.
- Gady je... commençai-je d'une voix hésitante.
- Je suis désolé, me coupa-t-il soudainement. Vraiment. Je suis désolé. Je te jure que je ne voulais pas faire ça. Jamais. Ce n'est pas moi je... Enfin, je ne savais plus quoi faire. J'ai vraiment... besoin d'argent et, je ne sais pas, ça m'est stupidement venu à l'esprit, je n'ai plus réfléchi, je... Je suis désolé. Tu peux me frapper, me hurler dessus, me détester... Tu peux m'insulter de tous les noms, décider de ne plus jamais me fréquenter, choisir d'oublier à tout jamais mon existence. Tu peux faire de moi ce que tu veux, mais je t'en supplie, n'appelle pas les flics. Je partirai, je te rembourserai au centuple, je serai ton esclave si tu le désire, mais n'appelle pas les flics. S'il te plait. Il en mourrait sinon.
Il avait prononcé sa tirade dans un souffle, la voix triste, la tête basse. Il avait dit ces mots, et je m'étais figée sur place, pétrifiée par la souffrance de cette prière. Je le voyais devant moi, si pitoyable. J'entendais ses appels au secours, et je ne bougeais pas. Je ne savais que dire ou que faire. J'étais simplement là, debout, ses mots se répétant inlassablement dans mon esprit et mes yeux scrutant avec peine son corps torturé. J'étais paralysée.
- Mélina ? demanda-t-il. Dis quelque chose, je t'en supplie.
Ce fut comme un électrochoc. Je battis brièvement des paupières et redressai la tête, concentrant mon attention sur sa personne. Sa silhouette menue et ses épaules voutées. Sur lui.
- Je... bafouillai faiblement, je... Non, bien sûr que non, ne t'inquiète pas, jamais je n'appellerais la police, ni même n'effacerai ton existence de ma mémoire. Tu t'es incrusté dans ma vie et tu y reste, tant pis pour toi !
Il eut un grimace amusée. Cela me rassura quelque peu.
- Après je ne te cache pas que la proposition de disposer d'un esclave peut présenter des perceptives plutôt séduisantes...
Un grognement nerveux s'échappa de la capuche. Il croisa les bras sur son torse.
- N'abuse pas trop non plus... maugréa-t-il.
- Eh, c'est toi qui a proposé !
Un fin sourire se dessina sur ses lèvres. Il pencha la tête sur le côté.
- Ça m'apprendra à m'en remettre à une fille sadique et sans pitié.
Je réprimai un gloussement. Un sentiment si agréable de bonheur se répandait en moi. Doucement. Comme une vague de chaleur. Il était de nouveau là. Gady.
- T'es dur, répliquai-je sur un ton qui se voulait boudeur, je ne suis pas si horrible. Tiens, la preuve, je ne te demanderai pas de faire le cochon pendu sur une grue, habillé en maya l'abeille avec un masque de Zoro sur la face et une pastèque dans la bouche, tout en chantant l'Internationale !
Il se mit à rire franchement. Mon cœur tressauta dans ma poitrine.
- Ouah, trop sympa de ta part..!
- N'est-ce pas ? Non, je ne te demanderai qu'une chose en vérité...
Il se tut. Sceptique.
- Laquelle ? osa-t-il finalement.
- La vérité. Rien que la vérité. Je veux savoir ce que tu faisais ici, et pourquoi. Et puis je veux aussi que tu retires ta capuche. Je déteste parler à un Mangemort...
Le silence se réinstalla dans la salle. Les battements de mon cœur étaient toujours plus fort. Je sentais le sang affluer avec excès dans mes tempes. Face à moi, Gady ne disait rien. Les bras croisés, son visage toujours à moitié envahit par les ombres, il se contentait de pincer nerveusement ses lèvres fines.
- Je n'ai jamais été une tête en maths, commença-t-il, mais je crois bien que ça fait deux demandes...
J'eu un sourire nerveux.
- Je peux toujours revenir sur mon idée d'abeille communiste si tu préfère...
Il eut un rire.
- Non, t'as raison, ça reste honnête comme proposition.
Je lui adressai un sourire maladroit. Honnête ? Je ne savais pas. Mais c'était ce qu'il fallait pour calmer mes frayeurs. Je voulais savoir. Je voulais comprendre. Et surtout, je voulais le comprendre, lui.
