- Alors, c'est ici que tu habites?
Cette voix, je n'ose pas me retourner par peur de l'avoir imaginée.

- Oui, mes voisins ont fait une pétition pour me voir partir.
- Ah. Je vois.
Je me retourne.

Il est là, le regard éteint.

- Tu es de retour en ville?
- Comme tu vois.
Avec une voix sans relief.

- Tu restes longtemps?
- Quelques jours.
- C'est bien. Tu as vendu ta villa?
- Oui, il le fallait.
Il se retourne pour partir.

- Prends soin de toi.
- Comme vous avez fait avec mon père.
Sa voix est un murmure.

J'entre, j'appelle en vidéoconférence. Ben me dit que c'est une avancée, c'est encourageant.
Il faut attendre qu'il revienne de lui-même. Il voudra, tout au tard, crever l'abcès. Je leur explique qu'il n'y a plus rien de l'hybride ou de Gabriel, c'est une ombre.

Je décide de me connecter sur le groupe de fans. Je remonte les actualités, il a enchaîné les conquêtes les premières semaines, il s'est marié. Je bloque sur ce mot, une actrice, une humaine, Taylor Adams. Je mets quelques minutes à comprendre les mots qui y sont inscrits. J'éteins l'ordinateur, j'espère qu'elle le guérira.

Le matin, je dois voir Helen. J'ai été invité à son cabinet ministériel. Je me rends avec mon invitation, les gardes me laissent passer. J'attends depuis dix minutes à l'accueil quand son assistante vient me chercher. Une femme en tailleur approche, elle me conduit jusqu'à Helen. Quand elle me voit, elle n' a aucune retenue, elle se jette dans mes bras. Elle me tient les mains et m'observe.

- Meghan, comme ça fait si longtemps. Tu es une femme à présent.
- Je garde mon côté enfant, au grand désespoir de mes collègues.
- Tant mieux, ne le perd pas.
- Comment ça va, Helen?

Je la touche et je comprends.

- Helen, pourquoi tu ne m'as pas appelé?
- Tu avais assez de malheur dans ta vie. Gabriel Adams, la mort de son père, votre séparation etc..
- J'ai toujours de la place pour toi. Je te le redis, entends le bien.
Elle sourit.

- Les sondages sont aussi bas?
- Je suis tombée dans mes travers avec mes équipes de communication . Regarde-moi avec mon chignon affreux, mon costume qui pue le fric.
Je ris.

- Pourquoi tu les as laissé faire.
Je la retouche pour en savoir plus.

- Helen, tu ne te rends que dans les soirées organisées par les multinationales, les soirées pour millionnaires. On avait réussi à enlever cette image.
- Je sais, je me suis laissée emporter.
- Tu attends quoi de moi?
- Que tu fasses renaître l'Helen du peuple, pour le peuple.
- Helen, je ne te cache pas que j'ai de nouvelles responsabilités, des déplacements.

Elle baisse le regard.

- Mais il faudra qu'on fasse avec nos agendas très chargés.
Elle me prend dans les bras.

Je lui propose de la revoir dans trois jours. Je m'envole en Ecosse dans cinq jours. Elle m'attend avec impatience. Je rentre à la base Suprême, je vais devoir gérer deux univers totalement différents. J'ai peur d'être rouillée dans le domaine de la communication. Helen m'a envoyé son agenda et ses déplacements. Je repère en quelques secondes ce qui ne va pas. Je travaille le reste de la matinée sur la nouvelle direction de son cabinet ministériel. Ça ne va pas plaire.

L'après-midi, je lis les rapports des missions.
Il y a un souci, les chasseurs ne sont pas assez productifs. Je me penche sur le département haute sécurité, je vais le restructurer en entier. Fini les cages à monstres, nous allons les accompagner dans la réinsertion civile. J'appelle Eva et Elisabeth, elles aiment l'idée. Je leur laisse me trouver des infrastructures qui veulent travailler avec nous. Je contacte une psychologue que j'ai croisée pour le travail de Gabriel. Son prénom est toujours une blessure, je chasse cette idée.

La psychologue me revoit le lendemain, mes journées promettent d'être chargées.