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II




Toutefois, tout équilibre est voué à vaciller un jour. Cette règle, surement établie par un savant rebelle, était malheureusement criante de vérité car il y existe toujours une inconnue, pouvant tout ravager sur son passage. Une lettre manquait et tout était dépeuplé tout comme un calcul pouvait s'avérer faux et toute logique s'écroulait. Mais il pouvait s'agir du hasard de la vie, du moins selon Amir. Dina, elle, pencherait davantage sur l'inattention humaine sans parler de manque de relecture. En effet, la jeune femme ne possédait l'esprit rêveur et complexe de son compagnon. Son vertige aidant certainement, elle préférait garder les pieds sur la terre ferme.

Cartésienne, elle remarquait davantage le titre d'un tableau que le lent dégradé de couleur sur la toile. Pragmatique, elle faisait  plus attention à l'utilité d'un pull qu'au drapé de ce dernier. Et pour finir, elle considérait qu'il n'y avait pas mieux que sa profession de professeur de mathématiques pour appliquer sa vision concrète de la logique. Il s'agissait bien de la différence entre elle et Amir. Lui n'avait pas besoin de comprendre à tout prix. Elle, si. Comment deux partisans de Thalès et de Pythagore pouvaient réfléchir si différemment? C'en était fascinant et plus les jours passaient et plus son admiration pour lui grandissait. Elle ignorait s'il s'agissait de la bonne manière d'aimer mais n'aime-t-on pas quelqu'un car on l'admire?

Dina aimait les couchers de soleil, les glaces à l'italienne ou encore les mathématiques. Mais Dina aimait Amir bien plus que cela, convaincue qu'elle était celle qui éprouvait le plus de sentiment entre eux deux. Et cela la terrifiait de se sentir davantage attachée. Quiconque ayant des chaines aux poignets se sentirait menacé, surtout s'il s'agissait de chaines dont on possède la clé. Cela la convainquit certainement de lui faire part de ses projets d'avenir car un soir, elle lui avoua vouloir rencontrer sa famille. Il était logique de souhaiter rencontrer les merveilleux parents qui avaient élevé l'homme pour qui son coeur battait. Alors à court d'arguments, Amir consentit. Plus tard, un autre soir, elle lui partagea ses voeux d'emménager ensemble. Avoir une routine quotidienne commune lui paraissait si beau... Pourquoi ne pas créer de nouvelles habitudes tous les deux? Au nom de l'amour, Amir consentit également. Encore plus tard, elle lui émit son envie de se marier. Quoi de plus que beau d'être unis pour la vie à la personne qu'on aime le plus? Une nouvelle fois, Amir consentit également d'un sourire absent.

Dina avait les poux en horreur. Pourtant, elle ne parvenait pas à cesser d'en chercher à Amir. Tester son affection, taquiner ses habitudes ou remettre en question ses opinions sur divers sujets était devenu son quotidien. Mais Amir continuait à l'aimer sans qu'elle ne comprenne pourquoi. Elle savait ce qu'elle valait et honnêtement, pas grand-chose. Sa soeur lui répétait inlassablement qu'elle voyait le verre à moitié vide mais le voir à moitié plein n'avait aucun sens. Un verre se remplissait mais se vidait surtout, il s'agissait d'un cycle. À la fin, il n'y avait plus rien.

Alors, elle s'évertuait à travailler sa démarche, à cultiver un style original et à s'instruire de sciences comme de littérature. À défaut d'avoir une jolie tête, la sienne serait bien remplie. Mais elle était tombée sur bien des garçons superficiels et cruels, des hommes qui n'en avaient que le nom. Se forger un caractère avec un père absent n'aidait pas à se construire non plus mais il avait bien fallu grandir. De guingois, certes,  mais elle avait grandi. Et à présent, elle avait Amir. Son ami, son amant, son mari. Et bientôt le père de ses enfants, du moins elle l'espérait. Un nouveau soir, elle lui en parla. Quoi de plus sublime que le fruit de leur union? Cela ne pouvait que les combler de bonheur.

-Dina, à quoi tu joues? Avait-il demandé, grave.

Amir l'avait longtemps dévisagé de ses grands yeux ombrés de cils sombres. Si longtemps que Dina s'en était ratatinée de honte; elle lui en voulut de la rendre si ridicule. Mais oui, à quoi jouait-elle?

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Tags: #amour