Chapitre 34
Aedan
Nayeli vient de quitter la pièce, et je continue de caresser les cheveux d'Hadès, qui est heureux de voir notre frère.
Je le jure, sur tout ce que j'ai de plus cher, que je vais lui faire payer. Rien à foutre de tuer ces potes. Nayeli m'en voudra peut-être, mais j'ai d'autres choses à penser.
Après deux-trois minutes, nous nous séparons d'Adriel, et l'infirmière revient. Hadès me fait une tête bizarre la concernant, et j'essaye de garder mon professionnalisme devant elle, même si ce con m'en empêche.
Elle nous indique qu'il a besoin de repos à présent. En gros : dégagez. Ayant compris le message, nous faisons au revoir à Adriel, lui promettant de revenir tous les jours, et Hadès referme doucement la porte.
— Toi, m'indique Hadès, menaçant.
Je ne prête pas attention à sa réplique, puisque je sais pertinemment ce qu'il veut me dire. Je n'ai pas spécialement envie d'en discuter maintenant. Des choses plus importantes sont à traiter.
Je me sors une clope, en me dirigeant vers l'entrée principale. Même si j'essaye d'arrêter, je ne peux pas m'empêcher d'en taffer une pour oublier mes problèmes, qui sont d'une gravité hors norme actuellement.
Je passe dans le salon, et croise Nayeli, qui a le regard dans le vide. En regardant autour de moi, je ne remarque personne. Je me dirige avec hâte vers elle.
Ma nouvelle copine me regarde, les sourcils froncés, et j'en profite pour lui faire un léger baiser. Cela l'étonne, mais elle me fait un sourire chaleureux, qui me donne envie de tout casser.
Je repars, satisfais. Je croise Hadès, qui a les yeux exorbités, et m'approche peu à peu de la porte. J'allume ma clope, en poussant le battant.
— Je t'ai vu ! crie-t-il, alors que je prends de la distance avec lui.
Je rigole, m'installe contre la rembarde, et fume un bon coup. Ce n'est pas très bon pour la santé, mais parfois, j'en ai plus que besoin. Putain, faut vraiment que j'arrête.
Hadès ouvre une nouvelle fois la porte, et fonce sur moi. Je sens qu'il va m'engueuler d'une puissance. Même si d'un côté, il est très content, car il attendait ça depuis un moment.
— Tu peux m'expliquer ?
— On dirait que tu viens de voir la fin du monde, m'exprimé-je simplement, en recrachant la fumée.
— J'ai vu pire. Une atrocité !
— Arrête un peu, soufflé-je.
— Tu sais très bien que je déconne mec. Je suis très content pour toi. Tu la kiffais depuis un moment, et je suis heureux de savoir que c'est réciproque. Tu le mérites. Elle est géniale cette petite.
Je remercie Hadès. Il sera toujours heureux pour moi quand quelque chose de bien survient. Sauf quand je me suis mis avec Esther. Ce jour-là, il avait tiré la gueule.
Je vois, à travers les fenêtres, la femme que j'aime qui commence à faire n'importe quoi avec Cristina. Je les entends rire d'ici, et elles commencent à se poursuivre.
— Mon dieu, ces femelles, s'exapère Hadès.
— J'en peux déjà plus, tonné-je.
— T'en as pour un moment mon pote, rigole-t-il. Elle ne va pas te lâcher de sitôt.
Je me contente de rire, mais ce qu'il me dit me rassure un peu au fond. Je ne veux pas qu'elle me lâche surtout. Je ne m'étais pas autant attaché à une fille depuis deux ans, elle ne peut pas me faire le même coup.
Hadès me prend la clope des mains, l'éteint, et la balance dans la petite poubelle extérieure. Je proteste, mais il s'en fiche et rentre à nouveau dans la maison.
Je décide de le suivre, essayant de me venger du coup qu'il vient de me faire. Il rentre dans mon bureau et je peux voir que mes hommes ont travaillés à la tâche. Il n'y a plus le signe.
— Je savais que t'allais me suivre. Il faut absolument qu'on parle Aedan. Si cet homme est revenu dans ta vie, il faut s'en débarrasser à tout prix. Tu mets en péril la vie des gens que tu aimes.
— Putain, mais qu'est-ce qu'il veut, déploré-je.
