Chapitre 22 : Cauchemars
Après le départ du professeur Rogue, Harry resta un long moment à fixer les rideaux en attendant que son cœur se calme. Ça n'arriva pas. Chaque fois qu'il imaginait les Mangemorts livrer à Draco ce qu'il ressentait, son angoisse repartait de plus belle. Il finit par rejeter ses couvertures et un chat noir quitta l'infirmerie.
Le calme alors qu'il remontait les allées labyrinthiques de la Salle sur Demande lui donnait l'impression qu'il était seul, c'est pourquoi découvrir la silhouette de Draco assis sur la chaise branlante le surprit. En l'apercevant, un sourire moqueur se dessina sur ses lèvres et Harry reprit aussitôt forme humaine. Le rejoindre sans se cacher derrière sa forme féline lui fit une drôle d'impression.
– Les vieux réflexes ? dit Draco en refermant son livre.
– Il est tard, je ne voulais pas être surpris hors du dortoir.
– Je ne pensais pas te revoir ici.
En arrivant à sa hauteur, Harry décida qu'il préférait aller examiner l'armoire.
– Pourquoi ?
– Tu as oublié ce que je t'ai dit dans le train ? répondit Draco. On est quitte.
– On a fait une trêve non ? Quel intérêt si c'est pour ne plus s'adresser la parole ? dit-il d'un ton détaché en examinant les craquelures dans les portes de l'armoire.
Comme Draco ne répondait pas, Harry ouvrit la bouche pour dire quelque chose, n'importe quoi, tant que ça brisait le silence.
– Tu essayais de faire quoi avec cette...
– Ce n'est pas une trêve que tu demandes là, Potter, c'est d'être amis. Je peux t'accorder ça si tu laisses tomber Weasley et Granger.
– Dans tes rêves.
– C'est bien plus avantageux d'être ami avec moi qu'avec ces deux-là, tu finiras par t'en rendre compte.
– Malfoy, ta définition de l'amitié est tordue. On ne devient pas ami avec quelqu'un parce qu'on peut en tirer des avantages. Le temps qu'on passe avec une personne qu'on apprécie et tout ce qu'on partage, c'est mille fois plus important. Tu as vraiment envie de finir seul avec ton argent ?
Ses arguments auraient dû faire mouche, mais vu le sourire grandissant de Draco, ce n'était pas le cas.
– Tu veux être mon ami, donc si je suis ta logique, tu apprécies le temps qu'on partage ensemble.
Harry prit une profonde inspiration.
– Des fois, j'ai vraiment l'impression que tu n'entends que ce qui t'arrange. Bon, qu'est-ce que tu fabriques avec cette armoire ?
Ce retour brutal à la réalité fit perdre son sourire à Draco.
– Je ne peux pas tuer Dumbledore, mais je peux faire entrer les Mangemorts dans le château. Cette armoire servira de passage quand elle sera réparée. C'est le plan dont j'ai convenu avec le Seigneur des Ténèbres. Je sais que tu ne t'associeras pas à ce genre de choses, alors tu...
– Je vais t'aider, mais il faudra qu'on prévienne Dumbledore. On peut leur tendre un piège.
– Hors de question. Il a ma famille, s'il se rend compte que je l'ai trahi il les tuera.
– Alors tu comptes le servir toute ta vie ? C'est vraiment ce que tu veux ?
Draco se ferma. Au bout d'un moment il se mit à faire les cent pas dans la petite clairière. Le fait qu'il ne refuse pas en bloc voulait tout dire, mais à sa respiration rapide et à sa pâleur, ce n'était pas une décision qu'il était capable de prendre. Il était trop terrifié par les conséquences.
– Malfoy... Draco, je ne peux pas te promettre que tout se passera bien, mais je peux te promettre que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour t'aider. (Il lui tendit sa main.) Si on ne parle pas de l'armoire jusqu'à ce que tu sois prêt à ouvrir le passage, personne ne pourra t'empêcher de le faire. Ensuite je préviendrai tout le monde pour que les élèves puissent se mettre à l'abri et que les professeurs et les membres de l'Ordre se préparent.
– On ne peut pas leur demander de risquer leur vie...
