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Chapitre 19

Je retire ma lame d'un coup sec de l'abdomen du berserker et détale à toutes jambes loin de lui, la pointe de l'acier n'ayant fait que frôler son cœur. Mon souffle devient plus sifflant de seconde en seconde à mesure que je change de rythme de course. Je passe d'un trot soutenu à un galop éclair en fonction du nombre d'obstacles sur mon chemin.

Je tente de ménager mes forces et mes efforts pour le bon moment, quitte à ce que mes soldats achèvent – au sens propre – mon travail. Cependant les sbires de Jarlath ne semblent pas décidés à me laisser faire. Leur chef a sans doute donné des ordres allant dans ce sens... Le vampire ne paraît pas être aussi pressé que moi de nous revoir, alors il m'envoie certaines de ses meilleures recrues triées sur le volet pour me le faire savoir et me ralentir.

Serait-il moins joueur que ce que je m'étais figurée ? Ou plus probablement, il se comporte ainsi parce qu'il préfère rester le maître du jeu en toute circonstance. C'est un maniaque du contrôle, après tout. Il veut dominer, et le moment venu – en clair, celui qui lui conviendra – il se présentera à moi.

En attendant, les guerriers tant vampires que berserkers qu'il m'adresse sont les plus puissants et agressifs qui soient à sa botte, après ceux qui composent sa garde très rapprochée bien sûr. Certains me donnent du fil à retordre, ce qui explique pourquoi je ne fais que les neutraliser un temps plutôt que les éliminer purement et simplement. J'en suis même arrivée au point où je me sers d'un Glock pour tirer quelques coups bien placés dans leur crâne dur. Alors que je slalome entre quelques arbres, j'ai la satisfaction de voir tomber trois de mes ennemis lancés à mes trousses. Je n'entends plus de bruits de course par-dessus ma respiration lourde.

Rangeant momentanément le pistolet dans son holster, j'attrape mon bâton télescopique dans mon dos, le déploie et m'en sers pour me propulser dans une autre direction. J'emprunte un autre chemin pour rejoindre le flanc sud du champ de bataille, là où j'ai cru percevoir un attroupement important. Allan et Jarlath pourraient en faire partie. Je dois m'y rendre pour en avoir le cœur net.

Je ne fais toutefois pas cinq mètres avant de sentir une nouvelle présence dissimulée dans les fourrés environnants. On me traque encore, et cette fois mes sens et instincts s'affolent, mis dans un état d'alerte avancé. Mon palpitant fait une embardée violente sous mes côtes en réaction et mes jambes s'immobilisent sur les aiguilles de pins. Se pourrait-il que...

Un rire brutal, à la limite de l'hystérie – mais surtout féminin – répond à mon interrogation et tue dans l'œuf mes espérances. La personne qui marche vers moi et se dégage des broussailles n'est pas celle que j'attendais. Et au vu de l'étincelle mesquine et fourbe qui pare son regard profond, elle l'a très bien compris.

— Si tu avais vu ta tête, Hybride ! s'esclaffe la vampire. Je t'ai fait une fausse-joie ? Tu as cru que c'était quelqu'un d'autre, disons un bel étalon fougueux qui allait apparaître ? Pas trop déçue de constater qu'il ne s'agit que de moi ?

Son sourire démentiel dévoile toutes ses dents et creuse à outrance ses joues. Son allure n'est pas sans rappeler celle de ces clowns tueurs dont raffolent les humains dans certains films d'horreur. « Une expression radieuse sur le visage, mais un désir vibrant de massacrer dans le regard », c'est ainsi que mon propre père les décrit. Cette femme en est l'illustration parfaite, selon moi. D'autant plus que son aura est marquée par une animosité excessive et une soif de sang et de chaos.

— Tu ne dis rien ? La surprise est telle que tu as perdu ta langue, Hybride ? m'apostrophe-t-elle encore alors que je suis en train de la scruter intensément. Tu n'es même pas curieuse de savoir qui je suis ?

— Tu es une disciple de Jarlath, lui réponds-je alors sur un ton bas. Tu as un poste avancé auprès de lui, pas une générale cela dit, peut-être plus une conseillère doublée d'une éclaireuse... Je t'ai déjà vue fureter nos troupes lors de nos derniers affrontements. Mais de là à vouloir savoir qui tu es absolument, non, je m'en contrefiche. Je ne m'intéresse pas à l'identité des sous-fifres que je tue.

