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Prologue

Trigger warning pour le prologue ! (violence et descriptions susceptibles de choquer)

Jonathan a mal aux fesses. Assis depuis une vingtaine de minutes sur le sol humide de l'embarcation, une désagréable pointe de douleur commence à lui engourdir les muscles. Le jeune homme se remue, mal à l'aise, dans l'espoir de se soulager. Mais, écrasé entre deux autres soldats, il a déjà à peine l'espace de respirer. Vu les relents qui hantent leur rafiot, c'est peut-être pour son plus grand bien.

Devant lui, quelqu'un se redresse brusquement et vomit à ses pieds ce qui lui reste dans l'estomac. Plusieurs grimaces dégoûtées se gravent sur les visages. Les soldats écartent leurs bottes des restes à moitié digérés. Même si tous savent que dans quelques minutes, le vomis sera le cadet de leur soucis et la moins inconvenante des odeurs.

Jonathan détourne la tête pour échapper à cette vision qui lui enserre les tripes. Le goût du sel lui brûle la langue et ses yeux exposés aux intempéries s'insurgent à coup de larmes rebelles. Il est bien loin son Texas natal, ses grandes plaines où la légère brise chaude couche les herbes et caresse la peau. Le vent d'ici fouette sans pitié son visage déjà rougi par le froid. Il n'est ni doux ni chaud, mais violent et glacial. Comme tout ce qui l'entoure en somme : infernal.

Pour tenter de s'évader, rien qu'un instant, Jonathan lève les yeux vers le ciel. De la même teinte que la mer agitée, gris dépourvu de nuances, il est aussi morose que cette journée de juin. Son petit frère lui a souvent demandé si le ciel était le même partout. En riant, Jonathan lui a toujours répondu que rien ne valait le beau bleu azur du Texas. Aujourd'hui, il confirme sa réponse initialement ironique. Pourtant, jamais il n'aurait imaginé que cette couleur et la chaleur étouffante de sa région lui manqueraient tant.

De temps à autres, un goéland traverse cette vaste étendue gris pâle en poussant un cri strident, brisant le silence installé depuis le départ. À ceci s'ajoute l'angoissant fracas des vagues sur la coque, éclaboussant les soldats déjà trempés jusqu'aux os. De là où il est, le bruit des combats lui parvient en brouillard étouffé. Presque irréel...

Jonathan frissonne. Il a froid. Il a peur. Il est terrifié. Mais il ne le montre pas. Exprimer sa peur lui donne un ancrage réel. Il ne lui faudra alors que quelques secondes pour, telle une épidémie, se répandre dans le rafiot. Dans un geste plus mécanique qu'utile, Jon' remet son casque qui a glissé sur son oreille droite. Son regard clair se pose sur les visages plus ou moins impassibles des soldats présents à ses côtés. Les yeux baissés vers le sol, personne ne parle et encore moins ne bouge. Chacun attend, prie, se souvient.

Le jeune homme se soulève légèrement pour soulager son postérieur qu'il ne sent presque plus. Ses pensées virevoltent, véritables oiseaux enfermés qui se posent sur tout ce qui l'entoure, évitant sciemment la seule branche morte, la seule qui entraînerait sa chute s'il venait s'y intéresser : leur destin imminent.

Il est six heures trente du matin. Le trajet a été calculé comme devant durer un peu plus de deux heures au total. Mais lorsqu'il est descendu dans cette barque, Jonathan savait que l'enfer n'était plus qu'à une petite demi-heure de lui. Les côtes françaises ne devraient donc pas tarder à se dessiner dans la brume. Dans une dizaine de minutes, ils poseront normalement le pied sur le sable des plages. Si tout va bien... Mais aucun soldat présent n'est dupe. Ils sont en guerre. Rien ne peut aller bien.

Jonathan a vingt-et-un ans depuis le neuf avril. Avant la guerre, il voulait être restaurateur. Il aimait préparer toutes sortes de plats avec une prédilection pour les desserts. Il était capable de s'enfermer plusieurs heures dans la cuisine au grand dam de sa sœur pour préparer le dîner. À présent, le soldat a tellement mangé que son estomac tolère difficilement les remous incessants et il ignore même s'il sera encore en vie à sept heures.

Comme tout le monde autour de lui, Jonathan connaissait les risques en s'engageant dans cette opération. Il n'a jamais douté de la justesse des objectifs de leur patrie. Depuis plusieurs années, il a entendu, d'une oreille distraite, les parties extrémistes monter et un climat de tension s'installer en Europe. Mais pourquoi intervenir dans une guerre qui n'était pas la leur ? Pourquoi aller mourir dans des pays à qui ils ne devaient rien ? Le leur peinait déjà à se relever de la crise de 29, ce n'était pas pour dépenser dans un combat qui ne leur apporterait que souffrance et mort. C'était du moins le point de vue de Jonathan jusqu'au 7 décembre 1941. Une attaque éclair, sans préambule ni avertissement, d'une lâcheté abominable. En un mot, une déclaration de guerre.

Et le voilà, ici, trois ans plus tard, toujours en adéquation avec les idées de sa patrie. Mais maintenant que son avenir est sur le point de s'effondrer, il se demande à quoi sert tout ceci. Quand l'homme retiendra-t-il enfin la leçon ? Cessera-t-il un jour de se détruire ? À quoi bon se battre pour une paix condamnée à être éphémère ? Après l'horreur de la Grande Guerre, le monde a juré de ne jamais recommencer. L'humanité n'a pas tenu cinquante ans avant de réitérer. C'est pitoyable. Les humains sont pathétiques. Pourquoi ne pas s'unir contre, par exemple, la grippe espagnole qui a ravagé presque autant de familles que les combats vingt ans plus tôt ? Au lieu de concentrer les efforts pour produire des armes qui arracheront plus de vies encore... À l'aube du Jour-J, grelottant et nauséeux, Jonathan s'interroge.

Puis soudain, il sent ses compagnons d'armes se crisper près de lui. Il relève la tête. Au large, une pâle forme apparaît dans la grisaille. Les traits des côtes s'affirment au fur et à mesure que leur embarcation s'approche. Le brouhaha et l'horreur des combats, de la mort se dessinent devant ses yeux horrifiés.

À leur vue, Jonathan oublie tout. Il oublie sa vie passée et regrettée, il oublie le temps maussade si loin du Texas. Il oublie l'odeur de vomi et la brûlure du sel. Il oublie même sa douleur. Plus rien d'autre ne compte que ces points noirs qu'il distingue sur la plage et au-dessus, que ces balles canardant des hommes à terre aux entrailles déjà éparpillées.

Il observe de loin ces corps brisés, écorchés que la vie a déjà déserté. Il imagine les bras, les jambes, les têtes échouées loin de leurs propriétaires. Jonathan n'ose penser à ce que leur famille recevra. Il contemple la mer jusqu'à alors si grise devenir peu à peu rouge sang, aux abords des barbelés, par les corps mutilés qui se noient en son sein. Jonathan aimerait fermer les yeux, mais il en est incapable. Il s'imbibe de cette horreur, de cet enfer qu'on ne peut décrire avec de simples mots.

Ils devaient débarquer à marée basse, mais avec le temps, les eaux se sont avancées, diminuant leur temps de marche sur le sable à découvert, multipliant par quinze le risque de mourir avant de quitter ce rafiot transformé en corbillard. Si bien que, lorsque le pont en fer tombe, s'ouvrant sur une mer qui lui parait soudain bien hostile, Jonathan sait ce qu'il a à faire. Avancer et ne pas mourir. Mais surtout avancer... Toujours avancer...

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