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Chapitre 3.1: Endeuillée

Lanaya

Depuis mes dix ans, deux fois par mois, ma mère me réveille en pleine nuit, en me secouant brutalement.

Je me souviens parfaitement de la première fois où elle m'a tirée du lit. Je me souviens de ma peur lorsqu'elle a hurlé qu'on devait fuir le plus loin possible de cet endroit. On était en novembre. Il faisait froid dans l'appartement. Je m'étais couchée tôt car le lendemain, je commençais par une évaluation de maths. Je me souviens de la terreur qui hantait ses prunelles quand elle m'a mis entre les mains un sac, me priant de la rejoindre le plus rapidement possible dans la voiture. J'étais jeune et encore endormie, si bien que je n'ai pas tilté lorsqu'elle m'a laissée seule avec ma terreur. Je n'ai pas compris, sur le coup, que jamais elle n'aurait déserté l'appartement sans moi si nous avions vraiment été en danger. Quand je suis enfin sortie de ma transe, je me suis levée d'un bond et ai fourré les premiers vêtements qui me tombaient sous la main dans le sac. Je n'ai même pas songé à prendre des chaussures, mon esprit brouillé par la panique.

Je me souviens de mon cœur battant, de ma frayeur, de la manière dont je serrais la bretelle de mon sac à dos à en avoir mal.

Je me souviens de la descente chaotique dans le noir jusqu'au garage car j'avais oublié d'en allumer la lumière.

Je me souviens d'autant plus du regard tranquille de ma mère, adossée contre la portière, son téléphone à la main.

Je n'ai pas compris quand elle m'a annoncé que j'avais mis quinze minutes à la rejoindre. Je croyais que nous devions fuir alors pourquoi est-elle si calme ? Je me souviens de ma peur panique. Dire que j'étais terrifiée est un pauvre euphémisme comparé à ce que j'ai ressenti cette nuit-là. Il a fallu qu'elle m'explique plusieurs fois que ce n'était qu'un exercice, que je ne craignais rien, avant que j'accepte à contre-cœur de lâcher le sac. Bien entendu, quand la tension est redescendue, la colère, elle, est montée en flèche. Je l'ai traitée d'inconsciente, de folle, de mauvaise mère et de plein d'autres mots qu'une fille de douze ans est capable de balancer sous le coup d'une émotion. Et évidemment j'en ai eu des remords toute la nuit, si bien que le lendemain matin, je me suis platement excusée.

Le sourire de ma mère quand elle m'a dit que, la prochaine fois, il valait mieux que je prenne la fuite en jean plutôt qu'en short et tee-shirt Marvel restera gravé dans ma mémoire. Piquée au vif, je lui ai alors rétorqué que quitte à abandonner quelque chose derrière moi, je préférais que ce soit ma dignité plutôt que ma vie. Elle a ri.

Depuis ce fameux soir, ma mère m'entraîne à la fuite deux fois par mois. Je ne sais jamais quand ça va me tomber dessus, mais c'est toujours en pleine nuit. Au fil des années, elle a fini par compliquer les choses en augmentant la distance que je devais parcourir pour la rejoindre, en rajoutant des obstacles, allant jusqu'à me poursuivre en voiture. Ces courses nocturnes ont l'avantage d'avoir développé mon agilité, mon endurance et ma rapidité à défaut de mon sommeil.

Mon lycée se trouve à trois kilomètres de mon immeuble. C'est une distance que j'ai souvent parcourue en marchant, en courant et même en conduisant, mais jamais elle ne m'a paru aussi longue. Pourtant, je n'ai pas traîné, en vingt minutes, je suis devant chez moi. Essoufflée et haletante, je ne prends même pas le temps de récupérer et déboule dans l'appartement comme une furie.

— Maman ! hurlé-je avec l'énergie du désespoir.

