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§ Prologue §

31 mai 2007
France

La petite fille courait. 

Elle ne savait pas jusqu'où, elle ne savait pas pour combien de temps, mais elle courait. 

Sans s'arrêter, alors que ses poumons criaient à l'aide et que ses petites jambes se dérobaient parfois sous elle, elle courait. 

Elle courait parce que son père lui avait dit de courir, courir le plus loin possible. Et dans sa tête, seuls ses mots résonnaient encore, les derniers qu'il avait prononcés avant qu'elle ne s'éloigne à toutes jambes ; ceux qu'il avait tenté de rendre fluides pour ne pas la faire paniquer et pour qu'elle obéisse sans se poser de questions, sans risquer de rester près de lui. Elle voyait encore ses yeux qui avaient envie de se fermer, ses bras qui peinaient à la porter, ses cheveux décoiffés, son regard rapide vers sa femme dont on ne voyait plus rien, sa main pour retenir la tête de sa fille, qui voulait regarder là où lui-même regardait. 

Elle se souvenait de tout ça, mais en même temps ces images se fragmentaient, se découpaient, se détruisaient entre elles, dans ce silence et ce décor si calme qui l'entouraient, avec le noir de la nuit et la douce pâleur de la lune dessinant les vagues ombres des arbres de cette route de campagne. Ces facteurs, terrifiants à ses jeunes yeux, ne faisaient qu'aggraver le chaos qui s'opérait dans sa mémoire. Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Elle voulait se souvenir de tout ça, elle devait s'en souvenir pour pouvoir obéir à son père, mais sa tête, son précieux cerveau avait l'air de penser autrement, pour une raison qu'elle ne saisissait pas. 

Soudain, le silence disparut, et elle arrêta de courir. Des phares bleus et rouges l'illuminèrent au loin sur la route, avec leurs sirènes hurlantes et des bruits de moteurs. Comme le lui avait dicté son père, elle se mit au milieu de la chaussée, les bras levés au-dessus de sa tête, pour qu'ils s'arrêtent et qu'elle leur raconte ce qu'il s'était passé, cette scène que sa mémoire semblait si tentée d'oublier. Elle ne trembla pas quand l'un des camions se stoppa à quelques mètres d'elle, un homme en rouge et jaune sortant du véhicule rutilant et prenant une voix douce pour ne pas l'effrayer. 

« Petite, que fais-tu au milieu de la route ? Est-ce que tout va bien ? Où sont tes parents ? »

Elle réfléchit en levant les yeux vers lui. Il lui avait posé trois questions différentes, et elle avait déjà oublié dans quel ordre. Elle se pinça le nez en baissant la tête pour retenir les larmes étranges qui lui venaient aux yeux, alors que d'autres hommes accouraient autour d'eux et que des camions continuaient de rouler tout autour, dans un désordre lumineux et sonore qui donna encore plus envie de pleurer à la petite fille. Les images tournaient dans tous les sens dans sa tête, sifflaient contre les parois de son crâne à les fendre tant elles virevoltaient vite, acérées comme des lames de rasoir, brouillant légèrement son regard et appuyant sur ses tempes comme pour les écraser. 

« Hey ma grande, tout va bien d'accord ? Tenta de la rassurer l'homme en rouge en la rapprochant doucement de lui. Je vais te poser quelques questions et tu vas y répondre une par une, ça te va ?

- O-oui, m-mons-sieur, commença à sangloter la petite fille en entendant les hommes parler dans leurs appareils, disant des ''ils sont là-bas'', ''envoyez des renforts et l'ambulance'', ''on ne sait pas combien il y a de blessés''. »

Elle redressa sa tête et voulut fixer son regard sur lui, pour pouvoir y déposer sa confiance, mais les images allaient trop vite, trop fort, et tout ce qu'elle parvint à faire ne fut qu'une respiration précipitée, plissant les yeux pour essayer de le voir dans sa vision floue, perturbée par la panique qui la prenait.  

« Shhh, concentre-toi sur moi, la rappela à l'ordre l'homme en face d'elle, qui savait analyser ce genre de comportement par l'habitude. Alors, est-ce que tu as mal quelque part ? Demanda-t-il en commençant à faire bouger quelques unes de ses articulations lentement, guettant une réaction de douleur sur son visage. 

- Non Monsieur, juste dans ma tête, répondit l'enfant d'une voix tremblante, les images s'effaçant lentement de sa mémoire sans cesser leur vacarme, tout ce bruit, l'impression que son crâne allait exploser et se compresser jusqu'à devenir une petite bille. 

- Oh, et où ça dans ta tête ? Tu me dis si je te fais mal, continua-t-il en reportant ses mains sur le petit crâne de l'enfant, qui se mit à rire d'une hilarité sans joie.

- Mais non, pas à ma tête, dans ma tête ! S'esclaffa-t-elle nerveusement. Dans ma tête il y a... il y a... »

Son souffle se perdit alors qu'elle s'y plongeait, laissant le pompier en face d'elle stupéfait de la perdre ainsi, d'un coup, alors qu'elle était tout à fait réveillée la seconde d'avant. Il tenta pauvrement de la tirer de son état, mais il était également au fait de ce comportement, et savait que l'état de choc d'une victime d'un accident aussi violent que l'avait été celui-là pouvait plonger dans une apathie incontrôlée.

Les parents de cette enfant ne s'en sortiront pas, songea-t-il sombrement en voyant les brancards couverts passer un peu plus loin, pas pressés.

Puisqu'ils étaient déjà morts.  

De son côté, la petite fille revoyait les images, qui d'un coup s'étaient décidées à se laisser regarder.

La radio, la musique entraînante, le rire de papa, le rougissement de maman quand il lui glisse quelque chose à l'oreille. La forêt autour de nous, pas très rassurante avec ses arbres décharnés et gris, aux branches mortes tendues vers la route, leurs cimes faiblement éclairées par les phares de la voiture.

