A presque 2000 mètres d'altitude, dans la nuit sans lune, au-dessus d'une ville qui brillait plus que les étoiles, l'équipe était parfaitement invisible et indétectable, dans le cas hypothétique ou quelqu'un chercherait leur présence.

D'un seul coup, sans préavis, les coéquipiers plongèrent vers le sol. Ils allèrent tellement vite qu'un son aigu retenti. A moins d'une dizaine de mètres d'un toit, le dragon ouvrit ses grandes ailes noires et se posa avec délicatesse, sans faire le moindre bruit. L'humain descendit de son dragon et sortit son appareil photo. Il s'accouda au muret et zooma au maximum. Il prit quelques clichés, avant de remonter rapidement sur son partenaire, qui prit aussitôt son envol.

En moins de vingt secondes, les deux amis se retrouvèrent à 500 mètres du bâtiment, tandis que deux soldats se posaient sur le toit. L'un des deux marmonna :

-Je t'avais dit qu'il n'y avait personne !

-J'étais pourtant sûr d'avoir vu une silhouette...

-Laisse tomber, le seul dragon qui aurait pu faire ça c'est une furie nocturne. Et la seule connue est en mission de l'autre côté du globe.

-Tu dois surement avoir raison...

-Bien sûr que j'ai raison !

Les deux soldats repartirent. Dans le ciel, la furie nocturne avait elle aussi disparu, allant apporter les précieuses photos.

Harold arriva à la base, se posant sur l'une des pistes prévue à cet effet. Il descendit de Krokmou et salua certaines personnes. Les deux compagnons vivaient dans cette base depuis maintenant 10 ans et faisaient désormais parti du décor, autant que puisse l'être l'unique furie nocturne et son partenaire. Ensemble, ils se rendirent au bureau de leur supérieur, le colonel Astor.

L'homme, en réunion, vit le duo par une fenêtre sans teint et congédia les personnes avec lui. Quand la porte s'ouvrit, il fit signe à Harold d'entrer et le salua :

-Commandant Haddock.

-Colonel.

-Avez-vous ce que je vous ai demandé ?

-Oui monsieur.

Le plus jeune ouvrit une sacoche qu'il portait à la taille et sorti un appareil photo. Il enleva la carte SIM et la tendit à son patron. Ce dernier sourit et l'inséra dans son ordinateur, pour en observer le contenu. Il sourit :

-Encore une fois, c'est du bon boulot. Fait profil bas pendant quelques temps, je te contacterai.

-Très bien.

-Il y a un problème ?

-Une rumeur coure.

-Laquelle ?

-Vous cherchez à faire disparaitre les dragons.

-Foutaises ! qui dit ça ?

-Certains soldats ayant participé à l'attaque contre les serpents de mer.

-Assure-toi de leur silence.

-Déjà fait monsieur.

-Bien, reste à l'écoute.

-Colonel ?

-Quoi donc ?

-Souhaitez-vous vraiment faire disparaitre les dragons ?

-Evidemment que non ! S'écria l'homme, mais tu dois comprendre qu'avec le réchauffement climatique, nous sommes l'une des dernières contrées au monde à accueillir des dragons. Chez nous, il y a environ 500 dragons pour un habitant. Cette explosion démographique pourrait mettre à mal notre pays. Il nous faut absolument intervenir avant les problèmes. L'attaque contre les serpents de mer a tué une centaine d'individus et les autres resteront tranquilles. La menace vient des dissidents. Les dragons incontrôlables doivent disparaître, sinon, ils mèneront notre monde à la destruction.

Harold salua son colonel et quitta le bureau, retrouvant son partenaire dans le couloir. Ils quittèrent rapidement la base, avant que le soleil ne se lève et avec lui, les cadets. Ceux-là, d'incroyables commères, pourraient facilement raconter qu'ils l'avaient vu à la base, au lieu qu'il soit à l'autre bout du monde, comme l'            avait informé Alfredo Dallas.

Les deux compagnons volèrent pendant plusieurs heures, vers le nord, jusqu'à atteindre une île, perdu au milieu de nulle part. Au premier abord et même lorsqu'on s'y posait, elle semblait abandonnée et austère. Pourtant, depuis presque 3000 ans, elle abritait l'unique colonie de furies nocturnes.

Le duo fut rapidement rejoint par l'espèce, ainsi qu'un groupe de personnes. A chaque fois qu'il saluait ses amis, il repensait à son enfance, où ces mêmes personnes le détestaient. Mais en grandissant, ils avaient tous mis leurs apriori de côté pour quelque chose de plus grand.

Leur retrouvaille, la première fois, avait été houleuse. La seconde aussi et toute celle qui suivirent, pourtant, tous leurs supérieurs voulaient les voir se côtoyer, pour l'image. Avec du temps, ils avaient fini par s'apprivoiser. Tout ça à cause d'un terreur terrible voleur d'élastique.

Harold avait alors 19 ans et se rebellait contre l'autorité. Il s'était laissé pousser les cheveux et portaient des extensions violettes qui lui arrivait jusqu'aux fesses. Personne ne pouvait lui faire de remarque dessus, sous peine de forte représailles, pas même ses instructeurs. Cependant, cette masse était assez encombrante lors des vols, alors Harold avait pris l'habitude de les attacher en un gros chignon.

Un jour qu'il suivait le colonel Astor par défi, pour lui prouver qu'il était le meilleur, un moment où son orgueil était poussé. Ils avaient atterri sur une petite île, tout au plus un gros rocher. Le militaire avait rendez-vous avec un marchand ambulant. Harold voulait simplement obtenir une phrase clef, pour se moquer, avant qu'un terreur terrible ne lui vole son élastique, faisant cascader ses cheveux sur ses épaules. Sans se soucier de la conversation, il partit à la poursuite du dragon, découvrant ainsi le véritable but du colonel.