19
J'ai passé les trois jours qui suivirent à me réveiller dans le lit douillet de Taehyung. Ce n'était pas une obligation, il me l'avait gentiment proposé après des heures de discussion vis à vis de mon besoin de sortir à l'air libre. J'ai accepté sans même réfléchir. Rien que l'idée de repasser des nuits entières sous les mêmes draps me faisait frissonner. J'avais si bien dormi, la première fois.
Ça n'avait pas loupé, mon sommeil était revenu comme par magie. C'était plaisant de faire des nuits complètes sans avoir à se tourner dans tous les sens sans jamais réussir à fermer l'œil plus de vingt minutes. Je m'endormais toujours avant Taehyung car il travaillait très tard sur ses dossiers le soir, généralement je fermais les yeux après être totalement épuisé. Car je faisais tout mon possible pour lutter et l'attendre, en vain.
Nos câlins du matin étaient de retour, ce n'était pas ceux "éclair" qui ne durent que dix petites secondes à peine. Non, c'était ceux du jour où Seungkwan a explosé. Ceux de ce Dimanche là. Ceux où Taehyung me serre très très fort contre lui, jusqu'à rassembler toutes les pièces de mon puzzle ensemble. Il me répare tout doucement, ça fait du bien. Je me sens mieux, quand il est là.
Alors, j'essaye de lui démontrer à quel point je suis reconnaissant pour tout ce qu'il fait pour moi quotidiennement. Je passe mes doigts dans ses cheveux, maintenant. J'ai le droit, car il n'a rien dit contre ça la dernière fois que c'est arrivé. Je n'ai plus peur. Je caresse son visage, ses joues, son nez, ses lèvres du bout des doigts. Il me laisse faire, quand personne n'est là. Et surtout, je le serre fort contre moi quand il ne le fait pas en premier. Quand je suis avec Taehyung, la douleur n'est plus là. Je ne la ressens plus. Comme si, rien qu'à l'aide de sa présence, il me soignait.
Ce matin là, j'étais le premier réveillé. J'ai ouvert les paupières à cinq heures à peine, c'était marqué sur le radio-réveil. Je n'arrivais plus à dormir, pas moyen. Malgré le fait que tout s'était arrangé, que Jimin ne s'était pas fait disputer et que Haseul prévoyait de recouper mes cheveux ce week-end, il y avait bien une chose qui me trottait encore dans le crâne.
La photo de l'Ukrainien qui demeurait sur le bureau de Taehyung.
Je n'avais pas osé en parler, de peur de paraître totalement ridicule. Pire, il risquait de ne pas me croire non plus. En même temps, c'était fortement envisageable. Mais je n'avais pourtant aucun doute la dessus. J'étais persuadé que c'était lui, je le savais. Ce qui me perturbait le plus c'est, pourquoi ?
Il était assez difficile d'accepter le fait qu'un fragment de mon ancienne vie se retrouvait implanté sans prévenir dans la nouvelle, du jour au lendemain. L'Ukrainien était sans doute le meilleur souvenir que j'en gardais, d'ailleurs. Mais c'était tout de même désagréable comme sensation. Surtout qu'il apparaissait sur d'autres photos, pas qu'une seule. J'ai fouiné pendant l'absence de Taehyung la journée, bien trop curieux. Je ne comprenais pas où ça menait et je me demandais si je devais lui en toucher deux mots ou non. Si ça tombe, j'allais dire des bêtises et le mettre en colère. Et je ne le voulais pas, pour rien au monde.
Le bout de mes doigts caressa doucement la joue de Taehyung alors que j'avais pris soin de rouler sur le côté pour me rapprocher un peu plus de son corps. Ça faisait une heure que mes pensées me faisaient tourner la tête et je m'ennuyais, tout seul. Je voulais qu'il se réveille. Qu'on puisse se faire nos câlins du matin, j'en avais l'envie.
