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Chapitre 6


Sander

Comté de Buskerud, Norvège, 1644

Suite à l'arrivée impromptue de nos invités, nous nous sommes dirigés d'un commun accord vers l'un de nos bâtiments les plus vastes, où nous entreposons une partie de nos réserves de bois. Par chance, nous avons rangé le local trois jours plus tôt, ce qui nous laisse un bel espace pour nous installer en rond et écouter les récits des étrangers. Ces derniers se sont tous rassemblés ensemble, sous les couvertures que les femmes du village leur ont apportées. Ils se serrent les uns les autres pour se réchauffer, et bientôt leurs tremblements s'atténuent.

En face d'eux, nous les observons sans mot dire tandis que quelques victuailles passent de nos mains aux leurs. Certains ont les traits tirés, à la limite du maladif, et les joues creuses, ce qui agrandit leurs yeux et la lueur tourmentée qui y règne ; d'autres, en tendant le bras, font apparaître leur teint trop blême et l'allure malingre de leurs silhouettes. Ils sont engourdis, hagards, et nous comprenons sans peine que le froid n'est pas le seul responsable de cet état...

Sur le chemin de la remise, j'ai entendu Erik souffler à mon père que leur voyage a été très pénible et coûteux. D'après lui, ils n'ont pas perdu que la santé depuis leur départ, et l'élan de peine et de compassion qu'a suscité cette information ne me quitte pas. Je le sens pulser en moi alors que je passe en revue tous ces visages tristes et troublés. Mais ce n'est qu'une fois qu'ils ont commencé à se restaurer que nous obtenons de plus amples explications grâce à la prise de parole de l'un d'eux. L'homme s'appelle Fritz et nous apprend qu'il est né au Danemark, comme nos amis voisins. Ainsi, il est l'interprète de son groupe et cette nouvelle nous soulage tous : nous ne risquons pas de nous mésentendre, il représente la passerelle entre nos deux cultures.

Nous sommes toutefois un peu étonnés et intrigués de savoir comment il est passé du Danemark à l'Angleterre, ce qui l'a conduit à traverser les océans. Et lorsque je lui pose la question, Fritz m'indique assez laconiquement qu'il a toujours beaucoup voyagé et qu'en arrivant en terre anglaise, il s'y est trouvé une deuxième famille. À le voir avec ces compagnons, je ne doute pas de la véracité de cette seconde affirmation : ils prennent soin les uns des autres, paraissent très soudés et aussi proches qu'une famille peut l'être.

Mon regard dévie de l'un à l'autre plus longuement, comme pour mieux les cerner, jusqu'à tomber sur la dernière représentante du clan. La femme est blonde, avec de longs cheveux ramassés à moitié sous son capuchon. Ses iris verts et sérieux miroitent sous le flamboiement des quelques bougeoirs allumés de ci de là, et un jeu d'ombres et de lumières intéressant met davantage en avant la finesse de son minois. La tête penchée sur le côté afin d'explorer au mieux ses traits, je détaille tout ce que je peux d'elle.

Elle est... fascinante, plus encore que les quelques femmes libres de mon village ou celles des environs ; bien plus aussi que celles qui l'accompagnent, bien que l'une d'elles doit à peu près avoir le même âge. Quelque chose dans son regard clair, dans son attitude me donne envie de la contempler encore et encore. Elle semble spéciale, différente sans que je ne sache bien pourquoi. Peut-être est-ce dû sa façon de sonder ses compagnons et les miens ? à la sagacité que je vois briller dans ses prunelles ? à sa réserve ou à sa prudence dans ses gestes, comme si elle avait peur de nous brusquer ou de se brusquer à tout moment ?

Peut-être est-ce dû à toutes ces choses à la fois, qui me frappent un peu plus à chaque seconde que j'occupe à la dévisager. De son côté, elle ne me remarque pas vraiment comme moi je le fais. Cela étant dit, je ne m'en offusque pas car il est clair, à sa manière de se tourner tantôt vers l'une de ses amies, tantôt vers Fritz, que son attention est appelée ailleurs.

