En se réveillant le lendemain matin, Amber avait l'impression que son cœur était empli de tristesse. Elle avait quitté un monde qu'elle connaissait à peine, et surtout une amie en or, pour se retrouver ici, au beau milieu de cette maison et de parents avec lesquels elle avait très peu de contacts. Depuis qu'elle avait eu son premier livre entre ses mains, ils s'occupaient à peine d'elle. Un fossé s'était creusé entre eux. Se préoccupaient-ils vraiment d'elle ?

Totalement à bout de forces, elle essaya de se lever, mais ses jambes refusèrent de faire ce travail. Elle ressentait un énorme poids l'alourdir. Elle décida de rester allongée dans son lit sous ses couvertures moelleuses un petit moment. De toute manière, elle se disait « À quoi bon se lever un lundi matin ? Pour encore aller à l'école ! ».

Amber n'était pas du genre à se laisser aller à ses émotions. Elle allait toujours de l'avant. Mais là, ses émotions avaient pris le dessus, et elle n'arrivait plus à y faire face. Elle espérait que ses parents soient déjà partis travailler pour la laisser seule face à ce désespoir immense.

Cette prière n'aboutit pas et une mère furieuse entra précipitamment dans sa chambre sans toquer :

« Amber ! Lèves-toi ! Que fais-tu encore dans ton lit ? Tu dois te dépêcher ! Habille-toi et plus vite que ça ! Dois-je te rappeler qu'on est mardi et que tu as école aujourd'hui ? »

Amber marmonna : « Non, je sais ! Mais je n'arrive pas à me lever ! »

Sa mère Lise, s'écria : « C'est quoi encore cette excuse bidon ? Tu es tombée sur la tête ou quoi ? Je suis sûre que tes jambes fonctionnent très bien ! Tu nous fais juste ton air de petit chien battu pour réussir à nous amadouer ! Mais cela ne fonctionne pas avec nous ! Tu dois y aller, et puisque tu n'es pas pressée, tu sauteras ton petit-déjeuner !».

Elle était hors d'elle. Elle tira sur le bras de sa fille qui en tomba à la renverse. Amber essaya de se lever, mais ses jambes la lâchèrent.

Sa mère se précipita sur elle pour la relever : « Tu en fais des manières pour ne pas aller à l'école ! »

Amber furieuse, répondit : « Et toi, pourquoi es-tu si méchante avec moi ? Et pourquoi mettre autant de distance entre vous et moi ? Qui suis-je pour vous ? Suis-je vraiment votre enfant ? »

Sa mère la prit sur ses genoux comme si de rien n'était : « Ah, c'est donc cela ? Tu crois vraiment qu'on te cache quelque chose ? Pourtant, tu es bien ma fille ! J'ai des photos de toi bébé ! Vérifie si tu veux ! Arrête de croire n'importe quoi ! Je ne sais pas qui te montes la tête, mais tu devrais arrêter et aller de l'avant ! On s'occupe de toi, à notre manière, et désolée si cela n'est pas suffisant pour toi. On fait ce que l'on peut lorsque l'on travaille. Rien n'est facile dans la vie. J'aimerais pouvoir rester avec toi toute la journée, mais ce n'est pas possible ! On essaye de te laisser de l'espace. On ne veut pas être sans arrêt sur ton dos, tu es grande et en mesure de prendre un peu sur toi. Tu dois prendre ton envol jeune fille. D'ailleurs, on avait un cadeau pour toi pour te prouver notre amour...mais si tu n'en veux pas, je peux le ramener ! »

Curieuse, Amber demanda : « Elles sont où ces photos de moi ? Il n'y en a pas dans la maison ! C'est quoi ce cadeau ? »

Sa mère expliqua : « OK, il est temps que tu saches. Lorsque tu n'étais encore qu'un bébé, notre ancien logement a brûlé ainsi que toutes nos photos. C'est pour cela qu'il n'y en a pas dans la maison. C'est le genre d'accident domestique qui ne doit pas arriver. Mais voilà, j'étais épuisée par les nuits à m'occuper de toi et par les journées de travail à rallonge. J'ai oublié d'éteindre le four et l'incendie s'est déclaré ! Du coup, ton père et moi t'avons sauvé en priorité. Les photos ont été détruites. Il n'en reste qu'une seule dans mon portefeuille... Je suis navrée, on ne voulait pas t'en parler. C'était un événement très traumatisant pour nous. On a tout perdu. C'est aussi pour cela que nous t'avons a un peu délaissé. On devait travailler davantage pour pouvoir payer les factures qui nous tombaient dessus. Et quand tu étais devant un livre, tu avais l'air ailleurs, alors on s'occupait pendant que tu dévorais tes livres. Et comme tu aimes lire, on a trouvé un nouveau livre qui devrait te plaire 'La prophétie de la louve blanche'. Ça t'intéresse ou je le ramène ? »

Amber se sentait honteuse d'avoir douté de ses parents. Ils avaient tout fait pour elle et voilà  comment elle les remerciait. Était-elle une fille ingrate ?

Voyant l'air peiné de sa fille, Lise câlina sa fille et s'excusa :« Je suis désolée d'avoir mis autant de distances entre nous. Je vois à quel point cela te chagrine. J'aurais dût te révéler ce secret bien avant. J'avais peur de te le dire, que tu me prennes pour une mauvaise mère, une incapable. J'espère que tu me pardonneras d'avoir fait autant de mystères. Je te propose qu'on se fasse une journée entière entre mère et fille aujourd'hui. Je prétexterais que tu es malade. On rattrapera le temps perdu. Je te donnerais le livre et tu pourras en choisir d'autres. Qu'en penses-tu ? »

Ravie, Amber sauta de joie. Elle n'aurait pas espéré recevoir autant d'attention. Elle cria : « Oh, merci maman ! J'ai vraiment cru que je n'étais rien pour vous et que je n'étais pas votre fille ! »

Lise regarda sa fille droit dans les yeux, l'air un peu ennuyée d'entendre cela et affirma : « Toi, à force de lire des livres, tu as trop d'imagination ! Quelle idée saugrenue quand même ! Allez, va déjeuner et après, on sort ! »

Amber courut vers la cuisine et mangea rapidement une barre de céréale.Elle était pressée de passer cette journée en tête-à-tête avec sa mère !