Je portais un short à Haseul, il était un peu trop large au niveau des hanches et avait tendance à glisser. J'ai reperdu quelques kilos, malgré moi. C'était embêtant mais je faisais de mon mieux pour l'ignorer. Ce n'était pas si grave, personne ne me voyait, sous la couette. À part Taehyung, mais lui, ça ne comptait pas.
« Taehyung... L'appelai-je en passant mon index sur l'arête de son nez. C'est le matin, il faut se réveiller. »
Il travaillait aujourd'hui et si il ne se levait pas dans les vingt minutes à venir, il allait être en retard. Son réveil personnel, c'était moi. Il l'avait confié en riant, il y a deux jours à peine si je me souviens bien. Car j'ai toujours pour habitude de me lever tôt, peu importe le jour. Même le week-end. Namjoon m'a dit une fois que j'étais réglé comme un coq, je ne comprends toujours pas ce que ça veut dire. J'espère que c'est un compliment.
Soudain, Taehyung attrapa mon poignet et fit mine de le dévorer. Je me redressai en riant, pris de court. C'était drôle de le voir comme ça, alors qu'il se montrait si sérieux avec les autres. J'avais l'impression de m'être glissé sous le masque. De voir ce que personne n'avait jamais vu avant.
Car c'était le vrai lui et le vrai moi dans cette pièce.
Il se redressa d'un seul coup et me poussa vers l'arrière, je tombai à la renverse, la tête dans le coussin. Ma respiration se bloqua une seconde dans ma gorge, par anticipation jusqu'au moment où ses doigts vinrent me chatouiller. Mon rire résonna à nouveau entre les quatre murs du bureau alors que je faisais de mon mieux pour lui échapper, en battant des jambes comme si je nageais.
« J-Je t'en suppliiiie stooooop... »
Et je riais, encore et encore. J'avais sans doute réveillé tout le hangar. Mes cheveux étaient retombés sur le haut de mes yeux, voilant légèrement ma vision. Il était impossible d'échapper à Taehyung et bizarrement, même si je lui demandais d'arrêter une dizaine de fois, j'aimais bien. Jamais personne ne m'avait chatouillé dans le passé, je n'avais jamais été assez proche de quelqu'un. Même pas de Kyun. Kyun ne m'avait jamais chatouillé. Est-ce que ça veut dire que je suis plus proche de Taehyung que de lui ?
Est-ce que c'est grave ?
Finalement, il s'arrêta en respirant assez fort. Son rire s'était entremêlé au mien de temps en temps. Mais son sourire s'estompa légèrement lorsque ses yeux quittèrent les miens. Il était installé entre mes jambes et ce n'est qu'à ce moment là que j'ai réalisé à quel point nous étions près l'un de l'autre, physiquement parlant. Mon short s'était abaissé de moitié, montrant mon boxer noir que je portais en dessous et mon t-shirt de pyjama s'était relevé, révélant beaucoup trop de peau.
« Oooh... »
Je m'empressai d'attraper le bas de mon vêtement pour cacher mon ventre maintenant exposé. Mais au même moment, Taehyung m'en empêcha. Il enroula ses doigts autour de mes poignets, m'empêchant de remettre en place mon t-shirt. Mal à l'aise, je gesticulai.
« J-Je...
-Tu ne dois pas être si gêné, Jungkook. Ton corps est beau, vraiment. »
Mes yeux s'écarquillèrent face à son compliment. Était-il normal de se complimenter le corps ? Je ne le savais pas. Haseul m'a souvent dit que j'ai des beaux yeux. Est-ce que c'était pareil ? Je crois que oui. Mais venant de Taehyung, ça avait un tout autre impact sur moi. Je sentais le haut de mon corps, autrefois dévoré par la douleur brûler de joie. De la joie, de la vraie joie. La brûlure était douloureuse mais étonnamment agréable. Je voulais l'entendre me le dire et faire semblant d'y croire si c'était le prix à payer pour qu'il le répète demain et les jours qui suivront.