– Je suis d'accord, c'est un des pires plans que je n'ai jamais eus, mais tu allais ouvrir le passage dans tous les cas, non ? On leur donne une chance de réagir.
Draco hésita encore, puis accepta de lui serrer la main.
– Harry... ? Harry !
Harry batailla contre le tissu qui l'entravait jusqu'à parvenir à se redresser dans l'obscurité, couvert d'une sueur froide. Il croisa le regard inquiet de Ron. Voldemort n'était pas là.
– Ça va, Harry ? demanda Neville.
Au bord de la nausée, il tâtonna sur sa table de chevet pour attraper la carte du Maraudeur et fit apparaître les traits d'encre jusqu'à ce que se dessine le dortoir des Serpentards. Un poids quitta sa poitrine. Draco se trouvait dans son lit.
– Harry ? insista Ron.
– Désolé, un mauvais rêve, encore.
Il frotta sa cicatrice. Plus la réparation de l'armoire avançait et plus les visions avec lesquelles Voldemort le harcelait pullulaient. Des visions de Draco torturé et exécuté. Le pire étant que toutes se déroulaient à Poudlard. Le message était clair, s'il ne voulait pas que les cauchemars deviennent réels à lui de se rendre lorsque Voldemort entrerait au château. Rogue l'avait mis en garde qu'il utiliserait Draco contre lui et il avait beau tenter de se convaincre qu'en le gardant éloigné tout irait bien, ses nerfs commençaient à lâcher.
– Euh, Harry ?
Il se tourna vers Ron qui le fixait, gêné.
– Tu répétais le nom de Malfoy. Qu'est-ce qui se passe ?
Malgré son ton bas, dans le silence du dortoir tous l'entendirent. Les joues brûlantes, Harry secoua la tête.
– Juste un mauvais rêve.
Mais Ron semblait avoir compris plus que ça.
Il se tourna et retourna dans son lit jusqu'au petit matin, le sommeil le fuyant. Lorsque les premières lueurs de l'aube percèrent les nuages, il enfouit sa tête dans son oreiller, épuisé. La fatigue le suivit jusqu'au petit déjeuner. Assise à côté d'eux avec Dean, Ginny croisa son regard.
– Tu as une mine affreuse, Harry, lança-t-elle. Tu dors debout ces derniers temps, est-ce que tout va bien ?
– Oui, répondit-il en mordant dans un toast sans conviction.
– On a besoin de notre capitaine de Quidditch tu sais, insista Dean.
– Hmm.
Ginny lança un regard interrogateur à Hermione qui fit non de la tête. Ils décidèrent de le laisser tranquille le reste du repas et Harry plongeait dangereusement vers son jus de citrouille, perdu dans les brumes du sommeil, quand Ron lança :
– Tiens, Malfoy est là.
Ces mots chassèrent la brume comme une rafale. Ron lui offrit un sourire innocent et Harry le fusilla du regard. Les Mangemorts étaient déjà au courant, il n'avait pas besoin d'attirer les soupçons de Ginny ou de Dean par-dessus le marché. Par chance, les deux venaient de terminer leur repas et se levaient.
– On se retrouve aux vestiaires, dit Ginny.
Alors qu'ils s'éloignaient, Harry pivota vers Ron.
– Qu'est-ce qui t'a pris ?!
– Tu vas te décider à nous dire ce qui se passe avec ces cauchemars ? répondit Ron. Comment veux-tu qu'on t'aide si tu gardes tout pour toi ?
– Je n'ai pas besoin d'aide.
– Oh, tu veux dire, comme quand tu passais ton temps à espionner l'autre ? répliqua Ron. Oui, tu te débrouillais incroyablement bien quand tu t'es retrouvé coincé par le collier et par Tu-Sais-Qui.
Plusieurs têtes s'étaient tournées vers eux.
– Si tu pouvais baisser d'un ton.
– Si tu pouvais arrêter de jouer au héros solitaire et parler, répliqua Ron.
– Très bien, c'est bon.
Satisfait, Ron se resservit des œufs brouillés et Hermione se pencha vers eux, attendant qu'il se lance.
– C'est Voldemort, dit-il enfin, les cauchemars sont identiques aux visions qu'il m'envoyait avant. Comme celles où... celles où il avait capturé Sirius. Sauf que cette fois je sais qu'elles sont fausses, vu qu'elles concernent... vous savez...
