Lorsque j'entre dans mon appartement, je souffle un bon coup. Je suis tellement stressée. Je me laisse glisser le long de ma porte. Je ne comprends rien à ce qui se passe dans mon corps en ce moment.

Mes pensées sont totalement embrouillées. Mon cerveau ne cesse de passer en boucle la scène où j'ai embrassé Monsieur Zach et les émotions que j'ai ressenti à ce moment-là.

Je me souviens que j'ai aimé sentir ses mains sur ma taille et j'ai aimé le contact de ses lèvres sur les miennes. Ce n'est à n'y rien comprendre. J'ai fait ça pour la mission. 

J'ai embrassé des centaines d'hommes pour mener à bien ma mission alors pourquoi cette fois c'est différent ? Pourquoi cette fois je me sens bizarre et je n'arrête pas d'y penser ? Je fais ça tous les jours, il fait ça tous les jours alors pourquoi je me sens si bizarre ?

Ce matin encore je disais contrôler parfaitement mes émotions et mes sentiments, mais ce qui m'arrive en ce moment me prouve le contraire. Peut-être que je ne suis pas assez forte. Monsieur Zach a créé une faille dans la personne que je suis et je me devais de la refermer. 

Je n'arrive pas à comprendre ce que je ressens alors il faut que j'éradique au plus vite cette sensation. C'est la seule façon de me préserver.

Je m'endors adossée à la porte, mes pensées toujours centrées sur le même sujet : mon baiser avec Monsieur Zach.

*****

- Allô ? Oui bonjour, j'appelle pour dire que je suis malade, je ne me sens pas bien et que je ne vais pas pouvoir venir travailler aujourd'hui exceptionnellement, je dis au téléphone en me pinçant le nez pour faire croire que j'ai le nez bouché et que je suis réellement malade. Oui j'aurai dû mieux me couvrir face à l'hiver. Bonne journée, au revoir.

Je raccroche. J'ai un mal de dos pas possible suite à ma nuit contre la porte. Je n'ai pas envie de voir Monsieur Zach aujourd'hui, je suis encore trop perturbée. Je ne sais pas pourquoi tout ça m'arrive. J'ai simplement besoin de temps pour me remettre les idées en place, loin de lui.

Je me suis réveillée à 12h30 et j'appelle une pizzeria pour qu'elle vienne me livrer à domicile. Je n'ai pas envie de faire la cuisine. Aujourd'hui, j'ai juste envie de ne rien faire.

Je me fais couler un bain chaud puis je rentre dedans. L'eau chaude fait un bien fou à mes muscles endoloris. Je me décontracte et je m'apaise. Je m'endors même dans mon bain tellement je m'y sens bien.

Le bruit de la sonnette résonne dans l'appartement et me réveille. J'ai oublié que le livreur devait passer ! J'enroule une serviette autour de mon corps, prends mon porte-monnaie posé sur le meuble de l'entrée et je vais ouvrir la porte.

Je reste bloquée sur le seuil de la porte. La dernière personne que je veux voir se tient devant moi.

- Qu'est-ce que vous faites là ? je demande en essayant de prendre un ton détaché.

- Je voulais voir comment tu vas. Hier, un homme a été assassiné sous tes yeux et je me souviens comment tu as réagis quand tu as tué pour la première fois et on m'a dit que tu étais malade. Alors j'ai fouillé dans ton dossier et j'ai trouvé ton adresse donc je suis venu prendre de tes nouvelles.

- Vous n'avez pas de boulot aujourd'hui ?

- J'ai donné mes missions à l'équipe, elle s'en chargera.

Le fait qu'il s'inquiète pour moi et qu'il vienne jusque chez moi pour prendre de mes nouvelles ne me laisse pas indifférente.

- Et pourquoi vous avez la pizza que j'ai commandé dans les mains ?

- Quand je suis arrivé, le livreur était devant ta porte alors je l'ai débarrassé.

- Je vous dois combien ?

- Je te l'offre. Peux-tu me laisser entrer ?

Je m'écarte de la porte et je le laisse entrer dans mon appartement, c'est la moindre des choses après son geste attentionné pour venir me voir. Il pose la boîte sur la table à manger et s'assoit sur une chaise. 

Je suppose qu'il compte manger ici aussi puisqu'il a payé le déjeuner. Je vais m'asseoir en face de lui. Il me regarde bizarrement, semblant être amusé.

- Qu'est-ce qu'il y a ? je demande sur la défensive.

- Tu comptes manger en serviette ?

Ce n'est qu'à ce moment que je me rends compte que je ne suis pas habillée. Une chaleur s'empare de mes joues et je m'empresse d'aller dans ma chambre. J'ai accueilli mon patron en serviette ! Je me frappe la tête pour me punir de mon imbécillité.

Je m'habille en vitesse et je retourne au salon. Je découvre Monsieur Zach devant le frigo. Décidément, il est sans gêne.

- Je me permets de prendre une bière, je peux ?

- Ce n'est pas comme si mon accord allait changer quelque chose.

Il rigole et se sert. Il en décapsule deux et m'en tend une. Je le remercie. On va se rasseoir à la table et lorsqu'il ouvre la boîte, il fait une mine horrifiée.

