Chapitre 10
Il était trop tôt pour se lever le matin et trop tard pour se coucher le soir. Marinette tournait et se retournait sans cesse dans son lit. Quelque chose la dérangeait. Et elle ne parlait pas de la chose qui grandissait tranquillement au sein de ses viscères, sous sa fine couche de graisse et ses muscles. Non, quelque chose d'autre la tiraillait. C'était si prenant, si agaçant, qu'elle se leva de sa banquette, droite comme un piquet. Elle allait finir folle !
Elle fusilla du regard son lit qui la narguait et l'obligeait à dormir ailleurs, tant ses forces l'avaient désertée. Elle jura contre la maudite échelle, puis contre la banquette et avait fini par aller dans la cuisine en plein milieu de la nuit avec la ferme intention d'annihiler son tiraillement. La jeune fille fusillait du regard la vaisselle dans l'évier, preuve de son repas du soir. Elle maudissait cet évier pour la lever si tard. Mais c'était plus fort qu'elle. D'habitude se coucher avec de la vaisselle à faire n'était pas dérangeant. Or là, elle aurait pu massacrer une armée entière pour faire cette vaisselle à la con. Ne pas la faire la dérangeait, la laisser trainer, sale en plus, l'a révulsait. Alors elle se mit à nettoyer de fond en comble le dit évier. Quitte à ne pas pouvoir dormir, autant se rendre utile.
Une fois sa tâche achevée, elle essuya le tout et le rangea. Son regard fut attiré par le lave-vaisselle, attisant sa curiosité. Elle se secoua la tête, ignorant ses réflexions. Elle devait aller se coucher ! Elle alla vers l'escalier, les lèvres pincées. Comme un mantra, elle se répétait "ne-te-retournes-pas-ne-te-retournes-surtout-pas". Trop tard, elle pivota, retourna dans la cuisine où elle vida le lave-vaisselle en murmurant une dizaine d'insultes envers le créateur des lave-vaisselle.
Un bruit la fit sursauter. Sabine la fixait avec compassion un verre vide dans les mains. Marinette se figea, prise en flagrant délit.
- Pourquoi tu ranges le lave-vaisselle à cette heure-ci ?
La question toute bête de sa mère fit rougir de honte la jeune fille.
- Parce que demain j'aurai la flemme ?
Sabine rit doucement et posa son verre dans l'évier, faisant le moins de bruit possible afin d'éviter un réveil prématuré à son mari. La plus jeune fixa la matriarche avec désinvolture puis l'agressa d'un ton agacé.
- Tu penses faire quoi là ?
Surprise, la plus vieille ne comprit pas pourquoi sa fille était dans une colère aussi noire que soudaine.
- Je pose mon verre et je vais me recoucher, tu devrais faire pareil.
Les larmes aux yeux, Marinette siffla de mécontentement. Elle lava le verre avec hargne, l'essuya et le rangea brusquement, faisant craquer le bois de l'étagère. L'aînée sourit, amusée.
- Quand j'étais enceinte de toi, je passais le balais à 3h07 pile toutes les nuits. Un véritable chamboule tout sans logique.
L'étudiante haussa un sourcil face à mère, qui avait piqué sa curiosité, mais aussi sa colère. Elle ne contrôlait plus ses envies, son corps, son sommeil et maintenant ses pensées. Génial. Putain de vaisselle. Il lui restait donc six mois dans cette galère de vaisselle. Sabine embrassa le front de sa fille quand elle vit de l'air contrarié de cette dernière.
- Ton père est encore bouleversé et c'est normal. Son bébé va avoir un bébé, il n'est pas prêt mais il finira par l'accepter, laisse-lui du temps. Ne te prends pas la tête avec ça, ton sourire est plus beau que la ride du lion.
La Dupain-Cheng retourna ensuite se coucher en baillant. La jeune styliste resta muette en plein milieu de la cuisine. Hésitant entre être embarrassée que sa mère soit à côté de la plaque ou faire une mini dépression dans son coin car son père avait besoin de temps, chose qu'elle n'avait plus.
Elle se coucha à son tour, sur sa banquette devenue fétiche et précieuse. Du coin de l'œil, elle fixait son lit en hauteur. Maudit soit ce lit. Elle ne s'apaisa qu'une fois dans un sommeil lourd.