L'hilarité la reprend et éclate entre les ramures des arbres. La vampire va jusqu'à rejeter sa tête en arrière pour prolonger cet éclat disproportionné. Je crois n'avoir jamais rencontré créature plus timbrée et illuminée qu'elle ; si j'avais été jeune vampire, elle aurait pu m'effrayer, ou tout du moins me mettre si mal à l'aise que j'aurais tenté d'instaurer le plus de kilomètres possible entre nous. Or, je ne suis pas jeune vampire, je suis une hybride, vieille de mille sept cents ans et sa bouffonnerie décalée me tape tant sur le système que je referme ma poigne sur mon bâton. L'enfoncer dans sa bouche béante qui laisse entendre ce son strident serait sans doute le meilleur châtiment à lui infliger...

Tel un ressort, le cou de mon opposante se redresse en position verticale et l'instant suivant, ses prunelles à la lueur fauve se verrouillent aux miennes.

— Tu ne devrais pas être si méprisante avec moi, Eleuia, amorce-t-elle sans se départir de son rictus d'aliénée. Nous avons plus en commun que ce que tu crois...

— Vraiment ? Ça m'étonnerait fort, pourtant..., répliqué-je distraitement tout en délogeant mon arme du sol.

Son sourire s'agrandit, alors que je n'aurais jamais pensé cela possible, et ses jambes esquissent un mouvement fluide vers l'avant.

— Et pourtant, comme tu dis, c'est bien vrai, déclare mon interlocutrice d'une voix caressante qui me crispe. Je pourrais te faire deviner de quoi il s'agit ! Qu'en dis-tu ? Ça pourrait être amusant !

— Ça ne te fera gagner que quelques secondes.

Je décris un arc de cercle près de sa tête, mais la vampire pare mon attaque et se décale sur quelques centimètres pour poursuivre.

— Tu crains de ne pas trouver, peut-être ? Ne t'inquiète pas, Hybride, je suis sûre que tu auras vite la puce à l'oreille ! Bien, ce que nous partageons toi et moi, Eleuia, est... chaud, fort, beau comme un dieu, musculeux, élancé... Il est aussi un poil sauvage et brutal, mais je ne peux pas vraiment m'en plaindre non plus. Ce serait hypocrite en fait. Après tout, il fait des miracles avec ses hanches quand il est lancé...

Sa voix fluette de fausse ingénue me percute avec la puissance d'un bulldozer. Je me fige sur place, mes mouvements s'arrêtent net à l'instar de mes organes vitaux dans mon corps. Mon cœur stoppe ses battements, mon cerveau n'est plus irrigué en sang comme mes artères, ou mes membranes. Mon arme échoue lamentablement sur la terre humide tant mes mains manquent de tonus.

C'est un cauchemar... Ce n'est pas vrai, elle ment. Ils n'ont pas... Allan n'a pas pu...

Le bloc de glace qui se forme dans ma poitrine pèse lourdement et enrobe mon cœur de sa prison réfrigérante. Il risque d'exploser d'une seconde à l'autre, emportant cette pompe affaiblie dans son sillage.

— Et son coup de reins ! À chaque fois, j'ai eu du mal à marcher ou ne serait-ce que me lever le lendemain..., continue à s'extasier ma rivale, de plus en plus crue dans ses propos. J'ai beau être une vampire, j'ai été dépassée par sa fébrilité... Mais là encore, je ne m'en plains pas. Ce sont les meilleures parties de jambes en l'air que j'ai connues, et de loin ! Bon sang, il est légendaire à plus d'un titre.

L'air se dérobe de mes poumons, la salive déserte mes papilles asséchant ainsi ma bouche et ma gorge douloureuse. Tout se glace à l'intérieur de moi... Tout est détérioré et gangréné par l'immense souffrance et la désillusion qui me frappent plus férocement qu'un couperet. Les yeux de la femme dévalent ma silhouette, et le plaisir qui y croît me soulève l'estomac. Elle est ravie, clairement satisfaite d'avoir réussi à me mettre dans un état aussi déplorable.

— Il t'a déjà fait ce truc avec la langue ? Tu sais, quand il la combine à ses doigts et qu'il appuie fort ? m'interroge-t-elle avec un air rêveur. Il me fait décoller du sommier en un rien de temps grâce à cette technique. Enfin, du sommier... comme du mur, ou du sol, ou de l'escalier... Partout où il a pu me baiser, en fait.

Elle ponctue son énumération d'un hochement de tête profond, accompagné d'un mordillement de ses lèvres.

