Chapitre 2 : Premier voyage au pays des koalas
Alors qu'un flot de souvenirs refoulés avait refait surface, Amber avait porté un nouveau regard sur ses livres. Elle détenait dorénavant la certitude qu'elle avait une capacité hors du commun : pouvoir voyager dans ses ouvrages littéraires. À ses yeux, son cauchemar qui lui paraissait auparavant irréel, devenait tangible voir réalisable. C'était une sorte de rêve prémonitoire. Elle sentait que son esprit avait tenté de lui faire comprendre quelque chose qui serait possible dans un avenir proche. Outre la peur qu'elle avait éprouvée au premier abord, elle avait ressenti une grande lucidité, une sensation de déjà-vu. Elle avait compris qu'un autre type de voyage littéraire était possible, encore fallait-il s'en donner les moyens.
Elle se doutait que ses prochains voyages seraient sûrement semés d'embuscades, mais elle n'éprouvait plus aucune peur. Après avoir subi autant de harcèlement scolaire, elle avait plus que besoin de s'immerger en profondeur dans un livre, de voir l'invisible...
Elle avait hâte de voir ce monde où la fiction devenait réalité et où la magie était plus que présente. Pour entrapercevoir ce monde, Amber devait imaginer une réalité fictive et la mettre en scène.
Elle prit un des livres qu'elle avait dans sa bibliothèque : « Mission sauvetage des koalas en danger de Marko Siam ». Elle connaissait déjà un peu l'histoire, ce serait donc plus facile de s'y projeter.
Elle essaya à plusieurs reprises, mais échoua à chaque fois. Elle savait pourtant ce qu'elle devait faire : observer bien minutieusement les images, se concentrer et s'imaginer à l'intérieur.
Mais pour pouvoir y arriver, elle repensa à son rêve étrange. Quelle était la clé d'accès à ce monde fictif ?
L'horreur qu'elle avait entrevue lui avait donné envie d'aider ces personnes qui avaient l'air malade. Il fallait donc non seulement qu'elle se montre persévérante, mais surtout que sa volonté d'accéder à ce monde soit plus fort que tout. Et ne pas oublier de croire en tout ce qui paraissait irréel. Tout cela, elle l'avait intégré, elle devait maintenant le mettre en application.
Elle se concentra et s'imagina donc à côté de ces koalas, dans cette forêt tropicale. Elle voulait plus que tout les aider. Pour elle, c'était une cause noble qui valait la peine de se battre. Encore plus depuis qu'elle avait entendu aux informations du soir que c'était une espèce menacée. Elle était pressée de se retrouver au pied de ces arbres.
Alors qu'elle avait une image nette des koalas, un phénomène incroyable se produisit. Elle sentit un vent chaud lui fouetter le visage, puis elle eu l'impression de s'élever dans les airs. En quelques secondes, elle se retrouva debout au pied des arbres. Elle se souvint avoir lu que les koalas vivaient en Australie dans des forêts d'eucalyptus.
Elle n'en revenait pas, c'était incroyable à quel point cela avait été rapide. Elle marmonna : « C'est moi qui ai fait ça ? C'est pas possible ! J'en reviens pas ! J'ai l'impression d'être dans un rêve ! »
Lorsqu'elle regarda autour d'elle, la première chose qu'elle vit, ce fut des militants, enfants et adultes qui se tenaient devant les arbres. Elle entendit leurs paroles très distinctement : « Stop aux destructions ! Stop à la déforestation ! Sauvons les koalas ! ». Il répétaient ces paroles inlassablement.
De l'autre côté, elle vit de gros engins de destruction, et des hommes avec des haches et des tronçonneuses. Elle comprenait qu'ils devaient faire leur travail, mais comment pouvait-on accepter de faire cela aux koalas, ces animaux si gentils ? Et maintenant, ils disparaissaient de jour en jour, et peu de personnes ne semblaient vouloir s'en préoccuper. La vie était tellement injuste.
Sans hésiter, elle alla voir les ouvriers. Elle ne savait pas si on la voyait. Afin d'en avoir le cœur net, elle décida d'entrer de suite dans le vif du sujet en demandant : « Pourquoi faites-vous cela ? Vous allez détruire des lieux d'habitation ! Et si c'était votre maison qu'on détruisait, comment réagiriez-vous? »
Ils la reluquèrent tous. C'était déjà un bon point pour elle, elle était bien visible. Puis ils lui répondirent : « Nous ne faisons que notre travail. Ce sont les ordres de notre chef. Nous n'avons pas le choix, nous avons aussi des familles à nourrir. Si nous ne le faisons pas, nous ne serons pas payés ! »
Amber comprenait le problème. Pour pouvoir vivre et faire vivre les leurs, ils devaient effectuer leurs tâches quotidiennes. Il fallait donc s'adresser directement à leur chef. Mais avant, elle voulait parler aux militants.