Il fit un geste vague vers la table des Serpentards.
– Pourquoi ? dit Ron. Ne me dis pas qu'il sait que tu l'aimes ?
Entendre parler d'« aimer » lui fit drôle. Il n'était pas sûr que ce soit à ce point-là.
– Si, il sait. Il a fouillé ma mémoire. Il doit espérer que je vais craquer, mentit-il, parce qu'il ne pouvait pas leur dire qu'il s'agissait de menaces.
– Qui espère que tu vas craquer ? demanda une voix traînante dans le dos de Harry.
Il se retourna en parfaite synchronisation avec Ron et découvrit Draco juste derrière lui. Il se tassa sur son banc en maudissant Hermione. Si elle l'avait vu approcher, pourquoi n'avait-elle rien dit ? Il eut sa réponse quand elle s'adressa directement à Draco :
– Voldemort. Il a une connexion avec Harry et il l'utilise pour lui envoyer des visions.
– Et aucun de vos brillants cerveaux n'a pensé à l'Occlumentie ?
Harry pressa les mains contre ses tempes.
– Non. Merci.
Draco haussa un sourcil, puis le tira hors de sa table. Des expressions ahuries suivirent leur passage et Harry se rappela que si lui s'était habitué à la présence de Draco, personne ne les avait jamais vus ensemble. Il accéléra l'allure pour se maintenir à sa hauteur.
– J'ai un entraînement de Quidditch.
– Non, ce dont tu as besoin c'est un Occlumens, pas de faire joujou sur ton balai. Je me demandais pourquoi tu avais cette tête de déterré ces derniers jours... L'armoire est presque réparée et ton aide ne me servira pas à grand-chose si tu es trop fatigué pour tenir ta baguette.
Les murmures de la Grande Salle derrière eux s'accentuèrent encore quand ils franchirent les doubles portes, s'atténuant au fur et à mesure qu'ils s'éloignaient vers le hall. En haut des marches menant aux cachots, Harry s'arrêta net.
– Je n'irai pas voir Rogue.
– Un des meilleurs Occlumens se trouve au château et tu refuses son aide ?
– Il a déjà essayé de m'apprendre et ça n'a pas marché.
– Si tu crois que je vais te laisser le choix, Potter. Tu m'as promis ton aide.
Malgré sa réticence, quand Draco prit son bras, Harry se laissa traîner dans le bureau de Rogue. Le maître des potions releva la tête de ses parchemins, son regard tombant sur la main de Draco. Harry récupéra son bras à la hâte.
– Je sais quelles visions vous envoie le Seigneur des Ténèbres, dit Rogue.
– Alors pas la peine de rentrer dans les détails, dit Harry, et pas besoin de rester, Malfoy.
– Ça ne me dérange pas d'entrer dans les détails, dit Draco en s'adossant à la porte. Je sais déjà que les visions sont liées à quelqu'un qu'il aime. L'Amortentia, le grand amour inassouvi, tout ça.
Son ton était froid.
Le professeur Rogue l'ignora, contournant son bureau pour récupérer une fiole sur une étagère.
– Je suppose que vous ne souhaitez pas reprendre les leçons d'Occlumentie ? (En voyant sa grimace, Rogue lui tendit la fiole.) C'est une potion de sommeil sans rêves, elle n'empêchera pas les visions, mais vous ne les remarquerez plus. Il est possible que vous soyez affecté au réveil, comme si vous aviez oublié quelque chose, mais je n'ai pas de meilleure alternative si vous ne reconsidérez pas l'Occlumentie.
En sortant, Harry songea que c'était tout réfléchi : hors de question.
– La solution idéale à tes problèmes te tend les bras et tu la refuses, dit Draco.
– L'Occlumencie ne marche pas avec moi.
Sentant Draco le scruter, il se raidit.
– Effectivement, tu es un livre ouvert. C'est un vrai miracle que tu aies pu cacher le nom de ta petite amoureuse aussi longtemps.
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Il aura quand même fallu Voldemort pour qu'ils arrivent à se parler normalement. Est-ce Voldemort serait pas un peu leur tinder du coup ?
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