Adélaïde fixa attentivement le visage de ce père qu'elle avait tant aimé en espérant voir une anomalie. Mais elle ne discerna aucune erreur de conception. Elle tenta de humer l'air pour voir si elle ressentait de la magie, mais elle n'était pas sûre d'elle car la magie était présente partout dans la pièce. Elle n'avait pas le choix, elle devait trouver le moyen de desceller la faille au cas où cela venait à se reproduire.

A  tout hasard, elle interrogea cette image « Toi qui ressemble étrangement à mon père, es-tu réellement mon père ou juste une pâle copie ? ».

L'image resta muette comme une carpe. Elle aurait dû s'en douter. Le meilleur moyen de discerner le vrai du faux était tout simplement de poser des questions. L'image, était un élément fictif. Cet élément ne pouvait donc ni bouger, ni parler. Adélaïde venait de retrouver tous ses esprits. Afin d'en être certaine, elle lança une formule de vérité : « Afin de mettre en lumière toute la vérité, et que tous les secrets soient dévoilés, toi qui te caches devant moi en toute simplicité, montres moi ton vrai visage avec sincérité ! ».

L'image,qui était devant elle, devint flou puis disparut comme elle était apparut. Adélaïde souffla de soulagement et en même temps de dépit. Elle s'assit à terre et prit sa tête entre ses mains pour se cacher du grimoire. Même si elle avait réussit une nouvelle épreuve, une partie d'elle-même avait espéré retrouver ce père perdu. Elle aurait tant aimé avoir des réponses aux questions qu'elle se posait, mais c'était peine perdue.

Amber ne savait pas comment réagir face à la détresse d'Adélaïde. Devait-elle faire un pas vers elle et la prendre dans ses bras, ou la laisser seule digérer tout ce qu'il venait de se passer ? Même si elle était dans cette histoire depuis un petit moment, et qu'elle aimait bien Adélaïde, elle ne se sentait pas encore assez proche d'elle pour la réconforter. Pourtant elle s'était toujours liée d'amitié facilement avec les personnages de ses livres : Ambroise, Willis, Maria et Maeva. Quelque chose dans l'attitude d'Adélaïde la faisait même parfois reculer... Était-ce le pouvoir immense que possédait Adélaïde qui lui faisait peur ? Ou la partie sombre qu'elle avait vue en Adélaïde au début et qu'elle ressentait encore en partie quand cette dernière utilisait ses pouvoirs ? Amber se méfiait un peu d'Adélaïde. Amber avait peur de s'attacher et d'avoir la boule au ventre en repartant !Une chose était sûre, elle espérait qu'un jour Adélaïde aurait les réponses à ses fameuses questions... Elle méritait de savoir toute la vérité !

Le grimoire ne pouvait pas la serrer dans ses bras, il se sentait un peu impuissant. Il se demandait s'il n'avait pas eu tort de la mettre face à une situation aussi éprouvante. Peut-être aurait-il dû attendre qu'elle ait plus d'expérience...

Juste au moment où il avait cette pensée, Adélaïde releva sa tête et lui répondit : « Ne t'inquiètes pas, c'est juste l'émotion qui ressort ! Je ne t'en veux pas, tu as fait ce que tu devais faire, tu as eu bien raison ! Si tu avais attendu plus longtemps, un sorcier maléfique aurait sûrement profité de l'aubaine pour me mettre face à cette douleur. Cela aurait été bien pire. Grâce à toi, je serais en mesure de mettre mes sentiments de côté, et je ne flancherais plus de désespoir comme je l'ai fait.Et t'inquiètes Amber, c'est normal de se méfier !Je sais que j'ai été odieuse au début, et je fais tout mon possible pour ne plus l'être ! La confiance viendra avec le temps ! J'aurais été à ta place, je serais sur mes gardes aussi ! Je ne t'en veux pas, on finira par devenir amies, je le sens ! Et tu as raison sur un point : c'est qu'un jour, je rechercherai mon père ! Maintenant que j'ai des pouvoirs, je dois connaître la vérité... »

Le grimoire avait l'impression qu'elle avait lu dans ses pensées. Il se demandait si elle avait eu un coup de chance ou si elle en était réellement capable. Jamais aucune autre demi-sorcière n'avait réussit cette prouesse, c'était étrange ! Lisait-elle dans les pensées d'Amber aussi ?

