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Chapitre 22

Gadie

« Voyons très Cher, le monde n'est pas un simple code binaire fait d'une austère succession de 1 et de 0 ! Le monde n'est pas cet assemblage froid de pixels blancs et noirs ! Non ! Car chaque pixel, aussi sombre ou clair soit-il, est composé d'un arc-en-ciel, d'un assemblage tout particulier de couleurs. Le monde n'est ni blanc ni noir, il est diversité !!! »

Un tintamarre assourdissant explosa alors dans les haut-parleurs et le couinement insupportable d'une armée de trompettes bouchées, assortis de leurs supers copains les violons désaccordés, vint aussitôt emplir l'espace. Serrant la mâchoire, je me tassai un peu plus contre le mur. Marie dandinait stupidement son énorme derrière tandis que Lucas s'effondrait sur le sol, comme subjugué par la tirade pathétique qui venait d'être déclamée. Je détournai le regard, effarée. Bon sang, déjà que le scénario laissait franchement à désirer, pourquoi avait-il en plus fallut que l'on confie à Tommy la composition de la bande musicale ! À ce rythme-là, mes tympans allaient finir par se mettre en grève. Et moi aussi par la même occasion !

Karim et Basile surgirent sur scène, vêtus de leurs élégants costume de piafs déplumés, et entamèrent avec Marie une danse endiablée au rythme des maracas. J'étouffai un soupir épuisé et appuyai ma tête contre le mur de briques noires, laissant avec dépit mes oreilles être inondées par ces cris monstrueux de castafiore enrouée. Mon existence était un cauchemar.

Je fermai les yeux, tentant de faire abstraction de la scène d'horreur qui se déroulait devant moi. Enfouis dans les manches de mon sweat, mes doigts trituraient nerveusement le couvercle de ma boite en métal. Je ne savais pas ce que je faisais là. Non que je détestasse ce lieu, bien au contraire : j'aimais venir ici, j'aimais ce théâtre et, en dépit de leurs misérables talents d'acteurs, j'adorais cette troupe de cinglés. Mais mon esprit était ailleurs. Marco envahissait mes pensées. Ses larmes, ses blessures et ses pleurs occupaient désespérément mon cerveau, foutant à l'envers mon cœur et mon estomac. Je ne pensais qu'à cela. A cet argent que je n'avais pas. A cette douleur qui brulait au fond de lui. A cet enfer sans fin dans lequel je ne cessais de sombrer.

Pourtant j'avais essayé de prendre en main la situation. Je m'étais résolue à le sortir de là, à nous sortir tous les deux de ce pétrin boueux. Ainsi, après avoir veillé de trop longues heures sur le sommeil perturbé de mon frère, je m'étais éclipsée pour aller flairer les quelques bourses qui trainaient dans le vieux pub de Ben. Entre deux bières, j'essayais de repérer les clients qui me devaient des services. Je n'avais pas d'autre solutions. Pleurer dans leurs bras n'aurait servi à rien : rien n'était gratuit dans ce bas monde, et je voulais à tout prix éviter de devoir quoi que ce soit à l'un de ces cadavres bourrés d'alcool et de pilules. Mais au vu du résultat, une entorse à cette règle sacrée allait finir par devenir inévitable...

2843,87. Ce chiffre se répétait en boucle dans ma tête. Comme une litanie. Il me hantait. 2843,87. C'était tout ce que j'avais pu récupérer. Tout ce que j'avais pu trouver, en grattant mes tiroirs, harcelant les clients, frappant les sales gosses de l'immeuble d'en face... Tout ce que j'avais amassé. Certes Marco aurait pu tenter de contacter quelques connaissances un peu fumeuses, mais depuis l'altercation avec Greg, disons que l'on ne pouvait plus vraiment compter dessus. Il s'était mis le ghetto à dos. Et cela n'allait pas vraiment arranger nos affaires... Crétin d'imbécile.

2843,87. J'engouffrai une nouvelle pastille.

- C'est le costume de dinosaure de Glenn perdue au milieu des marquis qui t'angoisse à ce point ?

Je sursautai. Bon sang, qui était l'idiot suicidaire qui avait osé venir troubler ce moment d'intense réflexion ?! Je tournai la tête, prête à libérer sur cette créature des enfer le feu qui bouillait en moi, avant de tomber nez-à-nez avec Laura et son opulente poitrine. J'haussai un sourcil, laissant retomber ma colère. Ben tiens, cela me changeait. Plantant mon regard dans ses pupilles effroyablement vertes, je lui adressai un regard agacé.