— À ton avis. Il te veut toi. À la base, il voulait le cartel. Dix ans plus tard, il ne l'a toujours pas et c'est toi à la tête de celui-ci.
Je soupire, en m'affalant sur mon siège. Hadès prend une carte du Mexique, et s'approche de moi, tout en récupérant une chaise qui figure sur le côté de la pièce.
— Où se trouve le cartel de Felipe ?
À l'entente de son nom, mon corps se met à réagir violemment, et d'innombrables frissons me parcourent tous les membres. Hadès attend que je termine et repose sa question.
— Mérida, dis-je, la bouche sèche.
— Il faut qu'on attaque son cartel. Nous allons faire comme celui au Pérou. Pas le choix. Même si cela doit enclencher une guerre entre la Bolivie et le Mexique. Tant que cet homme sera mort, le monde se portera mieux.
— Tu ne peux pas dire ça. Tu ne peux pas mettre en danger des milliers de Boliviens, pour ça.
— Je te parle concernant les cartels. Juste la guerre entre les cartels. Pas les habitants. Et puis, ce n'est pas que « ça ».
Je soupire, et le laisse gérer les commandes. Je suis tellement à l'ouest que j'aimerais dormir un peu. Pourquoi c'est toujours à moi et à Hadès de s'occuper de tout ?
— Nous allons brûler leur cartel aussi. Les Secrètes viendront avec nous, elles serviront de snipeuses. Ça sert toujours, comme la dernière fois avec l'autre fou.
Je fais un bond sur mon siège, et le regarde, incrédule. Il ne comprend pas bien ma réaction, et je commence à regarder de partout, essayant de chercher une solution.
Il est hors de question que Nayeli y aille. Cet homme est trop dangereux, et je ne peux pas me dire qu'un drame est vite arrivé. Parce que je ne peux pas la perdre dans les mains de Felipe, elle aussi.
Hadès se lève et vient se placer derrière moi. Il commence alors à me faire un massage des épaules, pour tenter de me décontracter. J'ai juste envie de m'emmitoufler à jamais.
— Je sais, murmure Hadès. Mais si Victoria et Cristina sont là, elle ne craint rien. Tout se passera bien, elle ne mourra pas.
— Non, je ne sais pas. Même si je sais que les filles seront toujours là pour l'aider et la protéger de tout danger. J'ai peur que tout chavire au dernier moment, et qu'il m'enlève la seule chose qui me fait du bien en ce moment.
— Et il en est capable, chuchote Hadès, meurtri.
Évidemment qu'il en est capable. C'est même facile à prévoir qu'il le fera. Nayeli est devenue quelqu'un de si important pour moi, qu'il fera tout pour l'avoir, et me détruire la vie.
— Il ne faut que cela arrive, Hadès. Je ne survivrai pas.
— Il faut qu'elles viennent, Aedan. C'est une chance de plus de notre côté. En tant que snipeuses, elles peuvent nous tuer des ennemis à distance et nous faciliter la tâche. Mais elles ne seront pas exposées à l'ennemi.
— Qu'est-ce que tu proposes alors ?
— Il faut les attaquer dans la soirée, entre vingt-et-une heure et minuit. Je ne vois pas d'autres explications, et il faudra être plus bien prudent que chez les Péruviens.
— Oui, je pense que c'est une bonne idée. Mais du coup, nous ne pouvons pas cramer leur cartel ? Ils ne seront certainement pas dedans, le soir ils seront dans les bars.
— Quel jour sommes-nous après-demain ?
— Le cinq mai ? répondis-je.
— Exactement. Qu'est-ce qu'on fête le cinq mai au Mexique ?
— Putain, l'anniversaire de la bataille de Puebla.
- Tout à fait ! Ça veut dire qu'ils seront chez eux en train de faire la fête. C'est une des traditions.
Comment ce jour peut tomber aussi bien à pic ? Le timing est de notre côté. Même si je suis encore réticent à emmener Nayeli, il faut que je vois la réalité : je vais devoir affronter Felipe à nouveau.
— On doit prendre l'avion demain matin vers quatre heures. Nous avons plus de quarante heures de vol, avec des escales et tout.
— Bordel.
