Chapitre 36 : Face à face
Rogue lui avait demandé une heure avec la pierre de Résurrection. Harry avait fini par patienter devant la salle de défense contre les forces du Mal. Sa mère se trouvait de l'autre côté. Il avait déjà décidé qu'il ne contacterait pas ses parents, la vision dans le miroir du Riséd avait été trop douloureuse pour qu'il veuille retenter l'expérience.
Seul celui qui tenait la pierre pouvait voir les âmes des défunts, de toute façon.
Au premier grincement de la porte, Harry bondit sur ses pieds. L'expression douloureuse de Rogue lui porta un coup. Pour qu'il ne puisse pas se retrancher derrière son indifférence habituelle, revoir Lily avait dû être une épreuve.
– Alors ?
Il n'aurait pas dû, mais la curiosité était trop forte.
– Alors il paraît que je suis trop sévère avec mes élèves, répondit Rogue sur son ton habituel. Le fait que vous soyez une bande de cornichons ne semble visiblement pas être une justification suffisante.
– Parce que c'est faux ! Hermione est la meilleure élève que je connaisse et vous agissez comme un... comme ça avec elle aussi.
Il n'aurait pas été surpris que sa répartie lui vaille une retenue, alors le sourire qui étira les lèvres minces de Rogue le prit par surprise.
– Visiblement, vous avez un point de vue similaire sur le sujet. Ce qui n'est pas mon cas, précisa-t-il en lui rendant la bague. Quoi qu'il en soit, votre mère avait quelques messages pour vous.
Harry attendit la suite, la gorge serrée.
– Votre père ne serait pas très enthousiaste concernant cette histoire avec Draco et vous recommande la prudence.
Ce n'était pas surprenant, Ron et Hermione avaient réagi exactement pareil, mais ça ne l'empêcha pas de grimacer.
– Votre mère n'est pas aussi tranchée. Pour reprendre ses mots « Les Serpentards ont tendance à côtoyer de près les Ténèbres, ce qui les rend capables du meilleur comme du pire. ».
Il avait récité ces mots comme s'il cherchait à graver la phrase dans sa mémoire. Sans doute parce que c'était ceux de sa mère et peut-être qu'il s'y était reconnu. Lily ne pensait pas forcément qu'à Draco en lui demandant de passer ce message. Après tout Rogue avait côtoyé les ténèbres de bien plus près que Draco.
– Quant à votre parrain, il digère.
Harry ne put s'empêcher de rire en imaginant Sirius.
En montant vers la Salle sur Demande, Harry dut s'arrêter plusieurs fois dans les escaliers volants. Ses yeux le brûlaient et il peinait à étouffer ses émotions. Il avait bien fait de ne pas activer la pierre. La dernière chose que Rogue lui avait dite raisonnait encore.
« Ce qui ne les empêche pas d'être fiers de vous et bien entendu, ils vous aiment. »
Il n'avait pas rajouté « et bla bla bla » mais ce n'était pas loin. Le malaise évident de Rogue l'avait presque fait rire et c'était aussi ce qui l'avait empêché de craquer là-bas.
En arrivant devant la Salle sur Demande, il avait regagné un peu de sang-froid, mais pas assez à son goût pour l'épreuve qui l'attendait. Dans la clairière où ils avaient passé tant de temps, adossé à l'Armoire à Disparaître, Draco l'attendait.
– Tu voulais me voir, dit aussitôt Harry.
Cette fois, ils étaient bel et bien seuls.
– Si un de nous deux a envie de voir l'autre, c'est plutôt toi je di...
– Malfoy !
Draco ricana.
– On n'avait pas terminé notre conversation, reprit Harry, et je préfère qu'on en finisse au plus vite.
– Je ne compte pas en finir, ce ne serait pas drôle.
Harry contint sa frustration.
– Qu'est-ce que tu veux à la fin, Malfoy ? Un coup tu essayes de prouver que je... enfin, de prouver la théorie de Pansy et l'autre tu fais l'inverse en sachant qu'elle est vraie.