« Ton corps est plus beau que le mien... Bredouillai-je en faisant la moue. »
Un fin sourire étira ses lèvres, c'est la première fois qu'il se levait de si bonne humeur. Habituellement, il lui fallait plusieurs minutes avant de se connecter à la réalité. Aujourd'hui, il s'était littéralement jeté sur moi. Non pas que je m'en plaignais, bien au contraire, c'est juste que j'ai été surpris sur le moment.
Pour la première fois, il s'étala de tout son long sur moi pour le câlin du matin. D'habitude, c'est moi qu'il fait glisser au dessus de lui. Mais là, c'était l'inverse. J'aimais bien même si il m'écrasait un peu. J'aimais penser que la douleur n'allait plus revenir, que mes souvenirs allaient disparaître car il était là et qu'en sa présence je n'arrivais plus à être triste. Taehyung était un remède miracle, celui que j'ai tant espéré. J'avais encore du mal à y croire, comme si rien de tout ça ne pouvait être réel. La vie ne pouvait pas me donner une nouvelle chance, et pourtant c'était bien le cas.
Nous étions presque une famille.
La tête de Taehyung logée dans mon cou, je sentis son souffle chaud caresser ma peau. Ça me donnait des frissons. Ce moment, il était à nous. Et plus les jours passaient plus je me rendais compte que je n'étais visiblement pas le seul à en avoir besoin. C'était devenu une habitude. Comme le sucre dans un café, le lait avec les céréales.
Il n'y avait pas de bonne journée sans le câlin du matin.
J'étais occupé à regarder le plafond quand une pensée m'interpella. Est-ce qu'il était possible de mentir à sa propre famille ? Non, on ne le pouvait pas. Ce n'était pas autorisé. N'est-ce pas ?
« Je le connais. Annonçai-je tout bas en continuant à caresser ses cheveux.
-Hm ?
-L'homme avec la veste, je le connais. Il était dans ma vie d'avant. »
Je l'entendis déglutir avant de se redresser sur ses coudes, les sourcils froncés. Ses yeux cherchèrent les miens, fuyards. Ses deux mains englobèrent mes joues afin de forcer le contact visuel. J'étais mal à l'aise à l'idée d'en parler. Je ne le voulais pas. Car j'étais totalement terrorisé à l'idée d'ouvrir le tiroir aux souvenirs. Et si ils me sautaient au visage ? Et si les voix revenaient ? Et la douleur ?
« De quel homme parles-tu, Jungkook ?
-Celui sur les photos qui sont sur ton bureau. »
Son visage changea littéralement de couleur à l'annonce. La confusion traversa son regard alors qu'il sortit à toute vitesse du lit, il manqua même de tomber à cause de son manque d'équilibre. Les cheveux en bataille, il fit le tour de son bureau en se grattant l'arrière de la nuque.
Abasourdi, je restai installé en tailleur sur le matelas, la couverture contre mon corps. Ça sentait lui et un peu moi aussi. Je n'étais pas certain d'aimer ça. Mais l'odeur de Taehyung passait tout de même au dessus et c'était le plus important. Et si je sentais son odeur, c'est que j'étais en sécurité. Et là, je l'étais. Alors j'avais le droit de parler, rien ni personne n'allait venir.
Taehyung attrapa toutes les photos avant de revenir vers le lit, désormais bien réveillé. Je voyais à son expression qu'il réfléchissait à toute vitesse, se demandant comment il allait certainement donner un motif à son retard. Car le temps passait plus vite, dans le bureau, quand nous sommes tous les deux.
Il tira sur la couette pour recouvrir son propre corps avant d'étaler toutes les photos, une vingtaine au total, dessus. C'était les mêmes, elles n'avaient pas changé. J'ai passé plusieurs heures à les regarder quand Taehyung n'était pas là. Juste pour me convaincre que, peut-être, je me trompais. Mais non, il n'y avait pas d'erreur à faire. C'était lui, je le reconnaissais.