- Quoi ? grognai-je.

Elle m'offrit un petit sourire amusé puis s'adossa à mes côtés, soulevant distraitement les pans de sa robe.

- Quand t'es angoissée tu te goinfre de pastilles mentholées, répliqua-t-elle avec un mouvement de tête en direction ma boite de métal. Et depuis tout à l'heure tu as bien dû engloutir la totalité de ta boite...

Je la considérai quelques instants, silencieuse, puis baissai les yeux vers l'écrin que je tenais entre mes mains. Elle n'avait pas tout à fait tort, il était presque vide. Seuls trois pauvres misérables bonbons survivaient encore sur la surface brillante du réceptacle. J'eu un moment de vague. Etais-je à ce point pathétique pour noyer mon chagrin dans le sucre ? Je ne m'en étais même pas rendue compte... Quelle être faible je faisais. Etouffant un soupire épuisé, je relevai la tête vers mon asperge de comparse.

- Je suis pas angoissée, soufflais-je d'une voix lasse.

Laura eut une moue affligée, haussant les sourcils. Bon. Visiblement, ma réponse ne lui convenait pas.

- Je m'interroge, c'est tout.

- Tu t'interroge ?

- Oui, je m'interroge, martelai-je. Le sens de la vie, la course désespérée au bonheur, la cuisson des chaussons aux pommes... Tout ça quoi.

Elle secoua la tête avec effarement et vint se coller contre le mur, croisant ses bras sur son ventre.

- Ouah, je ne te savais pas si savante.

- Je suis un génie.

- C'est ça, soupira-t-elle. Le génie des tartes aux pommes...

Un léger soupir s'échappa de ses lèvres et ses yeux se perdirent de nouveau dans l'obscurité du théâtre. Un courant d'air glacial vint soulever ses mèches d'or, la faisant frissonner. Immobile, le dos toujours fermement collé au mur, je l'observai du coin de l'œil, n'osant pas affronter son regard.

Elle savait. Elle savait toujours tout. Quand j'allais mal, quand j'étais triste. Elle savait. Son regard ne cessait de m'étudier, de me scruter. Je sentais sa présence autour de moi, son aura. Etait-ce de la pitié ? De la compassion ? De l'amitié ? Je ne savais pas. J'osais croire à de l'amitié. Naïvement. Ravalant un grognement, je reconcentrai mon attention sur la scène qui se déroulait devant mes yeux. Karim et Basile portaient Marie en reine sur leurs épaules, balançant leurs jambes en l'air, tel un parfait cabaret. Wow. Je n'aurais jamais pensé que Basile pouvait se montrer si souple... Comme quoi, tout pouvait arriver.

- Donc tu ne comptes pas me parler si je comprends bien ?

Je relevai la tête vers Laura. Cette dernière me fixait d'un air sévère, les bras croisés sur sa poitrine. Une de ses mèches blondes retombait tristement sur sa joue.

- Il y a rien à dire.

- Rien ?

- Rien.

Laura tourna la tête en soupirant. Je me mordis la joue. J'étais une gamine. J'en avais conscience. Une pitoyable et pathétique gamine. Je ne valais pas mieux que mon frère au final. Deux gosses butés et fermés qui n'osaient jamais parler de leurs problèmes. Quelle famille de rêve ! Je me renfrognai, agacée.

- Dommage, lâcha finalement Laura dans un soupir, parce que me concernant, j'avais quelque chose à te dire...

J'haussai un sourcil.

- Quoi ?

- Ben rien du coup, vu qu'il n'y a plus rien à dire...

Ok, je retire. On était trois gamins. Enlever Laura de la liste était peut-être un peu trop prématuré...

- T'es sérieuse là ?

- C'est toi qu'es sérieuse.

Je sentis une bulle de chaleur me monter au visage. Comme un tourbillon de colère qui se libérait en moi. Brutal. Soudain. Je ne me contrôlais plus. Je cédais. Cédais à la faiblesse.

- Putain ! M'énervais-je en me tournant brusquement vers elle. Mais tu sais déjà tout ! Qu'est-ce que tu veux que je te dise de plus ?! Que plus le temps passe, plus mon frère se fait défoncer ?! Que je me chie dessus en pensant que dans trois jours Stud mettra sa menace à exécution ?!