Et puis soudain, le bruit. La lumière. Le juron de papa. Le hurlement de maman. Et le choc. Tout se passe au ralenti. La carrosserie se retourne deux fois, finit par rouler dans le fossé, qui brise les vitres sous le poids de la voiture et crée une pluie de verre pilé autour de nous. Il y a beaucoup de bruit. Maman est enfoncée au fond du trou, papa est le plus proche du ciel, on voit les étoiles par sa fenêtre cassée. Ses jambes sont coincées à cause du tableau de bord, il me le dit en me sortant de la voiture par l'ouverture de sa fenêtre. 

« Cours ma chérie, d'accord ? Tu cours sans t'arrêter, jusqu'à ce que tu voies les camions des pompiers et que tu entendes les sirènes. Quand tu les verras, tu te mettras au milieu de la route les bras levés comme une statue et tu attendras qu'ils s'arrêtent. Ensuite tu diras tout ce que tu as vu à l'homme en rouge qui sortira. Tu as compris mon ange ? »   

Un hochement bref de la tête lui répond, et il me sort la voiture, me lâchant aussi près du sol qu'il le peut pour ne pas me blesser, même si je me fais quand même un peu mal au genou, ça laissera un bobo. J'entends encore son téléphone qui appelle les pompiers quand je commence à courir, mais je m'arrête net en entendant la voix étouffée de maman m'appeler. Je me rapproche rapidement du fossé, en faisant attention à ne pas tomber. 

« N'oublie pas qu'on t'aime ma chérie, plus que toutes les étoiles du ciel, me dit Maman sans que je ne puisse la voir. Sois heureuse, et aie le cœur de chanter, même quand tu seras grande, et même quand tu seras seule. Je te souhaite de rencontrer des amis qui te donneront la force d'être courageuse - sa voix se fatigue brusquement quand la carcasse de la voiture oscille et s'enfonce encore un peu dans le fossé. Ne t'inquiète pas pour nous. On t'attendra dans l'avion du paradis, avec mamie et son chat. Cours, et ne nous oublie pas mon amour. 

- Je t'aime maman, je t'aime papa, réponds-je en m'éloignant, oubliant instantanément le sang, la crasse et la détresse présentes sur mes parents. 

Mes jambes courent aussi vite qu'elles le peuvent, pour ne pas manquer les voitures. Elle ne pense qu'à mes parents. Pas à si je vais les revoir ni à s'ils vont bien, mais à ce qu'ils lui m'ont dit, et je me répète leurs ordres en boucle, pour ne rien oublier, comme le voulait maman. Les voitures. Le chant. Les voitures. Le chant. Et l'avion.

« Hey, petite ? Appelle le pompier en agitant lentement une petite lumière devant ses yeux.

- Monsieur, est-ce que j'ai trouvé les voitures des secours ? Demande la petite fille sans l'écouter réellement, ses yeux toujours figés dans le vide terrifiant qui les avait pris lorsqu'elle s'était perdue dans sa tête. 

- Ou-

- Est-ce que je vais bientôt rentrer à la maison pour chanter avec Zayn ? 

- Qui-

- Monsieur... Haleta la petite fille en portant la main à ses yeux, l'autre tenant le bras de l'homme accroupi face à elle pour ne pas tomber ; pourquoi tout est noir ? »

Un autre homme s'approcha, un ambulancier. Il se pencha à l'oreille de son collègue et lui murmura quelques mots, qui firent se ressaisir le premier, puis il s'éloigna en feuilletant les papiers qu'il avait dans les bras. 

« Petite, comment tu t'appelles ? Se reprit le pompier. On va reprendre les questions, ne t'inquiète pas pour tes yeux, ferme-les, ils sont juste fatigués. 

- Comment je m'appelle... murmura la petite fille, fouillant dans sa tête mais ne trouvant pas de réponse, trop perturbée par les images qui lui revenaient avec force hurlements déchirants pour se souvenir de son nom. 

- Ne t'inquiète pas, tu me le diras plus tard, la rassura le pompier en notant dans un petit carnet qu'elle ne put pas voir, faute à sa cécité soudaine. Ce sont tes parents là-bas ? 

- Oui, sourit la petite fille, contente de savoir quelque chose pour aider l'homme. »

Elle n'était pas stupide, elle avait déjà vu ce genre de scènes dans les films d'action que son père regardait parfois, où un monsieur en rouge posait des questions à des gens qui pleuraient. Elle ne savait jamais pourquoi ils étaient tristes d'ailleurs, elle était toujours envoyée au lit avant d'avoir l'explication de leur comportement. Elle se sentait presque comme au cinéma, mais en beaucoup moins confortable et amusant, elle avait si mal à la tête. 

« Tu connais leurs prénoms ? 

- Papa et Maman. 

- D'accord, et pourquoi courais-tu loin d'eux ? 

- Papa me l'a dit. 

- Tu te souviens de ce qu'il s'est passé ? »

L'enfant eu un rire franc, contrastant avec ses vêtements tachés de sang et déchirés, ses cheveux emmêlés et ses yeux toujours aussi froids et immobiles, qu'elle n'avait pas fermé. 

« Oui ! »

Le pompier attendit qu'elle développe, mais elle se tut, attendant la prochaine question en se balançant doucement, tentant toujours de faire taire les grincements incessants dans sa tête. Il redemanda donc, ne perdant pas son calme face à cette enfant étrangement trop guillerette pour sa situation, et visiblement pas amnésique :

« Peux-tu m'expliquer ?

- Non. »

Il haussa les sourcils en soufflant doucement du nez, l'agacement commençant à poindre derrière ce qu'il essayait de faire paraître comme un secours aimable et rassurant. Son travail était de prendre les renseignements de l'enfant, de sa famille, et de vérifier son état de santé ; elle n'avait pas l'air de se souvenir de son nom, ni de ceux de ses parents, ce qui retirait beaucoup d'informations possiblement récupérables - bien que leurs papiers devaient être dans la carcasse du véhicule -, et le choc qu'elle avait subi l'avait rendue momentanément aveugle, ce qui ne laissait pas non plus de doute sur son implication dans l'accident - elle n'avait pas l'air d'être autrement blessée physiquement à part peut être une petite égratignure au genou droit. 

« Tu ne veux pas ? La relança l'homme pour tenter de tout de même tirer quelque chose de l'enfant, qui s'était tue. 