« Lequel ? »
Je le zieutai avec appréhension, c'était difficile. Je ne comprenais vraiment pas pourquoi tout était devenu sérieux, d'un seul coup. Nous étions en train de rire il y a encore dix minutes, mais là, c'est comme si Taehyung était passé en mode « travail ». Est-ce que l'on était en train de travailler, tous les deux ?
Mes doigts tapotèrent les clichés où il figurait, de profil et de face. Il portait une imposante veste noire, il me l'avait prêté une fois. C'était lorsque j'étais venu toquer à sa porte pendant la tempête, quand je n'avais pas de toit sous lequel m'abriter. Il l'avait mise sur mes épaules le temps de me réchauffer devant le feu de sa cheminée.
« Tu te souviens de quelque chose sur lui ?
-C'est l'Ukrainien. »
Je fis défiler les photos devant mes yeux, détaillant son visage. Je ne l'avais pas oublié, même avec le temps qui était passé entre deux. Pourtant, je n'avais pas beaucoup pensé à lui depuis mon départ. C'était bizarre comment ma mémoire fonctionnait. Elle gardait tout en stock mais n'était pas foutue de me sortir les souvenirs que j'ai avec Kyun.
« Un nom ? Taehyung posa ses mains sur les miennes, doucement. Est-ce que tu sais comment il s'appelle ?
-Mais... Je te l'ai dit, il s'appelle l'Ukrainien. »
Il passa le bout de sa langue sur ses lèvres en baissant la tête. Est-ce que j'avais dit quelque chose de mal ? Ne voulant pas le décevoir, mes mains passèrent au dessus des siennes dans une tentative de le retenir.
« Il habite en face de...
-En face de ? »
Mes mots refusaient de sortir, comme si ils étaient bloqués à la barrière de ma bouche. Je voulais qu'ils sortent, je le voulais mais je n'y arrivais pas. Je ne pouvais pas prononcer ces mots, pas maintenant, pas encore. Il me fallait juste un petit peu de temps, ça allait trop vite. Et notre câlin, il n'avait pas duré assez longtemps.
« J-Je sais où il habite. »
Vers dix-sept heures, lorsque Taehyung et les membres des autres équipes étaient rentrés, j'ai enfilé mes chaussures, celles qui font mal aux pieds. On allait voir l'Ukrainien. J'étais content d'aller lui rendre visite, ça faisait si longtemps. Puis, j'allais pouvoir lui présenter une partie de ma nouvelle famille. Et aussi lui demander pourquoi il était sur les photos du bureau.
Haseul et Nam' venaient avec nous, j'avais le sourire aux lèvres en l'apprenant. Car ça faisait si longtemps que l'on ne s'était pas retrouvés ensemble, tous les quatre. Namjoon et Haseul n'avaient pas beaucoup de temps pour se voir, alors que l'on vivait tous cloîtrés dans le même hangar, sous le même toit depuis maintenant trop longtemps. Ils ne parlaient plus vraiment alors ça n'allait être que bénéfique pour tout le monde. Je n'avais qu'à m'asseoir du côté gauche de la banquette arrière, pour ne regarder qu'à travers cette vitre là et oublier le reste, oublier que la route a deux côtés.
« Un problème petit ? Demanda Nam' en s'agenouillant devant moi.
-J-Je... C'est mes lacets. Fis-je en les pointant du doigts. Je ne sais pas les faire, alors... »
Sa main ébouriffa mes cheveux et il les noua à ma place, rapidement. J'étais jaloux, car je ne savais pas faire ça, moi. Ils savaient tous faire des trucs super compliqués, alors que je n'étais même pas capable de faire le quart. Un jour, j'allais y arriver. Je le savais. Et puis, Jimin m'avait dit qu'il allait m'apprendre. J'avais enfin pris mon courage à deux mains et je lui en avais parlé. Il ne m'avait pas jugé comme je l'avais pensé mais m'a plutôt proposé son aide. Ça m'avait beaucoup étonné. La gentillesse était contagieuse, on dirait. Contagieux(se), c'est le nouveau mot que j'ai appris aujourd'hui.