***
Marinette se roula en boule dans son lit, la chaleur de la pièce l'étouffait. Étrangement, elle se sentait déchirée, son cœur était écrasé entre deux mains géantes. Elle soupira et s'allongea sur le flanc, posant son regard sur sa coiffeuse. Le bordel était tellement présent qu'elle n'était pas sûr qu'on puisse discerner à quoi servait ce meuble. Un courant d'air lui frôla la nuque. Elle en frissonna, mais pas parce qu'elle avait froid. Sa côte fut frôlée par un nouveau courant d'air. Elle se pinça le poignet pour éviter de rire, son côté chatouilleux faisant surface.
- Princesse.
Cette voix rauque à son oreille, suave, un souffle léger lui caressant les cheveux, l'appelait. Elle ferma les yeux, s'obligeant à ne rien voir, juste ressentir. Une langue légèrement râpeuse survola son lobe alors qu'une main ferme mais douce lui toucha la hanche. Un léger baiser assez chaste se déposa dans son cou, avec une lenteur abusive.
- Marinette. Regarde-moi à nouveau.
Elle rouvrit ses yeux lagons, dissimulant la lueur qui s'y cachait. Un visage masqué lui apparaissait, des yeux de jades la fixait avec voracité. Elle était dévorée par un regard aussi brûlant de désir.
Elle pivota, reposant son dos sur le matelas, observant l'intrus. Aussi vif qu'un éclair, le félin se mit à califourchon sur elle, ses genoux de chaque côté des hanches de la demoiselle.
- Cette nuit-là me manque.
Il l'embrassa avec douceur, retirant son costume avec une lenteur toute calculée. D'une main gantée, il descendit la fermeture éclair, de l'autre, il caressait les côtes de Marinette. Le rouge aux joues, elle s'essoufflait à l'embrasser. Réclamant encore et encore ce contact, ils s'embrassèrent avec fougue, leurs langues s'amusaient, se titillaient pour ensuite se retirer et recommencer.
- Elle te manque aussi.
Frustrée, elle lui retira d'un coup sec sa combinaison, parcourant son torse avec ses fines mains désireuses. Séductrice et dominante, elle se leva en position assise, poussant le félin sur ses jambes. Prenant du poil de la bête face à cet accord silencieux, il lui arracha son haut, plaquant le dos de la demoiselle contre le lit. Ces canines effleuraient un de ces tétons, lui arrachant des gémissements lorsqu'il mordillait et suçotait sa poitrine avidement.
Elle caressait les cicatrices du blond sur son col en V et son cou. Elle voulait plus, il ne faisait que jouer avec elle et sa patience. De ses mains habiles libérées de gants, il retira l'avant dernier tissu qui l'éloignait de son envie. Ses griffes se posèrent avec empressement sur les hanches de Marinette, surprise elle se cambra, collant sa poitrine au torse du super-héros, crochetant de ses mains le dos de son partenaire.
Il s'abaissa avec un halètement bestial, d'un mouvement bien calculé et félin, il se glissa entre ses jambes, enlevant au passage le dernier rempart de sa dame et sa combinaison devenue encombrante.
- Encore ma Lady, crie de nouveau pour moi.
Elle haletait sous ses mains connaisseuses, elle gémissait sous sa bouche intrusive. Elle ne put restée surprise indéfiniment, la douceur, la sensualité, la sauvagerie dont faisait preuve son coéquipier, lui faisait tourner la tête. Comme cette fois-là.
Elle se réveilla en sursaut, tombant de sa banquette. Le soleil pointait le bout de son nez. Transpirante et encore haletante, elle frappa de son poing le parquet. Il s'immisçait même dans ses rêves maintenant !
Elle chassa le rêve érotique qu'elle venait de faire, pur produit de son esprit, et se leva pour prendre une douche. Il ne s'était rien passé. Rien du tout.
***
Le jour suivant était un samedi, ni trop venteux, ni trop ensoleillé. Un samedi comme il y en avait eu des milliers et comme il y en aurait encore beaucoup. Marinette n'avait pas d'attente particulière concernant ce samedi-ci. Après tout, il n'était pas si particulier que ça. N'est-ce pas ?
Assise devant sa machine à coudre, elle hésitait franchement à aller recopier ses cours. Une plate-forme en ligne permettait à tout élève absent de récolter les informations essentielles des cours donnés par les professeurs de l'académie. Mais en général, les élèves préféraient ne pas s'absenter car les cours étaient incompréhensibles, et même avec cinquante tonneaux de café, il était très compliqué de comprendre un cours auquel on n'avait pas assisté.