Lentement, je le vis lever ses bras au niveau de sa tête pour retirer sa capuche. Le tissu retomba lourdement sur ses épaules, pour laisser le champ libre à deux yeux d'un bleu clair et intense, cerclés de noir. Sa peau était encore plus pâle que d'ordinaire et des cernes profondes creusaient ses paupières rougies. J'en eu le souffle coupé. Mon cœur s'arrêta même un instant de battre. Il portait toujours sa casquette qui couvrait son front et ses cheveux, mais je pouvais dessiner du regard la courbe si fine de sa mâchoire et me laisser bercer par la profondeur vertigineuse de ses pupilles.
Gady m'adressa un sourire maladroit. Raclant stupidement ma gorge, je tentai de me ressaisir.
- Tu es sûre que tu ne peux pas te contenter de la capuche ? demanda-t-il d'une voix hésitante.
- Je... oui. Certaine.
Il me regarda d'un air songeur, ses yeux scrutant chacune des parcelles de mon visage, comme s'il cherchait à déceler un trésor caché, lire au fond de mes pensées. Je détournai le regard.
- Je ne suis pas sûr que tu aies vraiment envie d'entendre cette vérité-là.
- Et moi je dis que si... Je pourrai t'aider.
Il m'observa encore quelques instants, puis tourna la tête, lâchant un lourd soupire.
- Peut-être, mais j'en doute. Enfin comme tu voudras... Après tout, je te dois bien une part de vérité.
Une part ? Comment cela une part ? Il croisa les bras sur son torse puis pivota légèrement sur ses pieds, le visage fermé, les yeux hésitants.
- J'essayais de forcer le coffre-fort de ton paternel, dit-t-il d'une voix sourde, le regard braqué vers la fenêtre. J'ai... des problèmes d'argent. Des gros problèmes d'argent.
- C'est-à-dire ?
- 5000 balles à réunir avant la fin de la semaine.
5000 balles ? Je ne parvenais pas à relativiser. Cela devait sûrement faire beaucoup d'argent. Je n'en savais rien. Mais vu sa mine abattue, ce devait être beaucoup pour lui.
- À qui tu les dois ?
Il se détourna de la fenêtre pour plonger une nouvelle fois son regard dans le mien. Il semblait réfléchir, peser le pour et le contre. Avait-il intérêt à me dire la vérité ? Pouvait-il vraiment me faire confiance ? Je n'en savais rien. J'espérais que oui.
- A des dealeurs de drogues.
- Pourquoi ?
- Parce que je ne leur ai pas rendue la cam qu'ils m'avaient confiée.
Je le regardai. Une perle de tristesse était venue souiller ses pupilles de cristal. Malgré ses réponses brèves et sa voix d'automate, je pouvais ressentir jusqu'au plus profond de mon cœur le désespoir que me criaient son regard, sa bouche et son être tout entier.
Des dealeurs de drogues. Bon sang.
- Tu te drogue ?
- Non.
- Comment ça « non » ?
- Je ne me drogue plus.
Il ne se drogue plus ? Qu'est-ce que cela voulait dire bon sang ? Il s'était déjà drogué ? De quelle manière ? Avec quoi ? Combien de temps ? Il était accro ? Mon esprit se mit à imaginer mille scénarios. Mince. Cela pouvait tout et rien dire.
- Alors pourquoi tu leur dois de l'argent à ces types ?
- Mon frère a déconné.
Son frère ?
- Tu as un frère ?
- Oui.
J'hochai la tête.
- Je ne savais pas.
- Tu ne sais pas grand-chose non plus...
J'encaissai le coup. C'était vrai. Pour qui me prenais-je tout à coup ? Son amie ? Sa confidente ? Je ne le connaissais pas. Je savais son prénom, et encore. Un nom pareil aurait parfaitement pu être inventé. Et pourtant... pourtant j'avais ce sentiment si particulier de confiance au fond de moi. J'avais envie de connaitre son histoire, de savoir ce qu'il avait vécu, ce qui l'avait fait rire et pleurer. Ce qui l'avait forgé. Je voulais savoir. Mais lui ne semblait pas l'entendre de cette même oreille.
Les bras toujours croisés sur son torse et la tête légèrement inclinée sur le côté, Gady m'observait. Il avait les lèvres pincées, un voile de scepticisme et d'inquiétude sur le visage.
- Tu veux que je t'aide ? lâchai-je finalement d'une voix timide.
Il écarquilla les yeux.
- Hein ?
- Je peux t'aider.
Décroisant les bras, il vint réajuster les coutures de son sweat. Son regard n'avait pas lâché le mien. Il secoua brièvement la tête.
- Non, marmonna-t-il. Non il ne vaut mieux pas...
Je fronçai les sourcils.
- Pourquoi il ne vaut mieux pas ?
- Ce... ce n'est pas bien.