Elle interrompit un des plus âgés, un garçon d'une vingtaine d'années. Elle lui relata ce que les ouvriers lui avaient dit :« Bonjour, je suis militante à vos côtés. J'ai tenté de parler aux ouvriers qui m'ont informé devoir faire leur mission en échange d'argent. Je pense qu'il faut s'adresser directement à leur chef. Vous avez déjà essayé ? Et deuxième question, je ne vois pas les koalas, ils sont où ? J'aimerais tant en voir ! »
Le jeune garçon expliqua : « Merci pour ton soutien jeune fille ! Je m'appelle Justin. C'est le monde qui est comme ça. On travaille pour de l'argent sans réfléchir aux conséquences. Certes, on en a besoin pour survivre. Mais les koalas ont besoin qu'on préserve leurs habitats naturels. Ce n'est pas la première fois que cela se produit. Beaucoup de ces petites bêtes sont déjà mortes à cause de ces hommes. L'homme est devenu un assassin, et nous ne pouvons plus tolérer cela. L'animal a un droit de vie autant que les hommes. Surtout que ces animaux sont inoffensifs. C'est normal que tu ne les voies pas, ils sont tout en haut des arbres, ils se sont abritées à cause de tout ce raffut. Et oui, j'ai déjà parlé au chef, il ne veut rien savoir ! Il est borné ! »
Amber s'indigna : « C'est injuste ! Mais si le chef ne veut pas, il faut s'adresser plus haut ! Par exemple, au directeur de leur société ! »
Une lumière passa dans le regard du jeune homme et il s'exclama :« Tu as raison ! Les autres vont continuer à militer ici, et toi et moi, on va voir ces hommes pour essayer d'avoir un mail ou un téléphone de leur directeur ! Après tout, qui ne tente rien, n'a rien ! »
Justin se dirigea vers les ouvriers. Il entama la discussion :« Bonjour, je m'appelle Justin, et je milite comme tous ces gens ! Je ne suis pas méchant, je souhaite juste qu'on trouve un terrain d'entente ! Vous voulez continuer à rester ici pendant des jours ? Vous n'avez pas trop chaud ? Moi, je trouve qu'il fait une de ces chaleurs ! Vous ne préfériez pas être en terrasse en train de siroter un bon cocktail ? Je pense que j'ai la solution au problème ! Je vous demande juste le numéro de votre directeur et je vais lui parler pour faire cesser ce chantier ? Qu'en pensez-vous ? »
D'abord, ils refusèrent puis l'un d'eux s'énerva : « OK, c'est bon, j'en ai marre d'attendre ici sans rien faire ! On va finir par attraper une insolation ! Je vais leur donner ce foutu numéro et ensemble, on va essayer de régler le problème ! »
Certains répondirent : « Non, ne fais pas ça, on n'a pas le droit, tu te feras virer ! »
Mais il répliqua : « Dans tous les cas, on se fera virer si on ne fait pas notre travail, alors je n'ai plus rien à perdre ! ».
Il sortit son téléphone et appela son directeur. Après plusieurs bips sonores, celui-ci décrocha et cria dans le combiné :« Qui me dérange à cette heure-ci ? Cela a intérêt à être très important, car sinon je vous ferais passer un sale quart d'heure ! »
L'ouvrier l'informa : « Je vous passe Justin, un militant persévérant qui veut vous parler ! Ne m'en voulez pas, je n'ai pas eu le choix ! Bonne journée Monsieur le Directeur ! »
Justin entama la discussion sans attendre : « Bonjour, je me nomme Justin. Je suis un des militants qui passe ses journées à empêcher vos ouvriers de travailler ! Et oui, ce n'est pas simplement des arbres qu'ils vont détruire, mais ce sont aussi des milliers d'espèces ! Êtes-vous prêt à sacrifier les koalas qui sont en déclin à l'heure actuelle ? Pourquoi vouloir abattre tous ces arbres ? Pour votre propre pouvoir ? Ou pour construire de nouvelles habitations ici ? N'avez-vous pas d'autres endroits où faire votre chantier ? »
Furieux, le directeur protesta : « Comment pouvez-vous me parler de cette manière ? C'est moi qui détiens le pouvoir ! C'est mon chantier, je fais ce qu'il me plaît ! Vous n'êtes qu'un pauvre militant ! Une vermine que l'on devrait exterminer ! Que faites-vous à part militer ? Rien ! Pendant que vous militez, je dirige des centaines de chantiers. Et c'est le premier qui me pose problème ! Oui, je travaille pendant que vous bronzez au soleil et que mes hommes poireautent ! Laissez-les donc faire leur travail ! »