Il était midi passée, et la jeune femme baillait à s'en décrocher la mâchoire. Elle avait finalement changé d'avis. Ce samedi était particulier dans sa monotonie et l'ennuie profond qu'il lui procurait. Les faibles rayons de soleil filtraient au travers des rideaux et donnaient des nuances de lumières assez intéressantes à observer lorsque l'on était styliste...mais surtout lorsque l'on n'avait absolument rien à faire.
N'y tenant plus, et parce que sa conscience la torturait, Marinette alla fouiller dans ses affaires. Des souvenirs par milliers jaillirent. A quel point pouvait-elle donc être désordonnée lorsque le cours ne l'intéressait pas ! Elle voyait des centaines de feuilles volantes pliées n'importe comment dans son sac pourtant si mignon. Ah ! C'était un cour optionnel d'économie ! Elle pouvait ne pas y faire attention.
Marinette avait pris son courage à deux mains. Ses cours d'arts modernes étaient parfaitement recopiés et rangés dans un classeur spécial. Ses fiches de technologie ne demandaient plus qu'à être remises dans les bonnes fiches à rabat. Il était quatre heures de l'après-midi lorsqu'une ombre détruisit les contemplations rêveuses de la jeune femme.
Elle avait fini son rangement et s'était octroyée une pause pour voir la magnificence des reflets roses que le soleil projetait sur son mur. Mais une silhouette à oreilles de chat la gênait furieusement ! Elle allait se lever pour aller chasser ce satané chat de gouttières qui la gênait. Mais quand son regard lagon en croisa un vert émeraude, elle comprit que ce n'était pas un simple chat devant sa fenêtre.
- Chat Noir ?
Ce dernier se posa sur son lit et referma la trappe derrière lui. D'un simple "Yo", il la salua. Elle soupira d'avance. Elle qui ne voulait pas avoir à faire à lui, il se mettait à venir la voir sans cesse ! Ne pouvait-il pas venir mais dans plusieurs dizaines d'années ? La laisser tranquille pendant quelques semaines au moins. Elle lui répondit par un salut monotone. S'il osait l'approcher, elle allait lui faire goûter son poing.
- Que fais-tu là ? Chez moi ? Dans ma maison. Dans MA chambre.
Gêné, le Chat se gratta la nuque tout en se déplaçant sur le tapis central de ladite chambre.
- Je n'ai plus le droit de rendre visite à ma meilleure méga giga ultra amie de tous les temps ?
N'étant pas dupe, sa langue claqua contre son palet. Un peu sur les nerfs d'être prise pour une idiote, et surtout haineuse à l'égard de son invité, elle resta silencieuse. Chat Noir se sentit soudainement coupable d'avoir dit ou fait quelque chose de mal. Il sentit son cœur se brisé un peu plus par des doutes et l'angoisse.
- Je ne sais pas pourquoi je suis là, je me suis laissé guider par mon instinct et pouf me voilà. J'ai une impression d'urgence en permanence et être avec toi m'apaise.
Qu'il aille lui faire une déclaration tant qu'il y était. Pourquoi forcément elle ? Pourquoi n'était-il pas attiré par une autre femme ou homme, chacun ses préférences mais elle doutait fortement que Chat Noir soit bisexuelle, vu l'ardeur qu'il avait pour la gente féminine...
Il s'allongea sur le tapis, son ventre collé à ce dernier, il ouvrit un boîte de fil de laine, curieux et enthousiaste. Il lui jetait parfois quelques regards tristes ou inquiets.
_
-Et sinon princess-
La vibration du téléphone de la brune sur le bureau coupa Chat Noir, qui fronça les sourcils grincheux. Marinette le coupa lorsqu'il ouvrit la bouche, son index en l'air, lui intimant le silence. Elle décrocha en pestant.
- C'est pas le moment Luka, j'ai un invité.
Le dit invité roula avec de la laine, sur le dos, il agita une pelote. Elle lui jetait des regards en coin, peu sereine d'avoir un homme aussi curieux dans sa chambre. Il semblait se désintéressé d'elle, sa pelote paraissait être toute une vie d'amusement.
