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Chapitre 17

Spectrophobie – Peur des miroirs (des reflets)

Des heures et des heures, Joséphine ne bouge pas. Elle est figée dans son lit, ses doigts tenant avec force la main d'Ange, les yeux plantés sur le plafond gris de la chambre d'hôpital. Elle n'a pas l'énergie de réagir quand les médecins rentrent pour lui demander comment elle va : elle n'a même pas assez de force pour réfléchir. De temps en temps, elle sent Ange se pencher lentement au-dessus d'elle, ses yeux clairs cherchant sur le visage de la jeune femme un signe d'émotion, de réaction. Joséphine cligne à peine des yeux.

Elle sent qu'on lui injecte quelque chose : un liquide monte, monte, monte dans ses veines, traverse son corps jusqu'à son cerveau. Elle sent sa vision noircir, ses paupières s'alourdir. Doucement, Joséphine se sent glisser, sombrer dans l'inconscience. Elle tourne un petit peu la tête sur son coussin blanc, ses boucles rouges comme un halo sanglant autour de son visage pâle. A travers ses yeux mi-clos, elle regarde Ange – son visage est un peu flou, ses gestes semblent saccadés. Joséphine passe sa langue sur ses lèvres, cligne violemment des yeux avant de murmurer :

« Je veux voir Inès. »

Sa voix n'est qu'un souffle rauque, et quelques secondes plus tard, le monde de Joséphine sombre à nouveau dans les ténèbres.

***

Trois jours plus tard, Joséphine est rentrée à l'appartement. Tout est encore comme elle l'a laissé : le lit défait, les tasses à moitié pleines sur la table de la cuisine, la vaisselle dans l'évier. Un manteau est tombé dans le couloir, la salle de bain est dans un désordre monstre. Lentement, la jeune femme avait déverrouillé la porte et était rentrée. Le concierge lui avait apporté un bouquet de fleurs dans un petit vase, un sourire triste sur son visage âgé. Joséphine avait soufflé un merci fatigué avant de prendre le vase dans ses mains encore un peu instable. Il avait failli glisser de ses mains et c'était Ange qui l'avait rattrapé sans un mot et qui l'avait posé sur la table de la cuisine, entre les deux tasses sales.

Joséphine se passe une main dans les cheveux. Dehors, il pleut et les doigts de la jeune femme, assise sur une chaise à la cuisine, se mette à tambouriner sur la table. Elle ne sait pas quoi faire : elle est encore en vie, elle devrait être contente qu'un destin quelconque lui ait accordé encore une chance. Mais cette chance, elle ne sait pas quoi en faire. Elle ne peut pas ressusciter Inès, son père est toujours le même, Ange est toujours là. Doucement, les gouttes de pluie roulent le long de la vitre qu'il serait temps de nettoyer. Un demi-sourire apparaît sur le visage de la jeune femme. Elle se souvient d'un poème qu'elle avait appris à l'école, le genre de poème que tout le monde apprend mais que tout le monde oublie après : « Il pleure dans mon cœur/ Comme il pleut sur la ville ». De qui était-ce déjà ? Baudelaire, Verlaine ? Joséphine soupire, ses doigts tambourinent plus fort, ses yeux fixent nerveusement la vitre. Il y a de la poussière dans les coins. Des miettes en-dessous. Elle baisse ses yeux sur la table. Les tasses sont sales, la table est sale, le sol est sale.

Un élan de colère injustifié étouffe la jeune femme. Tout est sale, sale et en désordre comme sa vie, sale et mal ordonné. Elle se lève en chancelant imperceptiblement. Joséphine attrape les tasses, les met dans l'évier. Frénétiquement, elle ouvre le robinet, laisse couler l'eau et se met à frotter et nettoyer la vaisselle, jusqu'à ce que l'éponge usée ait rougi ses doigts. Elle ne se rend même pas compte que des larmes se sont mises à dévaler silencieusement le long de ses joues. Elle essuie la table, essuie les chaises, passe le balais, frotte la vitre, nettoie le frigo. Comme en transe, balais à la main, Joséphine titube jusque dans le couloir. Des cadres sont accrochés de travers, la veste est encore par terre. Il y a des photos d'Inès, partout, partout, partout, de travers dans ce couloir sale, ce visage souriant qui hante Joséphine, cette beauté disparue. Les yeux écarquillés, Joséphine fixe sa sœur en tremblant, l'imaginant maintenant. Un corps pourri dans un cercueil pourri, quelques cheveux ternes restant au sommet d'un crâne blanchi. Un sourire cadavérique. Joséphine tremble plus fort. Etouffant un bruit hystérique, elle s'approche du mur, enlève les photos les unes après les autres. Elles lui glissent des mains avec le balai, tombent au sol. Les cadres se fissurent, le verre du plus grand éclate et envoie des morceaux de verres scintillants dans toutes les directions. La jeune femme reste figée un instant.