Une expiration plus tard, les vagues murmures qui bruissaient entre nos deux blocs s'éteignent, laissant place à un silence profond.

Les écuelles vides sont abandonnées, les gourdes d'eau vidées, alors une à une, les têtes de nos hôtes pivotent vers leur interprète. Celui-ci échange un long regard avec ses acolytes, puis finit par se racler la gorge. Cette fois, nous sommes tous aux aguets, impatients comme apeurés d'entendre leur histoire.

— La traversée de la France a été... une véritable épreuve pour nous tous, débute le Danois avec difficulté, tandis que Magnus traduit son discours aux Anglais. Les vives tensions du pays nous ont assaillis dès notre arrivée. Certaines terres que nous parcourions étaient miséreuses et désolées... à l'instar des peuples qui y « vivaient ».

Un ricanement amer franchit les lèvres de trois de ses amis, tandis que les autres secouent la tête de dépit.

— Toutes ces personnes étaient désespérées. Au début, nous avons tenté de partager nos vivres et ressources avec elles, mais plus nous avancions, plus leur accueil se voulait agressif et intransigeant. Notre droit de passage devenait plus cher d'étape en étape, alors très vite, nous avons dû nous résigner à nous éloigner un peu plus de la civilisation. Nous nous sommes enfoncés dans les bois, avons suivi quelques cours d'eau prometteur. Chez nous, en Angleterre, nous habitions au cœur même de la Nature, ainsi ce retour aux sources nous effrayait moins. Nous devions néanmoins être très vigilants car nous ne connaissions pas la faune des lieux. Alors, nous marchions dès les premières lueurs du jour et nous arrêtions qu'une fois le crépuscule venu. Nous veillions à dormir cachés, à chasser et pêcher régulièrement, à braver l'adversité qui s'imposait sous différentes formes chaque jour... jusqu'au moment où la Nature n'a plus suffi à nous préserver.

Fritz s'interrompt un instant, le regard perdu dans le vague. Ses épaules et sa mâchoire se crispent au souvenir de la suite de leurs mésaventures, et la femme blonde à deux places de lui pose une main réconfortante sur son avant-bras. Je fronce une seconde les sourcils devant ce geste, mais je l'oublie un clignement d'yeux plus tard lorsque le Danois reprend la parole.

— En émergeant dans l'Est de la France, nous sommes tombés sur une bataille, dans une plaine. Nous étions à Rocroi, où Espagnols et Français s'affrontaient avec acharnement. Ils se massacraient, de notre position nous pouvions apercevoir leurs cadavres jonchés la terre battue et retournée. L'horreur sévissait de toute part ; nous avons évidemment essayé de rebrousser chemin et de trouver un autre passage, mais les fuyards se sont précipités dans notre direction et nous ont séparés...

L'un des hommes du clan étranger s'exprime à son tour, et bien que je ne comprenne pas ce qu'il profère, je ressens toute la colère rentrée et tout le chagrin sincère que porte sa voix forte et grave.

— Deux de nos amis, un père et une mère, ont été piétinés par ces soldats, nous traduit Fritz, un nœud dans la gorge. Nous avons trouvé ce qu'il restait de leurs corps de longues heures plus tard et à plusieurs lieues du champ de bataille. Nous les avons enterrés au pied d'un chêne. Qu'ils reposent en paix et que Dieu garde leurs enfants, désormais...

Un nouveau silence s'installe entre nous après cette déclaration. Tous, Anglais comme Norvégiens et Danois, nous baissons la tête et prions pour le salut de leurs âmes, le cœur lourd. Les pleurs discrets des quelques femmes présentes accompagnent nos prières muettes, et je sens mes traits s'affaisser davantage lorsqu'une des perles salées de l'Anglaise blonde capture la lumière vive du feu en roulant sur sa joue. Leur tristesse commune me touche, mais celle plus personnelle de cette femme est telle une pique enfoncée dans mon torse. Elle me donne envie de me lever pour aller la serrer dans mes bras. Je ne veux pas la voir souffrir, ni arborer une expression aussi grave et accablée. Ce visage est trop doux et délicat pour exprimer autant d'austérité, il est plutôt fait pour la joie, fait pour sourire et s'épanouir. J'aimerais la voir sourire, peut-être même me sourire... et savoir que j'en suis responsable.