« Tu es prêt ? »
Taehyung passa derrière moi, ses deux larges mains sur mes épaules. Je hochai positivement la tête, en pensant l'inverse mentalement. Je n'étais pas prêt. Je ne voulais pas y retourner, jamais. C'était douloureux rien que d'y songer, mais je ne pouvais pas me dégonfler. Tout le monde s'était mobilisé et des autres membres de l'organisation étaient venus me voir pour me féliciter. Je ne savais toujours pas de quoi il s'agissait, peut-être même qu'ils s'étaient trompés de personne.
« En route. »
Sa main descendit dans mon dos, comme elle en avait la fâcheuse habitude maintenant. J'aimais bien, sentir ses doigts sur moi. Ça me rassurait. Ça voulait dire qu'il était là, proche. Que la sécurité était partout, tant qu'il était là.
Mais malgré le fait que j'essayais de me l'enfoncer dans le crâne pendant les premières minutes du trajet en voiture, mes mains s'étaient mises d'elles-mêmes à trembler.
« C'est de l'autre côté de la frontière, c'est ça ? Interrogea Taehyung, derrière le volant.
-Oui... »
Nam' était sur le siège passager, à regarder à travers la vitre. Je me demandais si il connaissait vraiment toutes les rues de ce quartier. Si peut-être, il était comme moi. J'aimais me comparer aux autres, surtout quand je trouvais des similitudes dans nos comportements respectifs. Car j'avais l'impression d'être normal, quand ça arrivait.
« Qui était ce monsieur pour toi ? »
Haseul s'était tourné vers moi, de l'autre côté de la banquette arrière. Elle avait coiffé ses cheveux colorés en une queue de cheval haute qui dégageait son visage harmonieux. Elle était vraiment belle, Haseul. Mais elle était un peu triste, comme une fleur qui fane tout doucement. Il lui fallait un peu de soleil pour qu'elle aille mieux, je voulais que ses pétales retrouvent leur couleur.
« I-Il... »
Je croisai le regard de Taehyung dans le rétroviseur central, il nous écoutait. Et j'étais presque certain que Nam' aussi, même si il avait la tête tourné dans la direction opposée. Haseul m'offrit un sourire réconfortant pour m'encourager à parler et les mots s'étaient échappés tout seul, sans que rien ne puisse les retenir cette fois.
« Il me donnait à manger, parfois. »
Haseul me caressa l'épaule, comme pour me féliciter. Elle était fière de moi, je l'ai déduit grâce au sourire qu'elle affichait. C'était sincère, je l'avais ressenti. Alors moi aussi, j'étais fier de moi. J'étais fier d'avoir osé parler, surtout de ça. Je n'avais pas pleuré. Et je n'avais presque pas bégayé non plus. Mais je continuais à trembler, violemment.
J'ai guidé Taehyung lorsque nous avions dépassé le petit restaurant dans lequel j'avais dîné avec les jumeaux avant mon départ. C'était mon territoire, mes rues, chez moi, ma maison. C'était étrange, de revenir. Je n'étais pas certain d'aimer cette sensation pour autant. Et plus je m'approchais, plus la douleur revenait. Je la sentais, elle s'étendait de seconde en seconde sans que je puisse y faire quelque chose. J'avais l'impression qu'elle enroulait ses doigts autour de mon cou, qu'elle m'étranglait. Est-ce que les plaques rouges étaient là, sur mon corps ?
« Stop ! »
Taehyung appuya sur la pédale de frein alors que Nam' et Haseul se tournèrent vers moi, intrigués par mon cri. J'en jugeai par leurs expressions que je n'avais pas crié normalement, que ça ressemblait plus à de l'urgence, de la détresse. Je n'osais pas regarder à travers les fenêtres, j'en avais déjà bien trop vu.