Ce n'est pas bien ? Ouah, niveau argumentation on pouvait sérieusement faire mieux. Je m'approchai de lui.
- Comment ça ce n'est pas bien ? interrogeai-je sur un ton interloqué. Tu t'apprêtais bien à les rembourser avec l'argent de mon père non ?
Son visage se rembruni. Il roula des yeux.
- Je... oui c'est vrai mais... Mais ce n'est pas la même chose.
- Pas la même chose ? Et pourquoi ?
Il laissa échapper un lourd soupir, enfouissant ses mains dans les poches de son vêtement.
- Tu ne sais pas de quoi tu parles... lâcha-t-il d'une voix fatiguée. Et puis, je ne veux pas t'embêter ou... te piquer ton fric. Tu ne mérites pas ça.
Me piquer mon fric ? Un rire nerveux s'échappa de mes lèvres. Secouant la tête, j'osai un nouveau pas vers lui.
- Je ne mérite pas ça ? m'étonnai-je avec un rire amer. Sans blagues.. ! Je ne suis qu'une gamine pourrie gâtée je te rappelle, alors si je peux rien qu'une fois dans ma vie faire quelque chose de bien et rendre service avec cette tonne de fric, je le ferais avec plaisir.
- En alimentant des réseaux de drogues violents ?
- En t'aidant toi.
Silence. Gady me considéra quelques instant, la mine sombre, sa bouche légèrement entrouverte. Il paraissait complètement démuni. Ses sourcils surplombaient tristement l'océan tumultueux de son regard. Je me mordis les lèvres. Un sentiment étrange de culpabilité s'empara de moi.
- Non, souffla-t-il au bout de quelques instants. Je...
- Mais si ! m'emportai-je sans le laisser finir. Parce que tu avais d'autre option à part le coffre-fort de mon père ? Une bijouterie ? Une banque ? La marchande de glace du coin de la rue ?
La tristesse de son regard laissa aussitôt place à une rancœur déçue. Il me fusillait littéralement du regard, le buste penché vers l'arrière. Merde. Mais qu'est-ce que j'avais dit... Quelle imbécile ! Cachant un rictus coupable, j'essayais de m'approcher. Il recula.
- Je... bafouillai-je. Je suis désolée, ce n'est pas ce que je voulais dire.
- Pourtant tu l'as dit...
Il se mura de nouveau dans un silence. Un silence triste, lourd. Un de ces silence qui vous prend au ventre et vous serre le cœur. Je me maudis de l'intérieur.
- Je... je veux simplement t'aider, osai-je sur un ton qui se voulait sincère. Vraiment. Tu, tu as fait tellement pour moi alors, vraiment je... je t'en supplie, laisse-moi t'aider, juste une fois.
Redressant la tête, il m'adressa un regard sceptique. Malheureux.
- Gady... Fais-moi confiance, je t'en supplie...
- Mais comment toi est-ce que tu peux me faire confiance..? souffla-t-il d'une voix triste. Tu ne me connais pas... tellement pas.
- Je ne sais pas, c'est... c'est juste toi.
Un nouveau regard. Il me scrutait, pinçant ses lèvres. Son bras tremblait légèrement. Je ne le lâchais pas des yeux. La pâleur de sa peau m'hypnotisait autant qu'elle m'inquiétait. Je fis un nouveau pas. Nous n'étions plus qu'à un mètre l'un de l'autre
- Gady... suppliai-je.
Je penchai la tête vers lui. Son odeur si particulière de menthe au tabac venait chatouiller mes narines. Un frisson parcouru mon corps. Un frisson agréable et rassurant.
J'allais émettre une énième supplication quand un mouvement imperceptible de son corps stoppa mon élan. Une moue résignée puis un hochement de tête, abattu, affligé. Il acceptait. Enfin.
Un tourbillon de bonheur déplacé m'envahit. Je pensais lui sauter au coup, crier de joie. Mais je me retins et réprimai mon sourire. Calme-toi imbécile.
- Tu, tu es d'accord ? m'assurai-je d'une voix tremblante.
Il releva son regard de glace vers moi. Question stupide chérie, très stupide.
- Oui, souffla-t-il. Mais je te rembourserai après, promis.
Je m'autorisai un mince sourire. Penchant la tête, je posai mes mains sur mes hanches.
- Ne t'inquiète pas pour ça.
Il me jeta un dernier coup d'œil puis détourna le regard, un fin sourire au coin des lèvres. Il paraissait apaisé et triste à la fois. J'hésitai à le prendre dans mes bras. Le désir de le serrer contre moi, d'égorger ses peines et ses souffrances me dévorait de l'intérieur. Mais je n'en fis rien. Au lieu de cela, je sorti mon téléphone de mon sac. Le message de Sophie s'affichait toujours sur l'écran d'accueil. L'ignorant superbement, je déverrouillai l'engin.