- Non mais...

- Alors arrête de poser des questions stupides bon sang !

Je la fixai quelques instants d'un air rageur puis me laissai lourdement retomber contre le mur, bouche entre-ouverte, cœur battant. Prenant une profonde inspiration, je passai ma main sur mon visage. J'étais épuisée et misérable. À côté de moi, Laura me regardait sans rien dire, triturant le tissu de ses jupons. Malgré le brouhaha incessant de la salle, mes oreilles parvenaient à entendre le sifflement léger de son nez. Doux et saccadé. Je poussai un grognement et enfonçai mes mains dans les poches de mon sweat, laissant mon regard se perdre dans le décor. Megan, assise sur une malle à l'autre bout de la scène, nous observait avec un drôle de regard. Je détournai la tête.

- Ok ok, souffla Laura après quelques instants d'un silence aussi lourd que pesant, je ne pose plus de question...

- Ravie de voir que le message est passé.

Déjà, Megan ne faisait plus attention à nous. Pinçant les manches de son costume de policière, elle regardait la représentation avec un léger sourire. Glenn vint lui murmurer un truc à l'oreille et toutes deux se mirent à rire.

Je me mordis les lèvres en détournant le regard. Pourquoi m'étais emportée comme cela ? Pourquoi n'arrivai-je pas à me contrôler, à garder mon calme ? Ne serait-ce qu'une journée ? Cinq petites minutes ? Mais non. C'était comme si le feu de ma colère brulait en permanence au fond de moi, prêt à exploser à tout instant. J'étais un volcan éveillé, une bombe à retardement. Laura ne méritait pas cela. Personne ne méritait cela.

- Ce que je voulais te dire, repris Laura d'une voix douce, c'est que... je crois avoir trouvé une solution à ton problème.

Je me figeai.

- Une quoi ?

Je senti Laura se détendre à côté de moi. Se détachant du mur, elle tourna son buste et m'adressa un petit sourire.

- J'ai une idée pour que tu puisses amasser du fric rapidement, expliqua-t-elle d'une voix malicieuse.

- C'est-à-dire ?

Le sourire de la grande blonde s'agrandit et elle se pencha vers moi. Son parfum vint envahir mes narines. Mon cœur battait à cent à l'heure. Elle avait... une idée.

- Je t'explique, commença-t-elle. Hier, avec Tommy, on est venu au théâtre pour faire des essais lumière pour la pièce. Tu sais, comme on a plus que deux projos sur trois il faut qu'on...

- Abrège.

- Coffre-fort, dans bureau de la direction. Plein de tune.

De quoi ?

- Hein ?

- Ah ! s'exclama-t-elle d'un air ravi. Tu vois que la version courte n'était pas le choix le plus judicieux !

Je devais avoir mal compris. Je devais forcément avoir mal compris. Laura ne pouvait pas me proposer un plan pareil. Ce n'était pas possible.

- Tu veux que je... vole le théâtre ? demandais-je, figée.

- Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

- Si, assurai-je, c'est exactement ce que tu viens de dire.

Elle eut un soupire et croisa ses bras sur sa poitrine, plongeant son regard dans le mien. Quoi ? Je me trompais ?

- Ce n'est pas le théâtre que tu vas voler, expliqua-t-elle d'une voix assurée, mais son propriétaire, nuance.

J'écarquillai les yeux. Son propriétaire ? Le père de Mélina ? Non, jamais de la vie. Je ne pouvais pas faire cela, pas à elle. J'eu un mouvement de recul, horrifiée.

- T'es malade je peux pas faire ça ! Ça revient strictement au même ! Et puis, je ne suis pas une voleuse purée !

- Mais non, ce n'est pas du vol c'est un emprunt, ne dramatise pas. Tu n'auras qu'à tout rendre après. Et puis rassure-toi, ce sont les réserves du proprio, on ne puise pas là-dedans nous...

Je la fixai d'un air effaré. Laura, me proposer un pareil plan. Je n'en revenais pas. Je ne pensais pas qu'elle puisse me croire capable de tel forfait. J'étais désespérée certes, mais je ne voulais pas m'abaisser à cela. Je ne voulais plus faire cela. Plus jamais. Arnaquer, mentir, tricher. Je l'avais suffisamment fait pendant quinze ans. Maintenant, c'était fini. Laura m'avait aidé en m'en sortir. Elle m'avait soutenue et encouragée, au prix de tant d'efforts... Alors pourquoi voulait-elle m'y faire replonger ? Je ne comprenais pas.

