§ Chapitre 22 §
5 septembre 2022
France
L'endroit était assez grand mais semblait plus petit à cause des nombreuses tables qui peuplaient la boutique, le comptoir à viennoiseries s'annonçant d'office être la chose la plus belle qu'Harry ait vue depuis le début de son séjour. La décoration d'ensemble reposait visiblement sur le thème d'un bon chalet campagnard, du bois ornant chaque surface disponible de la boutique pour un effet chaud et tout doux.
« Bonjour, adressa Betty à l'employée souriante face à eux. Je voudrais... Euh, attendez, il y a trop de choses. »
Pas vexée ni ennuyée, la brune en face d'eux leur murmura un gentil ''pas de problème'' en patientant, n'ayant pas beaucoup d'autres choses à faire de toute manière, la boutique n'abritant que deux duos d'étudiants en train de travailler. Harry retourna son attention sur la vitrine et eut aussitôt l'eau à la bouche, chaque élément semblant plus délicieux que son voisin. Les petites tartelettes, les choux, les éclairs, les créations de chocolat farfelues, les beignets, chaque aliment lui hurlait de le choisir.
« Je ne sais pas quoi prendre, soupira Harry devant une Betty pas plus éclairée que lui. Tout a l'air trop bon.
- Pareil. Oh attends j'ai une idée ! Sautilla la blonde en s'attirant les foudres d'un travailleur non loin d'eux. Je marche le long de la vitrine et tu me dis stop, et je fais pareil pour toi !
- C'est parti. »
De son côté, l'employée n'avait pas l'air dérangée d'avoir un peu de divertissement, vu son sourire doux.
« Je commence, prévint Betty en prenant un pas lent, levant son bras à différentes hauteurs pour ne rien rater. Dites-moi mademoiselle, adressa-t-elle à l'employée sans s'arrêter. Vous êtes super jolie, quel est votre nom ? »
Appuyé contre la vitrine, Harry ne manqua pas le rosissement des pommettes de la brune, qui bafouilla un petit ''Arowana'', qu'il fut sûr de ne capter que grâce à son ouïe particulière. La preuve, Betty atteignit le bout de la vitrine sans réagir autrement que de lui demander son nom à nouveau, signe qu'elle n'avait pas entendu.
« Arowana, répéta la jeune femme un peu plus fort, mais toujours très faiblement.
- C'est aussi beau que ton visage, tes parents étaient inspirés, sourit la jeune fille en continuant de marcher, les yeux fermés. Moi c'est moins classe, je m'appelle Betty.
- C'est très joli aussi, la défendit l'employée en fronçant les sourcils. Ton prénom est aussi atypique que le mien.
- Mais moins stylé qu'Arowana ou qu'Harry, contesta gentiment Betty en parcourant la surface de la vitrine dans l'autre sens. Pitié dis-moi qu'il ne s'est pas volatilisé cet imbécile, je ne l'entends plus.
- Je suis toujours là, d'ailleurs arrête-toi, déclara le brun en stoppant le bras de Betty à un étage, effleurant son bras. Tu peux ouvrir les yeux. »
Impatiente, Betty découvrit son goûter, s'éloignant inconsciemment d'Harry dans le même temps.
« Une tartelette au citron ! Oh, ça fait des siècles que j'ai pas mangé ça c'est trop bon !
- C'est vrai, approuva le garçon en lorgnant sur la pâtisserie brillante derrière la vitre. À mon tour. Tu me dis stop quand tu veux.
- Je connais les règles, dis-toi d'avance que je vais mettre autant de temps que tu en as mis pour moi.
- C'est mérité, acquiesça doctement le bouclé en se mettant en position. Je commence.
- Alors Arowana, je peux te poser des questions sur toi ou tu ne veux pas ? Reprit Betty comme elle avait commencé.
- Tu peux, affirma la jeune femme d'une voix fluette un peu plus forte que la minute d'avant. Je n'ai pas de problème particulier, ne te sens pas empêchée.
- Génial, mais ne t'inquiète pas, je ne compte pas être trop intrusive. Tu as quel âge ?
- Dix-neuf ans. Et vous ?
- Dix-sept tous les deux, on vient d'arriver ici. Tu es là depuis longtemps ? À CUHA je veux dire.