Adélaïde le regarda et émit un petit sourire diabolique. Puis elle lui avoua« Oui tu as raison, j'arrive à lire dans ton esprit !J'ai sûrement dû déverrouiller une porte cachée en toi pendant l'entraînement sans le savoir et maintenant je peux entendre tes pensées... D'ailleurs elles sont un peu désordonnées parfois !Tu pars vraiment dans tous les sens ! Il faudrait peut-être que tu ranges un peu mieux ton esprit, tu ne crois pas ? Et pour information, j'arrive à capter aussi certaines pensées d'Amber lorsqu'elles me concernent ! Peut-être qu'il existe une liaison entre nous deux ... »

Le grimoire avait l'air choqué par les propos d'Adélaïde. Il lui répondit : « Je ne sais pas, c'est la première fois qu'on lit en moi comme dans un livre ouvert ... Alors je ne saurais pas te dire comment c'est rangé là-haut ! Et puis ranger,c'est vraiment pas mon truc ! J'aime quand c'est dans le désordre... Et pour ton père, je t'aiderais le moment venu !»

Adélaïde rigola et lui confia : « En fait, je ne sais pas comment c'est rangé là haut dans ton esprit ! C'était une blague, je croyais que tu avais compris ! Et je m'en fous un peu du rangement moi aussi ! Pour un livre, tu n'es pas très futé,ni très perspicace en fait ! Dois-je t'expliquer ce que signifie le mot blague ? Je voulais juste un peu détendre l'atmosphère avant la prochaine tempête ! »

Le grimoire sourit de son seul œil valide puis lui affirma :« Non, t'inquiètes, je connais la définition du mot blague. D'ailleurs, j'ai un dictionnaire complet intégré, si un jour tu as besoin de regarder une définition ! »

Adélaïde lui rétorqua : « Je prends note, mais pour ta gouverne,maintenant, il y a ce que l'on appelle couramment Internet. On n'a plus besoin de chercher pendant des heures dans un gros dictionnaire, et je ne cherche pas à te vexer là ! On tape juste le mot recherché et on obtient notre réponse ! »

Le grimoire paraissait vexé et se défendit « Je sais ce qu'est Internet aussi ! Mais le jour où tu seras perdue au milieu de nulle part, et que tu n'auras plus de réseau sur ton téléphone, tu seras bien contente de pouvoir m'utiliser ! »

Adélaïde leva la main droite en signe de paix et lui dit avec un peu d'ironie dans sa voie « D'accord, c'est bon, on fait la paix !J'aurais toujours besoin de toi, aussi bien en tant qu'ami qu'en tant que livre des merveilles, livre des savoirs ! ».

Amber avaient suivi les piques qu'ils s'envoyaient tous les deux. C'était très divertissant, elle avait l'impression d'assister à une scène de théâtre un peu comique. Sa tête passait de l'un à l'autre à la manière d'une balle de ping-pong qui rebondit sans arrêt et elle se demandait qui marquerait le point final... Ouf finalement, Amber était soulagée car ils avaient l'air de s'être mis d'accord tous les deux pour arrêter là leur discussion un peu mouvementée. Mais son soulagement fût d'une courte durée, car Adélaïde et le grimoire fixaient trois paires d'yeux devant eux. Amber eut la présence d'esprit de se cacher derrière un grand arbre en mode invisible. Elle espérait ne pas être repérée. Finalement, elle se disait que ce n'était pas de tout repos de vivre pleinement une histoire !

En effet, à peine Adélaïde avait-elle mis un point final à cette discussion que trois sorciers différents étaient apparus et les avaient encerclé. Ça, c'était une situation qu'elle n'avait pas encore vu et surtout qu'elle n'avait pas prévu ! Elle savait faire face à un sorcier à la fois mais trois en même temps, ça c'était bien plus compliqué ! Ils s'étaient ligués contre eux ! L'épreuve de force était là ! Elle devra faire ses preuves devant le grimoire et devant ces individus qu'elle ne connaissait pas ! Elle devra unir ses forces avec celles du grimoire !

Maintenant qu'ils étaient tous les deux reliés, le grimoire émit une pensée secrète expressément pour qu'Adélaïde l'entende :« Adélaïde, ce n'est pas moi qui ai invoqué ces trois sorciers, ils sont bien réels. Prends garde à toi. Utilises ton bon sens et ce que tu as déjà appris. Je vais en prendre deux et toi,tu te charges de celui qui est le plus proche de toi, OK ? »

Le temps qu'il pense à tout cela, les trois sorciers avaient déjà unis leurs forces mais aussi triplé leur nombre. Ils n'étaient plus trois mais neuf devant eux. Le combat devenait inégal et pas du tout équilibré. Pourquoi ces sorciers avaient-ils besoin d'être aussi nombreux ? Avaient-ils autant peur des pouvoirs d'un grimoire et d'une apprentie demi-sorcière ? Pourtant ils devaient avoir bien plus d'expérience que notre duo infernal, non ?

