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chapitre un

Lorsque je me réveillai, il devait être un peu moins de dix heures. La pluie avait cessé. Les quelques rayons du soleil qui avaient parvenu à se faufiler entre les deux volets de ma fenêtre me chatouillaient le visage.

Je me levai de mon lit, puis allai ouvrir mes deux fenêtres, ainsi que les volets. Je plissai les yeux. L'orage s'était bien arrêté, pour laisser place à un soleil plus éclatant que jamais.

Je baillais tout en étirant mes bras, puis m'accoudai au rebord de la fenêtre, m'attardant sur l'activité qui régnait dans mon cher petit village. Il se trouvait dans une vallée, quelques maisons se trouvaient donc plus en hauteur par rapport à d'autres, ce qui était le cas de la notre, à mes parents et moi. Je disposais donc d'une vue imprenable sur tout le village, qui n'était pas bien grand. Ce qui était assez avantageux pour moi, j'adorais observer le petit monde qui s'attardait dehors sans raison.

Quelques touristes marchaient dans les rues et s'occupaient comme ils le pouvaient sur la place. Je ne voyais pas vraiment ce qu'ils venaient faire ici, ce petit trou perdu au milieu d'une vallée n'avait rien d'extraordinaire, ni de fantastique.

Je tirai sur la moustiquaire, qu'on avait installée tel un sorte vénitien. Lorsque j'étais plus jeune, je devais monter sur une chaise afin de pouvoir l'atteindre, étant trop petite de taille. Je fis de même pour ma deuxième fenêtre.

Je fis mon lit, puis me rendis dans ma salle de bain. J'avais la chance d'avoir une salle de bain rien pour moi toute seule. Elle était dissimulée derrière un grand miroir mural, qu'il fallait faire coulisser pour entrer dans la pièce. C'était ma mère qui avait donné cette idée aux architectes de la maison. Mes parents avaient acheté ce terrain à mes trois ans, ils avaient quitté Paris et sa pollution que je n'arrivais pas à supporter pour que je m'épanouisse dans ce petit village sudiste qu'ils avaient tout de suite adoré.

Après avoir pris une douche rapide afin de me rafraîchir, je me dirigeais vers la commode où étaient rangés tous mes vêtements et où, sur le dessus, se trouvait un énorme bazar constitué de bijoux, accessoires et de peu de maquillage. Je ne me maquillais que rarement, mais ça servait toujours, par exemple lorsqu'on se réveillait et qu'on avait une tête de zombie malade, ou qu'un moustique était quand même parvenu à entrer dans sa chambre, malgré la moustiquaire et la tonne de bombe anti-moustiques qu'on avait vidé la veille au soir, et qui nous piquait exactement sur le bout du nez.

Après m'être habillée, je sortis de ma chambre et descendis les escaliers, puis me retrouvais dans le salon. Je le traversais, allumant la télévision au passage. J'avais la ferme intention de prendre mon petit-déjeuner à l'intérieur, ç'aurait été du suicide de sortir pour moi. Avec ma peau trop fragile, mes tâches de rousseur, mes cheveux et tout ce que vous voulez d'autre, les coups de soleil étaient devenus mes meilleurs amis.

Ou alors il fallait que je me sois tartinée de crème solaire, ce que je n'avais pas pensé à faire avant de descendre.

Arrivée dans la cuisine, j'ouvris un placard et y trouvais mes céréales préférées. Je me servis un verre de lait et pris un pamplemousse dans la corbeille de fruits. Je sortis une petite assiette et du sucre pour le pamplemousse, mis le tout sur un plateau et m'installai dans le canapé du salon. Le ventilateur de plafond tournait silencieusement au-dessus de ma tête. Parfait.

J'étais prête à manger mon petit-déjeuner. Je commençai tout juste à couper en deux le pamplemousse lorsqu'on me coupa dans mon élan par un simple coup de sonnette. Je maudissais la personne qui osait me déranger.

Je me levai du canapé, légèrement agacée. Après tout, celui ou celle qui attendait à la porte ne savait pas que je venais pratiquement de me réveiller.

Je cherchais les clefs de maison dans le vide-poche et ouvris la porte.

- Bonjour Alexis, me lança l'homme qui était en face de moi.

Si je détestais une chose plus que l'été, les moustiques et les coups de soleil, c'était bien mon prénom. Pourquoi mes parents m'avaient affublée d'un nom masculin ? Je n'en avais aucune idée, il paraissait que mon prénom était mixte, surtout aux États-Unis. J'avais beau leur rappeler que nous habitions en France, ils ne voulaient pas changer mon prénom.

