Cette bruyante agitation attira le dictateur. En arrivant devant cette maison, une colère noire s'empara de lui. Sa fureur était si grande qu'on avait l'impression de voir danser des flammes  à l'intérieur de ses yeux. Ces dernières semblaient prêtes à être lancées sur le public. Terrorisée par cet homme, Amber avait choisi de rester cachée derrière ce public.

Sans attendre, il prit la parole avec une animosité dans la voix :« QUE VOUS ARRIVE T-IL MES CHERS COMPATRIOTES ? VOUS DOUTEZ DE MOI ? POURTANT JE N'AI RIEN FAIT ! J'AI EMPRISONNÉ TOUS CES GENS À VOTRE DEMANDE ! »

Le docteur Edgar Maurice hurla : « VOUS N'AVEZ RIEN FAIT ? VOUS ÊTES SÛR ? VOUS ALLEZ ME DIRE QUE CE JEUNE HOMME S'EST EMPOISONNÉ TOUT SEUL ? DITES MOI ALORS COMMENT IL A FAIT ? »

Le dictateur émit un petit rire diabolique et avoua : « Ah, si c'est juste cela que vous me reprochez, ce n'est pas si grave ! Effectivement ce jeune homme s'est empoisonné tout seul. Il a tenté de s'enfuir de sa prison, et il a eu le châtiment que je réserve aux évadés de notre justice ! De toute manière, il devait mourir par bûcher dans un mois ! Aujourd'hui ou demain, qu'est-ce que ça change ? Ça revient au même. La justice a été rendue, il doit mourir ! Maintenant, si vous voulez, je peux accélérer sa mort et le faire brûler sur le bûcher maintenant, qu'en pensez-vous ? »

Le médecin de famille s'exclama : « Mais, vous êtes ignoble ! Donnez-nous le remède maintenant, et nous ne vous en tiendrons pas rigueur ! Laissez-le vivre et on oubliera cet épisode ! »

Le dictateur ria à nouveau et rétorqua : « Mais, il n'y a pas de remède ! C'est un nouveau poison que j'ai trouvé dans un marché illégal tout près d'ici. Je ne sais donc pas ce qu'il contient ! Mais ne vous inquiétez pas, bientôt il ne souffrira plus ! Il partira en paix, et d'autres suivront ! D'ailleurs je vais m'empresser d'aller allumer le bûcher ! La sorcière sera sacrifiée aujourd'hui, comme ça elle rejoindra son jeune ami dans la mort... Votre cher Farid ne sera pas seul à affronter les démons de la mort, je vous le jure ! »

Les habitants présents crièrent leur mécontentement. Un gros brouhaha retentit et Amber entendit quelques bribes de paroles : « NON, IL NE PEUT PAS FAIRE ÇA ! » « NON, C'EST LUI QUI DOIT BRÛLER ! » « ON DOIT AIDER » « ATTACHONS-LE »...

C'était devenu un tel vacarme que le dictateur en profita pour s'éloigner à pas de souris. Le médecin s'écria : « LE DICTATEUR ESSAYE DE S'ENFUIR ! STOPPONS LE ! »

Les villageois coururent de manière désordonnée, chacun de son côté pour essayer d'intercepter cet individu machiavélique. Amber regardait la scène comme si elle était au théâtre. C'était pour elle une scène unique, du jamais vu !

Finalement, personne n'avait réussi à l'intercepter, il était déjà parvenu dans sa demeure hautement sécurisée. Amber se dirigea vers la maison de ce monstre. Elle voulait faire quelque chose, mais elle ne savait pas encore quoi !

Il profita que tous étaient rassemblés autour de sa maison pour annoncer haut et fort : « Jeunes gens, bienvenus chez moi ! Je vais vous préparer un beau spectacle ! Regardez bien attentivement. Dans mon jardin, j'ai préparé un poteau. Je vais y attacher la sorcière et ensuite j'allumerais les flammes pour qu'elle brûle ! Vous serez témoins de sa mort ! C'est ce que vous aviez demandé, il me semble, non ? »

Des cris fusèrent dans le public : « NON ! NE FAITES PAS CA ! » « ARRÊTEZ ! » « RELACHEZ-LÀ! » « LAISSEZ LA VIVRE ! » « NON, NOUS NE VOULONS PAS SA MORT ! »

Le dirigeant s'écria : « MAIS, IL EST TROP TARD ! SA MORT EST IMMINENTE ! ELLE N'A QUE CE QU'ELLE MÉRITE ! N'OUBLIEZ PAS SA VISION QU'ELLE A CRÉÉE POUR VOUS FAIRE PEUR ! IMAGINEZ QUE CELA SE PASSE ! ELLE VEUT VOTRE MORT À VOUS TOUS ! JE NE PEUX PAS ENVISAGER CELA ! JE VEUX JUSTE VOUS PROTÉGER DE CE FUNESTE DESTIN ! GRACE À SA MORT, PLUS RIEN NE POURRA VOUS ARRIVER ! »