Mes rêveries sont toutefois suspendues et s'étiolent très vite lorsque Fritz redresse la tête, suivi par ses compagnons, et réattire notre attention sur lui et ses mots.

— Après cet épisode, nous avons fui la France, ne nous arrêtant plus qu'à de très rares occasions jusqu'à la frontière. Nous ne mangions plus assez et nous puisions dans toutes nos réserves de force pour aller plus loin et plus vite encore... C'est donc affamés et amaigris que nous avons traversé la Belgique et les Pays-Bas. Nous avons perdu une autre partie de nos affaires là-bas et peut-être aussi un morceau de notre volonté.

Les compagnons de Fritz posent un regard lugubre sur lui et lui font vite signe d'enchaîner sur la suite, peu désireux de le voir s'étaler sur leur baisse de courage.

— Ce n'est qu'une fois que nous avons pénétré dans la seconde partie de l'Allemagne que notre situation s'est améliorée. Quelques-uns de mes amis et parents... lointains nous ont offert l'asile là-bas et nous ont accompagnés jusqu'à la frontière avec le Danemark. Il ne nous a fallu ensuite que quelques jours pour rejoindre nos amis communs dans le Jutland.

— Ils étaient encore mal en point lorsqu'ils ont franchi nos portes, rebondit Erik, une moue désolée sur les lèvres. Mais malgré leur faiblesse, ils nous ont expliqué ce qu'ils désiraient et étaient prêts à repartir sur-le-champ. Nous avons toutefois réussi à obtenir d'eux qu'ils se reposent trois jours avant de les conduire jusqu'à vous.

Près des Anglais, Magnus souffle quelque chose dans leur langue avec un demi sourire ironique, ce qui lui attire deux-trois mimiques similaires. Erik secoue la tête devant nous, toujours un peu incrédule face à leur obstination dangereuse, et je l'imite. Des inconscients. Ils auraient pu y laisser leur vie, si Erik et les autres ne les avaient pas retenus. À coup sûr, la neige et le froid auraient eu raison d'eux : toute personne peu habituée et donc peu résistante à notre climat risque de se transformer en congère par ici.

Mes prunelles analysent encore une fois cette petite troupe improbable. Ils me surprennent un peu plus de seconde en seconde.

— Mais pourriez-vous nous expliquer pourquoi il a fallu que vous les ameniez à nous ? les interroge Olaf, son attention rivée sur le visage d'Erik. Que faites-vous tous ici ?

Son intervention est suivie par un grand silence, durant lequel la soudaine nervosité de nos hôtes fait crépiter l'air qui nous entoure. D'instinct, mes proches se tendent sur leur séant, de nouveau méfiants. Je semble être le seul à éprouver plus de curiosité que de peur, alors je me penche légèrement en avant. J'attends leur réponse et je suis persuadé que cette dernière sera très intéressante...

— Pour être tout à fait honnêtes, reprend Erik, d'une voix basse et profonde, c'est à cause de nous si ces Anglais ont entrepris le voyage jusqu'en Norvège. C'est nous qui leur avons suggéré d'aller plus loin dans leur... quête.

— Mais de quel genre de quête s'agit-il à la fin ? s'impatiente encore Olaf, porté par les souffles irrités de notre clan.

Les Danois et les Anglais échangent une longue œillade sinistre et grave qui hérisse les poils sur mes bras. Leur angoisse est palpable et accélère les battements de mon cœur malgré moi. Mais bien vite, c'est leur détermination désespérée, celle qui les a guidés si loin de chez eux, qui domine tout le reste et les pousse à s'exprimer.

