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5. Voyage au bout du Bhoutan


1er janvier 2017


Yeux fermés, je me concentre sur ma respiration. Je ressens la brise du vent sur mon visage, la présence de chaque cellule de mon corps. Un état de plénitude m'envahit. Une onde se propage, les cellules se déplacent, se repositionnent les unes par rapport aux autres, se réordonnent. Une toison drue recouvre ma peau, tandis que deux bosses émergent dans mon dos.

Je rouvre les yeux, me redresse.

« Je... je suis un chameau. »

Adossé contre une colonnade, Gorzül m'observe d'un œil torve.

« Enfin ! Cela fait des semaines que vous moisissez dans ce temple bhoutanais à essayer d'apprendre cette technique. »

Sous sa forme humaine, le marchand de tapis applaudit à tout rompre.

« Félicitations, félicitations ! Je ne doutais pas que vous y parviendriez ! »

Je tente quelques pas maladroits. Se faire à cette forme est plus difficile qu'il n'y paraît.

« Bon, bah, voilà, vous êtes un chameau, commente Gorzül. Je ne suis pas trop sûr de savoir à quoi ça sert, mais j'espère que vous êtes content, maintenant.

— C'est un petit pas pour le chameau, mais un grand bond pour les camélidés.

— Hein ?

— Euh, j'essayais de marquer l'instant par une phrase historique. Ça sonnait mieux dans ma tête. »

Le vampire-garou soupire avant de porter son regard sur un moine, assis non loin. Crâne rasé, le teint hâlé, il inspire, puis expire, détaché du monde extérieur. Son nez enfle pour prendre une teinte rouge vif, sa peau pâlit jusqu'à devenir d'un blanc absolu, des cheveux multicolores émergent de sa tête. Je le dévisage, non sans une certaine admiration. La technique de métamorphose ultime, celle que seuls les maîtres sont capables de pratiquer.

« Encore un qui se transforme en clown, commente Gorzül.

— Un peu de respect, le réprimande le marchand de tapis. Devenir clown shaolin exige un entraînement hors du commun. Vous avez sous les yeux le résultat d'années d'expérience.

— Ouais, ouais. »

Le clown se redresse avant de saisir un klaxon et une tarte à la crème. Il s'enfuit aussitôt en hurlant, à la recherche d'autres congénères.

« Je croyais qu'un temple était censé être calme, grogne Gorzül. Vous savez, par rapport à la méditation, tout ça... »

Mon regard brillant rencontre celui de mon assistant, qui se renfrogne. Il n'a certainement pas la moindre idée de ce à quoi je suis en train de penser.

« Je sais parfaitement ce à quoi vous pensez, reprend Gorzül, et ma réponse est non. Je ne vais pas rester des années dans ce temple, tout ça pour que vous vous métamorphosiez en clown. »

Décidément, cet assistant ne passe son temps qu'à râler.

« Et arrêtez de me critiquer dans des propositions incises, poursuit-il.

— Je n'ai rien dit.

— Vous êtes écrivain, et je vous connais un peu, maintenant, alors arrêtez ce manège avec moi.

— Ou plutôt, ce cirque, non ? »

Gorzül se frappe le visage du plat de la main. Il ne le montre pas, mais je sais qu'il apprécie mon humour légendaire.

« Je déteste votre humour. »

Il faut dire qu'il est vraiment très habile pour cacher ses véritables sentiments.

« Bravo, bravo ! »

Le marchand de tapis acclame quant à lui la moindre de mes remarques. Ajoutons à cela les promotions exceptionnelles qu'il m'offre toujours concernant sa marchandise. Cela me rappelle que j'ai encore acheté deux carpettes uniques en leur genre, pas plus tard que ce matin.

« Que personne ne bouge ! »

Gorzül jette un regard vers l'entrée du temple. Une chenille verte se dresse devant nous, et agite une bombe de peinture verte.

« Eh, mais c'est la chenille de la dernière fois, constate Gorzül.

— Je ne suis pas une chenille, je suis un asticot, clame-t-elle.

— Euh, vert ?

— Si je suis verte, c'est parce que j'ai été aspergée par cette bombe de peinture verte.

— Mais d'habitude, vous êtes de quelle couleur, du coup ?

— Bah, euh, verte, quelle question. »

Elle pointe la bombe à peinture dans ma direction.

« Toi, le chameau ! Je n'ai pas oublié l'épisode du tapis, et je suis venue me venger ! Voici arrivée l'heure du tag !

— Hein, quoi, quel tapis ? »

Je cherche des yeux le marchand, mais il s'est volatilisé. La chenille s'approche de moi, menaçante.

« Ce tapis était plein de mites ! Regarde ça ! »

Elle brandit un fil sous mes yeux.

« Euh, c'est un fil.

— C'est tout ce qu'il reste de mon tapis ! Il a entièrement été dévoré par ces fichues bestioles !

— Ah, vous m'en voyez navré, alors. Mais en fait, contrairement à ce que les apparences pourraient laisser supposer, je ne suis pas vraiment marchand, mais...