Le dirigeant entra dans sa maison et en ressortit avec Esméralda. Il l'attacha sur le poteau et lui chuchota à l'oreille : « tu peux remercier tes chers amis et ton peuple ! Grâce à eux, tu vas aller brûler en enfer plus vite que prévu ! Ta mort est imminente ! Tu peux crier, personne ne viendra t'aider, ils ont tous peur de moi et des flammes aussi ! »

Pour toute réaction, elle lui cracha au visage. Il s'essuya du revers de son pull noir et lui indiqua : « Puisque tu ne sais pas garder ta salive pour toi, je vais te bander la bouche avec ce foulard ! Au moins, plus rien ne sortira de ta bouche, et on entendra presque pas tes cris d'agonie ! Allez, je te laisse sur le poteau de l'enfer ! Meurt sorcière ! »

Il alluma les flammes en bas du pilier et le brasier commença son chemin. La sorcière était terrorisée. Elle essaya de parler, mais le foulard bloquait la moindre petite parole. Elle sentait l'odeur de la fumée arriver jusqu'à ses narines. Elle devait tenter une dernière chose avant de sombrer. Elle ferma les yeux et imagina Amber. Puis elle tenta de lui envoyer un message télépathique :« Amber, je suis contente d'avoir fait ta rencontre ! Il faut que tu sauves Farid et les villageois ! Une fois morte, je ne pourrais plus rien pour eux ! Merci à toi pour ton aide si précieuse, continue ton chemin vers d'autres univers ! »

Amber avait bien entendu les paroles de la sorcière, mais elle ne pouvait pas la laisser mourir ! Elle fit le tour de la maison et découvrit qu'il manquait une brique dans l'un des murs. Elle appela en renfort plusieurs hommes du village et leur demanda de l'aider à démolir ce mur qui avait une faille. Ensemble ils essayèrent de pousser sur ce mur, mais il était trop solide. Puis ils tentèrent d'enlever les briques une par une, mais elles étaient bien fixées.

L'un d'entre eux murmura : « Il nous faut des outils, ou une force surhumaine ! Quelqu'un a t-il ça chez lui ? ».

Un autre répondit : « J'ai des marteaux chez moi, on peut essayer ! » Il se sauva et revint quelques minutes plus tard avec tout un ensemble de marteaux. Chacun en prit un, et ensemble ils tapèrent sur le mur qui s'effrita petit à petit. D'un coup, le mur éclata en morceaux, et les hommes se dépêchèrent de pénétrer dans le jardin de cette vaste demeure.

Ils arrivèrent près du poteau enflammé. Ils n'avaient plus de temps à perdre, la sorcière s'était déjà évanouie ! Ses chaussures étaient en train de cramer. Avec l'un des marteaux, ils tapèrent plusieurs fois sur l'une des menottes au niveau des pieds qui céda sous l'impact. Puis ils firent de même avec celle présente au niveau des bras. Le dirigeant s'était déjà enfuit, et personne ne savait où ! Les villageois portèrent la sorcière jusqu'à la maison de Farid. Ils l'allongèrent sur le canapé et lui humidifièrent ses lèvres et son visage. Petit à petit, elle reprit ses esprits et les remercia tous du fond du cœur.

On dit toujours que rien n'arrive par hasard, comme si tout était calculé d'avance par le destin et que si deux événements ont lieu,il y en aura forcément un troisième qui surviendra. C'est exactement ce qui se passa l'instant d'après.

Presque tous s'étaient réjouit de cet heureux dénouement. Certains étaient en train de boire pour fêter cet événement et la fin de cette tyrannie. Puis un cri à l'extérieur les interpella tous. Une femme criait qu'un avion survolait leurs maisons. Ils devaient tous fuir mais pour aller où ?

La sorcière leur cria : « Je vous avais bien dit que ce drame arriverait ! Je ne mens jamais ! Je vais vous aider une nouvelle fois ! Fuyez ! Ma maison sera la seule à l'abri de ce crash. Je vous invite tous même si elle n'est pas très grande ! »

Tous coururent, complètement paniqués, vers la maison de la sorcière.Ils abandonnèrent la sorcière ainsi que Farid et sa famille. La sorcière se leva avec difficultés et invita les parents de Farid à la rejoindre avant que la catastrophe ne s'abatte sur cette maison. Farid fut porté par son père, puis tous dévalèrent le chemin menant à l'habitation de notre sorcière.

Quelques minutes plus tard, ils entendirent un gros boum. L'avion avait finalement réussit à atterrir précipitamment à côté de la maison de Farid. Les ailes de l'avion étaient en flammes et il ne restait que des miettes des maisons alentour.

Les villageois étaient retournés sur place pour aider les personnes de l'avion à en descendre et pour tenter d'éteindre les flammes.