— Vos amis danois vous ont dit ce que nous recherchons, traduit Fritz pour nous, sans quitter des yeux l'homme brun assis près de lui. Nous avons besoin d'aide, d'une aide spéciale qui semble prendre racine dans vos pays. Nous souhaitons être sauvés d'une menace tout aussi spéciale, mais qui, elle, se répand jusqu'à nos contrées. Elle veut nous détruire et a déjà tenté de le faire à de nombreuses reprises... Certains des nôtres ont péri à cause d'elle, et elle nous a obligés à fuir nos maisons, à nous séparer de nos familles, de nos alliés.

L'homme qui parle nous harponne avec ses orbes couleur miel, et la lueur implacable qui y brille m'en retient prisonnier.

— Nous voulons que cela cesse et vous êtes le moyen qui réussira à y parvenir. Ensemble, nous sommes la clef.

L'Anglais et Fritz s'interrompent sur ces derniers mots, nous laissant quelques secondes pour avaler leurs explications nébuleuses, mais aussi vibrantes d'espoir. Bouche bée, ma famille et moi nous entreregardons avant de revenir sur les étrangers. Nous sommes « la clef » d'une menace ? Les personnes qui nous font face sont ici parce qu'elles sont en danger en Angleterre et sont convaincues que grâce à nous, elles pourront vaincre cette menace ? C'est... extravaguant. Incroyable. Fantasque. Cependant, une voix au fond de mon esprit me murmure aussi que ce n'est pas impossible. Que ça pourrait se révéler vrai.

— Quelle est cette menace qui vous fait si peur ? finit par demander mon père, l'air impénétrable comme eux.

— Et qu'est-ce qui vous fait dire que nous sommes la solution ? Ou même que nous accepterons de vous venir en aide ? embraye Leif, soupçonneux.

Hommes comme femmes devant nous restent calmes et imperturbables malgré le début d'agitation qui grandit chez les villageois. De mon côté, la curiosité enfle dans mon corps, tente de s'en extirper. Elle brûle dans mes entrailles, remonte sous la forme de vagues de chaleur dans mon dos, puis dans mon torse... jusqu'à s'échouer au fond de ma gorge et me faire formuler :

— Qui êtes-vous ?

Toutes les paires d'yeux animées par les flammes se tournent vers moi, et je tressaille en comprenant que j'ai posé la question qu'ils espéraient et redoutaient tout à la fois.

La femme blonde est la dernière avec qui j'échange un coup d'œil scrutateur, et le vert de ses iris, aussi radieux qu'une aurore boréale, me happe au cœur de ses mystères et secrets. C'est presque comme si elle me mettait au défi de trouver ce qu'ils nous cachent encore ; j'entrevois dans ses ombres persistantes qu'une partie d'elle ne désire pas nous mettre au courant, même si le pourquoi de sa retenue m'échappe. Si elle a entrepris ce voyage, c'est bien pour nous solliciter, non ?

Qu'est-ce qui l'en empêche ? Pourquoi pose-t-elle ce regard plus réticent sur nous ? Ses compagnons ne semblent pas éprouver la même réserve qu'elle à notre encontre. Si seulement je pouvais parler avec elle ! Je pourrais l'interroger comme je le souhaite et enfin la cerner...

Tandis que nous ne lâchions pas des yeux, un aparté muet s'est tenu entre les Anglais, jusqu'à ce que leur porte-parole, l'air grave et investi, réponde enfin à nos questions.