- Oh, si, monsieur ! Assura-t-elle en hochant exagérément la tête. Moi j'aimerais bien. Mais mon cerveau il ne veut pas. 

- Ah oui ? Soupira discrètement le pompier en se frottant le front, profitant du fait que la petite fille ne pouvait pas le voir pour se le permettre. Et pourquoi ?

- Monsieur, pourquoi tu t'énerves ? 

- Je ne m'énerve p-

- Si ! Dans ta voix tu en as marre, et moi je veux bien t'aider monsieur mais je te promets que mon cerveau il ne veut pas, commença à sangloter la petite fille en se frottant les yeux. Il crie, il envoie du vent, il tourne, mais il ne veut pas me montrer les images ! »

L'homme resta estomaqué devant elle. Jamais une victime ne l'avait fait soupirer, et jamais il ne s'était fait reprendre par un enfant de soupirer, aussi perturbé soit son état mental. 

« Monsieur, j'étais dans la voiture et j'ai tout vu, ça je sais, commença à compter l'enfant sur ses petits doigts qu'elle leva maladroitement devant elle, ses petites jambes tanguant avant de se stabiliser. Mon papa il m'a dit de venir vous voir ça je sais. J'ai couru jusqu'à voir la lumière du camion ça je sais. Mais je sais que ce que je sais d'avant je peux pas le dire, parce que j'ai encore les images dans ma tête mais elles tournent trop vite et trop fort pour que je comprenne ce qu'il y a dessus. 

- Tu te rappelles donc de ce que tu as vu ? La pressa le pompier, qui avait hâte d'en finir avec cet interrogatoire déstabilisant et de rentrer chez lui. 

- Monsieur, tu ne m'écoutes pas, soupira tristement l'enfant en laissant retomber sa main. J'ai tout vu. J'ai tout entendu. Je dormais pas, donc mon cerveau il a tout pris, et il a tout emmené loin dans ma tête, sauf que je peux pas raconter. Parce que j'ai rien compris. »

L'ambulancier revint d'un pas pressé, glissant au pompier désorienté qu'il fallait repartir, quitte à emmener l'enfant dans le camion si l'interrogatoire n'était pas terminé. 

« C'est bon, j'ai fini. Vous pouvez l'emmener, lui répondit le premier en se relevant, fermant son petit carnet.

- Monsieur ! Lui cria la petite fille alors qu'il s'en allait à pas rapides - il fut d'ailleurs étonné d'entendre sa voix aussi nettement dans le tintamarre que faisaient les sirènes des camions. Tu viendras me voir ? La voix de monsieur docteur m'a dit que j'allais aller dans l'hôpital mais je veux pas être toute seule là-bas, geignit l'enfant en venant vers lui tant bien que mal, avançant à tâtons pour ne pas tomber. 

- Je- 

- On doit vraiment y aller, coupa l'ambulancier en prenant l'enfant dans ses bras, la faisant crier. Réponds-lui que tu viendras et allons-y, elle aura tout oublié demain. 

- Je viendrai ma grande, c'est promis, la rassura le pompier, la faisant aussitôt arrêter de gesticuler dans les bras de son collègue, un immense sourire maintenant scotché au visage. 

- Je m'en souviens si tu me mens, fais attention ! » Lança-t-elle en s'éloignant avec l'ambulancier, disparaissant entre les véhicules qui démarraient pour rentrer.

• § •

1er juin 2007
France

« Eh bien mon cher Olivier, on se lève pour aller voir les blessés maintenant ? Ironisa l'ambulancier de la veille, Luc, en voyant son ami apparaître dans le hall de l'hôpital. Tu n'étais pas réellement obligé de venir, ajouta-t-il en le guidant à travers l'entrée du bâtiment. 

- Je sais, mais... je n'ai pas d'excuse, elle restait dans ma tête, avoua Olivier en passant sa main sur son cuir chevelu découvert par l'âge. Comment va-t-elle ? Elle a retrouvé la vue ? 

- Oui, elle voit à nouveau, mais elle reste dans ses pensées depuis ce matin, on ne sait pas vraiment pourquoi. C'est délicat d'interroger des enfants de son âge, surtout après un accident comme celui-ci... même si d'après ce que tu nous as laissé, elle avait l'air plutôt consciente hier. Elle était capable de t'en parler ?

- Non, elle ne comprenait pas ce qui venait de lui arriver, tenta d'expliquer le pompier, un vague souvenir des mots et de la douleur mentale de la petite fille lui revenant en tête. Pourtant, elle avait encore tous ses souvenirs, mais... peut-être qu'elle a eu une révélation pendant la nuit, songea-t-il à haute voix en passant les portes vitrées du service pédiatrie. 

- C'est bien possible oui, mais elle n'a demandé personne d'autre que toi ce matin, pas ses parents, lui sourit Luc. 

- Elle sait qu'ils sont décédés ?

- On ne lui a pas dit, mais elle doit l'avoir compris d'elle-même. » 

L'homme en blouse blanche s'arrêta devant une porte, dont la vitre laissait voir la silhouette de la petite fille, de dos sous les draps, apparemment encore endormie. 

« Elle se souvient de son nom ? Demanda Olivier d'une voix plus basse pour ne pas la réveiller, bien que la porte soit fermée. »

Malgré cette attention, l'enfant leva immédiatement la tête vers l'entrée de sa chambre, fixant la vitre de ses grands yeux cachés par ses cheveux emmêlés, son corps restant complètement immobile sur le matelas - la vision aurait été digne d'un film d'horreur si la chambre avait été plus sombre. 

« Aucune idée, elle ne parle plus depuis hier soir, soupira Luc sans remarquer le soudain état de l'enfant du fait de ses yeux rivés sur les éternels papiers qu'il avait dans les bras, et selon tes collègues qui ont fouillé la voiture, ses parents seraient Xavier et Pauline Nuison, qui n'ont pas d'enfant déclaré. Ça a laissé un doute sur la possibilité qu'elle soit leur fille, mais ils ont les mêmes gènes, alors.., Par contre, on n'a vraiment pas son prénom.

