1 - Mission 57 - Disparition
Il allait aller dans sa chambre pour dormir lorsque que le téléphone de son frère résonna dans l'immense bureau.
- Eugène Davis, répondit-il. Ah, Masako, bonjour ! Comment vas-tu ? ...
Curieux, Oliver s'approcha en essayant de comprendre le sujet de la conversation. Il était persuadé que ça avait un rapport avec cette vision et Mai.
- Quoi ? s'exclama Eugène en plongeant ses yeux dans ceux de son frère.
Il décala son téléphone de son oreille en mettant le haut-parleur.
- Mai a disparu ! entendirent-ils Masako. Nous sommes sur une affaire similaire au manoir de...
- Je m'en souviens, dit Naru. Où était-ce ? Que s'est-il passé ?
Le jeune homme s'empêchait de céder à la panique. Elle s'attirait toujours autant d'ennui... Et il n'était pas là pour l'en empêcher, pour les prévoir et être avec elle... Voilà pourquoi elle était entrée en contact avec lui. Elle l'appelait à l'aide.
- Dans un sous-terrain de Tokyo... Des femmes disparaissaient et on nous a demandé d'enquêter. Mai... Ses dons... Ils... Elle... Elle est plus forte que moi, et peut-être même que Gène... Elle a tout de suite compris que nous avions affaire à un monstre comme Urado... Nous cherchons son tombeau, il a été ouvert à cause de travaux dans un vieil immeuble... elle avait énormément de visions et elle n'a pas voulu se couper pour qu'on puisse résoudre l'affaire le plus rapidement possible... Mais, alors qu'on dormait, la première nuit, elle a commencé à se tordre de douleur, l'esprit qui l'avait hanté a été dur à faire partir, elle avait des marques sur le corps en entier, ça avait été bien plus qu'un rêve... Je vous promets, les marques apparaissaient de nulle part ! Le lendemain, elle a passé sa journée à s'évanouir, à rêver, mais le deuxième soir... Elle était bizarre, elle ne se sentait pas bien et elle m'a parlé de toi, Shibuya-san. Elle m'a demandé si vous étiez toujours en Angleterre, si vous alliez bien... Lin, que nous avions appelé dans la journée est arrivé le lendemain matin avec Madoka, ils ont parlé un long moment tous les deux et elle semblait ailleurs le soir, puis nous sommes allés nous coucher tous ensemble dans la même pièce. C'est Lin qui montait la garde quand d'un coup, son corps a disparu.
- Comment ça, disparu ?! demanda Eugene.
- Nous dormions juste à côté de lui, d'après son récit, il venait de vérifier que nous dormions bien tous, puis il a détourné son regard vers ce qu'il pensait être une ombre quand il a senti un mouvement derrière lui et Mai n'était plus là. A peine dix secondes s'est passé et la porte était fermée à clef ! Mai a disparu et je n'arrive pas à entrer en contact avec elle... Lin m'a demandé de vous contacter !
- Quand est-ce que ça s'est passé ? demanda l'ancien patron.
- Il y a quelques heures... huit environ...
Cela correspondait au moment où il l'avait senti.
- Nous prenons le premier avion, décida-t-il.
- Naru, attend ! s'écria la voix de la jeune médium à travers le portable.
- Je n'ai pas le temps, grogna-t-il.
- Mai a demandé à Lin un moyen de vous contacter, est-ce qu'elle est entrée en contact avec l'un de vous ?
- Non, aucunement... répondit Gene.
- J'ai senti sa présence plus tôt... il y a à peu près huit heures... Et elle m'a montré une vision...
- Quand tu t'es endormi, juste avant ? demanda son frère.
- Oui... Je ne suis pas sûr car je ne l'ai pas vu, elle n'était qu'une ombre.
- Quel était ta vision ? demanda Masako.
- J'étais un homme habillé en femme et j'accueillais des médecins qui voulaient me transformer en femme. Ce n'était pas rassurant du tout.