— Nous sommes des sorciers. Nous servons la Nature et veillons à ce que l'équilibre de ses forces soit préservé. Les pouvoirs que nous octroie notre Mère à tous permettent d'être à son écoute profonde et d'accomplir ses volontés. Mais le fléau qui guette entreprend de nous chasser et de nous tuer. Ce fléau s'appelle vampires, et ces êtres n'ont aucune pitié ni sens moral... Cela fait trop longtemps que nos routes se croisent et nous conduisent à nous battre contre eux. Ces monstres ont hélas quelques avantages sur nous que nous ne parvenons plus à contrecarrer. Ils sont plus rapides et plus forts. Ils sont responsables de beaucoup de morts, et pas seulement dans nos terres : ils tuent à travers le monde, répandent peine et désolation partout où ils passent. Les guerres qui se jouent entre humains nous touchent aussi, mais elles deviennent insurmontables lorsque ces bêtes s'en mêlent et font tout pour que nous fuyons nos villes et villages.

Tout au long du discours de Fritz, mes semblables hoquètent de stupeur, soufflent d'incrédulité. Leurs yeux sont ronds, leur bouche grande ouverte ; tantôt un voile de stupéfaction crispe leurs traits, tantôt une lueur méfiante et colérique brille dans leurs orbes sombres. Nos hôtes s'en rendent bien compte et restent tendus sur leur siège. Ils épient la moindre de nos réactions avec prudence et crainte, tout en laissant leur comparse finir son exposé.

— Nous ne voulons plus vivre dans la peur. Nous ne voulons plus être chassés de nos foyers et être dominés par cette puissance malveillante. Nous désirons nous battre avec plus de hargne qu'auparavant. Nous voulons les vaincre, eux, plutôt que l'inverse... Nous ne supportons plus cette ascendance, nous désirons y mettre un terme et ainsi épargner à d'autres peuples les souffrances que le nôtre a subies. Mais pour ce faire, nous avons besoin de vous... parce que vous aussi, vous êtes différents. Spéciaux.

C'en est trop pour mon clan. Leur indignation et leurs cris éclatent dans le bâtiment et ricochent à l'infini sur les parois. Ils les traitent de menteurs, d'imposteurs. Les voix tonitruantes des hommes les somment de partir, ce à quoi nos amis danois tentent de s'opposer, tandis que les femmes terrorisées dévisagent les Anglais. Et moi... je ne me joins pas à eux. Je reste focalisée sur la femme blonde, dont le visage s'est fermé dès les premières exclamations. Elle craignait notre réplique tout en s'y attendant. Je discerne d'ailleurs une même forme de résignation amère chez ses voisines alors qu'elle pivote vers elles. Tout autour de nous, le chaos s'établit, et l'abattement sincère de ces Anglaises m'atteint en pleine poitrine.

Au bout de quelques minutes, mon père et les Danois parviennent à ramener l'ordre et le calme, bien que certains esprits demeurent échauffés et prêts à se soulever au moindre mot de travers ou déplaisant. Debout devant nous, Erik, Magnus et Harald font front commun, leurs paumes dressées et ouvertes en signe de paix, et dissimulent en partie les « provocateurs ».

— Calmez-vous, s'il vous plaît. Nous savons qu'il est difficile de croire en tout ça au premier abord, déclare Magnus sur un ton apaisant.

— Ce sont des mensonges ! Bien sûr que nous n'y croyons pas, se met en colère Leif.

— Vous êtes de leur côté ? Vous avez inventé toute cette histoire à dormir debout avec eux ? lance Kristof d'une voix acide.

Les foudres s'abattent autant sur les étrangers que nos amis, et ces derniers ont bien du mal à faire entendre leur voix.

— Écoutez ! Écoutez tous ! clame plus fort Erik. Ce ne sont pas des mensonges. Tout ce qu'ils vous racontent là est la vérité, et ils ont des preuves à vous soumettre. Nous aussi, d'ailleurs...

Cette ultime confession est sans doute celle qui nous interpelle le plus. Elle arrête la nouvelle vague de haine qui allait s'abattre sur nos hôtes et est remplacée par un silence stupéfait.

— De quelles... preuves parlez-vous ? ose émettre Olaf quelques secondes plus tard.