— C'est une véritable bête de sexe. Il était déchaîné tôt ce matin, avant que l'on vous rejoigne ici... à tel point que mes cris ont dû s'entendre à des kilomètres à la ronde.

Le sourire salace qui orne sa bouche déchire mes entrailles et nourrit les trop nombreuses images qui peuplent déjà mon esprit fêlé. Mes paupières se ferment, ma tête dodeline d'un bord à l'autre, voulant extraire ces visions d'horreur, mais je n'y parviens pas. Elles se jouent toutes sans arrêt, entretenues par les détails sordides et exaltés de ma rivale.

La vampire ne tarit pas d'éloges sur les aventures et prouesses sexuelles qu'elle a partagées avec mon lié. Elle module sa voix de telle façon que je crains fort de ne jamais pouvoir oublier ses mots. D'intenses tremblements font palpiter ma cage thoracique alors qu'un soupir lascif et heureux s'expulse hors de sa gorge à elle.

— J'étais très détendue après ça, tu peux me croire. Lui... j'ai eu l'impression qu'il était encore plus survolté, comme un lion en cage qui avait hâte de se défouler. Ça l'a mis en jambe, en un sens !

Elle rigole encore pendant que moi, je me sens défaillir et perdre de plus en plus pied. La douleur... même aux portes de la mort, je n'ai pas eu aussi mal. Sentir la vie quitter mon être paraît bien doux en comparaison avec ce que j'endure aujourd'hui...

Mon corps mollit et ma tête flotte loin du reste, dans une vaine tentative de limiter la propagation du mal qui me ronge.

— Ah, j'aurais aimé que tu vois son visage après notre petite affaire ! Absolument mémorable ! Il a pris son pied comme jamais... C'est vraiment dommage que tu n'en aies pas profité.

Ma mâchoire craque, une sueur froide s'écoule dans mon dos. L'immense balafre sur mon cœur saute en même temps que le givre, et ce dernier est à nouveau à feu et à sang, en pleine agonie longue et pourrissante. Au moment où mes genoux commencent à se dérober, mon échine se retrouve propulsée avec violence contre un tronc d'arbre. Mes yeux baignés de larmes s'ouvrent sur les traits déformés par l'aversion de la vampire. Sa main serre ma gorge et sous son impulsion, elle me repousse plus haut sur la ramure.

— Qu'est-ce qu'il y a, Eleuia ? me demande-t-elle toutefois avec douceur. Ça ne va pas ? Tu n'as pas l'air dans ton assiette.

Je ne réponds pas, autant parce qu'elle me comprime la trachée qu'à cause de la souffrance qui siège en moi et me rend muette.

— Serait-il possible qu'il y ait un cœur sous cette carapace de salope frigide ? poursuit-elle sur le même ton, son visage encore plus près du mien. Se pourrait-il que ta sale carcasse se sente blessée et bafouée ? C'est ça, Eleuia ? Tu as mal parce que je me suis amusée avec ton chéri bestial ?

J'essaie d'endiguer le flux de ses paroles en me répétant que ce n'était pas vraiment Allan, que celui que j'aime n'aurait jamais fait ça consciemment...

Mais j'ai mal. J'ai tellement mal...

— Ça te bouffe de l'intérieur de savoir qu'il me baisait durant tout ce temps, alors que toi tu te languissais de lui ? Ça t'arrache le cœur de te dire qu'il n'en a absolument rien à faire de toi et qu'à la seconde où il te verra désormais, il n'hésitera pas à te trucider ? Ça te démolit de savoir que votre lien n'est pas assez puissant et qu'il s'est effacé à la seconde où il m'a touchée et pénétrée ?

Un trémolo confus et indistinct résonne dans mes cordes vocales malmenées, ce qui déclenche un sourire de pur sadisme chez la vampire. Elle se penche à mon oreille, son souffle chaud s'y écrase avant que ne le fasse sa nouvelle attaque frontale.

— Et est-ce que ça t'achève d'apprendre que j'ai bu son sang jusqu'à plus soif pendant qu'il me besognait ?

Ce murmure proféré sur le ton du secret me pousse à échapper un râle de désespoir, tandis que mon cœur s'ouvre en deux et saigne.

— Il est succulent, Eleuia, intégralement délicieux et paradisiaque... Je comprends pourquoi tu aurais préféré le garder pour toi toute seule, me confie-t-elle, l'air excitée à cette évocation. Mais il faut savoir partager dans la vie, Hybride ! Il faut être bonne camarade et se soutenir entre femmes... non ?