- Elle n'a aucun papier dans la voiture, vraiment ? S'étonna Olivier, qui se souvenait de l'emplacement de la route, très proche de la frontière allemande.

- Le seul qu'on ait c'est un passeport appartenant à Thalia Evans, aujourd'hui âgée de vingt ans. Elle n'a aucun lien avec leur famille. Enfin bref, tant que mademoiselle restera muette, on ne saura pas comment l'appeler. D'ailleurs, dit-il d'un ton plus gai, on lui a fait des analyses hier soir en coup de vent, pour vérifier qu'elle n'avait pas de séquelles graves de l'accident, et on a repéré quelque chose de plutôt drôle : son ouïe est parfaite, donc aucune altération en rapport au bruit de l'accident, mais on a quand même remarqué que cette petite dispose d'une reconnaissance des sons phénoménale, toi-même tu serais surpris ! On était sept devant elle, on finissait de l'examiner - trois étaient venus parce que c'était la pause café -, et quand elle a entendu un téléphone sonner dans une de nos poches, elle a directement orienté son visage vers la personne concernée, en disant que « madame, ton téléphone sonne », en pointant du doigt la poche en question. J'ai trouvé ça absolument fou, parce que- mais tu ne m'écoutes pas, décela-t-il en relevant la tête vers son ami, qui fixait la petite fille dans son lit, qui elle attendait qu'ils aient fini de parler pour se lever. 

- Excuse-moi, se reprit précipitamment le pompier, je... sa tête me dit vraiment quelque chose, mais je ne sais plus... »

À la lueur des camions la veille, il n'avait vu de la petite fille que ses yeux marquants, et quelques traits de son visage, mais maintenant qu'il l'avait en face de lui, il savait qu'il l'avait déjà aperçue quelque part. Luc regarda l'enfant à son tour à travers la petite vitre de la porte colorée, sans sourciller. 

« Bah, moi je t'avoue que j'en ai vu tellement... je vais te laisser avec elle, pas de bêtises, conclut-il en s'éloignant, son bippeur se manifestant dans sa poche.

- On se verra pour ta pause ? Lui lança Olivier avant d'entrer dans la pièce blanche. »

Un pouce en l'air lui répondit au fond du couloir, il entra alors doucement dans la petite chambre, le regard de la petite fille se fixant sur lui immédiatement. Il s'en approcha lentement, comme pour ne pas l'effrayer, conscient que la place du malade terrifiait plus d'une enfant. Pourtant, la petite fille sans nom ne bougea pas, le suivant du regard jusqu'à ce qu'il se pose dans un canapé près de son lit, à l'opposé de l'entrée. 

« Bonjour ma grande, commença-t-il pour rompre ce silence pesant, qui commençait à le déranger. Comment tu te sens ce matin ? »

Pas de réponse. Les mots de son ami lui revinrent en tête : elle n'avait pipé mot depuis la veille. Il sourit gentiment, ne laissant pas transparaître sa panique d'être venu ici sur une pulsion inexpliquée et complètement inédite. 

« Moi je t'avoue que ça va, ce qui s'est passé hier était éprouvant, et ça m'a fait du bien de dormir un peu - les yeux de l'enfant se posèrent sur le sol à ses mots, comme pour analyser ce qu'il disait, sa tête penchée curieusement sur le côté. »

Elle resta un moment immobile, puis ouvrit la bouche lentement, prenant une longue respiration avant de parler, son regard planté dans le carrelage immaculé luisant à la lumière des néons de la pièce. 

« Monsieur, tu es encore fatigué. Ta voix ne veut pas être ici. »

Douche froide pour Olivier, qui aussitôt, comme si les mots de l'enfant avaient une réelle signification - alors qu'ils n'avaient en réalité pas grand sens -, sursauta, et leva vivement sa tête vers elle, sans plus pouvoir se concentrer sur son rôle de pompier sans peurs et sans reproches. Elle avait recommencé. Il ne comprenait pas, il n'arrivait pas à saisir comment elle pouvait réfléchir, dans sa petite tête d'enfant, et tirer des conclusions sur ses émotions uniquement grâce au son de sa voix. Alors qu'il parlait avec un ton réconfortant. C'était incompréhensible. Elle l'avait fait la veille, elle venait de le refaire, et elle avait encore raison, meme s'il refusait de se l'avouer.

« Pardon ? Souffla-t-il en plissant les yeux pour mieux voir le petit être, tourné presque dos à lui. Peux-tu répéter s'il te plaît ?

- J'ai dit : ta voix est toujours fatiguée, elle n'a pas envie d'être ici. »

Puis elle tut sa voix monocorde et lasse à nouveau, instaurant une immense distance entre elle et son interlocuteur, stupéfait de la simplicité avec laquelle elle disait des choses aussi complexes, et pourtant si logiques. Aussi vrai qu'un enfant n'avait pas conscience de tous les aléas de la vie, il n'avait pas connaissance de toutes les règles de grammaire, conjugaison et orthographe de la langue, mais il savait pourtant manier les mots pour décrire les émotions de manière si juste, qu'il paraîtrait connaître les recoins du langage qui échappaient même aux plus âgés.

« Et... tu penses savoir pourquoi elle n'a pas envie d'être ici ? Tenta le pompier en y mettant toute sa compassion, toute sa tendresse, voulant désespérément entrer dans son monde d'enfant perturbé. 

- Parce que tu es nerveux, monsieur, posa l'enfant en se retournant sur son lit, opposant son regard à celui d'Olivier. »

Et il fut transpercé par ces yeux, ces yeux vides, toujours vides d'émotions et de lumière, vides comme ils l'étaient la veille quand ils étaient aveugles. Un vide glaçant, si différent de celui qu'elle avait avant de retourner dans ses souvenirs, dans sa tête, si différent de son regard d'enfant naïf, qui ne comprenait pas ce qui venait de lui arriver et obéissait simplement aux ordres de son père lui disant de s'éloigner du lieu de l'accident. Olivier aurait aimé retrouver ce regard.

« Tu as raison, je suis nerveux, soupira le pompier en manquant frissonner devant ces yeux pénétrants. J'ai peur de te parler, parce que tu peux ne pas me répondre. 