- Marinette, je ne voulais pas te déranger, pardon, je sais que c'est ma faute, que tu ne me parles plus, mais je suis inquiet pour toi et pour le-
- Ce qui me dérange c'est que tu mets ton nez dans des affaires qui ne te regardent pas, lâche-moi et oublie la chose, le père n'est qu'un irresponsable tout comme moi.
Une oreille féline se retourna, un grognement sourd retentit dans la pièce. Il faisait du mal à sa princesse ce maudit serpent. Lui aussi était inquiet, mais au moins il contenait sa curiosité et sa langue. Bon, il ne contenait que sa langue, mais pas sa curiosité puisqu'il écoutait la conversation qu'elle avait avec Luka. Il respectait son choix de ne pas parler du père du bébé, lui au moins.
Elle raccrocha au nez de Luka, incapable de tenir cette conversation. Elle retourna à ses cours à recopier, trop énervée pour faire de la couture. À tous les coups, si le fils se bloquait dans la machine à coudre, elle la jetterait par-dessus du balcon.
Les oreilles couchées en arrière, Chat Noir se contenta de continuer de faire semblant de jouer avec sa bobine de laine. Ennuyé de voir sa princesse si triste, il rampa vers elle et posa sa tête sur ses cuisses. Concentrée sur ses devoirs, elle passa sa main dans les cheveux blonds du chat sans même s'en rendre compte.
- Tu révises quoi ?
Les yeux rivés sur ses papiers et son stylo, elle répondit, soucieuse.
- Je ne révise pas, je réécris mes cours.
Voyant qu'elle ne sortait pas les griffes et qu'elle était loin d'être hostile, il continua.
- Pourquoiiiiii ?
- Parce que j'y suis pas aller depuis quelques semaines...
Il écarquilla ses yeux émeraudes, presque choqué. Il reprit contenance, et ronronna de plus belle lorsque des doigts s'aventurèrent derrière ces oreilles. Si seulement ils pouvaient s'aventurer ailleurs... il ferait plus que ronronner.
- Oh. Tu vas y retourner lundi ?
- Et avoir la honte ? Non.
- Tu devrais y retourner. Tant que ça se voit pas tu n'as rien à craindre ?
Le corps de la brunette se tendit. Il se releva, craignant que la jeune fille ait mal ou soit blessée. Il reconnaissait le sursaut de crainte, mais il devait dépasser ça pour qu'elle lui ouvre son cœur et se sente mieux. Il ressentait un grand malaise, une souffrance.
- Tu penses vraiment que le père et toi étiez irresponsable ?
Un grand silence régna. Il entendit un reniflement, il caressa du bout des doigts la nuque de Marinette. D'une voix peiné et hésitante, il se laissa porter un peu trop par sa curiosité et lui posa la question qui lui brûlait la langue.
- Pourquoi tu gardes le secret sur l'identité du père ? Un secret ça ronge et c'est douloureux pour les autres comme pour toi, j'en sais quelque chose.
Il disait la comprendre, mensonge. Elle se leva vivement, faisant tomber sa chaise roulante. Face à lui, elle lui montrait le chagrin qui lui collait à la peau, prises de soubresauts, elle sanglotait. Il comprit la douleur que ses mots avaient déclenchés. Il reçut une belle gifle qui lui fit ouvrir les yeux sur sa bêtise et la véritable souffrance qu'engendrait la situation dans laquelle était sa plus qu'amie.
- Je ne regrette pas la nuit que j'ai passé avec lui. Je l'aime et l'aimera sûrement toute ma vie, et ça, ça me tue. Il ne saura jamais rien, et s'il l'apprend alors ça sera la fin. Non seulement il va me haïr mais en plus il découvrira toute la vérité. Ce n'est pas ce que je veux. Je ne veux pas le dégoûter, je ne veux pas.
Elle poussa un soupir libérateur. Pourtant, ses larmes coulaient encore. Sa main qui avait frappé le Chat fut prise dans une main gantée. L'atmosphère emplie de tristesse coupa court à toutes discussions. La joue rouge, Chat parsema la main de Marinette de baisers, lui murmurant des excuses.
Il la prit dans ses bras, la calmant grâce à ces ronronnements. Il marmonna encore et encore, psalmodiant presque des excuses. Les larmes aux yeux, il se contentait de la réconforter par les gestes et les mots. La faute lui revenant, il lui baisa le bout du nez. Surprise, Marinette le fixa, essuyant ses larmes qui coulaient encore.