– Draco. Et de quelle théorie tu parles ?
– Comment ça quelle théorie ? Tu m'as embrassé pour prouver qu'elle avait raison !
– Ah, cette théorie. Non, j'ai menti, dit-il dans le plus grand des calmes. J'avais juste envie.
Harry se préparait à répliquer quand il réalisa ce que Draco venait de dire. Peut-être que Ron et Hermione avaient raison, mais c'était de sa bouche à lui qu'il avait besoin de l'entendre.
– Tu me détestes depuis le premier jour.
– Le premier jour, c'était dans la boutique de Madame Guipure. C'est vrai qu'entre tes réponses bizarres et l'énergumène qui t'accompagnait je me suis posé des questions. J'étais surtout intrigué. Ensuite j'ai découvert que tu étais le Harry Potter et c'est toi qui m'as rejeté à ce moment-là.
– Tu venais d'insulter Ron.
– Je ne pouvais pas être ami avec la belette, c'était lui ou moi. Tu te rappelles des souhaits que mes parents me demandaient de réaliser chaque Noël ?
Draco se détacha de l'armoire pour venir vers lui et Harry s'éloigna, préférant faire les cent pas. Il s'en souvenait bien. Draco avait parlé de quelque chose qu'il avait abandonné et dit qu'il se posait des questions mais avait refusé d'entrer dans les détails. Le sang qui battait à ses tempes l'empêchait de réfléchir. Cette chose, ça ne pouvait pas être... lui ?
– Oui, je parlais de toi, Potter. Je t'ai dit que j'allais tirer cette histoire au clair. Au fond, je suis presque reconnaissant que tes amis soient la belette et Miss Je-Sais-Tout. Je n'aurais jamais pu me permettre devant les Serpentards ce que je me suis permis devant eux après Noël.
– Alors Hermione avait raison, tu testais les limites ? J'ai toujours dû mal à te croire. S'il y a un truc que tu as rendu très clair, c'est que tu me détestais ; tu m'as livré à Voldemort à la première occasion.
Il s'arrêta de tourner pour lui faire face et pour la première fois, Draco se mura dans le silence.
– Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi tu es descendu me chercher après ça.
Draco se détourna.
– Tu savais qu'on te soupçonnerait. Tu as risqué ta vie. Tu as menti à Voldemort pour ne pas qu'on me retrouve. C'est quand même contradictoire, Malfoy. Tu vas prétendre que tu ne sais pas pourquoi tu...
– Parce que tu hurlais ! s'exclama Draco.
Il inspira et reprit d'un ton plus mesuré.
– Ce n'est pas ce que je voulais. Je voulais me venger, pour moi, pour mon père, mais ce qu'ils t'ont fait... Pour être honnête ces dernières années, je crois que je te haïssais autant que je t'aimais.
Ce fut au tour de Harry de rester sans voix. Qu'il ait envie de l'embrasser était déjà difficile à croire, alors qu'il l'aime ?
– Tu n'as pas la moindre idée de ce que c'était de t'entendre hurler sans rien pouvoir faire, d'entendre que tu faiblissais, de ne plus rien entendre du tout.
Draco avait croisé les bras sur sa veste mais Harry avait eu le temps de noter que ses mains tremblaient. Alors comme ça, il n'était pas le seul à qui le passage au manoir avait laissé des marques.
– Je ne regrette pas ce qui est arrivé, dit enfin Harry. C'était horrible, mais sans ça, je ne pense pas qu'on aurait réussi à se parler.
– Je suis touché par ce que tu es prêt à endurer juste pour me parler.
Et le Draco Malfoy habituel était de retour.
– J'ai failli mourir pour toi, Malfoy. Plusieurs fois.
– Draco.
Sentant son regard le brûler, Harry cessa de faire les cent pas. Si Draco ressentait la même chose pour lui, qu'est-ce que ça signifiait pour eux ?
– Ça veut dire que toi et moi... ?