— Cela signifie que nous partons le quatre mai, que nous arrivons à vingt-heures, le cinq mai, heure bolivienne. Mais si nous enlevons deux heures à cause du décalage horaire, nous devrions être là-bas pour dix-huit heures. Ce qui nous laisse le temps de nous préparer.
— Je te fais confiance là-dessus, prononcé-je d'un air grave. Nous devons être à l'aéroport pour environ trois heures trente, demain.
— Fais quelque chose cet après-midi. Pense à autre chose. Je m'occupe de tout et tu peux me faire confiance. Mais n'excluons pas que cela peut mal se passer. Il faudra alors faire preuve de calme et de patience. Nous serons là Aedan.
Je me lève, le remercie d'un geste sur l'épaule, et quitte la pièce. Il a raison. J'ai besoin d'air, besoin de décompresser. Il y a des chances que cela se passe mal, et cela serait totalement normal. Ils sont dans un cartel puissant, et sont aussi stratégiques que nous.
Je cherche Nayeli du regard. J'ai besoin d'elle pour cet après-midi. J'aimerais bien passer quelques heures avec elle dans la ville. Je n'ai jamais fait ça, et comme on dit, il ne vaut mieux tard que jamais.
Ne la trouvant pas, je cherche Victoria ou Cristina du regard. Elles seront forcément où elle est.
Bingo. Je trouve Cristina, dans la cafétéria. Elle est en train de manger une pomme en surfant sur le web. Je m'approche d'elle à pas distincts.
— Que me vaut la visite du chef ? chantonne-t-elle, en ne se retournant même pas.
— Où est Nayeli ?
— Là, indique une voix que je ne connais que trop bien.
La petite tête de ma copine sort des cuisines, et elle a le nez plein de farine. Mais qu'est-ce qu'ils font là-dedans ?
Je souris narquoisement, et la rejoins. Je lui essuie le bout du nez, et elle rigole de bon cœur.
— Dis-moi. Qu'est-ce que tu fous ?
— C'est la faute de Victoria.
— Eh ! Je n'ai jamais rien demandé moi. C'est toi qui voulais faire un dessert à Aedan, pas moi.
Nayeli rougit, et baisse instinctivement la tête en se triturant les mains. Quant à moi, mon cœur explose. Elle voulait me faire un gâteau ?
— Enfin, ce n'était pas grand-chose ! proteste-t-elle.
— Je te l'emprunte, achevé-je.
Sans lui laisser le temps de rétorquer, je prends la main de Nayeli, et l'emmène dans sa chambre afin qu'elle se prépare.
— Tu veux faire quoi là, rigole-t-elle.
— Tu viens faire une balade avec moi.
— Quel romantisme, j'adore !
Elle a le sourire qui me fait péter les plombs, et je me sens heureux de la voir comme ça. Putain, mais est-ce que j'ai déjà ressenti ça pour Esther ?
Une fois rentrés dans sa chambre, j'attends qu'elle se lave un peu et s'habille. Pendant ce temps, j'admire mes tatouages. J'en ai plus d'une vingtaine.
La porte de la salle de bain s'ouvre, et elle sort. Habillée d'une petite robe à fleur qui lui arrive juste au-dessus de ses genoux, elle est coiffée en petite queue de cheval, avec un élastique qui laisse des traines derrière.
Je ne sais pas comment ça s'appelle, mais mon cerveau s'en fiche. Elle est belle, et c'est tout ce qui compte.
Voyant mon regard qui passe de ses chaussures à ses pieds, elle serre son petit sac à main en cuir noir avec des chaînes, et se regarde à son tour.
— Ce n'est pas bien ? s'inquiète-t-elle.
Je m'approche d'elle, l'attrape par la taille et lui fais un baiser sur le front. Je la garde contre moi quelque instants, et je soupire de bonheur.
— T'es parfaite.
Nayeli sourit, me prend la main, et nous partons de la chambre. Ignorant les regards de mes hommes, et celui coquin d'Hadès, nous quittons la résidence.
— Il y a bien une vingtaine de minutes pour aller à Padcaya, non ?
— Oui. Tu veux y aller à pied ?
Je secoue la tête, et commence à marche le long du sentier réservé aux riverains. Nous parlons alors pendant une vingtaine de minutes. Elle me raconte les conneries qu'elle a faites ce matin avec Victoria, et pour la deuxième fois, j'oublie mes fonctions et mes problèmes qui m'attendent au cartel.