- Ça fait deux ans, je suis arrivée au même âge que vous, sourit la jeune femme, Harry le captant même s'il avait les yeux fermés. Quels sont vos handicaps à tous les deux, si ce n'est pas indiscret ?
- Ça ne me dérange pas de les dire ici, ça te va Harry ? Demanda Betty, ce qu'Harry remercia mentalement - d'aucuns auraient été gênés de parler de ça dans une boulangerie devant des inconnus, qui certes ne les écoutaient probablement pas, mais étaient là quand même.
- Ne t'inquiète pas pour ça, la rassura-t-il dans un sourire, tournant à la vitrine pour la seconde fois. Pour ma part Arowana, je suis trop-bien-entendant, et je dois porter des protections auditives car je trouve le monde qui m'entoure trop bruyant, surtout à cause des fréquences non naturelles produites par les appareils électriques. »
La chose qui le surprit le plus dans sa propre déclaration était qu'il n'avait pas pris un ton différent que s'il faisait un exposé sur les chromosomes en classe.
« Moi je suis hypocondriaque, suivit Betty en parlant plus bas - elle devait avoir un peu plus de réserves que le garçon à ce sujet. J'ai peur de la saleté et des maladies, j'ai des tocs de propreté et des réflexes pour rester saine que je ne contrôle pas, mais je fais très rarement des crises. Tu veux nous dire le tien aussi ? Je comprends si ce n'est pas le cas, ajouta-t-elle encore plus bas, de telle sorte que les étudiants derrière ne pouvaient pas l'avoir entendue. »
Il y eut un instant de silence, puis Arowana reprit la parole, très doucement, la voix aussi frêle et douce qu'une plume d'oisillon.
« La raison de ma présence ici vient du fait que j'ai longtemps été harcelée au collège puis au lycée, j'en parlais autour de moi mais les adultes et le personnel enseignant n'en avaient cure ou étaient impuissants, et ça a conduit à mon mutisme permanent - sa voix trembla un peu -, que j'ai conservé jusqu'à il y a quelques mois. Je réapprends à parler, ça me fait étrange mais ce n'est pas désagréable.
- Tu es super courageuse de reparler encore, je serais incapable de me présenter volontairement devant un malade à moins de deux mètres.
- Le rapport ? Demanda Harry en ricanant, se récoltant un regard tueur qu'il ne put pas voir.
- Bah je me dis que c'est le même sentiment gros débile. Allez arrête-toi, t'as fait combien d'allers-retours là ?
- Sept, répondit le garçon en ouvrant les yeux, tombant sur une religieuse. Cool !
- Toi et tes jambes de girafe là, maugréa Betty dans sa barbe, attirant un léger rire de la part de Arowana derrière le comptoir. Oh une religieuse, dommage que j'aime pas ça, ricana-t-elle pour elle-même.
- Tu l'as fait exprès, devina Harry sans mal. Pas grave, ça fait longtemps que je n'en ai pas mangé mais il me semble que c'est bon.
- Alors on prendra une tartelette au citron et une religieuse s'il te plaît, lança la petite blonde à la vendeuse qui les servit en souriant. Je peux avoir ton numéro pour te recontacter ? Fit-elle une fois leurs sachets dans les mains. Tu as l'air vachement cool. »
Arowana rougit une seconde fois, son embarras et sa timidité étant aux yeux des deux plus jeunes absolument adorables. Nerveusement, elle griffonna sur un papier puis le donna à Betty, qui le passa à Harry une fois qu'ils furent confortablement installés à l'une des tables intérieures, après avoir salué la gentille employée qui le leur avait rendu, toujours écarlate. Distraitement, Betty parcourut la carte de la partie café scotchée sur la table, et d'un coup, ses yeux s'agrandirent, et elle avala avec peine le morceau de tartelette qu'elle avait dans la bouche.
« Harry, haleta-t-elle, je crois que je vais défaillir. »
Son amie était clairement en train de blaguer, alors il ne s'alarma pas plus que ça quand il la vit se faire de l'air avec ses mains.
« Que se passe-t-il ma douce ? Fit-il calmement, mangeant lentement ses choux au chocolat.
- Le café prépare des galettes bretonnes et des crêpes, ils font salé et sucré, cet endroit est vraiment le paradis, te rends-tu compte ?