Hors de lui, Justin s'écria : « Vous vous entendez là ? Vous vous sentez supérieur à tout le monde ? Vous êtes le roi du monde peut-être ? Non, car il y a des dirigeants et des ministres au dessus de vous ! Et ils commencent à mettre en place des lois pour arrêter vos destructions massives ! »
L'homme d'affaire rigola et s'expliqua : « Non, je ne prétends pas être le roi du monde ! Ils peuvent mettre des lois en place, mais pour l'instant, il n'y a rien, nous sommes dans la légalité ! Nous avons tout à fait le droit de prendre du bois et de construire des villes ! Et toi, as tu eu l'autorisation de venir ici ? »
Justin se justifia : « Oui, nous avons tous une autorisation écrite. Le chantier ne redémarrera pas tant que nous camperons ici ! Et si vous nous assassinez, vous franchirez la case prison directement ! C'est comme au Monopoly, vous le connaissez ce jeu ? Je pense que nous devrions trouver un terrain d'entente ! »
Le dirigeant hésita quelques instants puis proposa un nouveau marché au jeune garçon : « Oui, oui, je connais ce jeu. J'avoue, tu es très fort en affaires ! Je pense que tu me serais très utile sur mes chantiers ! Je te propose une chose, j'accepte d'arrêter celui-ci si tu acceptes de travailler pour moi gratuitement pendant un mois ! Ensuite, si tu fais l'affaire, tu seras mon bras droit, et tu pourras lutter pour ta cause animale...Moi, je construirais mes villes et mes maisons, et toi, tu pourras convaincre les personnes chez qui je t'envoie pour qu'ils me laissent faire ce que je veux sur leur domaine. Par contre, si un lieu est habité par une quelconque espèce, je me désengage sans râler ! C'est à prendre ou à laisser ! Fais bien ton choix, tu n'en as qu'un avant que je passe à l'acte sur ce chantier ! »
Justin réfléchit puis interrogea cet homme un peu manipulateur :« Qui me dit que vous écouterez ce que je vous dis ? Et s'il y a des animaux sur chaque parcelle, vous vous désengagerez à chaque fois ? Où est le piège ? »
L'homme stipula sans hésiter : « Ah, nous y venons alors ! Tu as raison d'être prudent ! Oui forcément, ce doit être rentable pour moi ! Je dois faire au moins soixante-quinze pour-cent de chiffres d'affaire chaque mois ! Donc tu as une marche de manœuvre de vingt-cinq pour-cent, ce qui signifie que tu peux refuser que vingt-cinq pour-cent de mes chantiers. Par exemple, si j'ai huit chantiers à faire tourner dans le mois, tu peux seulement en refuser deux ! C'est déjà pas mal ! Et c'est des mathématiques, donc comme tu es calé en affaires, tu devrais savoir compter ! Et tu peux aussi me proposer des endroits qui sont libres pour construire ce que je souhaite ! Alors qu'en penses-tu ? Si tu refuses, je tuerai sans vergogne tous ces petits animaux que tu apprécies tant ! Je te laisse une heure pour réfléchir et je te rappelle sur ce téléphone ! À tout à l'heure ! »
Justin expliqua à Amber, aux ouvriers et aux militants ce que lui avait proposé le dirigeant puis il leurs demanda leurs avis.
Les ouvriers ricanèrent : « Ah, notre dirigeant, c'est le diable ! Pas sûr qu'il tiendra ses promesses ! Mais as-tu vraiment le choix ? »
Justin se prit la tête entre les mains et marmonna : « Je ne sais pas ce qu'il risque de me faire endurer ! Mais ces koalas et toutes les bêtes du monde en valent la peine ! Si je refuse et qu'à cause de moi, des espèces meurent, je m'en voudrais toute ma vie ! Et je suis capable de vivre avec un rien alors travailler gratuitement à l'essai, c'est faisable ! Qu'en penses-tu, Amber ? »
Amber savait exactement comment cette histoire se terminerait,mais elle ne pensait pas qu'on lui demanderait son avis. Jamais personne ne l'avait interrogé de la sorte. En allant plus loin, jamais personne ne l'avait regardé avec autant d'insistance en lui faisant comprendre que son avis comptait plus que tout ! Elle, une enfant, rejetée de tout le monde ! Elle avait l'impression que c'était le monde qui tournait à l'envers et ses livres à l'endroit ! Si seulement, c'était pareil dans la vraie vie ! Ce serait merveilleux d'avoir des amis qui comptaient sur elle.