Adélaïde eut une idée. Elle transmit sa pensée au grimoire : « Je vais essayer quelque chose, laisse moi faire. Je ne dis pas ce que c'est au cas où ils entendraient mes pensées... ».

Le grimoire fit un signe de tête à Adélaïde pour marquer son accord,et il la laissa faire. C'était dangereux de la laisser prendre tous les risques à sa place. Mais il devait lui faire confiance pour que leur duo fonctionne.

Adélaïde était contente que le grimoire ait confiance en elle. Elle avait plutôt intérêt à ne pas le décevoir... Elle fit un clin d'œil au grimoire et récita une formule de multi-clonage que même lui ne connaissait pas : « Afin de mener à bien ce combat, je fais appel à mes pouvoirs. Que la force se répande en moi, et qu'apparaissent mes clones dans un brouillard. Donnez leur mon énergie ainsi que ma magie pour les vaincre et nous protéger de ces sorciers maudits ! ». Cette formule, Adélaïde l'avait créée de toute pièce, grâce à sa connaissance des mangas. Le multi-clonage avait toujours été quelque chose qu'elle voulait pouvoir maîtriser ou imiter. Elle était une fervente admiratrice de Naruto (voir shonen manga japonais Naruto de Masashi Kishimoto). Elle croisait les doigts pour que sa formule fonctionne, elle n'était pas sûre d'elle car c'était son premier essai. Elle avait leur destin entre ses mains et avait peur de ce qui pourrait advenir d'eux si rien ne se déroulait comme elle l'avait prévu.

Pour le grimoire, c'était une formule « suicide » en quelque sorte, car Adélaïde l'avait sortie de nulle part. Et elle s'imaginait qu'avec sa faible expérience en magie cela fonctionnerait... Même les sorciers riaient de cette formule inconnue de tous... Le grimoire pensa « Adélaïde qu'as-tu fait ? C'est notre survie qui est en jeu, et tu lances cette formule sans certitude... Es-tu à ce point inconsciente ? »

Adélaïde lui répondit par le silence. Elle voulait rester concentrée sur ce multi-clonage et prier pour que cela réussisse.

Il faut croire que la prière d'Adélaïde fut entendue car ce n'est pas un ou deux clones qui apparurent dans un brouillard mais vingt. Toutes les personnes présentes, y compris Amber qui se cachait, furent sidérées du résultat de cette toute nouvelle formule. Adélaïde et ses clones profitèrent de ce moment de stupéfaction pour attaquer les neuf sorciers et les pousser dans leurs retranchements. Les clones n'avaient aucun sentiment et une durée de vie limitée. Ils n'avaient donc peur de rien et sûrement pas de ces individus qui avaient l'air de porter un déguisement de sorcier...

On dit toujours que le nombre fait la force, et c'était exactement le cas ici. Les clones ainsi qu'Adélaïde avancèrent vers les sorciers. Ces derniers commencèrent à avoir peur d'Adélaïde qui dégageait une force inouïe encore jamais vue chez des sorciers débutants. Elle était bien plus forte que les neufs sorciers réunis qui eux étaient sensés être plus expérimentés qu'elle. Elle maîtrisait l'art de la création de formules magiques, chose très rare chez les sorciers. Adélaïde pensait que tout sorcier normalement constitué pouvait réussir à créer des sorts uniques. Elle ne se doutait pas que c'était quelque chose d'exceptionnel qui pouvait effrayer ses adversaires.

Elle pensait qu'ils allaient attaquer, mais au lieu de cela, elle les voyait fuir. Elle ne comprenait pas leur lâcheté. D'un commun accord entre les clones et Adélaïde, tous entourèrent les neuf sorciers. Ils formèrent un cercle autour d'eux. Ils récitèrent la même incantation en même temps : « Nous faisons appel à l'énergie qui coule dans nos veines. Faisons d'elle notre force pour bannir de ce monde la haine. Transformons dans nos mains cette force en rayon d'énergie. Et qu'enfin ces sorciers puissent à jamais être détruits ! ».