Aucune réponse. Notre chez-nous n'est pas très grand, ce qui simplifie la recherche. La peur ne quitte mon ventre alors que je fais rapidement le tour des pièces, tremblant à l'idée de ce que je vais trouver derrière chaque porte. Mais rien. La gorge nouée par l'angoisse, je grimpe rapidement les escaliers menant au toit. Ma mère m'a toujours dit que cet accès est une des raisons qui l'ont poussée à acheter cet appartement. Elle dit avoir l'impression de surplomber la ville, tel un ange gardien. Le souvenir de ces paroles me noue l'estomac. Je ne veux pas y lire de signe mais mon corps s'en charge pour moi. Je tremble. Sans me laisser le temps de penser davantage, j'ouvre grand la trappe et monte les dernières marches, la gorge nouée d'appréhension, le cœur galopant d'angoisse.

Rien.

Les parterres de fleur où ma mère cultive son azalée m'observent narquois. Instinctivement, je les fusille du regard avant de d'observer un peu plus en détail le jardin. La porte du cabanon est entre ouverte si bien que je distingue les objets chacun à leur place. Je m'approche et finit d'ouvrir la porte d'un coup de pied vif avant de me plaquer contre le mur, haletante. Rien non plus. Je pénètre dans l'abri. Personne. Je décroche une planche pour révéler les armes cachées derrière. Je saisis trois couteaux et leurs ceintures spécifiques. J'en fixe une à l'intérieur de ma cuisse et y glisse la lame la plus longue. Celle plus courbée vient prendre place face à sa jumelle, sous ma manche d'où je pourrais la faire glisser au moindre souci. Je garde le dernier poignard dans ma main et l'y fais tourner. Ces gestes mécaniques me rassurent et m'aident à calmer la peur qui s'accroche à moi de ses griffes velues.

Je m'autorise un soupir de soulagement qui est de courte durée. Certes, il n'y a aucun corps mais elle n'est pas là, vivante, pour autant. Alors que ses dons, oui. Je les sens bouillir en moi, battre au même rythme que mon sang. Ils courent dans mes veines, font frémir mes muscles, décuplent mes sens. Exactement la sensation qu'elle m'a toujours décrit. Je me retourne pour rentrer dans l'appartement et partir vers son boulot. C'est le seul endroit où elle peut encore être. Mais à peine ai-je posé un pied hors du cabanon, qu'une vision cauchemardesque me cloue sur place.

Juste derrière la trappe, étendue au milieu de ses fleurs préférées. Je ferme les yeux et serre les poings, très fort, comme si cela allait me distraire de la souffrance qui s'empare de mon être. Non, non, non... J'avais beau m'en douter, le chagrin, la souffrance n'en sont que pires encore, anesthésiés un temps par l'espoir vain de la retrouver. Elle est là, allongée dans les pivoines, princesse endormie qui jamais ne se réveillera. Mon cœur déjà émietté se brise. Sans même que j'en prenne conscience, les quelques pas qui me séparent d'elle s'enchaînent. Mes genoux fauchés par cette vague de chagrin, de détresse, tremblent tandis que je me laisse tomber à côté d'elle en sanglotant.

— Maman... Je t'en supplie... Ouvre les yeux ! Je ne suis pas prête... J'ai encore besoin de toi !

Mais ses paupières restent closes. Je la secoue doucement avant de poser la tête sur sa poitrine. Je n'ai qu'un souhait : qu'elle ouvre les yeux en grondant que ce n'est qu'un exercice, que je suis beaucoup trop émotive. Je veux me disputer avec elle pour la peur qu'elle m'a faite et aussitôt la serrer dans mes bras, sentir sa peau chaude contre la mienne. Seule sa main froide reste entre mes doigts. Jamais elle ne m'a paru si loin, si inatteignable...

— S'il te plaît... Reviens...

Mes larmes coulent sur son chemisier bleu roi, terrible flot intarissable. Mais jamais plus elle ne râlera qu'il soit mouillé. À cette pensée, mes sanglots redoublent. Je ne veux pas... Je n'ai rien demandé à personne... Je n'ai pas demandé ces dons, cette vie, cette journée. J'aimerais me réveiller, blottie contre Dante qui n'a pas envie de se lever et constater avec soulagement que tout ceci n'est qu'un horrible cauchemar. Que rien ne s'est produit, que tout va pour le mieux.