- 5000 tu m'as dit ?
Gady releva aussitôt la tête vers, surpris. Il battit des paupières.
- Je euh... attends tu fais quoi là ?
- Un virement. Alors ? Combien ?
- Je... 3000 suffiront mais...
- Super ! T'as un RIB ?
Il me fixait avec de grands yeux ronds, complétement ébahit. Je le considérai quelques instants, sans comprendre, avant d'étouffer un juron.
- Euh Mélina... ?
- Je suis trop conne ! m'agaçais-je. Laisse tomber, j'ai une autre solution.
Sans lui laisser le temps de répliquer, je me dirigeai vers le coffre-fort toujours dissimulé dans le placard. Faisant rapidement courir mes doigts sur le mécanisme, je déverrouillai la porte et ouvris le battant. Gady étouffa une exclamation surprise derrière moi. Sans y prêter attention, je saisis une liasse de billet, puis referma le coffre. 10 seconde, montre en main. Super.
Ceci fait, je me redressai et pivotai sur mes talons. Face à moi, Gady m'observait, médusé. Ses yeux grands ouverts semblaient vouloir sortir de leurs orbites.
- Mais... bafouilla-t-il, mais comment t'as fait ?
Je fronçai les sourcils. Comment j'ai fait quoi ? Secouant la tête, il désigna le coffre du regard. Je me pinçai les lèvres.
- Ah ça... Mon père est extrêmement prévisible tu sais, alors quand on le connait un peu... La majorité de ses coffres ont le même code. Pas très malin de sa part je te l'accorde mais bon...
Comme il paraissait toujours me fixer sans comprendre, je lui tendis les billets.
- Enfin laisse tomber. Tiens, il devrait y avoir le compte.
Ses yeux se détachèrent de moi pour venir se poser sur la liasse de papier que je serrais entre mes doigts. Il sembla hésiter quelques instants puis fini par les saisir d'une main tremblante. Il les fourra nerveusement dans sa poche.
- Merci, murmura-t-il.
Je souris. Une légère boule de chaleur s'était formée dans mon estomac. Un frisson de satisfaction et de bonheur. Ses épaules s'étaient détendues, ses traits adoucis. Son visage aussi semblait moins sombre. Plus fatigué peut-être, mais définitivement moins sombre. L'angoisse et la crainte avaient quitté ses pupilles, laissant le champ libre à l'épuisement et la mélancolie. Pas franchement plus réjouissant, mais il y avait un mieux. Je voyais un mieux. Relevant la tête, il m'adressa un mince sourire. Je cru défaillir.
La sonnerie de mon téléphone m'arracha à ma contemplation. Pestant, je baissai les yeux vers l'écran. Sophie. Raaah. Mais qu'est-ce qu'elle avait celle là ?!
- Tu peux répondre si tu veux, m'assura la douce voix de Gady.
Je relevai les yeux vers lui, le téléphone vibrant toujours avec frénésie dans ma main.
- Je...
- Je ne vais pas tarder à y aller, assura-t-il avec un sourire triste. Il faut que je règle ce problème assez vite...
Régler le problème ? Oui, c'était vrai. L'écran de mon téléphone clignotait avec énervement. Réajustant sa casquette, il passa à mon niveau. Près. Très près. Son sourire s'agrandit.
- Je te revaudrais ça, promis.
Me revaloir ? Mais...
- Et puis il faudra que tu m'explique ce que tu faisais avec Tommy, conclu-t-il en ouvrant la porte. Merci Princesse, vraiment. Je ne suis peut-être plus un prince charmant après cela mais tu es indéniablement une princesse confirmée.
Puis il s'éclipsa. Mon téléphone s'était tu.
Princesse. Imbécile. Bien sûr que tu étais toujours un prince charmant. Le plus charmant de tous.
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Hey ! Chose promise, chose due : voilà le 24ème chapitre ! J'espère qu'il vous auras plu.
Mélina découvre un peu plus, mais alors rien qu'un peu, qui se cache derrière Gady. Un peu plus de confiance entre nos deux protagonistes... même si je vous l'accorde tout n'est pas encore très clair. ^^
Qu'en avez-vous pensé ?
Merci beaucoup de continuer à me suivre, et merci pour vos retour, vous me faites toujours beaucoup trop plaisir !!
A très bientôt !! (prochain chapitre dans une semaine, promis ! )
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