L'homme portait un bermuda bleu, et un polo jaune avec, sur le torse, le dessin d'une enveloppe et avait sur la tête une casquette du même bleu que son bermuda. Quelques boucles blondes tombaient sur son front perlé de minuscules gouttes d'eau. Il tenait dans ses mains un carton.

- Salut Francis.

- Je peux entrer ?

Je le laissais passer. Francis était le seul facteur du village. Enfin, celui-ci n'était pas bien grand, ça ne devait pas être très fatigant d'en faire le tour à vélo chaque matin. Je connaissais bien Francis pour la seule raison qu'il ramenait souvent des colis pour mon père.

- Alors, cette fois-ci, d'où vient-il ?

- Du Nord-Pas-de-Calais, me répondit Francis. Sûrement un ancien collectionneur qui se voit obligé par sa femme de vendre tous ses bibelots.

Mon père collectionnait les médailles des soldats de la Seconde Guerre Mondiale. Je n'avais jamais su d'où venait cette passion, enfin, pour ma part, je me contentais de signer les frais de port.

- Tu veux quelque chose à boire ?

Il acquiesça. J'avais dit que faire le tour du village en vélo était facile. Mais pas faire le tour du village en vélo sous quarante degrés.

Je lui versais un grand verre de limonade, ce qu'il avait l'habitude de prendre. Lorsque je revins dans la pièce à vivre, Francis s'était assis sur l'une des huit chaises qui entouraient la grande table carrée au centre de la salle, chaises un peu trop nombreuses car nous n'étions que trois à la maison, et les invités étaient rares chez nous. Il regardait d'un œil distrait la télévision.

Je posai le verre en face de lui et m'assis à mon tour.

- Je te dérange, peut-être ? me sourit-il en désignant le plateau resté sur la table basse du salon, avant de boire une gorgée de boisson pétillante au citron.

Je ne savais pas comment il pouvait boire ça.

- Non, ça va. Je n'avais pas encore commencé à manger, tu as eu de la chance.

Il me tendit le stylo qui se trouvait dans la poche de son t-shirt.

- Tu signes, comme d'habitude.

Je pris le stylo et signais par une parfaite imitation de la signature de mon père. C'était lui-même qui me l'avait apprise, sachant qu'à cause de son travail, il n'était pas souvent à la maison. Il m'avait donc autorisé à signer à sa place, afin de faire gagner du temps à Francis et, par la même occasion, à agrandir sa collection. Pour ma part, cela m'arrangerait bien quand ma professeur d'espagnol souhaitait lui faire comprendre que je n'avais pas bien choisi ma deuxième langue vivante.

Nous parlions encore un peu du temps d'aujourd'hui et de mon emploi du temps de la journée, puis Francis partit, ayant encore quelques lettres et un ou deux colis à distribuer.

Je me retrouvais à nouveau seule dans la maison. J'entendis la dame de la météo annoncer que cet été serait sûrement dans le classement des étés les plus chauds de France.

Au secours. Sauvez-moi de cette solitude et de cet acharnement que Dieu se permet de déverser sur moi.

Je terminais de déjeuner, puis allais me brosser les dents. En passant dans ma chambre, mon regard se posa sur ma guitare, posée au bout de mon lit. Je soupirais. Ça faisait un sacré bon moment que je n'avais pas joué.

Nous étions en été, en vacances. Mes amies étaient toutes parties les passer à l'autre bout du monde. Elles avaient quitté ce coin perdu le plus vite possible que leurs valises leur avaient permis. Moi ? J'avais le malheur d'avoir deux parents travaillant 365 jours par an. Non pas que je n'aimais pas mes parents, non... j'étais d'ailleurs très proches d'eux... pour le peu que je les voyais.

Ils m'avaient même laissé fêter le réveillon de Noël toute seule.

Enfin, ce n'était pas non plus entièrement de leur faute si je m'ennuyais pendant les vacances. J'aurais pu avoir plus d'amis. Il n'y avait pas que moi qui était obligée de rester ici pendant les vacances. Il y avait bien quelques personnes de mon lycée qui habitaient au village... mais je ne les appréciais pas, alors pourquoi passer les vacances avec eux ?