Ses mots sortent avec réticence, mais tout le monde entend aussi la pointe de curiosité derrière. Il n'en fallait pas plus pour les trois Danois, c'était sans doute le signe d'encouragement qu'ils attendaient. Ils se tournent alors vers les supposés sorciers et les invitent d'un geste à reprendre les rênes de la situation. Un à un, les hommes et femmes pivotent la tête vers l'extrémité de leur demi-cercle, et mon cœur fait une embardée lorsque l'Anglaise blonde redresse la tête, puis se lève avec lenteur.

Elle marche vers l'ouverture de la remise, la tête haute, les épaules droites, et son regard clair rivé sur la neige tombant dehors. Les rayons de la lune englobent sa silhouette et étirent son ombre fine sur la terre qu'elle foule. Arrivée sur le seuil, elle s'immobilise, relève un peu le menton... et une bourrasque de vent froid s'infiltre à l'intérieur et mouche les bougeoirs alentour.

Nous sursautons tous, certains bondissent même sur leurs pieds, mais nous n'avons pas le temps de faire plus ou de dire quoi que ce soit, car la lumière revient. Les faibles flammes de tout à l'heure se sont nichées dans le creux des mains des Anglais.

— Seigneur !

Mes frères et sœurs crient leur surprise, rugissent leur peur alors que l'autre assemblée reste sereine, leurs visages éclairés par la flammèche rougeoyante sous leurs nez. Par la suite, ils replient leurs doigts dessus, loin d'être perturbés par la chaleur, et au moment où ils rouvrent leurs mains, les lueurs ont disparu à nouveau.

Le glapissement heurté d'Astrid en bout de banc nous force à tourner la tête vers elle et à découvrir ce qui la perturbe tant. Le même affolement s'empare de nous lorsque nos regards exorbités se posent sur l'Anglaise blonde, qui revient vers nous accompagnée des étincelles des bougies. Elle fait halte à quelques pouces de notre assise, l'allure toujours aussi droite et assurée, puis d'une simple torsade du poignet, elle renvoie le feu dans son foyer. Bientôt, la remise est à nouveau illuminée par nos chandelles.

Un grand silence enveloppe les lieux alors que nous fixons cette femme. Bouche bée et le cœur battant à tout rompre, nous cillons plusieurs fois, puis déglutissons lorsqu'elle repart vers les siens. Ce n'est qu'après une éternité, et au prix d'un véritable effort, qu'Olaf entrouvre ses lèvres tremblantes et souffle un mot d'une voix gutturale et incrédule.

Völva...

N'ayant pas détourné mon attention de l'Anglaise, je comprends vite, à la manière qu'elle a de froncer les sourcils, que ce terme n'a aucun sens réel pour elle. Il doit en être de même pour ses amis, mais je n'ai ni la force ni le désir de le vérifier sur leurs figures ; je demeure concentré sur la blonde, rivé à ses prunelles vertes. Et à mesure que je l'admire, à mesure que je me perds dans la clarté de ses iris, je suis convaincu de la véracité des propos d'Olaf.

Elle est une völva, une wicce, ou encore une seiõkona. D'autres noms lui ont été attribués au fil des époques, d'une civilisation à une autre. On l'appelle aussi prêtresse, enchanteresse ; elle est celle qui sait, celle qui fait. Celle qui sert les dieux et le destin. Celle qui connaît la magie et communie avec la Nature.

Fritz dit la vérité. C'est une sorcière.

* * * * * * * * * * * * *

Demat/Bonjour ! :)

Et voilà, le gros secret de Gillian et de son groupe a été révélé aux Norvégiens ^^ Beaucoup de surprise et de choc donc, mais on ne s'attendait pas à moins de leur part, non ? Après tout, tout est nouveau pour eux !

La suite de cette discussion/confrontation la semaine prochaine (avec les Danois qui vont y mettre leur grain de sel en prime, de quoi donner des maux de tête carabinés aux Norvégiens haha)

J'espère que ce début vous plaît toujours, pour celleux toujours présent.e.s ! Merci à vous de laisser une petite trace de votre passage ici, ça me très plaisir <3

Bisous

A. H.

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