- C'est le fantôme sur lequel nous travaillons... C'est un monstre...
- Elle risque d'entrer en contact avec toi une nouvelle fois ! s'inquiéta son jumeau. Te sens-tu fatigué ? Nous allons prendre le jet de père et mère. Masako, demande à Lin ou Madoka de nous envoyer un véhicule, il est tôt au Japon, nous arriverons en fin de journée, nous ne pouvons être plus rapide.
- C'est le mieux... Nous allons continuer de chercher en vous attendant.
Elle raccrocha et les deux frères s'observèrent un instant avant de courir préparer leurs affaires. Eugène en profita pour prévenir leurs parents qui décidèrent de les suivre. Ils voulaient être sûrs de rencontrer la jeune femme qui leur avait permis de retrouver leur fils disparu, celle qui avait volé le cœur du deuxième. Ils feraient tout pour la retrouver.
Naru resta concentré sur ses sens pendant tout le chemin. Il voulait être sûr d'être prêt si elle tentait d'entrer en contact avec lui. Ce qui arriva alors qu'il montait dans l'avion. Sentant son frère sur le point de s'endormir, Eugène lui tint le bras et l'aida à aller s'asseoir sur un des sièges. Oliver s'endormit quasiment instantanément.
Quand il ouvrit ses yeux, il était dans une sorte de très vieille maison, typique japonaise, avec un grand jardin. Dans ce jardin, il y avait un bassin de carpe Koï absolument magnifique, on aurait dit qu'elles brillaient sous les éclats de la lune. Au bout du bassin qui se prolongeait comme un ruisseau dans tout le jardin, une fontaine en bambou creux. Il pouvait entendre le bruit du bâton taper contre la pierre à chaque fois qu'il était rempli d'eau. C'était la même maison que plus tôt.
- Naru... entendit-il derrière lui.
Il se tourna vers la voix de son ancienne assistante. Elle avait changé. Elle n'avait plus rien de la jeune fille qu'il avait quitté. Ça ne faisait qu'un an, mais il pouvait le voir, c'était une femme. Une magnifique jeune femme. Ses cheveux étaient bien plus longs, ils arrivaient en dessous de ses épaules. Elle était vêtue d'un haut bleu marine avec un décolleté plongeant, mettant en valeur ses formes de femme.
- Mai, lui répondit-il en plongeant ses yeux dans les siens.
Il s'attendait à un sourire de sa part, mais rien. Au contraire, elle avait un regard vide.
- Où es-tu ? essaya-t-il de la faire parler, la voyant perdue dans ses pensées.
Il la voyait l'observer de haut en bas. Elle ne réagissait même pas à ce qu'il disait.
Il décida d'avancer vers elle. Il faisait sombre malgré la lune, mais il pouvait voir les énormes cernes violettes sous ses yeux. Plus il avançait, plus il pouvait remarquer les marques dont parlait Masako. Des traces de doigt sous sa gorge, un hématome vers sa poitrine...
Quand il fut devant elle, il posa ses deux mains sur ses joues.
- Mai, où es-tu ? chuchota-t-il en cherchant son regard.
Les yeux de la jeune femme se fermèrent et elle posa sa tête contre le torse.
- Je suis épuisée, Naru...
Le jeune homme passa ses bras autour de ses épaules pour la serrer contre lui.
- J'ai peur... chuchota-t-elle. Urado était un monstre, mais il n'était pas malin, ce n'était qu'un fort désir de rester vivant... Ici, c'est un psychopathe... Sa haine est si grande... Il est fort, très fort, il arrive à prendre certaines formes grâce aux cadavres des femmes qu'il tue. Le désir de cet homme d'être femme. Sa greffe, bien entendu, s'est très mal passé. Les médecins ne voulaient que faire des tests, des expériences, voir ce qu'il se passerait si on greffait les bras d'une personne sur une autre... Son corps s'est boursoufflé... Il était endormi donc il n'a rien senti, il n'a même pas compris qu'il était mort. Il s'est « réveillé » monstrueux. Il a cherché les médecins pour avoir une explication, ce n'était pas ce qu'il voulait, il voulait se venger. Il est tombé sur les médecins autour de son corps. Il est devenu fou. Il a massacré les médecins et il a continué à tuer tous les autres qui passait devant sa maison, les médecins étaient tués par la rage et les femmes par sa jalousie... Les corps étaient retrouvés dans la pièce de son sous-sol où il avait été tué. Je t'épargne cette vision également...