Justin la voyant pensive, insista : « Amber ? Tu es toujours là ? J'ai besoin de toi ! Je sais que tu es jeune, mais tu sembles tellement mature et tu as l'air de trouver des solutions aisément ! Qu'en penses-tu ? Est-ce le bon choix ? »
Amber s'excusa et répondit : « Désolé, c'est la première fois qu'on me demande mon avis ! Je suis toujours la fille avec qui personne ne veut discuter alors ça me paraît étrange ! Mais pour te répondre, il faut suivre ton cœur ! Si en travaillant avec ce Monsieur, tu peux sauver des milliers d'animaux, alors suit ce chemin. Et peut-être qu'un jour, tu seras dans les journaux et qu'on te félicitera pour ton engagement envers les diverses espèces animales ! »
Justin la regarda attentivement, puis la prit dans ses bras :« Je vois dans ton regard et dans tes mots, une souffrance. J'en suis désolé que tu souffres alors que tu es si jeune ! Je militerais aussi en ton nom, car tu m'as apporté beaucoup de soutien ! Et il n'y a pas d'âge pour donner son avis ! Je vais faire le nécessaire pour aider le maximum d'espèces, mais je doute que mon nom soit un jour cité quelque part ! Je ne suis qu'un jeune homme lambda ! »
Amber avoua : « Crois-moi, un jour, tu seras célèbre ! Je le sens ! Tu fais le bon choix ! Tu gagneras des batailles, tu seras un grand homme avec un cœur immense ! Ne l'oublie pas ! »
Il hocha la tête. Quelques minutes plus tard, il répondit sur le téléphone de l'ouvrier. Avant même que le dirigeant parle, Justin affirma sans une once d'hésitation : « J'accepte votre marché, mais je veux un chauffeur personnel ! Vous comprendrez bien que je n'aurai pas le budget si je travaille gratuitement ! »
Le dirigeant accepta cet accord et il demanda à ce qu'on lui repasse l'ouvrier. Il discuta avec ce dernier : « Je ne connais pas ton nom, mais tu as gagné une promotion... Tu seras l'ouvrier personnel de Justin et son chauffeur ! Tu ne feras plus de travaux, tu le conduiras où je lui demande d'être et tu superviseras avec lui les chantiers ! Félicitations à toi ! Il faut parfois oser prendre des risques, et tu l'as fait ! Tu peux dire à ces hommes que le chantier s'arrête ici et aux militants qu'ils ont eu gain de cause ! Continue dans ce sens avec ce jeune garçon, vous formerez un duo de choc... »
Sans le savoir, il venait de celer son destin à celui de Justin. Leurs vies seraient à jamais entremêlées. À eux deux, ils avaient contribué à sauver des koalas ! Qui sait où leur prochaine mission les mènerait ?
Amber interpella Justin et lui annonça : « Je dois partir ! Désolé, je ne peux pas rester plus longtemps ! Le temps passe vite, et je sens que ma mission va s'arrêter là !J'ai été contente de faire ta connaissance. J'espère qu'on se reverra bientôt ! »
Justin la serra à nouveau dans ses bras et lui assura : « Je suis content également de t'avoir rencontrée, dommage que tu ne puisses pas m'accompagner plus loin ! J'aurais aimé que tu puisses voir une de ces créatures... »
Juste au moment où il prononça cette phrase, un koala descendit d'un arbre et sauta au pied de Justin. Puis il remonta sur son arbre aussi vite qu'il était apparu. Amber n'en revenait pas !
Amber s'exclama : « Oh, je n'en reviens pas ! Il est venu exprès pour me saluer ! C'est une chance inespérée pour moi ! J'ai enfin pu en admirer un même si c'était quelques secondes ! Merci Justin ! Grâce à toi, un de mes rêves se réalise ! Voir un koala dans son habitat naturel ! »
Justin se défendit : « Mais je n'ai rien fait, c'est ce koala qui a tout fait ! »
Amber ajouta : « Merci petit Koala de t'être montré, c'est très gentil ! Prends soin de ta famille et de tes amis ! Au revoir ! »
Avant qu'elle ne parte, Justin la mit en garde : « Attention à toi ! Ne laisse jamais personne te dire que tu n'as pas le droit de donner ton avis ! Ton avis compte tout autant que celui d'une autre personne ! Personne ne peux te réduire au silence ! Ne te laisse pas faire ! Tu auras des combats à mener et tu dois avoir foi en toi et en tes capacités ! Tu es exceptionnelle ! Crois en toi Amber ! À bientôt et reviens quand tu veux ! »
Un vent chaud se leva et Amber s'éclipsa sous les yeux ébahis de Justin. Elle revint devant cette histoire qu'elle avait adorée. Elle avait rencontré des personnages extraordinaires, et contre toute attente vu un koala pour la première fois ! L'action s'était déroulée en seulement deux heures devant ses yeux d'enfant éberlué, et elle avait réussi sa première mission avec succès. Elle se doutait qu'elle visiterait d'autres livres et qu'elle rencontrerait d'autres personnes, peut-être des amis en or, qui sait ?
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