Je sens l'énergie tourbillonner dans mes entrailles, véritable incendie alimenté par ma détresse. Elle tourne, tourne, m'envahit, me submerge. Je suffoque, étouffe. Je deviens une bombe sous pression. Qui explose. Je pousse un hurlement de douleur et mon énergie me quitte d'un coup, irradiant autour de moi, me laissant tremblante. Pourquoi... Pourquoi...

Prisonnière de mon chagrin, ce n'est que lorsqu'une horrible odeur de brûlé me prend la gorge et me pique les yeux, que je daigne redresser la tête. Et pour la troisième fois de la journée, une scène me coupe le souffle et me détruit un peu plus. Le jardin brûle ! Ce jardin sur le toit si cher à ma mère part en fumée ! Les flammes gagnent peu à peu les parterres de fleurs. Ces parterres qu'elle a mis tant de temps à faire pousser. D'ici quelques secondes, il n'en restera plus que des cendres. Envolés comme la vie de celle qui m'est le plus chère.

Canalise-toi ! Tu es trop émotive ! Comment veux-tu contrôler tes dons si tu ne te contrôles pas toi-même ?! m'ordonne sèchement mon inconscient prenant la voix de ma mère.

— Mais je ne veux pas de ces dons ! hurlé-je.

L'énergie continue de s'écouler de moi en un flot interrompu. Les flammes se rapprochent dangereusement, dévorant les fleurs et plantes sur leur passage, réduisant en poussière les dernières bribes de mon cœur aussi sûrement que si le brasier avait démarré à même mon âme.

— Qu'ils aillent au diable !

Ma colère jette de l'essence sur le feu qui gagne en puissance. J'entends des pas précipités dans les escaliers, mais enfermée dans mon désarroi, je ne me retourne pas pour voir de qui il s'agit. Des pompiers alertés par les voisins ? Ou l'assassin de ma mère venu terminer le travail ? Sa peur a toujours été d'être rattrapée par ce monde qu'elle fuyait. Et c'est moi qui l'ai convaincue de rester, ici, dans cette ville où j'avais pour la première fois trouvé mes marques. Je l'ai convaincue que Le Conseil avait renoncé à la pister. Je l'ai forcé à rester dans son cercueil... Alors qu'il vienne ! Qu'il finisse ce qu'il a commencé ! De toute manière, qui me retient ici ? Ma mère est morte et Dante a peu de chance de s'en être sorti. Je n'ai plus personne.

Oui, mais si tu t'en vas, qui les vengera ? siffle une voix douce et vicieuse dans mon esprit.

Je me crispe. Les venger ? Contre qui ? Contre la police ? Contre un monde de magie que je ne veux pas connaître ? Avec des pouvoirs que je ne maîtrise que dans un monde théorique ?

Je ne veux plus me battre. Je ne veux pas de cette vie, cachée à rejeter ce que je suis. Je ne suis pas ma mère. Je n'ai pas cette capacité à toujours tout abandonner pour ma survie et tranquillité. Je n'ai pas sa faculté à tourner la page et le dos à son passé, comme si elle changeait simplement de chapitre et poursuivait l'histoire qu'est sa vie. Je n'y arrive pas.

Une main se pose sur mon épaule. D'un geste vif, témoignant une envie de survie encore insoupçonnée trois secondes auparavant, je l'attrape et y envoie toute la chaleur qui court dans mes veines. L'intrus pousse un cri étouffé. Mais je ne la lâche pas. Le poignard caché dans ma bottine gagne ma paume et je m'apprête à frapper. Je dois expulser ce surplus d'énergie, cette peur, ce chagrin. Le sang circule dans mon corps à une vitesse folle et mon cœur bat en accord.

— Lana, arrête ! C'est moi ! grogne une voix masculine.

Cette voix... Je l'entends à peine, réfugiée derrière mon brouillard de désespoir, si bien qu'il lui faut un temps pour arriver à mon esprit. Je libère aussitôt sa main et me retourne. Dante ! Il est là ! Debout au milieu de ce jardin en flammes. Meurtri de plaies, brûlé, mais vivant ! Les larmes coulent de nouveau mais cette fois, c'est de joie, de soulagement tandis que je me jette dans ses bras. Son parfum m'emplit le nez et domine sans peine la fumée. Je tremble, blottie contre lui, pleurant ma mère, et en même temps tellement soulagée de le sentir contre moi.