Le jeune homme entendit la terreur et l'horreur dans sa voix. Il la serra un peu plus contre lui, il voulait lui donner le plus de réconfort possible. Elle devait rester courageuse.
- Les habitants de la ville... reprit-elle en essayant de se contenir. Ils ont très vite compris la source du problème. Ils ont tendu un piège au fantôme, ils ont sacrifié une femme. Elle était très malade et seule et voulait que ses filles puissent vivre sans la crainte d'être massacré un jour ou l'autre... Pendant qu'il torturait la femme, les hommes ont scellé la pièce, l'enfermant à jamais. Ensuite, la maison a été complètement détruite, brûlée et purifiée. Ils ont installé un petit temple avec des avertissements à cet endroit. Ils ont supprimé tous les documents parlant de son existence et de ce qu'il s'était passé. Après tout, il était un homme, un héritier, il avait du pouvoir et il a jeté la honte sur les membres de sa famille. Son frère s'est suicidé de honte et sa sœur n'a jamais pu se marier... Elle s'est isolé en forêt où elle a été retrouvé morte... Mais récemment, des...
- Des travaux ont ouvert le tombeau. Masako nous a prévenu.
- Elle vous a appelé, alors vous arrivez ? sembla-t-elle espérer.
- Oui, nous arrivons, acquiesça-t-il. J'arrive, Mai...
Elle ferma ses yeux, essayant vainement de contenir ses larmes.
- Je suis si fatiguée... chuchota-t-elle.
- Dis-moi où tu es, Mai... La supplia-t-il. Plus vite nous savons, plus vite tu seras sauve...
- Quand arrives-tu ?
- Dans quelques heures... Mai, ne fuis pas ma question.
- Je ne sais pas exactement où je suis, soupira-t-elle en essuyant ses larmes. Je sais juste que c'est dans cette maison, sa maison, mais impossible de connaitre son emplacement... Il a réussi à me déplacer dans l'espace donc je n'ai pas vu le chemin... Je savais qu'il me surveillait, j'ai demandé à Lin s'il pouvait déployer ses shikis autour de chacune des filles mais nous étions quatre et il n'en a que trois. J'ai pris la décision de ne pas me protéger, parce que je savais que je serais la plus forte et parce que je compte sur toi, Naru.
- De quoi tu parles, Mai ?
- Cette nuit, je l'ai senti arrivé, je n'ai pas dormi. Je tenais un collier qui est très important pour moi. Il est caché dans la doublure de ma couverture, il t'aidera à me trouver.
Il acquiesça d'un air sérieux avant de laisser un micro-sourire railleur étirer ses lèvres.
- Depuis quand es-tu si prévoyante, Mai ? Depuis quand réfléchis-tu ?
La jeune femme releva sa tête vers lui avant de rougir de colère. Il la reconnaissait mieux de cette façon. Et puis, au moins, elle pensait à autre chose.
- Imbécile ! lui frappa-t-elle le torse avec violence.
Mais elle s'arrêta presque instantanément. Son bras retomba le long de son corps.
- Ne sois pas si familier avec moi...
- Mai...
- Non, Shibuya-san.
Elle recula, laissant trois pas entre eux avant de se tourner vers la maison. Le scientifique en profita pour observer tous les détails de cet endroit. Il sentait que cette rencontre prendrait bientôt fin et il devait trouver cet endroit, surtout que la maison n'existait plus.
