A V A N T-G O Û T
Il y avait ce garçon avec qui je jouais dans la boue quand nous avions à peine six ans, il s'appelait Kyun. Je crois que c'est grâce à lui que j'ai réussi à grandir sans l'aide d'un de mes parents. Tenir debout toute une journée est parfois difficile lorsque nos destins sont si sombres et lourds sur nos épaules. J'ai très vite su qu'elles n'étaient pas assez rigides pour porter le poids de mon existence, si courte et futile fut-elle à ce moment là. L'Espoir n'était rien d'autre qu'un mythe, un conte que l'on s'amusait souvent à se raconter, encore et encore pour se divertir. La douleur dans ma poitrine ne s'apaisait pourtant pas, elle était omniprésente. Comme des flammes ardentes qui ne cessaient jamais de me consumer, petit à petit, elles me grignotaient. J'avais l'impression d'être né avec cet incendie permanent à l'intérieur de la poitrine mais avec le temps: il est devenu une partie de moi.
J'ai passé l'intégralité de mon enfance à penser que j'étais maudit.
L'année de mes douze ans, j'ai passé cent soixante-treize nuits entières dehors, été comme hiver, parfois sous l'intransigeance de la pluie. Kyun n'était plus là pour me rassurer, ni pour m'informer que les étoiles me suivaient simplement pour me protéger et non pas pour me voler la seule sucette que j'avais dans la poche de pantalon. L'obscurité devint alors mon quotidien, si bien que la lumière m'effrayait au plus haut point. Lui, il avait eu la chance d'être sauvé et avait déménagé vers l'Est là où la vie était ensoleillée en compagnie de sa famille aimante et soucieuse de son futur. Le jour, moi, je profitais de l'absence momentanée de ma mère pour me changer et prendre une douche rapide. J'osais à peine laisser des traces de mon passage derrière moi, comme si finalement, je m'introduisais dans une maison qui n'avait jamais été la mienne.
Ma mère me détestait pour la simple et bonne raison que je respirais le même air qu'elle depuis mon premier cri, imprévu. Les quelques voisins qui n'étaient pas dépendants d'une quelconque drogue ou d'une addiction à l'alcool fort prétendaient que je lui ressemblais énormément en grandissant et que c'était peut-être pour cette raison que sa haine à mon égard s'était intensifiée d'avantage. Je ne pouvais que me mettre à sa place et en effet, voir son portrait craché tous les jours depuis quatorze ans devait lui donner des envies de meurtre ou des hallucinations, peut-être même les deux à la fois, tout compte fait. Au point où d'après elle, je venais vociférer dans ses rêves.
Après tout, je n'étais rien d'autre qu'une erreur monumentale à ses yeux.
L'erreur monumentale de sa vie:
Jeon Jungkook.
J'ai commencé à voler dans la petite épicerie au bout de la rue, une fois symbolique puis trois par semaine. Un roulement s'était alors bien vite installé même si ce n'était que pour de vulgaires paquets de chips sans goût à moitié remplis et des bouteilles de Seven Up qui n'étaient plus pétillantes depuis des lustres. J'ai fini par croire que le caissier me voyait mais qu'il en avait simplement marre de me courir après, il ne faisait alors que me sourire tristement lorsque je m'enfuyais par la porte principale comme un voyou inexpérimenté, de dix-sept ans.
Il avait pitié.
Moi aussi,
je me faisais pitié.
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