« C-C'est ici. »
Du coin de l'œil, je remarquai Haseul froncer les sourcils. Elle se doutait de quelque chose. Mais je ne pouvais pas leur dire, je ne voulais pas. C'était là, juste là, de l'autre côté de la route. C'était près et j'avais peur.
Taehyung et Namjoon sortirent de la voiture et je les imitai, ayant peur que Haseul ne pose trop de questions auxquelles j'étais incapable de fournir une quelconque réponse. Ça allait être évasif, plus que jamais et je ne voulais pas lui infliger ça.
Une fois devant la porte de chez l'Ukrainien, c'en était déjà bien trop pour moi. Sans m'en rendre compte, c'était plus un réflexe désespéré de mon corps, je m'étais immobilisé. Mes chaussures en fusion avec le béton. Taehyung s'était retourné vers moi en ne sentant plus ma présence à proximité.
« Je comprends si c'est trop difficile pour toi de nous suivre, Haseul va rester ici pour que tu ne sois pas seul. Il fit d'une voix relativement douce qui me calma. Tu as bien travaillé, je suis fier de toi. »
Je n'arrivais pas à sourire, même si j'en avais l'envie. Un beau sourire, avec les dents apparentes. À la place, mes lèvres n'avaient pas même bougé d'une seul millimètre. Ils s'étaient éloignés, jusqu'à regarder par les fenêtres quand l'Ukrainien n'ouvrit pas la porte. Je pense qu'il n'était pas là. L'une des camionnettes n'était pas garée sur le trottoir. Ils entrèrent par l'arrière, sans son accord.
Haseul était à côté de moi, elle chantonnait doucement. C'était sûrement pour m'apaiser et dire que c'était faux serait mentir. J'aurais aimé que quelqu'un chantonne pour moi, quand j'étais plus jeune, lorsque j'étais seul dans les rues. Lorsque même Kyun n'était plus là.
« Ils sont ici, pas vrai ? »
Je me tournai vers elle, happé par son intervention. Je voulais qu'elle continue à fredonner, ça m'aidait à me concentrer.
« Qui ?
-Tes souvenirs. »
Les larmes me montèrent automatiquement aux yeux, elle avait compris. Haseul venait de relier les morceaux, les indices que j'avais laissé, que je pensais par ailleurs inaperçus. Elle avait vu. Et ça me donnait envie de pleurer. Car elle avait raison. Ils étaient tous ici et j'étais revenu, au point de départ.
Je tournai la tête vers la petite maison de l'Ukrainien, voulant repousser mes larmes qui menaçaient de couler. Je ne voulais plus pleurer, plus maintenant.
Et c'est là que j'ai vu.
Dans le reflet de la fenêtre au rez-de-chaussée, il y avait la maison de ma mère de l'autre côté de la route. Je la voyais distinctement. Le pire, c'est quand la porte s'est ouverte et qu'il est apparu dans l'encadrement. J'étais si bien, de l'autre côté de la frontière, entouré de bonnes ondes que pour la première fois de toute ma vie, j'ai oublié la couleur du jour.
Vendredi, Violet.
----------------------------------------------------
Bonjour bonjooooooour. Ce chapitre marque un tournant important, comme vous avez sûrement dû le constater. Je crois que c'est mon favoris, on y apprend énormément de choses sur Jungkook mais aussi sur Taehyung. Pour la suite, comme je vous l'ai recommandé il y a un moment de ça, j'espère que vos ceintures de sécurité sont bien accrochées car ça risque de secouer un petit peu
J'espère de tout coeur que cette fiction est à la hauteur de vos espérances, sachez que j'aime beaucoup l'écrire et que je m'attache peut-être un peu trop aux personnages... Oups. On se dit à Mercredi prochain les copains, surtout prenez soin de vous, c'est le plus important!♡
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro