Chapitre 3
Je ne sais pas depuis combien de temps cela fait que je suis là.
Je ne sais pas depuis combien de temps cet enfoiré a osé me tailler. Et encore, il y a été mollo. Ce n'était que le début de cette infâme torture.
J'ai soif et j'ai faim. Je n'ai rien eu depuis que je me suis réveillée ici. J'ai envie d'aller aux toilettes, mais aucune envie d'essayer ces satanées toilettes. D'autant plus que mes jambes sont meurtries, et que mes mains sont toujours liées derrière mon dos avec un fil très gros et solide.
Je ne contrôle plus du tout mon corps. Il ne fait que trembler, et n'a qu'une peur : qu'Hadès revienne et recommence son petit manège. Ce qui va certainement arriver. Ils ne vont pas s'en tenir là.
J'entends des cris. Des cris d'autres prisonniers qui ne veulent que sortir et arrêter de se faire torturer :
— Non, arrêtez ! Je vous en supplie, je ferais tout ce que vous voudrez, mais ne me touchez plus. Vous allez me tuer ! hurle une voix inconnue.
— Si tu penses que j'en ai quelque chose à foutre, rigole une voix qui me semble reconnaissable. Tu n'as pas ouvert ta gueule lorsqu'Aedan te l'a demandé, alors tu mérites tout ce qu'il t'arrive. Si tu avais juste dit où était ton collaborateur, tu serais peut-être sorti d'ici. Quoique non, on t'aurait gardé un peu pour te faire un peu de mal.
— Vous êtes complètement malade ! Je n'ai pas de collaborateur, je ne comprends rien de ce que vous me reprochez ! Je n'ai aucun contact avec cette personne. Pourquoi vous pensez que je n'ai rien dit ? Parce que je n'ai rien à révéler ! Pour la centième fois, arrêtez de me toucher, parce que je ne mérite pas le traitement que vous me faites vivre !
— Ferme ta gueule, lance la voix.
Un bruit assourdissant emplit le sous-sol dans lequel les prisonniers se trouvent. J'entends un hurlement de la voix de cet homme. Pourquoi je le crois ? Quels monstres ils sont. Ça se trouve, il n'a vraiment rien demandé et ces enfoirés lui font du mal et détruisent sa vie !
Et ça se trouve, c'est exactement ce traitement qui m'attend si je continue de fermer ma bouche. Mais comment réussir à l'ouvrir, en sachant que ma sœur risque de mourir sous les mains de ce cartel, et que ma famille sera en péril ?
J'ai beau ne pas être très courageuse, je ne peux pas laisser ma famille crever parce que j'ai décidé de laisser parler ma langue. Sachant qu'il y a des chances que si je crache le morceau, il me tue quand même. Cela changera donc quoi que je parle ?
J'entends des pas arriver près de ma cellule. J'essaye de bouger pour aller vers le fond, mais c'est une nouvelle fois, perdu d'avance.
Ma jambe ne saigne plus trop, mais les marques de couteau de cet abruti sont encore bien visibles et rouges. Je pense que j'ai vraiment passé le pire moment de ma vie. Et dire que ce n'est que le début. Enfin, je n'espère pas.
Il n'a pas planté le couteau à l'intérieur, et heureusement, sinon, j'aurais bien pu mourir de douleur. J'étais déconnectée à ce moment précis, ne savant plus où j'étais.
La porte de la cellule s'ouvre, et je ne regarde même pas. Je n'ai aucune envie de revoir la tête d'Hadès. Ou pire, celle d'Aedan. Je refuse qu'ils me voient souffrir et qu'ils en jouent.
— Nayeli ?
Mais c'est une voix totalement inconnue qui s'offre à moi. Ce n'est pas la voix perverse d'Hadès ou la voix grave d'Aedan, non. C'est une petite voix, comme si elle ne me voulait que du bien.
Je relève la tête et croise des beaux yeux châtains qui me regardent avec tendresse. Bon dieu, il fait réellement parti d'un cartel sanglant lui ?
Ses cheveux noirs lui retombent dans les yeux, et il me sourit. Je me sens, pour la première fois, un peu plus en confiance avec celui-là qu'avec les deux autres tortionnaires.
— Ne t'inquiète pas, ce n'est pas moi qui vais te faire du mal. Je suis particulièrement contre le fait que l'on te touche puisque tu n'as rien fait, mais bon.
— Qui êtes-vous ?
— Oh, ta soeur t'a peut-être parlé de moi. Je suis l'homme avec qui elle a couché, s'explique-t-il, devenant mal à l'aise.
Alors c'est lui qui a trouvé la carte d'agent de ma soeur qu'elle a fait tomber. C'est à cause de lui que je me retrouve dans cette situation de merde !
Je sens ma rage monter petit à petit. J'ai envie de le démolir. Ma main droite se met à trembler autant de rage et de peur.
— C'est à cause de toi !
Il a l'air très surpris de mon ton agressif. Et puis, on repassera le vouvoiement et la politesse. J'en ai plus que marre.
— C'est à cause de toi que je me retrouve ici, et que toute ma famille est en danger !
— Tu ne comprends pas Nayeli, se défend-il. J'en ai beaucoup trop dit à ta sœur, j'avais bu, et j'ai complètement oublié de ne rien dire. J'ai beau ne pas avoir le charisme d'Aedan, ni le corps d'Hadès, mais je fais tout de même parti de ce cartel. Et je ne peux pas le voir couler juste à cause d'une erreur débile de ma part.
— Mais alors pourquoi, pourquoi me kidnapper ? Je n'ai strictement rien fait dans l'histoire, je n'étais même pas au courant qu'Inaya avait couché avec un membre du cartel, je ne savais rien de tout ça ! Je l'ai appris, il n'y a pas longtemps.
— J'ai été contre cette idée, tu sais. C'est Aedan qui a voulu qu'on kidnappe un membre de ta famille pour faire pression sur elle. Tant que nous t'avons dans nos filets, ta sœur ne pourra pas parler, et c'est exactement ce que nous voulons.
Un silence s'installe. Un silence très douloureux, où je remets en place toutes mes idées. Je peux le comprendre, devoir désobéir au grand Aedan ne doit pas être une très bonne idée, et il doit être parfaitement au courant de cela.
Il a l'air de se rendre compte que je suis assez énervée, alors il s'accroupit devant moi, toujours ce regard réconfortant.
— Écoute Nayeli. Je sais que c'est très difficile ce qu'ils te font vivre et sache que je suis totalement contre. Mais c'était toi ou ta sœur.
— Inaya ? Forcément, c'est elle qui a toutes les informations, c'est donc elle qui devrait être à ma place, même si c'est égoïste de le dire !
— Je ne parle pas d'Inaya, Nayeli...
Pardon ? S'il ne parle pas de ma grande sœur, alors il parle d'Eva, ma petite sœur que j'essaye de protéger par tous les moyens de la dangerosité de ce pays.
— C'est une blague ? craché-je.
— Hadès et moi hésitions entre Eva et toi. Puisque tu travailles en criminologie et que tu possèdes pas mal de réflexes, on se disait que tu allais être très compliqué à attraper. Cependant, comme ta sœur est plus jeune, elle est plus naïve et elle est facilement manipulable.
— Comment avez-vous pu...
— Laisse-moi terminer, me coupe cet homme dont je ne sais toujours pas le nom. Mais Aedan était fixé sur son objectif. Et son objectif, c'était toi. Ne me demande pas pourquoi, ni moi, ni Hadès n'avons compris son choix. Mais nous l'avons respecté et c'est pour cela que tu es ici.
Toutes ces informations me donnent la migraine, et ma jambe commence à vraiment me faire souffrir.
— Je vois qu'Hadès n'y est pas allé de main morte, souffle-t-il.
— Non, tu crois ?
Je pense que mon ton était légèrement agressif. Mais j'en ai marre de rester dans ce trou à ras, à avoir la dalle et vouloir boire. Si leur but c'est de me tuer sans même me torturer, alors c'est bien parti.
— J'ai pris quelques soins. Je ne suis normalement pas trop autorisé, mais au vu des dégâts d'Hadès, je n'ai pas le choix. Au fait, moi c'est Adriel !
Je le regarde d'un drôle d'air. Pourquoi il veut absolument paraître gentil ? S'il est inclus dans ce cartel, comme il le dit, il ne devrait pas être comme ça avec moi.
Il revient avec du matériel, de quoi me soigner ma belle jambe endolorie. Il prend un désinfectant pour nettoyer mes plaies, et le liquide me brûle la peau. C'est vraiment là que je me rends compte qu'il n'y a pas été de main morte.
Adriel passe alors les minutes à me soigner minutieusement. Il fait attention à chacun de ses mouvements, et me soigne délicatement. Ma jambe me fait toujours mal, mais c'est déjà mieux comme ça.
— Voilà, ça devrait aller mieux ! s'exclame-t-il, content de son travail. Je vais te laisser, je ne suis pas trop autorisé à venir faire un coucou à nos prisonniers, et encore moins à les soigner.
Je le remercie d'un mouvement de tête. Il s'apprête à repartir, alors j'ouvre la bouche juste avant, une question me brûlant les lèvres.
— Excuse-moi.
— Oui Nayeli ? exprime-t-il en se retournant.
— Je sais que c'est peut-être un peu culotté, mais j'ai très soif et faim, je n'ai rien mangé ni bu, depuis que je suis ici.
— Ah là là, soupire Adriel. Si ces deux-là veulent te faire mourir de faim, ils sont bien partis. Je reviens dans une petite heure avec ce qu'il te faut !
Je reste sidérée face à sa remarque. Je pensais qu'il allait me laisser crever par la suite, mais non, il continue d'être aimable envers moi. Et je suppose qu'il doit l'être avec tous les autres prisonniers.
Pourquoi un garçon aussi gentil et peu d'accord avec des êtres sanguinaires reste dans ce cartel ? Je n'aurais probablement jamais les réponses à toutes mes questions.
Je passe quelque temps à attendre, accroupie avec mes bandages. Jusqu'à ce que je remarque un vieux bout de verre qui brille à ma droite. Mais qu'est-ce que ça fait là ?
Une illumination traverse mon pauvre cerveau. Et si je l'utilisais pour défaire ce fil solide ? Peut-être que cela ne va servir à rien, mais au moins, je n'aurais pas de regret.
Je me décale alors doucement, pour éviter encore plus de souffrance à mes jambes et atteins progressivement le bout de verre, jusqu'à ce que je l'attrape doucement entre mes doigts.
Je manipule le bout de verre, pour éviter de me couper et commence à le frotter contre le fil. Je ne sais pas si cela sert à quelque chose, vu que je ne vois pas l'étendue des dégâts que je fais.
Au bout de quelques minutes, je sens une résistance moins lourde sur mon poignet gauche. Je suppose donc que cela marche plutôt bien, et accélère la cadence, jusqu'à ne plus rien sentir sur mon poignet gauche.
Je ramène mes mains devant moi. Seul le fil est resté sur mon poignet droit, mais tant que les deux sont mobiles, je m'en fiche un peu.
Soudain, j'entends deux voix que je reconnais bien. Et ce sont des voix que je ne voulais pas du tout réentendre, du moins pas tout de suite.
Je cache rapidement le bout de verre, et replie mes mains derrière mon dos, faisant mine que je n'ai pas détaché le fil. S'ils le remarquent, je suis définitivement foutue.
Je reconnais facilement les silhouettes d'Hadès et Aedan. Et je ne suis absolument pas ravie de les voir. Je baisse la tête et regarde attentivement mes pieds.
Ils entrent doucement dans la pièce, sûrement en train de me scruter.
— Bon sang Adriel, crache Aedan.
— Oh, je vois qu'il a un petit faible pour elle ! Regarde Aedan, il l'a bien recouvert de bandages, il a fait ça proprement dis donc.
— C'est bon Hadès, ferme là, j'ai des yeux, je peux très bien voir l'oeuvre d'Adriel par moi-même.
Aedan se rapproche de moi, mais étrangement je n'ai pas si peur. Pourtant, ses pupilles bleu foncé me scrutent fortement et me lancent très probablement des éclairs.
— Comment vas-tu ma petite ? dit-il en attrapant mon menton de ses doigts.
Je me dégage de son emprise par un mouvement sur le côté. Aedan sourit face à mon action tout en écoutant Hadès qui lui marmonne quelque chose que je ne comprends pas forcément.
Je suis plutôt concentrée sur les pupilles qui ne font que me regarder. Elles essayent d'aller au plus profond de mon âme, et de trouver les réponses qu'elles cherchent à travers.
— Aedan, tu m'écoutes ?
— Hein, quoi ? s'étonne le concerné en décrochant son regard du mien.
— Mon vieux, commence Hadès en rigolant. Tu étais tellement plongée dans le regard de cette belle jeune femme que tu ne m'écoutais déjà plus. Je pense que je dois le prendre mal, mais bon ,je te comprends, elle ne m'est pas insensible à moi non plus !
— Ferme-la, marmonné-je.