Elle ne sait plus ce qu'elle fait, ne sait plus ce qu'elle doit faire.

Les larmes coulent plus fort. Elle fait un pas en arrière, se fige à nouveau. Elle n'entend même pas Ange approcher. Silencieusement, il la prend dans ses bras pour la tirer vers la cuisine. Joséphine ne bouge pas. Elle secoue violemment la tête.

« Je dois ranger ! », dit-elle, sa voix se brisant à la fin de sa phrase. « Je dois ranger ! »

Derrière elle, Ange prend une respiration bruyante. Joséphine ne voit pas la larme solitaire qui roule sur sa joue à lui, ne voit pas l'expression brisée de ses yeux hantés.

« D'accord. », souffle-t-il finalement. Lentement, il lâche Joséphine et l'aide à s'adosser contre le mur. Silencieusement, il ramasse le balai, ramasse les cadres. Balaye les débris de verres, raccroche la veste. Joséphine s'est laissée glisser au sol et le fixe d'un regard vide. Ange pose le balai et se retourne vers elle. Avec sa main droite, il enfonce nerveusement ses ongles dans le poignet de sa main gauche.

« C'est... Est-ce que c'est assez rangé ? »

Joséphine cligne des yeux avant de secouer la tête imperceptiblement.

« Ce ne sera jamais assez rangé. », murmure-t-elle sans lever son regard. S'appuyant contre le mur, elle se relève finalement. Elle avance jusqu'à la salle de bain. La porte n'a pas été réparée. Du sang séché orne la porcelaine de la baignoire, une couleur brune morbide qui donne la nausée à la jeune femme.

Inès avait-elle laissé une trace pareille dans la rue lorsqu'elle était morte ?

Joséphine ouvre la bouche pour parler mais n'est incapable de prononcer aucun son. Ange est derrière elle, une présence familière, ironiquement rassurante. Elle fait un pas en avant, encore un, jusqu'au lavabo où elle prend, comme en transe, l'éponge violette posée sur le rebord. Elle la mouille et s'approche de la baignoire. Elle la passe une première fois sur les traces de sang. Elles ne s'effacent pas. Persistent, comme des marques indélébiles. Joséphine frotte plus fort, encore plus fort, jusqu'à ce que les rayures marronnées finissent par s'effriter, jusqu'à ce que plus rien ne restent d'elles et que Joséphine soit accroupit à côté de la porcelaine blanche, incapable de se relever.

Elle avait failli mourir, à exactement cet endroit, par ses propres mains.

Quelle ironie.

Ange s'assit derrière elle, elle sent ses bras incertains la serrer et sans réfléchir, elle pose sa tête contre son épaule, fatiguée.

« Je ne sais plus quoi faire. », murmure Joséphine avant de fermer les yeux instants. « Je suis perdue, Ange. Je ne sais plus qui je suis, où je vais, qui sont réellement les gens autour de moi. Je ne sais plus rien. Et j'ai peur, parce que j'ai besoin de savoir.»

Durant quelques instants, Ange ne dit rien. Seule sa respiration bruyante résonne contre l'oreille de Joséphine. La jeune femme ne s'attend pas à une réponse. Ne s'attend pas à ce qu'en quelques mots, il apaise ces inquiétudes qui la détruisent. Il se passe sa langue sur les lèvres.