- Dois-je comprendre que ta tartelette est bonne ? Ironisa le garçon en recevant l'information.
- Tu n'es pas assez enjoué, c'est étrange, murmura Betty en dardant sur lui un regard inquisiteur, ses yeux formant des fentes ayant sans doute pour but d'être intimidantes. Ne me dis pas que tu n'as jamais goûté ces cadeaux venus du ciel ? »
Son sourire niais fut la seule réponse qu'elle obtint, et elle fut sur le point de renchérir sur une plainte lorsque quelqu'un derrière elle le fit à sa place, la faisant brusquement sursauter :
« HANNN, MONSTRE ! INDIGNE D'ENTRER DANS LE DOMAINE SACRÉ DE LA PÂTISSERIE !
- Salut Wilhelm, répondit Harry en sursautant légèrement lui aussi, portant la main à ses tympans brusqués. Tu viens prendre un en-cas ?
- Merde j'avais oublié tes oreilles, excuse-moi- Ouais, je suis pote avec la gérante, faut savoir choisir ses amis tu le sais, sourit-il en ponctuant son 'conseil' d'un clin d'œil appuyé. Religieuse, je vois, reprit-il en détaillant leur commande, et tarte au citron ? Si vous voulez mon avis, ce qu'ils réussissent le mieux c'est les fondants au chocolat, mais faut aimer le chocolat.
- Je prendrai ça la prochaine fois, réfléchit Harry à voix haute, croisant ensuite le regard mortifié de Betty. Oh d'ailleurs, Wilhelm je te présente Betty, une étudiante de ma promo en médecine, et Betty-
- L'un des quatre masters de ce campus, aka le plus beau et le plus drôle, se présenta-t-il lui-même en lui tendant la main. »
Elle la refusa poliment, levant ses deux mains en l'air. Lui n'eut pas l'air de comprendre, puisqu'il joignit ses propres mains aux siennes, formant un check à peu près potable - sans prendre en compte le mouvement de recul immédiat de la jeune fille, devant le blond étonné.
« Oh mon dieu, tu n'aimes pas le contact ? Comprit-il en la voyant se frotter les mains contre elle, jurant silencieusement d'être aussi peu dégourdie pour ne pas toucher les gens. Je suis vraiment désolé, je n'avais pas compris. Je- Merde, quel boloss- Oh, ça va toi, râla-t-il en voyant Harry exploser de rire. J'ai brusqué quelqu'un alors que je suis littéralement aux rênes de cet endroit, quel débile ! Je suis vraiment désolé Betty, se confondit-il en excuses alors qu'elle se désinfectait les mains. J'ai peur de deviner maintenant, t'es quoi ?
- Hypocondriaque, sourit-elle gentiment. Mais ne t'en fais pas, j'ai l'habitude des maladresses, le rassura-t-elle en voyant que le pli entre ses sourcils ne disparaissait pas, c'est vraiment quelque chose de récurrent avec moi, même si les gens s'arrêtent en général quand je lève les mains, tu es le premier qui m'a fait un check, pouffa-t-elle. Toi, tu as quoi ?
- Je vis avec un seul poumon, expliqua brièvement le master en souriant façon colgate. Mais à part ça je n'ai rien. Sinon, reprenons notre intrigue principale, outre le fait que je m'y suis pris comme un manche dès le début - il prit une grande inspiration qui en y repensant devait forcément contraindre son unique poumon à la longue - HARRY, COMMENT OSES-TU N'AVOIR JAMAIS GOÛTÉ DE GALETTES BRETONNES ?! Beugla le blond en éclipsant visiblement par la pensée tous les étudiants travaillant dans la pièce.
- Je-
- Tu me fais honte, je pensais que tu étais quelqu'un de bien, renifla Betty en essuyant une larme.
- Alors-
- ET TU AS LE TOUPET DE NOUS ADRESSER LA PAROLE APRÈS NOUS L'AVOIR DIT ?! MAIS QUEL- JE N'AI PAS LES MOTS ! S'égosilla le blond en faisant mine de s'arracher les cheveux.
- Vous vous ressemblez beaucoup, se contenta de répondre Harry en les fixant tous les deux. À demain Betty, à plus Will. »
Puis il s'échappa littéralement de la boutique, laissant les deux jeunes scandalisés faire connaissance sans lui.