- Est-ce que tu reviendras vers moi ?
- Je ne sais pas... répondit-elle. Je suis déjà épuisée et si je veux pouvoir rester en vie, je dois continuer de combattre et je dois garder tous mes moyens. J'ai seulement profité du fait que Masako l'intrigue et qu'il la surveille. Surveillez bien Masako. Elle est le type exact de femme qu'il aurait aimé devenir.
- Elle ne sera jamais seule, je te le promets.
Elle ne répondit pas et continua d'observer la maison. Ayant mémorisé tous les détails environnant dont il avait besoin, Naru s'approcha d'elle et la tourna pour qu'elle le regarde.
- Je suis désolé, Mai.
- Je ne vois pas pourquoi tu t'excuses... ça ne changera rien à...
- Si, ça change tout.
- Je dois y aller, je le sens arriver...
- Mai, je te sauverai, affirma-t-il en la forçant à le regarder yeux dans les yeux. Je te récupérerai.
Une larme coula le long de sa joue. Il l'attrapa et ne se retint pas de passer une de ses mains dans ses cheveux pour la rapprocher de lui.
- Tout se passera bien, je te le promets...
Elle disparut d'un coup et il eut à peine le temps de l'appeler qu'il se réveilla.
Ses yeux se posèrent directement sur son frère qui l'observait. Ils étaient toujours dans l'avion. L'écran leur indiquait qu'ils arriveraient dans trois heures. C'était passé vite. Plus vite que dans la réalité. Il se souvenait que c'était la même chose avec Mai, elle pouvait s'endormir des heures et leur raconter à peine dix minutes de rêves et inversement. C'était beaucoup d'énergie.
- Comment va-t-elle ? lui demanda Eugene.
- Fatiguée, répondit-il en prenant son ordinateur. Elle est là où il y avait la maison. Il a dû l'emmener dans la pièce qui a été scellé.
- La pièce qui a été scellé ? ne comprit pas son frère.
Il savait que son frère attendait plus de détails mais il ne devait rien oublier.
- Appelle Lin.
Eugène s'exécuta sans s'offusquer du ton et du manque de politesse de son frère.
Lin décrocha au bout de deux sonneries.
- Eugène, Naru est réveillé ?
- Je le suis, lui répondit directement ce dernier. Mai est là où il y a eu les massacres. Où sont les travaux exactement ?
- Dans la vieille ville mais ce sont des travaux de plomberie, ils ont creusé sur des kilomètres, nous n'avons toujours pas trouvé cette fameuse pièce.
- On doit la trouver. Mai ne tiendra pas.
- Comment va-t-elle ?
- Elle est épuisée. On doit la trouver au plus vite. Lin, dans son lit, elle a laissé un collier. Retrouve-le et garde-le précieusement jusqu'à mon arrivée.
- Je vais le faire tout de suite.
- Lin, garde Hara-san près de toi. L'esprit est obsédé par elle. Elle s'habille de la même façon que les femmes qu'il enviait à l'époque.
- Comment ça ? ne comprit pas Eugène.
- Cet homme voulait être une femme, il enviait les belles japonaises à la peau très pâle, les cheveux noires, habillée en tenue traditionnelle... Vérifie s'il n'y a pas un lien avec toutes les victimes. Il faut trouver un moyen de le faire disparaitre, ou de le sceller à nouveau. Mais si nous le scellons, nous devons le mettre dans un objet.
- Très bien. Tout sera prêt.
- Merci Lin.
- Lin, ajouta Eugène avant que ce dernier ne raccroche. Veille sur Masako s'il te plait.
Lin lui promit alors que son frère souriait, se moquant de l'attirance qu'éprouvait son jumeau pour la japonaise.
- Moque-toi, le fusilla Eugène. Tu feras moins le malin devant Mai. Réfléchis à la façon dont tu te feras pardonner.
Oliver grogna et se concentra. Il ne dormirait pas tant qu'il n'aurait pas de nouvelles de Mai.
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