C'en est trop, je ne parviens plus à respirer ni même à écouter la part sagace en moi qui essaie de me raisonner et de limiter les dégâts. Je suis étouffée par la douleur et l'affliction. Je suis en train de mourir de chagrin.

Le bras de ma rivale se contracte plus fermement sur mon cou, plante ses ongles longs dans ma chair. Des perles de sang se forment et roulent entre ses doigts et sur mon épiderme.

— Je tenais à ce que tu apprennes tout cela de ma bouche avant de mourir, susurre-t-elle en déposant brièvement ses lèvres sur le côté de ma joue. Histoire que ton agonie soit la plus effroyable possible. Et vu ta tête, je pense que j'ai réussi haut la main.

Un nouvel éclat de rire monte dans sa gorge alors que sa main descend en un éclair sur mon buste pour me balancer à terre. Face plaquée sur l'humus, je ne tente pas de me relever.

Je reste prostrée. Abrutie et sonnée, l'âme écartelée. Ses pieds foulent tranquillement le sol pour me rejoindre, puis ils s'abattent l'un après l'autre sur mes côtes découvertes.

— Sale chienne ! Où elle est passée la grande Eleuia maintenant ? Où est passée la mythique guerrière aux nerfs d'acier ? Hein ? Tu n'es qu'une moins que rien et une salope !

La vampire se déchaîne autant physiquement que verbalement. Mon apathie est l'occasion rêvée pour ce faire. Sa poigne s'abat à nouveau sur moi, me tenant bien avant de me torpiller sur un autre carré d'herbe.

— C'est ça, l'hybride millénaire qui fait trembler ses ennemis comme ses alliés ? La loque que j'ai devant moi est censée être un « danger mortel » ? Tu es juste pitoyable et pathétique ! persifle-t-elle. Aussi faible et malléable qu'une humaine.

Sa dernière comparaison la fait ricaner et cracher au sol de dégoût dans le même temps. Le talon de sa botte s'aplatit sur ma colonne, m'obligeant à me cambrer sous l'impact.

— Regarde ce que tes sentiments dégoulinants font de toi ! Vois comme tu es médiocre ! Tu vas pleurer ? Tu vas crier ? Te mettre en position fœtale jusqu'à ce que je t'inflige le coup de grâce ? Mais quelle conne tu es ! Tu es vraiment cette espèce d'ingénue geignarde, pétrie d'amour qui est perdue et impuissante dès lors que l'objet de cette affection s'éloigne ? Tu me fais pitié...

Quelques-uns de mes os craquent, le bruit néanmoins étouffé par la pression constante des membres de mon adversaire sur moi. Une traînée de sang s'écoule depuis le sommet de mon crâne désormais.

— Tu me facilites tellement la tâche comme ça..., soupire ma rivale sur un ton presque boudeur. Je suis un peu déçue je dois dire... Enfin ! Je pourrai aller me consoler auprès d'Allan une fois que je t'aurai réglé ton compte. Il sera peut-être autant d'humeur que moi pour le faire.

J'ai un soubresaut interne en entendant le nom d'Allan à nouveau associé à cette fille... La plaie dans ma poitrine est toujours à vif et béante, mais il n'y a pas que la douleur qui existe et circule soudain en moi. Étrangement, et petit à petit, mon être cherche à répondre aux provocations incessantes de la vampire. Ses cellules et fibres s'activent en sourdine, réclament l'attention pleine et entière de mes membres et muscles. Et en guise de première réaction physique, mes ongles se plantent dans la terre compacte pendant que la femme continue de débiter ses ignominies.

— Je devrais aller le chercher tout de suite, même. Il ne doit pas être très loin... On pourrait te vider de ton sang lentement et te forcer à regarder ton lié me prendre de toutes les manières possibles avant ton dernier soupir ? Tu souffriras sans doute plus qu'avec les autres plans que j'ai pu concocter. Oh oui, faisons ça !

La folle s'applaudit avec entrain quelques secondes, excitée et satisfaite de son ultime trouvaille. Je devine sans peine l'air béat et radieux que doivent arborer ses traits. Mes poings se serrent, font blanchir mes phalanges dans leur élan alors que la vampire se trémousse au-dessus de moi.

— Mmh, ça me fait déjà de l'effet, s'exclame-t-elle, lascive et songeuse. Toi en vulgaire spectatrice résignée, et nous deux en train de rugir notre jouissance comme des bêtes... Oui, ça me plaît de plus en plus.