- Je devrais partir, je suis désolé, mes mots ont dépassé mes pensées, je reviendrais dès que tu seras reposée.
Il l'enlaça une dernière fois, se décollant avec mal de son trésor et passa part la trappe. Il se figea un instant, murmurant pour lui-même en fixant la jeune fille restée en bas et qui était étonnée de le voir s'en aller ainsi.
- Il en a de la chance d'avoir la femme que j'aime et une descendance qui ne pourra être que belle.
Ces mots sincères ne tombèrent pas dans l'oreille d'une sourde. Loin de là.
***
Cette matinée-là, Marinette n'eut aucun problème pour se réveiller. Comme si le destin VOULAIT que Marinette aille à l'heure à son rendez-vous avec Alya. Ou qu'une tout autre entité ait pour projet quelques aventures derrière la tête.
Quoi qu'il en soit, Marinette était fin prête à onze heures tapantes. Et cela tombait bien car son téléphone sonna à ce moment-là. Sans surprise, il s'agissait d'Alya qui l'attendait juste en bas de chez elle, les mains sur les hanches. Presque choquée que Marinette ait pu, pour une fois, se pointer à l'heure à un rendez-vous et sans avoir provoqué un quelconque accident.
Les deux filles, d'un regard complice, convinrent du restaurant et filèrent, joyeuse pour l'une et légèrement anxieuse pour l'autre, en direction de ce qui promettait d'être un délicieux repas. Le soleil brillait timidement derrière quelques nuages insignifiants et réapparaissait clairement à chaque éclat de rire.
L'établissement de restauration était assez simple, mais parfaitement adapté pour deux jeunes femmes comme Alya et Marinette qui désiraient simplement discuter à l'ombre d'un parasol et avec le parfum délicieux d'un repas bien préparé.
- Y a pas mal de monde aujourd'hui, tu ne trouves pas ?
- Oui, sûrement grâce à la nouvelle déco, ça fait plus moderne.
- Plus froid tu veux dire, y a plus beaucoup de couleurs...
- Si.
- Alya, le blanc et le noir ne sont pas des couleurs. Ce sont des nuances.
Le serveur accourut presque aussitôt et les commandes furent prises tout aussi vite. Marinette choisit du poulet tandis que son amie brune pencha pour une omelette épicée. Deux choix différents qui réveillèrent de suite les élans gamins de la brunette enceinte. Elle se mit en effet à penser aux succulentes saveurs d'une omelette au lieu de se satisfaire de son futur poulet.
- Bah alors ma poule ça ne va pas ? Tu as une mine affreuse, insomnie ?
- Relation intime avec la cuvette.
- Oh, il n'y a pas que ça tu as le visage d'une constipée.
- Juste un peu perdue dans mes pensées mais rien d'intéressant.
Les repas arrivèrent enfin, mais la mine boudeuse de Marinette ne filait pas pour autant. Tout en mangeant son poulet, elle jetait des regards frénétiques sur le repas d'Alya, l'enviant furieusement. Son poulet n'était pourtant pas si mauvais. Seulement, les envies capricieuses d'une jeune fille enceinte ne se satisfaisaient pas de poulet quand une omelette lui faisait de l'œil.
C'était une très belle journée. Le soleil brillait si fort qu'Alya avait dû, sans attendre le serveur, s'occuper d'orienter correctement le parasol avant qu'elles n'attrapent des coups de soleil. Lorsqu'elle se réinstalla, elle remarqua enfin le regard insistant de Marinette sur sa nourriture et un sourire de canaille se dessina sur ses lèvres :
- T'a pas changé. Tu en veux un bout avant de déverser des litres de bave sur la table ?
Aucune réponse, Marinette était à l'ouest. Elle était perturbée par Chat Noir. Il l'aimait. Elle l'aimait. Mais il demeurait un sérieux problème : lui avouer qu'elle était enceinte de lui ne changera en rien la situation. L'impliquer dans cette histoire allait l'impliquer dans la décision à prendre, et s'ils n'étaient pas d'accord entre eux ? A qui reviendrait la décision finale ? A elle évidemment ! Mais... Mais la chose qui poussait dans son ventre était aussi une partie de lui, car il faut être deux pour faire un truc pareil ! Oui mais s'il désirait garder la chose ? Et s'il se désintéressait d'elle ? S'il changeait d'avis au dernier moment ? Valait-il mieux garder ça secret et envoyer la chose à l'adoption?