Il avait l'impression de se consumer de l'intérieur. Est-ce que c'était vraiment possible ? Harry fronça soudain les sourcils. En cours de défense contre les forces du Mal, Draco portait son uniforme aux couleurs de Serpentard, là une chemise sombre avait remplacé la blanche, complétée par une veste noire. Il s'était changé ?
Pour lui ?
Un instant, il fut tenté de le rejoindre, mais son corps refusa de bouger. Ce fut Draco qui traversa la distance qui les séparait.
– Tu as l'air de douter, Potter.
Harry soutint son regard. Il avait l'impression d'être dans un de leurs énièmes affrontements.
– Difficile d'oublier des années à se battre, répondit Harry.
Draco attrapa un bout de sa cravate rouge et or.
– Donne-moi cinq minutes, dit-il en se penchant vers son cou.
– Qui te dit que c'est ce que je veux... ?
Draco frôla sa peau, remontant vers sa mâchoire jusqu'à effleurer ses lèvres. Harry lutta pour rester de marbre alors que l'envie consumait ce qui lui restait de fierté. Il ravala sa frustration lorsque Draco s'écarta avec un sourire en coin.
– Oui, clairement ça ne t'intéresse pas. On devrait passer cette soirée à mettre les choses au clair, qu'est-ce que tu en dis ?
Harry empoigna la veste de Draco pour le tirer vers lui et l'embrassa. Draco répondit aussitôt. La sensation l'arracha du sol et l'y renvoya brutalement l'instant suivant quand tout s'arrêta. Armé d'un air innocent, Draco faisait mine de réfléchir.
– Point numéro un, tu deviens un Malfoy, hors de question que je perde mon nom.
– Draco... Tais-toi.
Draco ricana.
– Si tu n'es encore là que pour jouer, Malfoy, tu peux...
Un baiser le coupa. Pris par surprise, il resta un instant immobile à encaisser les sensations qu'embrasser Draco Malfoy lui procurait. Son parfum flottait tout autour de lui, identique à celui de la potion. Lentement, Harry referma les bras autour de ses épaules et ferma les yeux.
Ils avaient longtemps été dans des camps opposés, mais Draco avait refusé de rejoindre les Mangemorts quand ses parents l'avaient appelé et lui-même avait choisi de l'aider malgré le danger de sa mission. Dans un sens, ils avaient fini par former leur propre camp. Étant qui ils étaient, il était difficile pour eux de faire autrement. C'était un avant-goût du futur qui les attendait s'il le choisissait, parce que beaucoup ne comprendraient pas.
Harry rompit le baiser sans le relâcher.
– Si on apprend qu'on est ensemble, la réaction ne sera pas très bonne, murmura-t-il en rouvrant les yeux. Je ne suis pas sûr que ta famille apprécie le scandale.
– Oh, ils n'apprécieront pas. Je ne suis pas sûr que tes Weasley aiment l'idée non plus. La Gazette adorera par contre, leur meilleure Une depuis des siècles.
Draco affichait un sourire moqueur mais Harry devinait l'appréhension cachée derrière.
– Le côté positif, dit enfin Draco, c'est que ça découragera tes groupies. Cette Romilda Vane par exemple... Et puis on peut toujours passer la fin de notre scolarité tranquille si personne n'est au courant. Évite d'en parler à Weasley et Granger, vu comment garder un secret te réussit, mieux vaut que le moins de personnes possible soient au courant.
Harry faillit protester, puis se rappela le manque total de discrétion dont Ron et Hermione avaient fait preuve par moment et décida que ça pouvait bien attendre la fin de l'année suivante, quand il serait plus au clair avec lui même.
– D'ailleurs, je croyais qu'on devait faire une soirée mise au clair ? lui rappela Harry. C'est déjà fini ? Si tu t'ennuies on a toujours les parchemins de métamorphose et de potions à rendre.
– Pourquoi pas, je ne vois rien de mieux à faire que travailler sur une dissertation de McGonagall, répondit Draco en lui retirant ses lunettes.
En riant à moitié, Harry l'embrassa.
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Avant-dernier chapitre, déjà :o rendez-vous mercredi pour l'épilogue !
Des bisous ^o^/
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