Nous arrivons alors au centre-ville de Padcaya. C'est une petite ville, mais il y a tout ce qu'il faut. Et maintenant que nous sommes là, je me sens bête. Je ne sais pas ce que l'on va faire de cet après-midi.
De son petit corps fragile, elle me tire vers une boutique de robe. Je n'ai jamais fait ça, mais je me dis que c'est le moment d'essayer de nouvelles choses.
Nayeli pousse la porte, et salue la vendeuse, qui me lorgne un peu trop à mon goût. Je ne veux pas paraître méchant, au point de me faire jeter, mais je ne veux pas qu'elle me regarde comme ça. Qu'une seule personne en a les droits.
— Bonjour ! s'extasie-t-elle. Bienvenue chez nous. Que recherchez-vous précisément ?
— Oh, je ne sais pas trop, explique Nayeli. Je voulais juste m'acheter une jolie robe.
— Vous faites quelle taille madame ?
— Du M.
Cela étonne la vendeuse, qui s'apprête à rétorquer quelque chose. Mais je crois que mon regard l'en dissuade. Elle emmène donc ma petite protégée à travers des milliers de robes.
Ce qui est pratique, c'est que comme je fais un mètre quatre-vingt-dix, je dépasse les rangements de robes. Ce qui me permet d'avoir un visuel permanent sur cette femme intrigante qu'est Nayeli.
Elle récupère trois robes, et court, carrément, vers la cabine d'essayage. Je me dirige vers celles-ci. Putain, mais je suis même un peu plus grand que les cabines, ça va plus.
Nayeli sort avec une première robe. Elle est vert clair, ce qui tonne bien avec l'été qui arrive. Elle possède un décolleté, les bretelles sur les bras, et la robe est longue, jusqu'à ses pieds.
— Jolie, pas jolie ? me demande-t-elle en se regardant dans le miroir.
— Tu seras toujours jolie, peu importe ce que tu portes.
Elle court, de nouveau, jusqu'à sa cabine, pour que je ne voie pas la gêne qui a masqué son visage. Trop tard, petit ange.
Elle ressort quelques minutes après, avec une robe bleu foncé. Elle possède un anneau doré au-dessus de la poitrine, et elle lui arrive aux genoux. De nouveau, il n'y a pas de manches, juste deux bouts de tissu qui relient la robe devant et derrière.
Encore une fois, je ne connais pas les mots utilisés en mode. C'est compliqué du coup.
— Je veux elle ! s'exclame-t-elle.
- Et la dernière ?
— Elle était rose, mais celle-ci m'a plus convaincu.
Elle rentre dans la cabine, et me tend la robe bleue pour que je la tienne le temps qu'elle se change. C'est elle qui veut payer. Et je le sais, puisque j'ai vu quelques billets de sorti. Ça sort d'où ?
Sans lui dire, je m'approche du comptoir où se trouve une nouvelle fois la vendeuse, et lui tend la robe. Elle la prend, non sans me reluquer une nouvelle fois, et la scanne.
Je paye la robe, lui assène un « Merci » sec, et rejoins Nayeli qui vient de sortir des cabines.
— Tu as payé ? note-t-elle, les yeux ronds.
— Oui, articulé-je. Allez vient.
Je lui prends la main, sans la laisser parler en retour. Elle me fait un câlin en guise de merci, et prend le sac dans son autre main.
Nous passons alors l'après-midi à faire toutes sortes de choses. Elle a tene à me payer une chemise, alors j'en ai pris une qui m'allait plutôt bien, vu comme elle regardait mes muscles à travers.
Nous avons également fait le goûter, en prenant des glaces et en allant se poser dans le parc.
Je n'ai jamais vécu ça de ma vie. J'ai l'impression d'être libéré d'un poids. C'est l'après-midi qu'il me fallait avec la personne qu'il me fallait.
Alors que nous sommes toujours allongés sur l'herbe, sa tête posé sur mon épaule, je l'embrasse dans les cheveux, remerciant la bénédiction qui m'a été offerte.
Mais, une chose continue à me brûler le cerveau. Je ne peux pas m'en empêcher. Quand nous ne faisons rien, cette peur est là, revient sans cesse.
Et si la mission se passait mal, et que Nayeli en payait les conséquences ?
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