— Silence ! Ces boniments ne marcheront pas avec moi ! »

Gorzül s'interpose au dernier instant. Qu'est-ce que j'apprécie cet assistant.

« J'espère que vous dites du bien de moi dans vos propositions incises. » commente-t-il.

Enveloppé de sa cape noire, le vampire-garou se dresse de toute sa hauteur. Son visage d'albâtre surplombe la chenille vindicative, ses yeux rouges étincèlent d'une lueur inquiétante. Je me demande si je ne ferais pas mieux d'intervenir si je ne veux pas que la scène qui suive ne m'oblige à recatégoriser cette histoire en "mature". Ou alors je ferai une ellipse, c'est bien, ça, les ellipses.

« Écoutez, reprend le vampire-garou, je suis pacifiste, donc je vous prierais de bien vouloir déposer les armes, afin que nous puissions discuter de...

— Jamais, mouahaha ! »

Un jet de peinture interrompt la tirade de Gorzül, qui se décale sur le côté.

« Aah, je déteste la peinture ! »

Finalement, la scène ne s'est pas tout à fait déroulée comme prévu. Quant à l'ellipse, l'action était beaucoup trop courte pour ne serait-ce que l'envisager.

La chenille se rapproche de moi, la bombe à la main. Gorzül à terre, plus rien ne semble pouvoir l'arrêter. La tension dramatique atteint son paroxysme. Impossible maintenant de recourir à une ellipse salvatrice, sous peine de m'attirer les foudres de mes lecteurs.

« Un instant ! Tu prétends être un asticot, mais pourtant tu conjugues tous tes verbes et participes au féminin.

— C'est parce qu'il s'agit de mon genre, justement.

— Certes, mais "asticot" est masculin, justement. Donc, qu'est-ce qui devrait primer ? Ou alors signifie peut-être que tu es en fait une chenille, sans le savoir...

— Mais je ne suis pas une chenille ? Je m'appelle Elenasticot, pas Elenachenille ! »

Je profite d'avoir perdu son attention dans de profondes questions existentielles pour effectuer un repli stratégique. Ma forme de chameau, aussi encombrante et peu pratique soit-elle, me permet au moins de courir plus vite. À mes côtés, Gorzül me rejoint sous la forme d'une chauve-souris, désormais repeinte en vert.

Je ne peux m'empêcher de commencer à chantonner.

« Une chauve-souris verte, qui volait dans l'air...

— Essayez seulement de continuer et je démissionne. »

Aucun humour, décidément.

« Eeh, vous ne m'échapperez pas ! »

Derrière nous, la chenille verte s'est déjà rendue compte de la supercherie, et se met en chasse. Trois clowns shaolins interviennent finalement, attirés par tout ce tapage. Des tartes à la crème fusent à travers la pièce, de même que des jets de peinture verte. Cette fois-ci, la scène est d'une violence telle que je ne m'attarderai pas dessus par égards pour les plus jeunes lecteurs.

Nous arrivons enfin à sortir du temple par une porte dérobée, pour retrouver Zogothar, occupé à manger des carottes.

« Zogothar, on part d'ici en vitesse ! »

Le dragon ouvre des yeux éberlués, tandis que je cours vers lui.

« Mais, euh... vous êtes qui, vous ?

— Mais c'est moi, voyons.

— Euh, vous êtes un... euh...

— Un chameau, oui ; j'ai réussi à me métamorphoser. Il faut qu'on parte d'ici. »

J'essaie de monter sur le dos du dragon, ce qui est tout sauf évident avec ma nouvelle morphologie. Gorzül s'accroche à une de mes bosses, toujours sous sa forme de chauve-souris. Le tintamarre du temple a laissé place à un silence inquiétant. Pour l'heure, nous ne savons pas ce qui est arrivé aux moines ni à la chenille, mais mieux vaut ne prendre aucun risque.

Zogothar déploie ses grandes ailes rouges, et nous propulse face au soleil couchant. Nos silhouettes se découpent dans un ciel teinté d'écarlate.

« I'm a poor lonesome cowboy...

— Vous n'êtes ni pauvre, ni seul, ni même un cowboy, alors arrêtez de chanter, m'interrompt Gorzül. En plus, ce n'est pas un coucher de soleil, mais l'aube, et vous n'avez véritablement rien fait.

— Je me suis transformé en chameau, quand même. Cette année commence bien.

— Vous avez été tagué, aussi. »

Je hausse les épaules.

« Que veux-tu ; ce sont les risques du métier. »

La chenille se matérialise dans le champ désert, puis lève les yeux vers le ciel. Elle fait une grimace. Ses pouvoirs de téléportation lui ont peut-être permis d'échapper aux clowns, mais pas d'arriver à temps. Pour couronner le tout, sa bombe de peinture est vide, de toute façon. Elle jette l'objet inutile au sol, pour la forme, avant de le ramasser, puis s'en débarrasser dans une benne appropriée, placée ici pour l'occasion.

Un petit homme enturbanné se détache d'un arbre pour l'accoster dans l'obscurité.

« Vous savez, je vends des tapis-volants, aussi... »

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