- Et ce pauvre type ? Enchainai-je. T'as pensé au propriétaire ? Qu'est-ce qu'il va faire si je lui pique son fric moi ?

- Oh arrêtes, soupira Laura en haussant les épaules. Ce mec est pété de tunes à ne plus savoir quoi foutre ! Tu lui rendrais presque service en faisant ça, crois-moi !

Je secouai la tête, en signe de refus. Son idée m'envenimait l'esprit. D'un côté une partie de moi la rejetai complètement, blâmant ces méthodes de bandit, tandis qu'une autre trouvait la proposition alléchante. Presque séduisante. Je secouai plus vivement la tête. Non. Je ne voulais pas.

- Et puis comment que tu veux que j'ouvre un truc comme ça ? ajoutai-je. Il y a pas marqué Joe Dalton sur mon front, je n'ai jamais fait ça de ma vie !

- Ah, mais rassure-toi, c'est là que j'entre en jeu ! Regarde...

Avec un petit regard complice elle plongea une main dans son décolleté pour en sortir un morceau de papier plié en quatre. Elle me le tendit. Sans la quitter du regard, je saisis le papier que je dépliai lentement, méfiante. Trois combinaisons de chiffres y étaient inscrites. J'écarquillai les yeux. Bon sang...

- T'es complètement cinglée... soufflai-je sans détacher mes pupilles de l'enchainement hypnotisant de chiffres.

Laura eut un rire amusée puis pencha sa tête sur le côté, me faisant relever les yeux. Elle m'adressa un regard instigateur.

- Alors ? demanda-t-elle, un léger sourire en coin.

Je fis osciller mes yeux entre Laura et le papier. Mon cerveau bourdonnait, mon cœur s'excitait. Oui. Non. Je ne savais pas. Je ne devais pas. Mais avais-je un autre choix ? Oui, bien sûr, on a toujours le choix. Tout le monde a toujours le choix. Enfin, tout le monde sauf moi. Je ne l'avais jamais eu. Ou peut-être n'avais-je fais que les mauvais à chaque fois. Je ne savais pas. Je ne savais plus. L'argent, mon frère. Un vol. Mélina. Tout était confus. Tout se mélangeait dans mon esprit. J'étais perdue, complétement perdue. Le visage tuméfié de Marco se présenta devant moi. Mon cœur se brisa. Pris d'un malaise, je poussai le papier vers Laura.

- Non. Je peux pas faire ça... Je suis plus comme ça... Je ne veux pas...

Le soupire agacé que lâcha mon amie me tira de ma torpeur. Je relevai les yeux vers elle, épuisée.

- Alors tu vas faire quoi ? s'énerva-t-elle en plantant son regard dans le miens. Hein ? Qu'est-ce que tu vas faire si tu ne fais pas ça ? Tu vas retourner te rouler aux pieds de ce connard ? Tu vas le supplier à genoux de vous laisser encore un peu de temps ? Tu vas faire quoi ? T'as quoi comme choix sinon ça, hein ?!

Je la fixais avec stupeur. Bon sang. Mais je ne savais pas ! Je n'en savais foutrement rien ! Tout ce dont j'étais certaine, c'était que j'étais faible. J'étais désespérément faible. Un frisson glacé me parcouru le corps. Je baissai la tête. Non. Je ne voulais pas m'abaisser à voler. Je ne voulais pas redevenir l'adolescente misérable que j'avais été mais... mais j'avais besoin d'argent. Quel autre choix avais-je à ma disposition ? Le temps était trop court. Mon frère souffrait. Stud se rapprochait. Je savais que je n'avais jamais été très pas douée pour réfléchir, mais là... là tout était pire. Trop de choses s'emmêlaient dans mon esprit. Ma peur, ma colère. Ma faiblesse.

- Laura, je ne peux pas faire ça. Ce n'est pas bien.. ! Ce type... Ce type il n'a rien fait pour mériter que je le vole !

- Bon sang ! Explosa Laura en levant les bras. Mais ce mec ne sait sûrement même plus qu'il a laissé de la tune ici ! Tu l'as déjà vu toi ? Parce que moi jamais ! Et même s'il le savait, je peux t'assurer que ce ne sont pas quelques milliers de moins qui vont le faire trembler.