- Tu dois bien être l'une des seules personnes à prendre une pizza hawaïenne ! Qui aime mélanger le sucré et le salé ? Ça ne se mélange pas ! C'est comme l'huile et l'eau !

- Vous y avez déjà goûté ?

- Non et ça ne me tente pas.

- Toujours à juger sans connaître. Goûtez et vous verrez que vous ne pourrez plus jamais vous en passez.

Il me regarde sceptique.

- Ou alors ne mangez pas, crevez de faim et laissez moi tout manger parce que moi je ne m'en priverai pas.

Comme pour accentuer mes propos, je prends une part de pizza et je commence à la manger. Il en prend une à son tour et l'apporte à sa bouche. Je le regarde pour voir quelle va être sa réaction.

Au début il fait une grimace puis son visage se décontracte et il dit :

- Au final, ce n'est pas si mauvais t'as raison.

Je souris et je continue de manger tout en buvant ma bière.

- T'as du whisky ? me demande Monsieur Zach en me montrant sa bouteille vide.

- Dans le placard du bas, là-bas, je lui dis en lui montrant un placard.

Il va se servir et nous sert deux verres.

- En quel honneur on boit ? je demande curieuse.

- Aujourd'hui, c'est mon anniversaire.

- Sérieux ? Joyeux anniversaire ! Vous ne le fêtez pas avec vos amis ou votre famille ?

- Je suis seul.

Je reste interdite face à sa révélation. Moi aussi je suis seule, j'ai toujours été seule mais je ne m'attendais pas à ce que lui le soit. Je l'imaginais entouré d'un grand cercle d'amis avec qui faire la fête. Et je ne m'attendais à ce qu'il fasse sa révélation comme ça. 

Mais je suppose qu'à force, on s'y habitue et ça n'a plus tellement d'importance. Exactement comme moi. Peut-être que nous ne sommes pas si différent l'un de l'autre finalement.

- Ça vous fait quel âge, sans vouloir être indiscrète ? je demande pour changer de sujet car il me met légèrement mal à l'aise.

- 22 ans.

Il a donc trois ans d'écart avec moi. Ce n'est pas si grand que ça, je l'imaginais un peu plus vieux, 25 ans peut-être.

- Tu es née quand toi ? il me demande à son tour.

- Le 21 mars.

- C'est le jour du printemps. Tu sais, la semaine prochaine c'est le Nouvel an. L'équipe va la fêter à l'organisation. Tu veux venir ?

Je hoche la tête. Je n'ai rien à faire pour le nouvel an de toute façon donc ça ne me coûte rien d'aller le fêter avec mes camarades.

On finit notre verre qui était plutôt bien rempli puis je débarrasse les bouteilles tandis que Monsieur Zach jette le carton à la poubelle. Sans faire exprès, je fais tomber une des bouteilles qui se brise en mille morceaux sur le sol.

Je jure puis me baisse pour ramasser les bouts mais Monsieur Zach fait la même chose. Nous nous retrouvons tous les deux accroupis l'un en face de l'autre, nos visages se trouvant à quelques centimètres. Nos regards se croisent. Il me regarde droit dans les yeux.

Je sens une tension s'éveiller en moi. Le grand verre de whisky en plus de la bière font que lorsque Monsieur Zach se penche vers moi, je fais de même sans réfléchir.

Nos lèvres entrent en contact et cette fois les sensations sont encore plus forte. L'adrénaline ne parcourant plus mon corps comme hier, le reste a pris entièrement possession de mon corps.

Mes lèvres bougent contre les siennes et nous nous relevons. J'enfonce mes mains dans ses cheveux alors qu'il me tient fermement par la taille. Je commence à avoir chaud et je perds les pédales. Je suis submergée par toutes ces nouvelles sensations.

Il descend m'embrasser dans le cou ce qui me rend folle. Je ne comprends pas pourquoi mon corps est si réceptif à son contact. Pourquoi ne l'a-t-il jamais été avec mes victimes ?

Il remonte pour de nouveau m'embrasser avec passion lorsqu'une sonnerie de téléphone retentit. Je me détache à contre cœur en reconnaissant la musique de mon portable.

Je marche jusqu'au meuble de l'entrée et je vois le prénom de Nathan, un de mes coéquipiers de Londres. Pourquoi m'appelle-t-il ? Je décline l'appel, je le rappellerai quand Monsieur Zach sera parti.

- Pourquoi tu ne décroches pas ? C'est qui ? me demande mon patron.

- Personne.

- C'est ton petit ami ?

- Non !

Il me regarde attentivement et murmure un "Si ça l'est". Je soupire et je lui dis :

- Tu ferais mieux d'y aller.

Il hoche la tête et il prend sa veste. Alors qu'il allait sortir, il se retourne et il me dit :

- T'aurais pu me dire plutôt que tu étais prise, ça aurait empêcher tout ça.

Puis il claque la porte sans même me laisser le temps de répondre. Je passe mes mains sur mon visage. Je viens d'embrasser mon patron. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ? En plus maintenant il croit que je suis en couple. Comment vais-je me sortir de cette histoire ?