Je suis un génie.
• § •
L'étage des cordes, l'étage des cordes...
Il était précisément dix-huit heures cinquante-cinq, et Harry souhaitait trouver l'étage où il devrait se rendre pour son cours de guitare sans l'aide quelconque de Jacques, bien au rendez-vous à son comptoir d'entrée.
C'est pas possible, Louis me l'avait dit pourtant...
Il essayait de se souvenir de sa première venue ici, quasiment un mois plus tôt, mais les étages attribués ne lui revenaient pas, il n'avait en mémoire rien d'autre que le bon sermon que lui avait fait le paraplégique à propos de Charlie, moment qui le rendait encore mort de honte. Il abandonna sa recherche mentale à contrecœur, entrant dans la Charlie's House - parce que oui, il trépignait devant l'immeuble depuis dix minutes.
La porte tinta, attirant l'attention de l'employé derrière le bureau.
« Nom, prénom ? Demanda-t-il dans le vide pour identifier la personne venant d'entrer.
- Où est l'étage de l'apprentissage des cordes s'il te plaît ? Ignora Harry sans se déplacer, narquois devant l'ennui soudain de Jacques.
- Harry, il me semble ? Soupira-t-il en sortant son formulaire poinçonné. Tu as cours ?
- Ouais, guitare. Quel étage et quelle salle ? Fit le garçon sèchement, conscient d'être immensément impoli mais conservant une certaine rancœur envers le secrétaire.
- Étage trois, lâcha-t-il laconiquement en tapotant ses points. Salle trente-sept. Bon cours.
- Hm, bon ennui, grogna le bouclé en entrant dans l'ascenseur, pressant le bouton correspondant d'emblée, qui mit heureusement l'appareil en marche quasi-immédiatement. »
Dans la boîte métallique, Harry refit l'inventaire de ce qu'il avait emmené avec lui, à savoir un bloc-notes, un stylo, un porte-vues, sa guitare et son médiator - il se sentait un peu stupide d'emmener une guitare dans son dos sans savoir en jouer, mais il n'était sûr de rien. Son moyen de transport se stoppa bien trop vite à son goût, et il en sortit en prenant une grande goulée d'air frais - amen aux immeubles constamment climatisés. Les salles étaient numérotées de un à dix visiblement, et s'il faisait le compte total, cet immeuble comportait environ cent-dix salles, sachant que le douxième et dernier étage n'était qu'une seule grande pièce et qu'il n'avait pas visité le onzième avec Louis.
C'est quand même beaucoup, comparé à bon nombre de conservatoires.
Arrêté devant la salle indiquée, il regarda l'heure sur son téléphone, et il ne fut pas ravi de constater qu'il était dix-neuf heures UNE. Il était en retard. Il ouvrit tout de même la porte, sans frapper, et tomba face à un adulte, visiblement plus âgé que Wilhelm de plusieurs années - n'en déplaise à ses cheveux noir corbeau, sa peau pâle et ses cernes de quinze kilomètres de profondeur.
« Bonjour ! Lança le bouclé après une pénible seconde de silence. Je m'appelle Harry, c'est bien ici pour le cours ?
- Ouais c'est là, entre, souffla le jeune homme dans un sourire, s'installant sur l'une des deux chaises posées au milieu de la pièce. Je m'appelle Romuald, et avant toute chose, laisse moi te demander : t'as une guitare pour t'exercer chez toi ?
- Ouais, je l'ai prise au cas où, répondit Harry en désignant l'étui dans s'on dos - il dut pour cela faire un pas de plus pour entrer réellement dans la pièce. On en aura besoin ou je devrai la laisser chez moi à l'avenir ?
- On en aura besoin, d'ailleurs je vais l'accorder et te montrer comment changer une corde, on pourra faire connaissance pendant ce temps-là. »
Il demanda l'instrument en tendant la main, puis indiqua au plus jeune de s'asseoir à côté de lui, alors qu'il commençait à tourner les mollettes en haut du manche.
« Alors Harry, tu as dix-sept ans et c'est ta première année c'est ça ? S'intéressa Romuald en s'activant sur le manche de l'instrument.
- Ouais, je fais partie de la chorale aussi, c'est relaxant de faire de la musique.