La contraction dans mes mains s'étend plus vite dans mes autres muscles et tendons. Mon cœur amoché pompe furieusement le sang dans mes artères. Il répond lui aussi à l'appel de mon corps en pleine révolte. Tout cela semble échapper à mon ennemie qui s'extasie encore sur son ébauche de scénario. Elle ne voit rien, n'entend rien, ne perçoit pas le changement subtil qui s'opère... Et elle ne le comprendra que trop tard.

— Bien, ma décision est prise ! Ne bouge pas, je reviens dans deux minutes avec Allan. Il sera ravi de te voir ainsi !

Elle amorce un mouvement léger de retrait, mais ne fait pas trois pas avant que je me redresse et fonce sur sa personne. Mon corps dirige, c'est lui qui use de toutes ses forces retrouvées et de sa détermination inébranlable pour agripper une parcelle de peau au hasard. Il tire dessus jusqu'à ce que sa propriétaire rencontre un arbre et glapisse de douleur et de surprise. Son front laisse une marque dans l'écorce, et ses doigts frottent ce dernier alors qu'elle fait volte-face vers moi.

— Sale garce ! gronde ma rivale en grinçant des dents. Tu vas me le payer.

Je ne lui réponds pas, mon esprit est comme déconnecté. Le voile rouge et tenace qui l'obstrue m'en empêche. Il n'y a que l'énergie sourde vibrant en moi qui est en capacité de réagir. Elle a désintégré la glace, repris le contrôle et se diffuse. Elle est forte et solide, plus redoutable que n'importe quel acier. Et sa teinte écarlate ne subsiste pas seulement dans ma tête, elle descend en pellicule sur mes prunelles, serpente dans mes veines avec mon sang.

Tout est rouge, écarlate. Rouge comme la passion. Rouge comme le sang. Rouge comme la folie.

Rouge comme la colère. Ma colère.

Mes bras se tendent comme des ressorts sur ma cible, mais celle-ci se baisse puis s'échappe vers le sol. Lorsqu'elle se redresse, je constate qu'elle brandit mon bâton télescopique. La vampire le fait virevolter dans les airs afin de me prouver qu'elle sait s'en servir. Les arabesques sont larges et rapides, elles parviennent à me frôler à deux reprises... mais c'est tout ce que mon ennemie réussira à faire désormais : me frôler.

Mes doigts emprisonnent bien vite mon arme entre eux, ce qui arrache un feulement ténu à sa nouvelle détentrice. Toutefois, elle ne se démonte pas, au contraire, elle essaie de le récupérer, voire de l'enfoncer malgré tout dans ma chair. Ses grognements retentissent alentour alors qu'elle redirige la trajectoire du bâton, démontrant l'effort qu'elle met dans son geste. Un éclair de panique passe dans ses iris à mesure qu'elle sent la situation lui échapper. La vampire n'a pas oublié qui est en face d'elle, ni tout ce que j'ai accompli à travers les âges, quand elle-même n'existait pas encore. La réalité la frappe et la fait blêmir et miauler de dépit, mais là encore, il est trop tard.

Sans sourciller, j'amène l'extrémité de la lance à hauteur de mon épaule et la plante d'un mouvement sec à l'intérieur. Un liquide chaud imprègne mes vêtements et ma peau, tandis que les yeux de ma rivale s'écarquillent. Devenues de véritables soucoupes, ses prunelles balayent frénétiquement ma silhouette et s'exorbitent bien davantage lorsque je n'hésite pas me taillader plus encore.

J'avance centimètre après centimètre. Le bâton s'enfonce dans mon articulation jusqu'à la traverser. Il perfore mon omoplate pour ressortir, des coulées de sang dans son sillage. J'avale la distance qui nous sépare encore, la vampire et moi, et jauge l'effroi qui trouble son regard.

Arrivée à cinq centimètres d'elle, je sens les tremblements de ses paumes autour de l'arme avant qu'elle lâche prise. Je casse le dernier tiers de bois qui la « protégeait » de moi, le reste demeurant fiché dans mon épaule pour l'instant, et jette ce morceau au loin. Sa peur exsude par ses pores, embaume l'atmosphère de son odeur pesante et âcre ; ses lèvres frémissent à l'instar de ses genoux et de sa poitrine qui retient ses cris de détresse. L'effrontée de tout à l'heure n'est plus, elle s'est changée en épave terrorisée.