De plus, même si je finissais à faire amis-amie avec eux, ça ne servirait à rien : l'été terminé, ils m'ignoreront à nouveau comme si j'étais leur première chaussette.

Je sentais que j'allais particulièrement m'ennuyer, durant ces deux longs mois.

Au lieu de rester dans ma chambre à me tourner les pouces, je décidais de faire un tour. Peut-être trouverais-je l'inspiration à faire quelque chose dans les rues qui embaumaient les fleurs et les glaces.

Je n'oubliais pas d'étaler une tonne de crème solaire sur ma peau et de mettre un chapeau et des lunettes de soleil. Puis, enfin prête, je fermais la porte d'entrée à clefs puis descendis l'allée en cailloux blancs de ma maison.

Tout en descendant les rues pour me rendre à la place, je regardais autour de moi. Il était presque onze heures et demi, et il n'y avait pas un chat dans les ruelles. Il fallait dire que les seules personnes susceptibles de croiser à cette heure-ci ne pouvaient qu'être des touristes, la majorité des habitants du village étant de vielles personnes, elles devaient sûrement préparer leur repas bien au frais chez elles. Je me mis à fredonner le refrain de Summertime Sadness de Lana Del Rey.

J'arrivais enfin à la place, où il y avait déjà plus de monde. Une odeur de saumon grillé me parvint jusqu'aux narines. Quelques personnes venaient juste de commencer à manger. Un petit groupe de badauds s'était formé près de la fontaine. Un air de guitare me parvient. Il y avait sûrement quelqu'un qui en jouait assez bien pour se faire remarquer.

Je m'approchai du petit attroupement, et tendis l'oreille. Il y avait aussi une voix masculine. Bien, c'était donc pour cela qu'il attirait tant de monde...

Personne ne pouvait résister à un garçon qui, de un jouait de la guitare, et de deux savait chanter ; et cela les deux en même temps, c'était encore mieux ! Il était assez difficile de chanter en même temps que de jouer, j'avais du beaucoup m'entraîner pour réussir. Et encore, c'était assez approximatif, surtout que ma voix n'avait rien d'exceptionnel à mon goût.

C'était une reprise de Safe and Sound, de Capital Cities. Une très jolie version, juste avec une voix et une guitare. Je l'avais déjà entendu, mais l'entendre de la voix du jeune homme était tout de même agréable.

Je me mis sur la pointe des pieds afin d'apercevoir l'interprète. De ce que je pouvais voir, il était brun, portait des lunettes de soleil et une chemise à manches courtes blanche. Sa voix était très belle. J'avais l'impression que je pouvais l'écouter des heures et des heures durant, je ne m'en lasserai jamais...

J'haussais les épaules, continuais de marcher et passais mon chemin. Je ne voulais pas ressembler à toutes ces filles qui étaient attirées par le premier garçon qu'elles croisaient dans la rue. Puis même, ce n'était pas mon genre de « tomber amoureuse ». Je n'en comprenais même pas le sens, comment pouvait-on tomber amoureuse ? On pouvait être amoureuse, mais pas « tomber » amoureuse...

Puis d'ailleurs, pourquoi je me focalisais sur ça ? Je devais bien penser à autre chose, ça ne rimait à rien de garder l'image de ce garçon et de sa voix mélodieuse dans la tête...

Je passais devant l'un des cafés du village, nommé L'Authentique. Il était tenu par Samuel, un homme un peu joufflu mais fort sympathique. Il aimait son travail, et n'hésitait pas à le montrer en accueillant comme il se devait ses clients par un large sourire de bienveillance. Il a vécu ses vingt premières années à Marseille, sa ville natale. On pouvait le remarquer grâce à son fort accent, mais aussi aux murs verts émeraudes du café tapissés de photos, posters et médailles de l'Olympique de Marseille.

Je décidai de rentrer dans le café, et de commander un jus de fruits. C'était Christian, le fils de Samuel, qui tenait la brasserie ce jour-là ; le restaurateur devait sûrement être absent.

Christian avait une vingtaine d'années. Je le connaissais depuis toute petite. À chaque fois que je m'ennuyais, seule chez moi, lui et moi restions au bout de la salle, et jouions ensemble. Nous nous étions toujours très bien entendus, les gens se demandaient même si nous n'étions pas frère et sœur, parfois. Cela nous amusait, et nous avions réussi à faire croire pendant quelques semaines à de nouveaux habitants que nous étions de la même fratrie. Ça nous avait bien fait rire.