- Parce que despote-Charlie est relaxante quand elle te crie dessus ? Ricana le brun sans lever les yeux.
- Je suis quelqu'un de très sage, rit Harry en faisant mine d'être choqué. »
Sans rien dire, Romuald déposa tranquillement ses yeux dans ceux d'Harry, qui eut le très désagréable sentiment d'être entièrement transparent sous ces yeux bleus aussi clairs que du cristal.
« Il me semblait qu'elle ne t'appréciait pas, j'ai dû me tromper, conclut-il en haussant les épaules. Moi j'ai vingt-cinq ans, je suis prof de guitare et de solfège ici, et je serai muté à un conservatoire pas loin dans deux ans, en espérant que ma dépression s'en soit allée d'ici là, mais je crois que je peux être confiant.
- Ce n'est pas difficile d'être... dépressif ? Demanda Harry maladroitement, parce que qui peut être à l'aise avec ce genre de sujet ?
- Dans le sens logique du terme, si, mais honnêtement je ne m'en suis pas rendu compte avant ma majorité, réfléchit le corbeau à voix haute, ôtant momentanément son regard de son ouvrage. Ça ne fait pas de mal en soi, enfin si, mais... C'est par comparaison entre avant et maintenant que tu t'en rends compte, c'est pas comme si tu te réveillais un matin et que tu te disais 'tiens, je constate que je suis dépressif, c'est pas la grande forme'. Tu piges ? »
Le garçon hocha bêtement la tête, ayant complètement oublié le cours de guitare à cet instant, captivé à l'idée de connaître une nouvelle histoire.
« Quand j'ai cherché quelque chose à faire comme travail, ma mère m'a dirigé ici en connaissance de cause, mais moi je pensais que c'était une université basique, où j'allais enseigner la musique puisque c'était ma vocation. Et quand j'ai croisé Charlie - c'est elle qui m'a accueillie dans le grand hall -, j'ai à peine fait trois pas qu'elle m'a demandé pourquoi je tirais une tête d'enterrement - j'avais pas capté qu'elle était aveugle encore - et quand je lui ai dit ''non non tout va bien'', elle m'a diagnostiqué dépressif, juste en entendant combien ma voix était je sais pas comment. Elle est très forte. Et l'entendre aussi franchement, que j'étais dépressif, je sais pas, ça m'a comme donné un électrochoc, j'ai revu les trois dernières années de ma vie et je me suis dit ''bah ouais'', mais avant ça je le savais même pas. C'est une preuve que vivre avec ça se remarque à peine au début, tu tombes dans des cercles progressivement alors tu ne te méfies de rien, mais quand après on te le fait remarquer, là tu te rends compte de tout ce que tu fais, de tout ce à quoi tu penses, et que t'es problématique.
- Tu ne t'es pas senti mal de l'apprendre aussi brusquement ? Interrogea Harry, surpris des méthodes cavalières de Charlie.
- Je me suis senti comme une merde, honnêtement. C'est dur de relativiser et de se dire qu'on est pas seul, que c'est même assez répandu. »
Harry était sans voix. Lui qui pensait son handicap compliqué dans la vie de tous les jours.
« Et toi, t'as quoi ? Demanda Romuald comme s'il ne venait pas de bouleverser le monde du plus jeune.
- Mes tympans sont trop sensibles, je parviens à entendre les fréquences électriques et parfois les ondes, raccourcit le bouclé.
- Merde, c'est de naissance ?
- Non, j'étais sourd et ça s'est inversé pendant mon enfance, mais ça devrait diminuer pour disparaître avec le temps, c'est pour ça que je suis là.
- Eh bah mon gars. Je suis d'avis qu'on commence à voir les premiers accords si tu veux bien, moi sur ma guitare et toi sur la tienne, changea le professeur de sujet. Tu as des questions supplémentaires ?
- Je peux avoir ton numéro, au cas où je serais absent un jour ?
- Bien sûr. Prends ta guitare, je t'écris ça quelque part. »
Harry obéit tandis que son professeur s'activait pour trouver un papier, un stylo, et marquer son numéro de téléphone, donnant ensuite le papier à son élève avant de se rasseoir.
« C'est parti alors, s'extasia le plus âgé de sa voix fatiguée. »
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