- Mais je te réponds. 

- Et si je te demande si tu as envie de pleurer, tu peux me répondre ? »

L'enfant se détourna pour descendre du lit, laissant momentanément son interlocuteur respirer, puis s'approcha de lui, qui la posa sur ses genoux pour être à la même hauteur qu'elle. 

« Monsieur, pourquoi je voudrais pleurer ? Moi monsieur, je n'en ai pas envie, pas comme les gens dans la télé. J'ai envie de chanter, de crier, de hurler, mais pas de pleurer. Moi je sais que mes parents je ne les reverrai plus jamais, je l'ai deviné quand les gens en blouse blanche ils m'ont parlé avec pitié, hier soir, surtout les madames avec les cafés. Je savais qu'ils me regardaient comme on regarde Bambi dans le film, quand on est tout triste pour lui à la mort de sa maman biche. Je me sentais comme Bambi. Mais j'ai pas aimé me sentir comme si on avait tué ma maman biche. Et puis, reprit-elle en posant ses petites mains sur la barbe naissante de d'Olivier, examinant les petits poils durs sous ses doigts, je sais que je ne suis pas triste pour Papa et Maman, parce qu'ils ne sont pas morts, ils sont dans l'avion du paradis, et ils me regardent quand je vois un avion dans le ciel, comme dans la chanson du portrait. Alors je n'ai pas peur. Mais j'ai peur pour ce qui va m'arriver, parce que monsieur docteur Luc il m'a dit qu'on allait s'occuper de moi et peut-être me trouver une nouvelle famille si personne ne vient, mais moi je ne veux pas.

- Pourquoi tu ne veux pas qu'on te trouve une nouvelle famille ? Demanda doucement Olivier, sans bouger pour ne pas perturber la petite, fille qui semblait s'ouvrir à lui en racontant tout ce qui lui passait par la tête, créant un récit délié et sans sens commun au début et à la fin. 

- Dans les Disney, les nouvelles familles sont toujours méchantes. Cendrillon elle avait une belle-maman qui lui faisait faire le ménage et l'empêchait de sortir voir le prince, Blanche-neige elle avait une belle-maman qui voulait l'empoisonner avec une pomme pourrie, et Raiponce elle avait une belle-maman qui l'enfermait dans une tour. Mon Papa il m'a dit une fois que dans les Disney le plus important c'est la fin et comment elle est arrivée, mais la fin c'est toujours quand la princesse trouve un prince charmant, et moi je veux pas attendre de trouver mon prince charmant, parce que tous les garçons de ma classe ils sont bêtes et moches, il n'y en a pas du tout qui puisse faire un bon prince charmant. »

Olivier prit un instant de silence, pour comprendre le mélange de connaissance de la petite fille, et sa maturité alors qu'elle était si jeune ; penser comme ça, au futur, à comment y arriver, au lieu de simplement se dire « plus tard je trouverai un prince et on aura un château » comme toutes les petites filles rêveuses de son âge. 

« Ma grande, quel âge as-tu ? Demanda-t-il à sa petite interlocutrice, réalisant qu'il ne l'avait pas fait la veille. 

- J'ai... réfléchit l'enfant en comptant sur ses doigts, en en levant six. Tout ça. 

- Tu réfléchis beaucoup pour une petite fille de six ans dis-moi, prit-il sur le ton de l'humour en la chatouillant légèrement, la faisant gigoter en gloussant. 

- Oui, Zayn il me dit toujours ça aussi, rit-elle en prenant la main du pompier pour l'observer, pliant et dépliant ses doigts lentement en en observant les articulations. 

- Qui est Zayn ? Tu m'en as déjà parlé, mais je ne sais pas qui c'est... »

L'enfant leva les yeux vers lui, stupéfaite, comme si il était évident pour elle de savoir qui était ce « Zayn » dont elle lui parlait. 

« Tout le monde connaît Zayn, marmonna la petite fille en boudant. 

- Peut être que je le connais oui, mais j'en connais plusieurs, alors il me faut son nom de famille... mentit pitoyablement le pompier en redoutant d'avoir fait se renfermer la petite fille. »

Elle leva vers lui un regard qui le fit se sentir très mal, à la limite de baisser les yeux, parce qu'elle semblait savoir tout autant que lui l'ampleur de ce mensonge. Pourtant, elle ne dit rien, et lui demanda son téléphone, tapant quelques mots sur la barre de recherche Google, une révolution qu'elle avait l'air de savoir utiliser. 

« Qu'est-ce que tu cherches ? Tenta de se rattraper l'adulte en essayant de voir ce qu'elle écrivait, mais elle cacha ses yeux avec l'une de ses mains sans rien dire, lui faisant clairement comprendre d'attendre qu'elle ait fini. 

- Tiens, dit-elle de sa petite voix en lui mettant l'écran sous les yeux quelques instants plus tard, affichant un article d'un journal en ligne ''Zayn Malik, d'Ingé son à chef de chœur international''. »

Olivier défila rapidement les pages du bout des doigts, l'appareil restant dans les mains de la petite fille, contente de revoir le visage de cette personne, apparemment était importante pour elle, sur les photos de l'article. Tout ce que retint l'adulte fut que ce Zayn avait débuté dans la musique en tant qu'ingénieur du son dans un groupe local, et avait fondé un chœur mixte quelques années plus tard, décollant soudainement dans le monde musical et faisant des tournées à l'internationale avec son chœur. 

« Zayn c'est mon ami, et même qu'il me protège, babillait la petite fille en rendant le téléphone à Olivier, qui le rangea dans sa poche. 

- Tu le connais donc bien ? L'interrogea Olivier, vérifiant qu'il ne s'agissait pas d'une lubie ou d'un imposteur louche qui aurait entourloupé l'enfant lorsqu'elle serait allée le voir à un concert. 