« Qu'est-ce que je fais ? Je fais quoi ? Garder, pas garder, adoption, lui dire, rrrahhhh », pensait-elle.
Est-ce que ne rien faire et laisser les choses telles quel n'était pas une solution en soit ? Car ça lui filerait la migraine de prendre l'avis de l'autre géniteur en compte. Alya souffla un grand coup et lâcha un petit "merde" discret. Cela eu pour conséquence de réveiller Marinette qui était définitivement perdue dans ses pensées. La brunette se sentit gênée du blanc qu'elle avait inconsciemment causé, et là, ce fut la révélation de sa vie : si elle ne trouvait pas de solution, alors quelqu'un d'autre devrait l'aider à y réfléchir.
- Alya, je me demandais un truc. Imaginons que tu aies un secret qui implique quelqu'un. Mais ce quelqu'un n'est pas au courant. Mais il est urgent de prendre une décision par rapport à ce secret. Mais tu ne peux pas en parler à la personne concernée, car c'est un secret, mais en même temps, il faut prendre une décision rapidement et le secret te relie à la personne. Mais si tu lui en parles, ce n'est plus un secret... Tu ferais quoi ?
Alya s'empêcha de pouffer de rire sur le moment :
- Tu me demandes de l'aide car soit tu es Ladybug soit le cher papa du petit bout a débarqué dans ta vie y'a pas longtemps en mode in love.
Marinette la regarda bouche bée, complètement choquée par ce que venait de dire sa meilleure amie. Elle n'eut pas le temps de dire quoique ce soit qu'Alya rit de bon cœur :
- Tu verrais ta tête, respire Marinette, je sais que tu parles du père. Raconte, on va trouver une solution à ton problème masculin
- J'étais pas sûre, mais imagine qu'il m'aime ! Je l'aime aussi, mais j'avais Luka, tu comprends ! Jamais j'aurais été infidèle et Luka mérite tout le bonheur du monde. Et moi comme une débilosaure je l'ai envoyé six pieds sous terre.
- Attends. Tu aimes Luka et l'autre ? Attends, attends, il a été conçu quand le cadeau surprise ?
- C'est pas ce que tu imagines. Pendant le break, tu me connais. Je l'aime depuis super longtemps mais j'imagine que j'étais aveugle tout comme Adrien, et j'aime pas Luka dans ce sens.
- Attends. T'aimes pas Luka et Adrien est le père aveugle ?
- Alya tu déformes tout ! Bien sûr que non c'est pas Adrien ! Je te dis que j'aime l'autre, j'ai juste été aveugle sur mes sentiments voilà tout.
- Oh ok. Tu vas manger tes frites ?
- Non prends les. C'est pas le sujet !
- Bah alors dis moi ce qui te tracasse de but en blanc je comprends pas !
- Est-ce que je dois dire à... au père de la chose, qu'il est justement, le père ?
Alya imita le merlan frit quelques secondes avant de s'écrier, faisant se retourner les gens autour, car la discrétion...elle l'enculait à ce moment-là.
- IL N'EST MÊME PAS AU COURANT ?!
Brusquement, Marinette secoua la tête, si gênée qu'elle en vira au rouge pivoine. Elle se prenait tant de déformations de vérités et de secrets dans la figure qu'elle en perdait le fil.
- Voilà justement pourquoi je te demande.
- Il t'aime ?
- Oui.
- Tu l'aimes ?
- Oui.
- Bah il est où le problème?
« Bonjour. Je m'appelle Marinette et je dois me compliquer la vie un max car ça serait ennuyeux sinon », lui souffla une petite voix dans sa tête.
Alya se reprit, limite blasée de la vie, car Marinette restait Marinette après tout.
- Mari'. Tu m'impressionneras toujours. Ta bêtise aussi. Il a le droit de savoir, c'est une décision à prendre à deux. Pas toute seule, j'imagine pas à quel point seul ça doit être dur. S'il t'aime alors il comprendra tes choix, et si tu l'aimes ça te libéreras d'un poids. Tu es une personne formidable, qui tombe amoureuse de garçon responsable et tout aussi formidable, alors il ne va pas te rejeter. Vas lui parler et tu verras. Si ça se passe mal, je le saurais, le retrouverais, et l'égorgerai. Finis l'omelette où elle va refroidir.