Farid était toujours en mauvais état. Il était pâle et son teint devenait grisâtre. Il murmurait des paroles incompréhensibles. Sa mère pleurait à son chevet. Elle s'excusait auprès de lui pour l'avoir laissé seul tant de temps et pour ne pas l'avoir aidé dans ce combat. Elle demanda alors à la sorcière : « N'avez-vous pas un remède magique, vous qui avaient tant de savoirs inconnus de nous tous ? »

La sorcière s'éloigna du lit de Farid et parcourut les étagères de sa bibliothèque à potions. Elle trouva une potion contre les empoisonnements et venins mortels. Elle pensait qu'un venin était susceptible d'être à l'origine de ce mal qui rongeait ce garçon.

Elle administra trois gouttes et tous attendirent de voir le résultat.Ils croisèrent les doigts pour que ce remède fonctionne car c'était sa dernière chance. La sorcière ressentait la mort s'approcher à petits pas.

Le teint de Farid reprenait quelques couleurs. La potion faisait effet,mais cela prendrait un peu de temps avant qu'il revienne à lui et qu'il reprenne des forces.

Esméralda annonça : « Le remède fonctionne, il reprend des couleurs. Il faudra un peu de temps avant qu'il ne rouvre les yeux.Mais soyez rassurés, je vais veiller sur lui. Ceux qui veulent aller aider les voyageurs de l'avion, allez-y. Ils auront besoin d'aide et surtout de réconfort. »

Les parents de Farid s'éloignèrent, rassurés que leur fils soit entre de bonnes mains.

Amber était elle aussi rassurée de l'état de Farid. Elle avait hâte de le voir ouvrir ses yeux et de pouvoir lui parler.

Esméralda en profita pour serrer contre elle Amber et lui exprima toute sa gratitude « Amber, je te remercie pour l'aide que tu nous as apporté mais surtout de m'avoir sauvé des flammes ! Je te serais éternellement reconnaissante ! »

Amber s'étonna : « Mais je n'ai presque rien fait ! C'est vous qui avez sauvé toutes ces personnes. Moi j'ai juste aidé les villageois à trouver leur mission. »

Esméralda la fixa attentivement et lui affirma : « Au contraire, tu as joué un rôle central, tu es destinée à aider beaucoup de monde ! Farid pourra te le confirmer quand il se réveillera ».

Juste à ce moment-là, Farid ouvrit les yeux. La sorcière les laissa un peu seuls. Juste au moment où elle sortit de la pièce, une nouvelle vision s'empara d'elle.

Farid prit la main d'Amber et il articula difficilement : « Je suis d'accord avec la sorcière, tu es quelqu'un de bien. Tu m'as sauvé lorsque nous sommes devenus invisibles... Tu es quelqu'un d'exceptionnelle, ne l'oublie jamais »

Amber le prit dans ses bras. Elle était contente de retrouver ce nouvel ami. C'était même plus qu'un ami. Son cœur tambourinait dans sa poitrine quand elle pensait à lui et une lumière nouvelle brillait dans ses yeux. Elle ne connaissait pas encore ce sentiment étrange. Une larme coula sur sa joue à l'idée de devoir l'abandonner ici, mais il lui restait encore du chemin à parcourir. Peut-être pourra-t-elle revenir le voir dans un avenir proche lorsqu'elle sera un peu plus âgée ?

Elle enserra Esméralda et s'excusa de devoir partir. La sorcière lui attrapa la main avant qu'elle ne parte et s'écria :« TROUVES-LÀ ! »

Amber ne comprenait pas ces mots. Elle interrogea la sorcière : « Qui dois-je trouver ? Je ne comprends rien à votre demande ! »

A cette question, la sorcière expliqua : « J'ai eu une vision pendant que tu étais seule avec Farid. Tu dois trouver la sauveuse ! Celle qui a le remède en elle ! Elle doit sauver tous ces gens ! Le temps leur est compté ! »

Amber l'interrompit : « Mais quelle sauveuse ? Il va se passer quelque chose chez moi ? »

La sorcière précisa : « Non, rassure-toi, ta famille va très bien. J'ai vu que tu voyageais dans différents mondes... Dans ton prochain voyage, tu devras trouver cette fille rapidement. Le sort de ce monde dépendra de tes talents de persuasion. Tu es une passeuse de mots, une sorte d'intermédiaire. Tu as ce don en toi. Tu vas aider à ta manière les gens des différents mondes que tu parcourras. Tu es l'élément qui relie les héros et les actions. Souviens-toi en et sers toi de ce don. Tu es unique ! Et à ma connaissance, il n'y a jamais eu d'autres personnes comme toi ! »

Amber ne saisissait pas tous les enjeux dont parlait Esméralda mais elle acquiesça tout de même. Puis elle fit un signe de la main à Farid. C'était douloureux pour elle d'être loin de cet être pour qui elle éprouvait quelque chose de nouveau. Elle ne voulait pas qu'il s'en rende compte. Elle s'assit à terre et se concentra. Des lumières l'entourèrent et elle s'éclipsa. En arrivant dans sa chambre, elle ferma ce livre et décida de le poser à côté de sa table de chevet puis s'endormit d'épuisement dans son lit.