— Tu es là... Tu es vivant... murmuré-je en m'accrochant à lui comme s'il était mon ancrage dans cette tempête.

Il me serre contre lui malgré la douleur qu'il doit éprouver au contact de mon corps bouillant.

— Oui, je suis là... C'est terminé, ne t'inquiète pas, je ne te lâche plus...

Je veux y croire même si je sais que rien n'est terminé. Au contraire, tout commence. Mais l'entendre le dire me rassure. Je ne suis plus seule. Pendant un instant, j'oublie et savoure son contact, son cœur qui bat sous son pull léger. Seulement, la scène de la terrasse me revient en mémoire, brisant ma sérénité précaire.

— Que... Que s'est-il passé au lycée ? chuchoté-je en relevant la tête pour croiser son regard gris.

À ces mots, ses yeux s'assombrissent. Il lève la main, le poing fermé, je crois qu'il va me caresser le visage, mais au dernier moment, mes yeux sont agressés par une poudre inconnue. Je tousse, bats des paupières en tentant de chasser l'étrange poussière. Les larmes continuent de couler sur mes joues alors que je recule d'un pas. Je gémis en sentant mon énergie se rétracter, piégé soudain dans mon corps. Ma température chute drastiquement et je me sens faiblir. Dante passe une main sous mes genoux et me soulève du sol avant que je ne m'y retrouve par la force des choses. De l'azalée... C'est de l'azalée en poudre... Très efficace pour bloquer temporairement un Alementa.

— Plus tard les explications. On doit d'abord quitter cet endroit.

Il se tourne de manière à camoufler de ses épaules le corps de ma mère. Mon cœur s'emballe alors qu'une douce brume envahit mon esprit.

— On ne peut pas la laisser là ! On ne peut pas la laisser à la merci des flammes...

Dante me jette un coup d'œil désolé mais ne s'arrête pas.

— On ne peut plus rien pour elle, Lana. Je suis désolé.

Je me débats faiblement, les larmes coulant sur mes joues pleines de suie. Je sais bien que ma mère m'aurait ordonné de fuir, de l'abandonner là. Je vois presque son fantôme, pâle et furieux voler autour de nous, m'intimant de me reprendre. Mais je ne peux pas, je ne veux pas que son corps finisse dévoré par les flammes. Flammes provoquées par des dons qui lui ont déjà gâché la vie avant de finalement la lui ôter.

Malheureusement, Dante ne se retourne pas, pas plus qu'il ne fait demi-tour, et m'entraîne dans l'appartement malgré toutes mes supplications. Le cœur en miettes et soudainement à bout de force, je le laisse m'arracher à celle qui m'a élevée, à celle qui m'a mise au monde et construite telle que je suis aujourd'hui. Je cesse de me débattre et ferme les yeux.

Pendant un moment, je crois encore que lorsque je les rouvrirai, je découvrirai que rien de tout cela ne se serait passé. Que tout ira bien. Mais l'odeur de fumée me maintient dans la réalité, m'empêche d'espérer. L'espoir fait vivre mais il fait aussi souffrir, surtout quand il est vain.

Je me laisse aller dans les bras de Dante. J'occulte les sirènes des pompiers que les voisins ont dû alerter. J'occulte le crépitement des flammes qui me parvient depuis la rue. J'occulte les diverses questions que les combattants du feu posent à Dante et les mensonges que ce dernier répond.

Alors que je perds pied, que je vais sombrer dans l'inconscience, une question s'impose dans mon esprit. Une question que je me serais posée bien plus tôt si les conditions avaient été différentes. Une question qui pendant un instant me taraude suffisamment pour me convaincre d'ouvrir les yeux. Je croise rapidement le regard gris de Dante. J'y lis de l'amour, du chagrin, de la compassion mais pas de surprise. Jamais il n'a exprimé d'étonnement depuis qu'il m'a trouvée près du corps de ma mère. Il ne m'a pas demandé ce qu'il s'est passé, pourquoi le jardin brûlait. Il n'a même pas cherché à vérifier si elle était morte ou vivante. Il a juste dégainé de l'azalée...

Il savait...

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