***
Marinette rentra chez elle, cette sortie lui avait fait du bien, tant pour son estomac que pour son esprit. Du moins, sa faim semblait avoir été comblée. La franco-chinoise entrouvrit la porte d'entrée après avoir grimper les dizaines de marches. Son père se tenait dans l'entrée, droit comme une statue grecque, les traits de son visage tirés par l'inquiétude. Il la laissa passer, la suivant et ronchonnant sur ce qui lui paraissait trop long. Ils se retrouvèrent en tête à tête, Sabine s'occupant des dernières heures de la boulangerie. L'atmosphère était électrique, tellement tendue que tout pouvait s'enflammer. C'est le patriarche de la famille Dupain-Cheng qui ouvrit le bal, serein, d'un calme dangereux.
- J'ai discuté avec ta mère.
- Ah.
- Et on a tiré des conclusions.
- Ah.
Tom se pinça l'arête du nez, n'étant pas au bout de ces peines, ses nerfs déjà rongés par l'impatience et bien d'autres.
- Un « ah » en plus et tu devras supporter mes larmes qui vont inonder la cuisine et tu risques de te noyer.
Marinette ne répondit pas, ne sachant pas quoi dire ou répliquer.
- Tu es mon bébé. Mais un bébé ça grandit. Et de toutes manière, t'as toujours tout fait de travers comparé aux autres.
Elle grimaça, comment devait-elle prendre cette réflexion ? Positivement, puisque son père essuya d'un revers d'une main une petite larme à l'œil gauche.
- C'est un compliment ?
- Je ne sais pas. Alors. Ta mère et moi avons décidé qu'il était tant que l'oiseau quitte le nid, que le cafard quitte la cuisine.
Là elle le prenait mal.
- Papa, là c'est moi qui vais pleurer.
- Roh laisse-moi parler je t'aime ! Donc. Tu as dix-huit ans, bientôt. Tu vas être donc majeur et responsable. Tu gères ta vie et tes bêtises.
Il renifla douloureusement, essuyant de nouvelles larmes.
- Papa tu pleures.
- Zut hein ! Nous pensons donc que c'est à toi seule de décider pour ma petite fille.
Surprise, elle le fixa avec étonnement. Et depuis quand il émettait cette supposition ?
- Qui te dit que c'est une fille ?
Il plissa les yeux l'air pensif, un grand philosophe débattait en lui à son air intelligent qui brillait dans son regard lointain.
- Instinct de grand-père. Nous te laissons donc choisir un studio plus proche encore de ton école. Comme tu le souhaitais il y a quelques mois... Mais, pas tant qu'un autre poussin ne soit arrivé à l'écurie.
Elle imita le poisson chat, ouvrant puis fermant la bouche successivement. L'incompréhension se lisait sur son visage. Tom soupira imitant un facepalm parfait avant de se reprendre avec difficulté de ne pas verser de larme.
- Quand le bébé sera né, tu auras ton studio. D'ici là, tu resteras à la maison, on t'autorise à aller en cours tant que tu le souhaites. Mais faire école à domicile le plus tôt possible c'est très bien pour nous hein... Et surtout ! Ta mère et moi voudrions rencontrer le conna-jeune homme, qui a laissé sa nouille dehors.
Son père ne lui en voulait plus vraiment. Sa mère non-plus. Que pouvait-on bien demander de plus ? La joie et le soulagement de Marinette filèrent vers les étoiles et des larmes de bonheur coulèrent, par fatigue et par contentement, tandis que la jeune fille eut un mal fou à se contenir. Finalement, elle embrassa son père et courut en quatrième vitesse vers sa chambre.
La fatigue explosait dans sa tête, qui s'était remise à bourdonner. Son lit l'appelait avec une voix si séduisante que Marinette en oubliant tout charme et s'installa à son aise sur son nouveau mari : la maudite banquette. Et une belle nuit de sommeil s'en suivit, sans rêves, ni cauchemars. Seulement une mise à jour corporelle.
***
Soudain, un grand fracas se fit entendre. Un bruit pourtant si familier aux oreilles de Marinette mais qui restait bouleversant. Quelques briques de maisons s'effondrèrent par terre et des miettes de ciments s'effritèrent puis s'envolèrent au gré du vent qui venait de se lever.
Marinette releva la tête et vit au-dessus d'elle un super-héros en costume noir bondir de tuilerie en tuilerie. Elle poussa un soupir d'exaspération : quelle incroyable super héroïne elle faisait !
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