- Où est ton père ? demandai-je à Christian, après avoir payé l'addition.

Je m'étais laissée tenter par un cookie aux pépites de chocolat fait-maison. Il fallait dire que je les préférais lorsque c'était Christian qui les cuisinait.

- Il est parti voir ma grand-mère, à Marseille, me répondit-il. Elle est en maison de retraite.

Il se tut un cours instant.

- Apparemment, c'est bientôt la fin, ajouta-t-il, un regard triste sur le visage.

- Je suis désolée pour ta grand-mère, c'était une femme géniale.

J'avais connu sa grand-mère. Quelques fois, elle allait rendre visite à son fils ici, et restait quelques jours. J'étais même allée chez elle, quand j'étais partie en vacances à Marseille avec Christian et son père.

Je n'étais pas connue pour redonner la pêche aux autres, mais j'essayais et faisais de mon mieux. Je lui caressai gentiment le bras. Il me regarda et sourit.

- Tu sais, ça fait longtemps qu'elle ne sait plus comment je m'appelle, alors...

Christian avait un frère aîné, Louis. Je le voyais parfois, lorsque j'étais petite, mais j'étais bien trop occupée à faire les quatre cents coups avec Christian pour me le rappeler exactement. Louis habitait aux États-Unis, mais j'ai eu l'occasion de le revoir une fois, pendant les vacances de Noël, il y avait trois ans. Lui se souvenait très bien de moi, et on avait beaucoup parlé.

Ça ne devait pas être facile tous les jours pour Christian, de ne plus vivre avec son frère. Je l'avais vu, ils étaient très liés. Enfin, j'étais là, moi, et j'étais contente d'être serviable à quelqu'un.

- Tu as prévu de faire quoi, aujourd'hui ? me demanda Christian, tout en passant un coup de torchon sur le comptoir

- Je ne sais pas, je vais trainer, comme je l'ai fait tout-à-l'heure...

- Traîneuse de rues, m'insulta-t-il en souriant. Tu n'as pas autre chose à faire ?

- Franchement ? Non, rien. Puis dis-le moi si je t'embête à venir te rendre visite.

- D'accord : tu m'embêtes. Alors termines ton jus de fruits et déguerpis.

J'ouvris grand la bouche, indignée, tapant son épaule de toutes mes forces, tandis qu'il riait. Je sentis une présence dans mon dos se déplacer vers ma gauche.

- S'il vous plait ?

- Excuse-moi, lâcha Christian en reprenant son sérieux mais tout de même souriant. Que puis-je te servir ?

Je me tournai vers le client. Il s'était assis à quelques sièges du mien, avait posé ses lunettes de soleil sur le comptoir. C'était un garçon qui devait avoir mon âge, peut-être plus âgé. La sacoche d'une guitare était posé à ses pieds.

- Un jus d'orange et deux limonades s'il vous plait.

- J'en ai pour une minute.

Je ne réussissais pas à détacher mes yeux du garçon. Tiens, ce n'était pas...

Son regard bleu clair croisa le mien. Trois secondes s'écoulèrent avant que je ne puisse le détourner et m'empressai de boire une gorgée de mon jus de fruits. Je ne pouvais m'empêcher de rougir, et mon cœur battait plus vite qu'à la normale. J'aimais observer les gens, mais le fait qu'il m'avait remarqué ne me mettait pas du tout à l'aise.

Du coin de l'œil, je vis le garçon sourire. Christian lui, se dirigeait dans la cuisine pour chercher une orange après avoir pris un verre dans les étagères derrière le bar. Pourquoi m'abandonnait-il comme ça ?

- Salut, dit le garçon.

S'était-il adressé à moi ? Non, non ce n'était pas possible, ce n'était pas moi, il devait sûrement avoir croisé un ami, ou quelque chose comme ça... Je tournais la tête vers lui, et il me sourit.

Pourtant, je ne lui répondis pas. Je ne savais pas ce qu'il m'arrivait, mais les mots restaient coincés dans ma gorge, comme si quelque chose ou quelqu'un m'empêchait de lui parler.

Sûrement son regard posé sur moi et son sourire permanent.

- Tu n'es pas muette, tu parlais à ton ami, tout à l'heure, sourit-il.

Ce garçon, je le connaissais... Du moins, je l'avais déjà vu quelque part. Mes yeux de baissèrent sur la housse de sa guitare. Le garçon de la place. Mon cœur manqua un battement. Que m'arrivait-il ?