- Oh oui ! Il m'apprend tout plein de chansons très jolies et compliquées, et il est content quand je les chante, sourit-elle en se promenant dans la chambre. Avec Papa et Maman, ils disent que quand je chante ça pourrait faire s'arrêter la Terre de tourner, et les autres ils sont jaloux alors il faut me protéger d'eux et m'en tenir éloignée, et puis ne pas qu'ils me connaissent aussi, récita la petite fille en plissant les yeux pour se souvenir de tout ce que ses parents semblaient lui avoir appris. »

L'étonnement fut la première chose qui prit l'homme qui l'écoutait. La seconde fut la raillerie, puisque couver leur enfant comme ça et la complimenter trop ardemment ne ferait que la rendre hautaine et détestable auprès des autres, et enfin il songea que pour prendre de telles mesures, il fallait de très bonnes raisons. 

« Tu veux bien me chanter quelque chose ? Demanda-t-il alors, doucement car intrigué, pour ne pas la brusquer. Si c'est si beau, j'ai envie d'entendre moi aussi... »

Elle s'arrêta net, son regard qui semblait reprendre vie se perdant à nouveau. Et là, Olivier crut avoir fait une bêtise. Jusqu'à ce que le bruit de la porte qui s'ouvrait n'attire son attention. Luc passa sa tête dans l'entrebâillement, tout sourire. 

« Alors tous les deux, ça discute bien ? Je viens te chercher pour les résultats de tes examens, championne, et puis après ça on ira te présenter aux autres enfants, et te poser quelques dernières questions pour voir des détails. On y va ? »

Il n'obtint pas de réponse, la petite fille le suivant simplement sans adresser mot ni geste à Olivier, son regard toujours perdu dans le sol. Lui les regarda partir, culpabilisant d'avoir perdu à nouveau la lueur d'âme d'enfant qui subsistait dans cette petite personne.

Qui est-elle pour avoir besoin d'une protection aussi stricte à son âge ? Se demanda Olivier intérieurement, se levant pour sortir de la pièce qui commençait à lui devenir étouffante sans la présence de sa petite propriétaire.

Il se dirigea lentement vers une salle informatique dédiée au personnel - en tant qu'ami de Luc et pompier affilié à l'hôpital il en avait exceptionnellement accès, ce dont il aimait abuser de temps en temps -, alluma un ordinateur, et rechercha le nom de ce chef de chœur, Zayn Malik. Aussitôt, le débit rapide du bâtiment lui proposa de nombreux résultats, notamment des vidéos de concerts menés à l'étranger, la plus vue étant également celle qui avait été publiée moins de deux jours plus tôt.

Je regarderai ça plus tard, songea l'homme en cliquant plutôt sur une page d'un article en ligne d'un journal musical réputé, sorti la veille au soir. 

Zayn Malik, un chanceux inédit, de moins que rien à idole de la musique. 

On ne le présente plus dans le domaine de la musique, Zayn Malik et son chœur mixte SATB réunissant enfants et seniors sont partout dans les médias musicaux depuis des semaines ; mais pourquoi ce succès est-il aussi soudain ? 

L'une des principales raisons de cette montée fulgurante est bien sûr le talent du jeune homme pour enseigner des chants de la plus grande complexité à ses chanteurs, parmi lesquels retrouve quelques timbres particuliers, qui ont tendance à faire des solos ; ils ne sont cependant pas privilégiés et tous les membres sont à un moment appelés à chanter seuls devant le public. Sa rigueur, sa patience et son sens de l'humour sont, selon ses chanteurs, à toutes épreuves, et c'est ce qui les aide souvent à avancer et progresser, sa présence permettant au groupe de tenir sous la pression médiatique, défiant de lui-même les caméras à se risquer dans leurs répétitions et interviewer les chanteurs individuellement. 

Un second point est, bien entendu, les chants interprétés, allant des plus classiques, aux plus compliqués, aux modernes, et parfois très récents. Les chanteuses jeunes adultes semblent apprécier apprendre au groupe des chansons populaires passant encore sur les postes. Leur chef n'est pas contre ces changements, « cela aide le groupe à être soudé et bien travailler ensemble », raconte-t-il dans une interview exclusive. Lui-même se joint à ces explosions de gaieté, alors même qu'ils risquent de prendre du retard sur leurs programmes toujours plus chargés et difficiles. Un ajout récent à leur catalogue est le Requiem* de Stopford, réputé très difficile et pourtant annoncé comme la plus belle interprétation du chœur, ce qui nous amène à notre troisième point, point central de son succès : le chœur a récemment accueilli une membre âgée d'environ six ans, dont l'identité n'est pas révélée au public, à l'instar des autres chanteurs, mais c'est pourtant son nom qui est le plus demandé dans les convocations que reçoit le groupe depuis deux jours, et particulièrement leur chef, Zayn Malik. 

« Je ne souhaite pas acculer notre nouvelle membre et surtout pas à son âge », claque le chef à un assaut de journalistes après leur première interprétation du Requiem dans leur concert en Allemagne, le 30 mai. « L'objectif de son intégration au groupe est nul autre que de s'amuser, apprendre de la musique et se faire des amis. Je ne veux pas qu'elle tombe entre vos mains véreuses et perde son avenir à cause de votre cupidité ». Mais pourquoi reste-t-il aussi véhément à ce sujet ? On raconte plusieurs hypothèses, dont voici quelques-unes : la première est que cette petite fille serait sa progéniture et qu'il souhaite la protéger du monde extérieur en tant que papa poule, mais elle fut rapidement déviée car selon ceux présents au fameux concert, ils ne se ressemblaient pas et la petite fille faisait de grands signes au public en hélant ses parents avant d'être reprise pour commencer à chanter. Une seconde hypothèse serait que le chef de chœur voudrait garder cette enfant pour lui, et profiter de ses avantages, car si tout le monde s'accorde sur un point, c'est que la voix de cette enfant est magnifique, non pas magnifique car elle serait émouvante, mais magnifique à l'oreille, si juste que, selon tous les témoignages recueillis après ce concert, le public aurait cessé tous mouvements dès la première note émise par l'enfant, écoutant le solo du chant Lux Æterna de la petite fille, se sentant profondément touchés au plus profond d'eux-mêmes. « Le stade entier s'était tu, on n'entendait plus que le souffle du vent passant dans les rangées de sièges, et sa voix, glissant comme une lame dans la nuit. Même le chœur qui chantait encore à côté, on ne l'entendait plus », raconte notre envoyé spécial avec des larmes dans les yeux en y repensant, pourtant d'un naturel réservé.