Le souffle de mon ennemie se suspend quand mes mains encadrent son visage avec calme et une fausse douceur dans mes intentions. Un léger vibrato éraillé naît dans sa gorge et les pulsations de son cœur s'affolent dans ses tempes, sous la pulpe de mes doigts. Je lui décoche un sourire froid, mais large, tout en comprimant sa tête entre mes mains. Mes ongles laminent les premières couches d'épiderme, à l'instar d'un couteau dans du beurre, puis détruisent ses zygomatiques sous ses hurlements de panique.

Mes doigts s'engouffrent dans les lésions, atteignent le nerf facial, puis l'os, dans des gerbes de sang incroyables. La partie inférieure de ses orbites est écrabouillée sous la pression, entraînant la sortie des yeux hors de leurs cavités. Ils explosent dans un flot visqueux vermeil, tandis que je remonte ma prise plus haut sur la tête afin de la pulvériser entièrement dans ma poigne. Les cris de la vampire cessent, sa matière grise et ses tissus recouvrent mes mains lorsque je les récupère et laisse glisser le cadavre défiguré contre le végétal qui le soutenait.

Haletante, je baisse le regard sur la carcasse à mes pieds. Le vide est toujours omniprésent dans mon esprit. Je ne ressens pas grand-chose en dehors du tiraillement intense à mon épaule, et préfère donc me centrer sur ma respiration. Avec lenteur, j'effectue quelques foulées en direction d'un autre végétal, me mets ensuite dos à lui et expire profondément avant de m'y accrocher et d'expulser par à-coups brusques la tige en acier.

Libérée de son emprise et d'un grognement sourd que je retenais depuis un bon moment, j'inspecte ma blessure et observe le processus de cicatrisation se mettre déjà en branle. Je me retourne contre l'écorce. Mon souffle rude résonne entre mes deux mains ramenées sur mon visage, pendant que j'essuie les perles de sueur qui dégoulinent de mon front. Il faut que je rejoigne mes troupes sur le champ de bataille. Je dois retrouver le flanc principal, là où les combats font rage, et dénicher Allan.

Titubante sur les premiers mètres, je m'appuie à certains troncs pour me redonner de l'élan et suis les échos violents droit devant moi. Ma respiration demeure chaotique, ce que je mets vite sur le compte du stress et choc émotionnels que je viens de vivre. Mon corps y réagit plus vite que ma tête, ce qui donne lieu à des manifestations désobligeantes. Je perçois même quelques tremblements diffus dans mes jambes alors que j'enchaîne les pas sur l'herbe crissante.

Mais à mesure que j'avance, je sens quelque chose se former et m'oppresser de l'intérieur. Chaleur et froidure se mêlent, donnent naissance à une sensation d'écrasement que je ne contrôle pas. Ça me compresse, ça me pèse de plus en plus...

Mon crâne est comme enfermé dans un étau, mes cuisses sont lourdes au point que je m'effondre au sol, la gorge nouée. Mes doigts se pressent sur mes yeux puis mes tempes, mon souffle devient plus hachuré encore.

Ça monte, et monte encore, jusqu'à ce que je renverse la tête en arrière et que ça sorte sous la forme d'un grand cri, proche du hurlement de douleur. Il se catapulte dans les airs, voyage sur plusieurs mètres, éclate et se déchire autant qu'il me déchire en deux. Il dure, et dure encore... Le temps s'étire et les veines de mon cou saillent, au bord de l'explosion. Puis, quand il ne me reste plus d'air dans les poumons, mon cri se meurt.

Je m'affaisse, mon menton touchant presque ma poitrine, et j'écoute le sang rugir sous ma peau. Il fourmille à tout va, comme excité. La brûlure irradie encore, chaud et froid se battent férocement en moi. Et alors que j'observe mon torse, là où le flux semble être le plus fort, je redresse la tête dans un éclair de génie et la pivote sur la gauche. La sensation reprend de plus belle lorsque mes orbes tombent sur un corps massif et immobile entre deux arbres. Mon cœur fait plusieurs embardées souffreteuses tandis que je le détaille de haut en bas.

C'est finalement lui qui m'aura retrouvée.

Ni lui ni moi ne bougeons durant notre contemplation mutuelle. Nous ne parlons pas non plus, bien que cela fasse une éternité que je n'ai pas entendu le son de sa voix et qu'elle me manque atrocement. Nous ne faisons que nous regarder, nous scruter avec attention... jusqu'à ce que notre affrontement final s'annonce dans nos entrailles.

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