« Je sais. », finit-il par répondre. « Je... Je veux juste... » Ange déglutit nerveusement. « Je sais que je n'ai aucun droit de-de demander une chose pareille mais Joséphine... Même si tu ne sais pas, même si tu as peur... Promets-moi de ne pas abandonner. Pas encore une fois. »

Joséphine pâlit un peu plus.

« Je vais essayer. », répond-t-elle simplement et Ange n'a pas le courage de la forcer à dire plus. S'écartant du jeune homme, Joséphine se relève. Elle arrange en silence les quelques objets en désordre de la salle de bain avant de ressortir. Elle s'arrête un instant dans le couloir, se retourne vers Ange encore assis au sol.

Elle ouvre la bouche, la referme. Secoue la tête. Joséphine se passe une main sur le visage. Elle continue jusqu'au salon. Range là aussi. Va ensuite faire le lit dans sa chambre, jusqu'à ce que toute trace de désordre et de poussière ait disparu. Ensuite, Joséphine retourne au salon. Calmement. Son visage, pourtant marqué par les traces rouges qu'ont laissé ses larmes silencieuses, ne porte aucun signe d'émotion. Elle s'installe sur son canapé, s'adosse lentement. Elle ne sait pas où est Ange.

Il apparaît quelques instants plus tard. Dans sa main, il tient les cadres que Joséphine a enlevé auparavant. Il déglutit.

« Où... Où est-ce que tu voudrais les ranger ? »

Elle regarde le jeune homme un instant avant de se lever. Elle attrape un carton sur le haut d'une armoire au salon. Un gros carton à rayures blanches et roses entouré d'un grand nœud au bout duquel pendouille une vieille étiquette sur laquelle quelqu'un a écrit « Photos de Jo ». Elle défait le nœud, enlève le couvercle pour laisser apparaître un tas d'albums photos. Les mains de Joséphine se mettent à trembler à nouveau. Le premier album, un petit album carré avec un motif floral est celui de l'anniversaire de Joséphine et Inès, celui qu'elles avaient fêté ensemble lorsque Joséphine avait eu huit ans. Sans réfléchir, la jeune femme le prend dans ses mains et l'ouvre.

Jo et Inès sur la balançoire, des miettes de gâteau au coin des lèvres, des paillettes aux coins des yeux. Jo et Inès devant le portail de la maison, tenant des ballons plus grands que leurs têtes. Jo et Inès devant leurs gâteaux d'anniversaires.

Les lèvres de Joséphine se mettent à trembler.

Elle n'a jamais autant pleuré de toute sa vie.

Elle referme l'album, prend le prochain. Vacances à Biscarosse. Noël. Anniversaire d'Inès, anniversaire de Joséphine, anniversaire de Papa. Finalement, un dernier album. Le plus vieux : la couverture a un peu jauni. Sur l'étiquette, il y a cette fois écrit Maman. Joséphine a l'impression d'étouffer sous ses larmes tandis qu'un hoquettement douloureux lui échappe. Elle ouvre l'album photo.

Maman juste après ses accouchements.

Maman, Papa, Inès et Joséphine.

A la mer, en été, en hiver, à la maison, chez les grands-parents, dans le jardin, juste avant de se coucher, en se brossant les dents. L'image d'une famille idyllique, de l'enfance que Joséphine avait voulu avoir mais dont elle n'avait plus aucun souvenir. Maman, qui les avait abandonnées, avec Inès et Joséphine dans ses bras.

Comment avait-elle pu ?

Comment avait-elle pu partir comme ça ?

Un autre bruit étouffé échappe à la jeune femme tandis que ses jambes lâchent subitement sous son poids. Elle glisse au sol.

Comment avait-elle pu revenir comme ça ?

Joséphine pousse un cri enragé et de toutes ses forces, elle jette l'album photo contre le mur. Encore et encore, jusqu'à ce qu'une première page se déchire et qu'une autre s'arrache.

« Sale conne ! Sale conne, sale conne, sale conne ! »

Tout son corps vibre de colère et d'émotions qu'elle n'arrive ni à placer, ni à gérer.

« Joséphine ! »

Elle ignore Ange, ramasse des photos tombées et les déchire en tremblant de tous ses membres, les déchirent jusqu'à ce qu'ils ne restent que des miettes d'images, des lambeaux de souvenir.

