21 - savoureux
- Alors ? Comment tu trouves la soupe de ma grand-mère ?
- Délicieuse, approuva Tim, en avalant une nouvelle gorgée de soupe.
C'était un plat simple, une sorte de soupe aux légumes moulinés. Mais préparée selon la recette secrète de sa grand-mère, qui gardait jalousement son contenu comme Panoramix le secret de la potion magique. Qui sait, peut-être en était-ce ... ?
En tout cas, Tim appréciait. Et c'était tout ce qui comptait. Il avait repris des couleurs, grâce à la soupe. Mais surtout, il avait cessé de trembler. Tant mieux. ''Elle va me tuer'' ... Il serra les dents, rien que de repenser à ce qu'il lui avait dit. Qui était cette personne qui le terrifiait autant ? Cette femme ? Était-ce ...
- Ça va ?
- Par rapport à toi, très bien, crétin. Et toi ?
- Je n'ai plus de vertiges ou de nausées. Je suis juste ... fatigué.
- Tu restes dormir ici.
Ce n'était pas une proposition, qu'il lui donnait. Mais plutôt un ordre. Et il n'accepterait aucun refus.
Tim se redressa, en fronçant les sourcils.
- Jean ...
- Trop tard. Ma grand-mère a appelé ta mère.
Il tressaillit vivement, et son bol de soupe manqua de se renverser sur sa couette.
- Quoi ... ? balbutia son ami, le visage soudainement devenu bien plus pâle.
- On a trouvé son numéro dans ton téléphone. Tu devrais vraiment mettre un mot de passe dessus ...
- Vous avez appelé ma mère ?!
Son cri ne le déstabilisa pas pour autant. Il s'y attendait. Tim se remit à trembler et son rythme cardiaque paraissait s'être emballé, vu son souffle court.
- Eh, tout va bien.
- Non. Tout ne va ...
Il se tut soudainement, comme si ses lèvres s'étaient scellées, et Jean plissa les yeux.
- Est-ce que c'est elle, qui ''va te tuer" ?
Tim ouvrit de grand yeux, et durant un instant, il crut le voir frissonner, mais il finit par lever les yeux au ciel.
- Ma mère est terrifiante. C'est tout. J'ai loupé le couvre-feu, elle va ...
- Te frapper ?
Son ami perdit vivement le sourire presque mesquin qu'il s'était construit, et Jean secoua doucement la tête, son regard ancré dans le sien. Mais alors qu'il ouvrait la bouche, Tim l'interrompit vivement.
- Tu n'as aucun droit de me dire ça, murmura Tim, si doucement, mais si froidement, que durant un instant, Jean se sentit presque soufflé.
Mais il finit par reprendre une vive respiration, et secoua de nouveau la tête.
- Tim, je ne voulais pas te blesser, mais ... Pourquoi ?
- Pourquoi, quoi ? répliqua-t-il, agressif.
Jean hésita, un instant. C'était ... quelque chose de difficile. De très difficile. Trop, pour lui, en tout cas. Délicat, aussi. Pouvait-il vraiment secouer Tim, comme ça ? Pourtant ... Pourtant, quelque chose devait être fait ... Absolument. Mais comment ... ?
Soudain, Tim soupira longuement, et posa le bol de soupe maintenant vide, à terre, non loin de là, avant de se lever, le plus doucement du monde.
- Jean ... écoute, ça va. Je ... je te remercie de te faire du souci pour moi mais ça va. Tu as appelé ma mère ? Tu lui as dit quoi ?
- Ma grand-mère l'a eue, pas moi. Mais elle a dit que tu étais tombé par terre, inconscient, et qu'on avait préféré te garder à la maison plutôt que de te bouger dans tous les sens. Ta mère a répondu qu'elle passerait demain à dix heures, avant de raccrocher.
Tim souffla alors, longuement, et la tension qui avait envahi son être depuis l'annonce de l'appel sembla s'effacer, remplacé par un soulagement sans bornes.
Ça au moins, c'était fait ... Mais bon sang, quel gosse pouvait bien être terrifié de ses parents comme ça ?!
Jean se leva à son tour, par réflexe, et fit face à Tim, un instant, l'air sur le point de ... de faire quoi ? Il scruta Tim, soudainement hésitant ... et ce dernier posa alors une main sur son épaule, avec ... une sorte de petit sourire hésitant.
- Merci, Jean.
- Je t'en prie, c'est la moindre des choses que je puisse ... faire pour toi.
Quelque chose passa dans son regard, et Jean se mordit la lèvre inférieure, en baissant les yeux.
- Tim ... Tu ...
- S'il te plaît. Pas un autre mot de plus, chuchota-t-il en pressant son épaule, un peu plus.
Jean serra les dents. Ce n'était pas normal. Ce n'était pas normal. Non. Il ... NON. Tim ne méritait pas ça. Alors il se dégagea doucement de la prise de Tim, et le força à s'asseoir sur le lit, en s'accroupissant devant celui qui était devenu son ami.
- Lorsque je t'ai rencontré pour la première fois, crétin, je me demandais quel genre de tête de nœud tu pouvais bien être. T'es une plaie, mais ... tu es ... important. Tu es devenu important. Alors j'ai le droit de me soucier de ton bien-être. Tu comprends ? Surtout quand l'ami en question se trouve être dans un état aussi critique.
Tim cligna des yeux, et une expression bien étrange passa sur son visage ... bien vite balayée par une sorte de grimace étrange.
- Tu dramatises ...
- Tim. Ta gueule.
Et pour une fois, il la ferma.
- Ce soir donc, tu restes dormir ici, et tu nous laisses t'occuper de toi comme la dernière fois. Et ... on parlera pas des sujets qui fâchent. Ça te va ?
Quelque chose comme du soulagement passa sur son visage, et il hocha la tête, doucement, avec, de nouveau, un petit sourire. Jean l'imita.
- Ça me va, acquiesça Tim.
Il lui tapota la cuisse, en signe de contentement, et se redressa.
- Parfait donc. Ce soir, donc, tu es sous ma responsabilité. Mais c'est aussi le soir "Tim". Donc. Tu veux quoi ?
Il remua un instant, l'air gêné. Et ... plissa les lèvres.
- Hum. Eh bien ... Est-ce qu'il reste encore de la ... savoureuse soupe de ta grand mère ?
Jean sentit une douce chaleur se développer en lui, et il hocha vigoureusement la tête.
- Bien sûr. Rallonge-toi, je vais en chercher.
- Hum ... Merci.
Le jeune homme se coucha de nouveau dans le grand lit de Jean, tandis qu'il ramassait leurs bols, afin d'aller les remplir.
Mais alors qu'il s'apprêtait à sortir de la chambre, Tim le rappela. Il se retourna vers lui, et le trouva enfoncé sous les couettes, comme un petit enfant.
- Jean ... Merci. Vraiment.
- C'est rien, Tim, répondit-il avec un grand sourire, en fermant la porte derrière lui.
Il était impossible. Mais ... C'était Tim.
Et ce soir, il veillerait sur lui autant que possible. Et il ferait de son mieux pour continuer bien après ça. Quoi qu'il lui en coûte.
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