- Bon, alors il faut croire que tu es très timide...

Il posa son regard sur mon verre, tandis que je détournais le mien, soudainement intéressée par la porte qui menait à la cuisine, où, apparement, Christian ne se pressait pas.

- Il est à quoi, ton jus de fruits ? me demanda-t-il.

Même une question aussi banale que celle-ci, je ne pouvais y répondre. Je ne pouvais plus rien faire, je ne contrôlais plus rien. Mon cœur s'emballait, et je restais muette, paralysée par une peur soudaine. Ou par autre chose.

- Tu ne sais pas quel parfum a ton jus de fruits ? ajouta-t-il, amusé.

Je tournai brusquement la tête vers lui afin de répliquer, bien décidée à ne plus me faire rouler dans la farine ainsi. Un peu trop brusquement, d'ailleurs, je pensai qu'il s'était pris quelques mèches de cheveux rousses dans le visage. Pourtant il n'avait pas l'air contrarié. Non, il avait un air... amusé. Pourquoi ? Je devais être aussi rouge que ma chevelure, à l'heure qu'il était.

Je ne m'étais pas souvenue qu'il s'était assis si près de moi ; nos visages étaient si proches que nos nez pouvaient se toucher. Je parvenais à sentir son souffle chaud et mentholé sortir de sa bouche entre-ouverte et caresser ma peau, apercevoir un minuscule cheveu brun rebelle tomber sur son front, tandis que les autres étaient relevés, bouclés et en pagaille au-dessus de sa tête, admirer ses yeux bleus magnifiques, qui plongeaient dans les miens comme pour lire dans mes pensées et alors découvrir que tout mon être ne pouvait se détacher de lui, et même compter les quelques tâches de rousseur qui ornaient ses joues sous son teint mat et bronzé.

Lui devait sûrement entendre mon cœur qui n'en pouvait plus de battre à cent à l'heure, malgré tous mes efforts pour le calmer. Il pouvait même se moquer de moi, s'il lui chantait, mes joues devaient avoir atteint un rouge coquelicot. Mais il n'en fit rien. Il me regardait juste. Moi. Son regard dans le mien.

Le temps aurait pu s'arrêter, la terre trembler, un ouragan éclater, la fin du monde arriver, jamais je n'aurais détacher mes yeux de lui. Jamais je n'aurais voulu qu'il arrête de plonger et noyer ses yeux dans les miens. Jamais je n'aurais voulu arrêter de penser à lui et au pourquoi nous restions immobiles. Jamais arrêter et passer à un autre instant que celui où je m'étais perdue dans ses yeux et mes pensées.

Et toujours rester ainsi, à quelques centimètres de ses lèvres, ne sachant que faire et n'en attachant aucune attention.

Et pourtant...

- Je ne vous dérange pas, j'espère ?

Je détournai lentement mon regard, de même pour le garçon. Christian nous regardait, un à un, un verre de jus d'orange dans une main, l'autre tenant deux limonages par le haut des verres.

- Ça fera trois euros cinquante, lâcha-t-il en ne détachant pas son regard de moi et ma petite personne.

Je m'accoudai prestement au comptoir, puis fis semblant de rien un peu trop exagérément, une main soutenant la tête et l'autre tenant la paille de mon jus de fruits, tout en regardant ailleurs.

- Gardez la monnaie, entendis-je la voix du garçon résonner dans ma tête.

Il passa la hanse de sa housse à l'épaule, prit les trois verres et alla rejoindre ses amis, qui s'étaient installés à une table sur la terrasse. C'est un autre garçon et une fille. Qui était-elle d'ailleurs ? Sa sœur, une cousine ?

... pourquoi j'y prêtais autant d'attention, d'ailleurs ?

J'entendis Christian toussoter. Sans m'en rendre compte, je m'étais penchée en arrière pour avoir une meilleure vision. Je le regardai, puis je me remis doucement correctement.

- Tu peux m'expliquer ce qu'il vient de se passer ?

Que vient-il de se passer ? Très bonne question.

- A vrai dire, moi-même je ne saurais répondre à ta question, finis-je par répondre.

- Que se passe-t-il, Alex ? répéta-t-il, un peu plus doux.

- Mais rien, je...

Je me pris la tête dans mes mains. Je repensais à ce qu'il s'était exactement passé.

- D'abord, il a remarqué que je le regardais, puis il a commencé à me parler, énumérai-je. Mais je n'arrivais pas à lui répondre, je...