« Joséphine ! », appelle Ange encore une fois avant de lui arracher l'album photo des mains. « Joséphine, arrête ! Arrête ! »

La jeune femme relève la tête. Dans un élan de colère, sans réfléchir, elle lève sa main et gifle le jeune homme.

« C'est de ta faute ! Tout est de ta faute ! Tout, tout, tout ! » Les mots sortent incontrôlablement de la bouche de Joséphine tandis qu'elle se relève en titubant. Elle a si mal qu'elle a besoin de faire mal. Elle veut détruire, déchirer. Ange ne réagit pas. Presque calmement, il s'agenouille devant elle, levant ses yeux vers elle. Une trace rouge est apparue sur sa joue. Ses mains sont posées sur ses cuisses et il attend. Attend le prochain coup, la prochaine insulte. La respiration de Joséphine est haletante. Pendant un instant, ils se regardent dans les yeux.

Une voix crie à Joséphine de se calmer. De s'assoir un instant et de réfléchir rationnellement. Mais la jeune femme a été rationnelle trop longtemps. Trop d'émotions l'étouffent, trop de sentiments lui coupent la respiration et sa colère n'a plus rien de rationnel.

« Tu as tué ma sœur, sale monstre. », finit-elle par cracher sur un ton qu'elle-même ne reconnaît pas. Ange ne dit toujours rien. Ne baisse pas les yeux, acceptant simplement les mots de la jeune femme. « Mais dit quelque chose ! »

Poussant un cri de rage, Joséphine le frappe une seconde fois. Encore et encore, jusqu'à ce qu'elle tombe à genou, que ses ongles griffent ses joues, sa nuque son dos dans une colère désespérée et aveugles. Jusqu'à ce qu'Ange presse brusquement ses lèvres sur les siennes, brutalement. Sa main posée sur sa cuisse s'enroule dans les cheveux couleur sang de la jeune femme, tire sa tête vers lui avec force. Joséphine s'agrippe à lui, l'embrasse avec autant d'agression, jusqu'à ce qu'un hoquettement lui échappe, et encore un.

Finalement, toute sa force semble quitter son corps et elle s'enroule autour d'Ange, des sanglots lui secouant tout le corps. Le jeune homme enroule ses bras autour d'elle. La berce doucement, tendrement avant de mettre sa tête dans la nuque de la jeune femme.

Comme avant.

Les mains violentes de Joséphine deviennent tendres, caressent la nuque d'Ange, ses cheveux, ses joues amochées.

« Je suis désolée. », finit-elle par souffler. Elle ne relève pas la tête et Ange ne relève pas la sienne. Doucement, le jeune homme embrasse la nuque de Joséphine. Il ne dit rien de plus : il n'en a pas besoin.

Il comprend et Joséphine l'a compris.

Elle renifle.

« Ma mère est partie quand j'avais trois ans. Je ne me souviens plus d'elle. Elle ne m'a jamais écrit. Jamais. Et elle réapparaît du jour au lendemain me demandant de l'accepter. Je ne savais même plus que j'avais encore cet album photo, je pensais que je l'avais jeté mais mon père a dû le remettre dans le carton. » Joséphine s'arrête de parler un instant. « Je crois que mon père n'a jamais arrêté d'aimer ma mère, tu sais. Il n'a jamais... » Joséphine est incapable de continuer. Elle secoue seulement la tête, avant de se passer une main fatiguée sur les yeux.

Ange reste silencieux un long moment avant de seulement répondre :

« Elle ne te ressemble pas. »

Surprise, Joséphine rit doucement.

« Je n'ai pas fait attention à ça. »

Le jeune homme hausse seulement les épaules. Le sourire disparaît du visage de Joséphine et elle se relève lentement, tenant la main d'Ange dans la sienne. Elle renifle à nouveau.

« Il est quel heure ? », demande-t-elle finalement, décidant de mettre un terme à la conversation. Ange ne répond pas et Joséphine se tourne pour attraper son téléphone posé sur la commode. Il est à peine 14 heures, et juste en-dessous de la petite horloge dessinée, un message de Gaspard apparaît.

Qui est Elie ?

Joséphine se fige.


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