Je me pinçai les lèvres. Elle avait peut-être raison, mais cela me perturbait. En faisant cela, ce n'était pas simplement cet homme que je volerai, mais le théâtre. Je volerai sa fille. Je trahirais leur confiance à tous. Tous. Par mes bêtises. Mes pitoyables bêtises.

- Tu n'auras qu'à remettre l'argent une fois que tu auras renfloué les caisses... ajouta Laura d'une voix qui se voulait plus douce.

Je relevai mon regard vers elle. J'y lisais de la compassion, de la compréhension. Même un peu de pitié. Et pourtant, c'étaient ces mêmes yeux qui m'encourageait à commettre un délit. A réaliser une chose qui me répugnait.

- Gadie, murmura doucement mon amie, je sais bien que tu n'as plus envie d'agir comme ça mais, avec le peu de temps qui te reste je...

- Ok.

Laura se tu brutalement et me regarda avec surprise.

- Quoi ?

- J'ai dit ok, répétai-je d'un ton neutre. C'est d'accord je le fais. File-moi ton papier.

Elle eut temps d'arrêt, fixant mon visage avec une stupéfaction ahurie, puis battit vivement des paupières. Elle se redressa maladroitement et me rendit le bout de papier.

- Euh, oui. Tiens.

Je le saisis. Mes mains étaient moites. Dépliant le morceau déchiré, mon regard se posa une seconde fois sur les notes de Laura. Je les fixais tristement, ailleurs.

J'allais le faire. J'allais me rendre dans ce bureau, ouvrir ce coffre et partir avec l'argent. Comme cela. Tout simplement. J'allais voler un homme que je ne connaissais pas. J'allais voler Mélina. Voilà. Mon cœur se serra douloureusement.

- Tu verras, expliqua Laura, c'est tout bête. Le coffre se trouve dans la grande armoire bleue, derrière une armée de dictionnaires. Il y a trois leviers, c'est un modèle assez vieux à code. Et puis ne t'inquiète pas, j'ai vérifié et il n'y a pas de caméra ni d'alarmes, c'est clean. Quand tu...

- Depuis quand t'es devenue une pro dans ce domaine toi ? la coupais-je d'une voix intriguée.

Arrêtée dans son élan, Laura se tut quelques instants, perdue, avant d'esquisser un sourire. Elle se tourna un peu plus vers moi, l'air soudainement malicieux.

- Ah ! Mais tu ignores tout de ma vie de l'ombre... Je suis un ninja !

J'eu un léger rire. Un rire nerveux. J'haussai un sourcil amusé.

- Un ninja pilleur de théâtre tu veux dire ?

- Exactement.

- Impressionnant...

Un vacarme assourdissant nous tira brusquement de notre palpitante conversation. Je tournai aussitôt la tête. Sur scène, le trône du roi gisait tristement au centre de l'estrade, complètement renversé sur le côté.

« Purée mais fais gaffe ! »

Maël se mit à faire de grands mouvements de bras agacés, libérant sur Lucas un flot de commentaires déplacés. Glenn accouru pour tenter de le calmer, tandis que Karim et Jérémy redressaient péniblement le siège royal. Au fond de la pièce, à moitié englouti dans l'obscurité, Tommy jetait des coups d'œil inquiet en direction de la scène. Je fronçais les sourcils. Je ne l'avais pas remarqué. Cela devait faire bien dix minutes qu'on ne l'avait pas entendu. Pourtant, c'était un professionnel dans son domaine. Dans le genre « je gueule partout avec une tronche d'excité », on ne faisait pas mieux. Il était d'ailleurs rare que je puisse rester aussi longtemps adossée à mon mur. Je plissai les yeux.

Il était en pleine discussion avec Louise, la secrétaire, ainsi qu'une autre personne dont je ne parvenais qu'à distinguer l'ignoble couleur rose de son T-Shirt, le restant de son corps étant complétement dissimulé par les ombres et l'énorme tête de mon metteur en scène. Ce dernier, bras croisés, hochait lentement la tête, prononçant par moments quelques paroles inaudibles. Une ride d'inquiétude inhabituelle barrait son front. J'haussai un sourcil. Que pouvait bien lui dire Laura pour que cela l'intéresse d'avantage que le spectacle désastreux que l'on mettait en scène ?