Les membres du public interrogés voulurent eux aussi exprimer ce qu'ils avaient entendu, mais aucun n'avait de mots précis, à part un qui nous confia : « Cette enfant a une voix belle à en mourir, elle nous l'aurait ordonné, nous l'aurions fait. Si je devais la décrire, je dirais que c'est le son se rapprochant le plus de la voix des anges telle que l'humanité pourrait l'entendre. C'était... beau, et parfait. ». Enfin, une dernière hypothèse à cette protection est issue du terme employé par cet écrivain, « belle à en mourir ». « Une telle voix peut aisément convaincre n'importe qui de faire n'importe quoi », a avancé un critique en sortant du concert, encore ému de ce qu'il venait d'entendre. « On dira ce qu'on veut, mais si les parents tenaient vraiment à leur fille, ils devraient la retirer de ce chœur illico, même si maintenant je pense que c'est trop tard. On ne sait pas ce qui peut arriver à une enfant aussi jeune dans les coulisses, et je ne dis pas ça pour être incendié dans les médias, je vous assure que dans six mois, si il ne lui est rien arrivé, c'est un miracle ». 

Ces dernières paroles sont tirées du direct qu'il a mené sur la chaîne nationale ce matin, déclenchant le mécontentement de nombreux téléspectateurs, mais nous sommes cependant amenés à penser la même chose ; dans un monde aussi peu sûr et fourbe que peut l'être celui de la célébrité, une petite fille de six ans ne pourra tenir longtemps face aux nombreux êtres cupides qui le peuplent. Aucun prochain concert n'est annoncé pour la nouvelle étoile montante, mais le public ne fait que l'attendre et reste pour l'instant sur sa faim. 

C'était Isabelle Meunier, envoyée de...

Olivier arriva à la fin de l'article en retenant sa respiration, se remémorant chaque parole échangée avec la petite fille, sentant lui aussi que cette nouvelle célébrité n'avait rien de bon pour elle, à son âge. Il se souvint brusquement d'où il l'avait déjà vue, lorsqu'il en avait eu le pressentiment ; il lui semblait bien que c'était sur une photo de son journal, qu'il lisait la veille depuis son poste de garde jusqu'à recevoir l'appel du père de l'enfant après l'accident. Ses pensées se bousculèrent dans sa tête, se liant les une aux autres. Il ne pouvait concevoir que cette petite enfant, dont personne ne connaissait le nom, était livrée à elle-même dans les médias, ne pouvant même plus compter sur ses parents pour la protéger. Apparemment, seul lui restait ce Zayn, chef du chœur.

Après quelques instants de recherches supplémentaires, il tomba sur un autre article, beaucoup moins sérieux que le premier, dans lequel la petite fille était surnommée Angel, en référence à sa voix merveilleuse. Une petite communauté s'était réunie ici, clamant le fait qu'elle devait revenir sur l'avant de la scène, ou être traquée pour être interviewée. 

« Les gens sont fous, marmonna le pompier pour lui-même en fermant la page, retenant néanmoins le surnom Angel. Au moins je peux tenter de l'appeler comme ça maintenant...

- Tu parles tout seul ? Intervint Luc en passant sa tête dans l'entrebâillement de la porte, faisant sursauter son ami. Alors, tes recherches avancent ?

- Cette petite fille ne doit pas tomber n'importe où, Luc, répondit simplement Olivier en éteignant l'ordinateur. Vous avez obtenu son nom en l'interrogeant à nouveau ?

- Non. Mais je crois qu'elle s'en souvient maintenant, elle a eu une piste pendant qu'elle nous parlait, et elle a semblé l'exploiter dans sa tête, puis nous a dit qu'elle ne le dirait à personne. Elle n'a apparemment pas le droit de le divulguer.

- Et elle a raison. Je peux lui parler ? »

Luc ne comprit pas le ton froid de son ami, ni les réponses laconiques qu'il lui lâchait, mais ne fit pas de remarque. 

« Oui, je viens te chercher pour ça justement... elle veut te voir avant de repartir. Tu devrais peut-être lui dire comment tu t'appelles d'ailleurs, on a eu du mal à comprendre de qui elle parlait quand elle appelait monsieur. Ah, soupira-t-il quand son bippeur s'activa, tu vas devoir y aller seul.

- Ça ne me dérange pas, merci de m'avoir prévenu, lui lança Olivier en s'éloignant en direction de la pédiatrie. »

Son esprit se sentait mitigé à propos de cette Angel. Il voulait lui parler comme avant d'être au courant de son identité relative, mais il bloquait ; il ne savait d'un coup plus vraiment comment faire pour être aussi détendu qu'avant en sa présence.

C'est stupide, ce n'est qu'une enfant... se morigéna-t-il en se frottant le front, poussant la porte de sa chambre après avoir frappé.

Immédiatement, la petite fille lui fonça dans les jambes en riant, le faisant presque tomber. 

« Angel, fais attention ! S'exclama quelqu'un d'autre dans la pièce, une voix fluette d'homme. »

Olivier leva immédiatement la tête, alerté, et tomba sur une paire d'yeux bruns, appartenant au chef du chœur, Zayn Malik, dont il avait vu de nombreuses photos depuis le début de ses recherches. Il ne sut quoi dire, alors il frotta simplement les cheveux de la petite fille affectueusement, essayant d'oublier la présence du jeune homme. Cette fois c'était sûr, il ne savait plus du tout comment se comporter. Il releva tout de même la tête vers lui après quelques secondes, pour ne pas paraître impoli.

« Bonjour, vous devez être Zayn ? Salua-t-il en se déplaçant pour lui serrer la main, accueilli par un sourire franc. 

- En effet, enchanté monsieur !

- Vous pouvez m'appeler Olivier, lui sourit-il en retour. 

- Alors enchanté Olivier ! Je crois que notre chère amie voulait vous revoir avant de partir, je l'emmène avec moi.