Vingt et un rayons d'une couleur bleutée fusèrent des mains d'Adélaïde et de ses clones. Ils atteignirent les sorciers en pleine poitrine. Ces derniers s'évaporèrent dans une lumière bleue éclatante. Il n'y avait plus aucune trace de leur présence et plus aucune bataille à mener. Les clones disparurent, dans un nouveau brouillard, aussi vite qu'ils étaient apparus.

Amber venait d'assister à une scène digne d'un film de science fiction.Elle se sentait à la fois soulagée et horrifiée par ce qui venait de se passer. Les sorciers n'avaient pas pu lutter pour survivre, ils n'avaient pas pu s'enfuir. Elle pensait que même des êtres diaboliques ne méritaient pas de mourir ainsi. Elle se disait qu'ils avaient peut-être été manipulés par quelqu'un de plus haut placé. Avaient-ils seulement eu un libre arbitre ? De même, elle ne comprenait pas pourquoi Adélaïde avait été aussi dure avec ces sorciers... Pourquoi ne les avait-elle pas laisser fuir ? Pourquoi s'acharner sur ces hommes ? Avait-elle quelque chose à prouver ? L'aura d'Adélaïde avait changé. A l'extérieur, il y avait toujours ce cercle argenté, mais à l'intérieur le blanc était zébré de rouge clair et brillant. Ce rouge lumineux indiquait qu'une grande énergie et qu'une prodigieuse force circulaient dans le corps d'Adélaïde.

Adélaïde semblait jubiler de cette victoire. Un large sourire se dessinait sur son visage. Le grimoire entendait les pensées d'Adélaïde :« Wahoo, j'ai réussit, j'en reviens pas... C'était du jamais vu... hein mon petit grimoire... C'était sensationnel ? Les prochains sorciers n'auront qu'à bien se tenir... »

Le grimoire la réprimanda : « Adélaïde ! Arrête de jubiler ! Tu as eu de la chance que tes formules aient fonctionné ! Tu nous as tous mis en danger ! Inventer des formules de toutes pièces et deux fois d'affilé en plus, c'est risqué lorsqu'on débute ! La chance était de ton côté cette fois-ci ! Mais ce ne sera pas toujours le cas ! Il suffit d'une hésitation, ou d'un mot placé au mauvais endroit pour que la formule soit inutile ! Un sorcier aura vite fait d'en profiter pour te déstabiliser et te mettre à terre. Pour les clones, ils auraient pu se retourner contre toi aussi, c'était Quitte ou Double. Mais je retiens la formule, je l'ai rajouté à la fin de mes pages ! Je pense qu'on pourra s'en resservir dans les prochaines semaines... Pareil pour la deuxième formule, c'était malin ! Et je fais rarement des compliments ! Tu as pris tous les risques ! Au prochain combat, on agit ensemble et pas chacun de son côté, c'est aussi ça une équipe ! Et il ne faut jamais savourer la mort d'individus, c'est diabolique ! Ah, autre chose, rares sont les sorciers qui peuvent créer des formules de A à Z ! Tu as un grand pouvoir en toi, tu vas devoir apprendre à mieux l'utiliser mais aussi t'en méfier ! Oublie pas qu'un sort peut aussi se retourner contre toi et tes proches ! As tu compris mes mises en garde ? ».

Adélaïde se justifia : « Oui, j'ai bien compris où tu voulais en venir ! Je ne savoure pas la mort ! Je suis juste contente d'avoir réussi à créer des formules dignes d'être validée par toi mon ami ! Je ne pensais pas qu'un jour, j'y arriverai... Et désolé Amber si je t'ai un peu effrayée... Lorsqu'on manie un tel pouvoir, c'est difficile de s'arrêter, c'est enivrant, ... on a envie d'aller plus loin ! J'aime ce pouvoir que j'ai en moi, mais j'ai bien compris que je devrais faire plus attention aux individus que j'ai en face de moi... même s'ils sont mauvais... Tout être bon ou mauvais mérite une deuxième chance pour se repentir ! ».

Amber expliqua : « Oui, tu possèdes beaucoup de pouvoir, c'est très tentant de l'utiliser sans vergogne ! Mais il faut faire attention à ne pas t'éloigner du droit chemin. Tu es quelqu'un de bien, je ne voudrais pas que tu deviennes un de ces mauvais sorcier attiré par le pouvoir ou par la vengeance ! » .

Le grimoire répondit : « Ne t'inquiètes pas Amber, Adélaïde restera sur le droit chemin, j'y veillerais personnellement ! ».