Lâchant le noiraud anorexique du regard, je reconcentrai mon attention sur la scène. Maël avait fini par se calmer et le trône avait retrouvé sa place, bien au chaud dans les coulisses. Mais tous ces soucis me semblaient à présent complètement illusoires. Dans quelques minutes à peine, j'allais commettre un vol. Certes, il y avait bien pire dans la vie. J'avais commis bien pire. Tellement pire. Mais aujourd'hui, maintenant, je ne voulais plus commettre ce genre de chose. J'avais stupidement imaginé que plus rien ne pourrais me détourner de ce chemin un peu moins sombre que je m'étais tracé. J'espérais ne plus jamais avoir flancher. Ne plus jamais avoir à blesser. Mais à l'évidence je m'étais menti. Je n'avais pas changé.

Il s'agissait de mon frère. L'être le plus important de toute ma misérable existence. La personne à qui j'avais fait le plus de mal. Le seul homme de ma vie. Alors oui, je m'étais promis de ne plus jamais tricher, de ne plus jamais mentir. De ne plus jamais voler. Mais pour lui... pour lui j'aurais étripé le monde entier.

Finalement, ce vol, s'il me répugnait, il ne me gênait pas plus que cela. C'était presque un soulagement au final. Dans quelques heures, mon frère sera libre. Du moins, si Stud lui pardonne l'épisode « j'ai buté la môman à Greg ». Et merde...

- Tu devrais y aller maintenant, annonça Laura en se tournant vers moi. Tommy va nous faire son petit discours habituel et Louise est occupée avec lui...

Je jetai un nouveau coup d'œil vers Tommy. La troisième personne, une femme je présume au vu de la hauteur de ses talons, agitait distraitement les bras. Elle semblait parler.

- Si tu y va maintenant, continua Laura, personne ne te verra. Au pire, je leur dirais que tu es partie aux toilettes.

Je tournai la tête vers elle.

- Avec le temps que ça prendra, ils vont tous croire que j'ai la chiasse...

- Boooh, lâcha-t-elle avec un sourire. Ce n'est pas trop grave ça, ça te correspond plutôt bien.

Elle m'adressa un clin d'œil espiègle.

- Je te déteste, articulai-je.

- Voleuse.

- Ninja de trottoir.

Laura eut un léger rire puis me poussa du bras vers les coulisses.

- Aller imbécile, dégage...

Elle n'avait pas tort. Je n'aurais pas trois mille chances. Louise n'était pas dans son bureau, c'était une aubaine. Cette grande perche à lunettes ne quittait jamais son poste de garde, aboyant sur le premier qui s'approchait un peu trop du bureau du Big Boss. Et là, elle venait de quitter sa niche. Cerbère était partie, je devais en profiter. Hochant la tête, je commençai à m'éloigner, avant de me retourner une dernière fois vers ma blondasse favorite.

- N'empêche, hélai-je en direction de Laura, il faudra que tu m'explique comment t'as fait pour obtenir ce truc.

Laura haussa un sourcil avant de m'offrir un grand sourire. Elle posa ses mains sur ses hanches.

- Ah, ça t'intrigue finalement..! Promis à ton retour je te réserve la version longue en trois volumes !

- Super ! ironisai-je. Des heures d'ennuis en perspective !

Elle eut un rire.

- Imbécile. Aller ! Grouille toi !

Lui adressant mon plus beau sourire, je tournai sur moi-même et m'éclipsai derrière les grands rideaux sombres. Mon cœur battait à tout rompre dans ma poitrine. Dévalant les escaliers, j'entendis la voix rauque de Tommy appeler au silence.

« Les gars un peu de calme s'il vous plait ! J'ai une importante nouvelle à vous annoncer... »

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Voilà le chapitre 22 !! Tadaaaaa ! Et sans trop de retard qui plus est ! Je suis badass... 😬

Alors voilà, on a fini par trouver une solution à ce problème d'argent... pas forcément de la manière la plus correcte, vous l'aurez compris, mais bon... Gadie commençait sérieusement à être à court d'idées, et cela aurait pu être bien pire. Qu'en avez-vous pensé ?

Et cette pièce de théâtre, elle vous inspire ? 😉

Enfin voilà, j'espère que ce chapitre vous aura plu !

Merci beaucoup de continuer à me lire, et merci pour vos commentaires !

À bientôt !

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