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Chapitre 28

Les ondes avaient disparu à la surface du lac, et sa seule cause en était le gel qui recouvrait entièrement sa surface. Personne ne s'était risqué à y jouer, a glisser sur la glace aux reflets aveuglants.

Seulement Remus et moi avions un point commun des plus innatendus ; nous étions tous deux des monstres et nos amis n'en étaient plus vraiment. Alors à l'heure actuelle, notre seule préoccupation était de savoir qui chuterai le premier.

Jamais je ne me serais crue capable de souhaiter m'amuser avec une simple connaissance, si même simplement avoir envie de rire et de me défouler.

À présent que je chancelai là, sur la paroie opaque et glissante, plus rien d'autre ne comptait que ce stupide jeu. Remus tremblait face à moi, totalement déséquilibré et des plus maladroits. Je ne savais même plus comment nous nous étions retrouvés là.

Il leva ses yeux bleus dans ma direction et une expression affolée s'afficha sur son visage. Il s'agrippa soudainement à mon bras et j'écarquillai les yeux :

-Tu triches !

Je me débattis, quoique doucement, pour me libérer de ses mains qui se servaient de mes bras comme soutien. Nous chancelâmes, mais je tins bon et finis par me dégager. Il esquissa un sourire malin lorsqu'il parvint cependant à demeurer debout, bien que difficilement :

-Il ne me semble pas avoir lu ça dans les règles...

Je lui fis une belle grimace en guise de réponse, et il pouffa. Voilà qu'il retrouvait le sourire et moi explorai l'inconnu : je ne me reconnaissais même plus. Qui était cette fille, sur la glace, à avancer sur place tout en tremblant pour conserver son équilibre ? Qui était cette élève de Poudlard qui se détachait soudainement de la réalité avec un inconnu ? Sûrement pas moi...

Je resserai mes gants sur mes poignets et fis un autre tour autour de mon cou avec mon écharpe ; en plus d'avoir froid, je voulais demeurer concentrée pour gagner cet idiot de jeu.

Le jeune homme de Gryffondor revint en force et propulsa toute sa force sur mes épaules pour me faire chuter : cependant, je parvins à m'accrocher à ses bras pour qu'il me redresse avec lui pour éviter de tomber à son tour. De nouveau droite, je levai ma jambe gauche et forcai sur la sienne pour tenter un croche-pattes.

-Je vais gagner ! rugis-je, véritablement déterminée.

Il s'accrocha tant bien que mal mais finit par abandonner. Ses muscles se décontractèrent et je pus enfin le faire tomber. Soudain, il s'agrippa à mon manteau et me tira vers lui avec une force surprenante.

Le choc de la chute me coupa le souffle, et nous roulâmes au sol. Je finis par me stopper sur le dos, hors d'haleine, pour entendre le cri triompheur de Remus :

-Ha ha ! J'ai gagné !

-C'est faux ! protestai-je, pourtant à ma grande surprise amusée. On est tous les deux à...

Je me tus subitement, les yeux écarquillés. Un craquement venait-il de résonner à travers la glace ? Ou bien avais-je rêvé ?

Je me redressai lentement et vis Remus debout a quelques mètres de moi, le teint blafard. Il tendit la main dans ma direction et bredouilla :

-Tout va bien. Viens lentement dans ma direction. Surtout, lentement. Ne prend pas appui sur la glace...

Je baissai les yeux, aussi raide qu'une statue de marbre. À cet instant, les secondes résonnaient lentement à mes tympans, aussi lents que puissants. Les battements de mon cœur suivaient la cadence, comme ralentissant le temps.

Tout va bien.

Je pivotai lentement, un nouveau cracement me fis tendre tous mes muscles. Je sentis le sang descendre d'un seul coup, pour venir battre à mes pieds qui me maintenaient à présent debout sur les fissures.

Des stries noires, effrayantes, se frayaient un passage jusqu'à moi. Les remous glacés de l'eau sous la couche de gel grondaient, comme menaçants. Comme attendant ma venue.

Tout va bien.

Je relevai lentement les yeux vers Remus. Si celui ci abordait une expression dévorée par la peur, cela ne l'empêcha pas de rester parfaitement immobile à seulement trois mètres, la main tendue vers moi et son regard plongé dans le mien :

-Tout va bien.

-Tout va bien, répétai-je dans un souffle pour moi même.

Je rabaissai le regard vers mes pieds, et un nouveau gémissement de glace retentit. Les secondes s'éternisèrent. Les bruits se turent et seul resta le rythme fou des battements affolés de mon cœur.

Et soudain, la glace se fendit et l'eau glacée me dévora.

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