Je levais le regard vers Christian. Je tournais la tête vers la terrasse, rougis et retournais instantanément à Christian lorsque j'eus aperçu que le garçon me regardait, lui aussi.

- Il me regarde, chuchotais-je à mon pseudo grand frère.

- Et ? rit-il.

- Et... c'est pareil que tout-à-l'heure, mon cœur s'emballe, et... il fait chaud, tout à coup, non ?

Je bus une longue gorgée de mon jus de fruits, reposais le verre vide sèchement sur le comptoir et passais nerveusement une main dans mes cheveux légèrement ondulés. Je soupirais.

- Christian, tu sais ce qu'il m'arrive ? soufflai-je.

Je levais la tête vers lui, qui souriait. Il s'accouda au comptoir, les mains jointes sous son menton.

- Je sais ce qu'il arrive à ma petite sœur chérie. Tu es amoureuse, voilà tout.

J'arquai un sourcil, perplexe. Amoureuse, moi ? Ce serait la meilleure.

- Amoureuse, tu en es sûr ?

- Tout à fait, acquiesça-t-il.

- Mais enfin, je ne peux pas être amoureuse de lui, je ne le connais même pas...

- Ça s'appelle le coup de foudre.

- Le coup de...

J'éclatai de rire.

- Mais enfin Christian, le coup de foudre, ça n'existe pas ! C'est juste dans les films et dans les livres qu'on trouve ça !

Il secoua la tête.

- Non Alex, tu as eu le coup de foudre pour lui. Tu es tombée amoureuse !

- Oh, arrête de dire ça, ça ne veut rien dire.

- Tomber amoureux ?

J'hochai la tête.

- Mais Alex, avoue-le, tu es amoureuse de ce garçon !

- Mais comment ? Je ne sais même pas comment il s'appelle !

- C'est ça, le coup de foudre : tu tombes raide dingue de quelqu'un alors que tu ne le connais même pas.

- Tu en sais quelque chose, toi, peut-être ?

- Non, mais je sais ce que c'est. Oh, ma petite Alex est amoureuse ! chantonna-t-il.

- Arrête de dire des conneries.

Bien qu'une infime partie au fond de moi pensait qu'il n'avait peut-être pas tort. Mais je ne savais pas ce qu'était l'amour, jamais je n'avais été amoureuse, alors pourquoi seulement ce jour ?

Et était-ce ça, l'amour ? être mal à l'aise, se rendre ridicule, sentir ses joues s'incendier et son cœur battre à toute allure ?

Non, c'était impossible. Puis je ne connaissais pas ce garçon. Je savais juste qu'il jouait de la guitare et chantais. Rien de plus. Alors pourquoi en être amoureuse ? Ce n'était pas plausible, aucune raison cartésienne, tout simplement.

Je jetais un coup d'œil derrière mon épaule. Il était encore là, et avait cessé de me regarder pour parler avec ses amis. Je me détendus un peu : savoir qu'il ne me prêtait plus attention me soulageait ; bien qu'un goût amer me monta dans la bouche quand il commença à rire avec la fille à sa table.

- Mais sache que j'enquêterai sur ton amoureux, sourit Christian.

Je fronçais les sourcils, ne relevant rien sur le terme « amoureux ».

- Comment ça, enquêter sur lui ?

- Tu te doutes bien que maintenant que je sais que t'en pinces pour quelqu'un, je vais tout faire pour savoir qui c'est ?

Je lui souris. À quoi bon briser ses rêves de détective privé ?

Lui et moi, nous devions avoir six à huit ans, étions rentrés dans une période « espions et agents secrets » : tous les moments qu'on vivait suffisaient à en faire d'incroyables aventures. On le prenait parfois trop au sérieux, jusqu'à observer les voisins pour être sûrs qu'ils ne détenaient pas d'armes nucléaires. Ils avaient failli porter plainte, heureusement que Samuel les avait convaincu de ne rien faire en expliquant que nous n'étions simplement que des enfants qui jouaient... j'avais reçu une punition phénoménale de la part de mes parents, de même pour Christian.

- Et pourquoi veux-tu découvrir l'identité de mon soit-disant amoureux, monsieur ?

- Parce que mon nom est Bond...

Il mima un pistolet qu'il sortit d'une veste imaginaire, en le pointant dans toutes les directions possibles.

- ... Christian Bond.

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