- Monsieur, ton prénom c'est Olivier ? Demanda Angel en secouant ses jambes pour attirer son attention, alors que Zayn sortait de la pièce pour aller demander quelque chose à l'infirmière de service, comme il le lui indiqua avec un sourire ravageur.

- Oui ma grande, je m'appelle Olivier. 

- J'aime bien ! Je m'en rappellerai toute ma vie et même encore après ! Rit-elle, soudainement très joyeuse. Tu vas être ma chanson préférée pour la vie ! »

Le pompier n'eut pas le temps de se concentrer sur ces paroles que Zayn revint dans la pièce, accompagné de Luc. 

« On va y aller ma chérie, tu as tout avec toi ? Tu n'as rien oublié ?

- Non non. On peut y aller Zayn. Au revoir Olivier ! Lança-t-elle en s'éloignant dans les couloirs de l'hôpital. Tu m'oublies pas hein ?

- Non ma belle, ne t'inquiète pas ! Lui renvoya le pompier en sentant son cœur se compresser lentement, en proie à un mauvais pressentiment concernant ce départ. Il avait le droit de l'emmener ? Demanda-t-il ensuite à Luc quand ils eurent tourné à l'angle du couloir. 

- Oui, il a apporté une attestation de son identité et de sa tutelle en cas d'accident aux parents, signée par eux-mêmes. Toute cette histoire de sans-papiers est vraiment très étrange si tu veux mon avis, marmonna l'infirmier en fouillant dans ses papiers avec plus de rigueur qu'à l'accoutumée, même le nom était falsifié sur l'attestation. À part ça tout est en règle, il peut avoir sa garde, m'enfin c'était moins une, Michael semblait sur le point de péter un câble en écoutant ce gars déblatérer qu'elle n'était pas déclarée mais gna-gna-gna. Reste à savoir s'il peut l'adopter définitivement, mais ce n'est plus de notre ressort. »

Olivier soupira discrètement, suivant son ami pour aller manger à la cafétéria du personnel. Il ne savait vraiment pas quoi, mais il sentait que quelque chose allait mal se passer. 

• § •

16 juin 2007
Musicactual.com

Chers lecteurs, l'article d'aujourd'hui est exceptionnel, mais nous tenons à l'écrire pour vous tenir au courant des actualités du monde musical, bien que peu joyeuses en ce moment. La nuit dernière, lors du concert tant attendu du chœur de Zayn Malik, Allegra Voce, une émeute a éclaté lorsque le public a appris que la jeune prodige du chœur, surnommée Angel par les fans, ne serait pas présente ; l'émeute fut difficilement retenue, et engendra la fermeture du gala originellement organisé. Ces faits sont déplorables, mais c'est pourtant une réalité, et nous soutenons de tout cœur les membres d'Allegra Voce qui doivent faire face à cette situation, surnommée ''effet Angel'' par certains journalistes.

27 juin 2007
Musicactual.com

Les faits du début du mois sont bien peu notables comparé à ce qu'Allegra Voce a dû affronter hier soir, lors de sa répétition hebdomadaire avec la plupart de ses membres, puisque des individus cagoulés sont entrés sur le lieu - privé - de la répétition et ont interpellé plusieurs chanteurs avant de leur lancer des pierres, en constatant que l'objectif de leur intrusion illégale n'était pas présent, Angel étant en effet absente du lieu de la répétition. La police est arrivée à temps pour interpeler les intrus, qui sont actuellement en garde à vue. Nous tenons à partager notre soutien au chef d'Allegra Voce, Zayn Malik.

22 juillet 2007
Musicactual.com

À l'image des précédents événements dramatiques subis ces derniers temps, Allegra Voce se relève péniblement, cette fois après une attaque qui pourrait bien s'apparenter à du terrorisme, subie en plein concert hier soir en Russie. Quinze de leurs membres sont décédés en plus de trois de leurs spectateurs, après avoir respiré les diverses gaz moyennement toxiques mais dangereux déversés sur scène, les victimes se trouvant être des enfants et des personnes âgées en majorité. Il semblerait après une première enquête que leur cible n'était pas claire : les deux agissants ont été retrouvés non loin du lieu du crime, complètement soûls. Ils se seraient maudits ce matin, l'un d'eux s'est donné la mort en apprenant ce qu'ils avaient fait sous l'emprise de l'alcool. 

Ces tragiques moments pour Allegra Voce semblent ne pas se calmer, l'effet Angel terrorise les foules aussi bien qu'il les extasie, le nombre de demandes augmentant sans cesse auprès de leur chef, Zayn Malik. Nous lui communiquons tout notre soutien ainsi qu'aux membres du choeur, et à Angel elle-même, qui fut filmée par l'une des chanteuses un peu plus tôt, pleurant la mort de ses anciens camarades. « Thalia elle a dit que plus jamais je verrai les autres, mais moi je veux les entendre chanter encore », sanglotera-t-elle devant la petite caméra, émouvant nombre d'internautes. 

1er août 2007
T

F1.fr

Chers téléspectateurs, aujourd'hui est la fin du combat qu'ont mené les membres du chœur Allegra Voce depuis des mois, puisque sont à déplorer leur décès à tous, dont Zayn Malik leur dirigeant, le lieu de leur répétition hebdomadaire ayant été retrouvé encore une fois par leurs poursuivants hier soir, selon les témoignages ''hypnotisés'' par la voix d'une membre en particulier, voire même complètement fous et hilares pendant leur massacre - il s'avère après enquête qu'ils étaient sous l'emprise de drogues et de stupéfiants. Les détails de la tuerie organisée sont effroyables, les victimes sont retrouvées pour beaucoup découpées et difficilement identifiables, d'autres entassées dans un coin de la pièce après plusieurs coups contondants ou tranchants, d'autres encore étouffées ou bien la gorge tranchée. Aucun survivant n'est signalé à l'heure actuelle, prenant en compte le fait qu'une grande partie du lieu est parti en fumée pendant un incendie déclenché lors de l'attaque par l'un des agresseurs.  

Nous tenons à manifester tout notre soutien aux familles des morts, c'était votre journal de treize heures sur TF1

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