Aedan sourit, mais d'un vrai sourire franc face à ma remarque. Il doit voir que je tiens tête à Hadès et cela le fait beaucoup rire à l'intérieur de lui.
Quant à Hadès, qui a aussi entendu ma phrase, il se met à rougir comme une tomate et à me regarder profondément.
— Comment elle t'a répondu, rigole Aedan. À ta place, je n'aurais pas aimé !
— Si tu veux mon avis, elle ne te l'aurait jamais dit à toi.
C'est bien Hadès, tu remontes petit à petit dans mon estime. Tu es un minimum intelligent, je suis fière de toi.
— C'est exact ? me demande alors Aedan en replongeant ses beaux yeux dans les miens.
— Arrête Aedan, me coupe Hadès en s'approchant rapidement de lui, et en mettant sa main devant ses yeux. C'est une sorcière, elle t'ensorcèle avec ses yeux ! Fais très attention, tu es en train de tomber dans son piège. Si j'étais toi, je reculerais un peu.
— Idiot, souffle Aedan en enlevant sa main de devant ses yeux.
Dans cette situation, j'aurais dû rire ou même réprimer un sourire. Les deux ont l'air d'être très complices et bien s'entendre. On dirait juste deux amis qui se chamaillent. Mais je ne trouve pas la situation drôle. Loin de là.
— Bon, amène-moi les menottes.
Ce changement de ton soudain dans l'air me surprend. De quelles menottes parlent-ils ? Ils auraient cramé que je me suis détachée ? Comment cela est possible ?
Aedan, comme pour répondre à ma question, m'attrape le poignet droit, là où il me reste le fil. Il fait un sourire mauvais avant de reprendre son exploration dans mes yeux.
J'ai envie de pleurer. Comment peuvent-ils savoir, alors que j'ai fait en sorte de bien les cacher et de ne pas les faire apparaître ?
— Ne pleure pas, chuchote Aedan en enlevant une larme avec son pouce.
Son ton est malsain. Je sais très bien qu'il ne pense pas ce qu'il dit. Il doit être très heureux de me voir pleurer, au fond de lui.
Mes pleurs s'amplifient à mesure qu'il reste près de moi. Je veux rentrer chez moi. Je veux me réveiller de ce cauchemar, et oublier ces visages qui me hanteront des années.
— Maintenant, déclare-t-il en m'attrapant par les cheveux et en m'attirant de nouveau vers lui. Tu vas me communiquer les informations dont j'ai besoin pour retrouver ta sœur. Et tu as intérêt à me dire tout ce dont j'ai envie, sinon Hadès ira plus fort.
Je ne peux m'empêcher de ressentir un frisson me déchirer la colonne vertébrale. Non, je ne veux plus qu'il me touche. Je ne veux pas qu'il fasse pire que sur ma jambe. Déjà que c'était une douleur infâme, je ne veux pas imaginer le reste.
— Tu sais, des gens sont tombés pour moins que ça. Tu as de la chance d'être encore en vie, j'espère que tu t'en rends compte. Tu restes sur ta position ? Tu ne veux pas me dire ?
— Je préfère que vous couliez avec moi.
Aedan resserre son emprise sur mes cheveux. Il sait très bien que j'ai raison. Plus j'attends pour parler, plus ma sœur a le temps d'aller dénoncer le cartel aux autorités.
— Cette sale garce, exprime Aedan en me relâchant violemment.
Je me rattrape facilement et vois Hadès arriver avec des menottes qui sont rattachées à des ... boulets ?! Les machines lourdes qui vont me détruire les poignets.
Je commence alors à me débattre et à vouloir frapper Hadès, mais c'est clairement perdu d'avance. Je ne peux pas me servir de ma jambe, et Aedan m'écrase la deuxième avec son énorme pied. Ce qui commence à me faire sacrément mal d'ailleurs.
Hadès m'installe donc ces menottes tandis que j'essaye toujours de me débattre. Même si je dois mourir, je veux avoir tout donné avant de partir !
Une fois les menottes mises, je me rends compte de la lourdeur de ce qu'il vient de me mettre. Avec ça, c''est sûr, impossible de me détacher et de m'échapper. Ils sont tranquilles pour un moment.
Aedan enlève son pied de ma jambe et s'accroupit près de moi. Si ma main était libre, je pense que je lui en aurais collé une. Non Nayeli, arrête un peu de faire celle qui est trop forte, tu n'aurais rien fait du tout.
Il me regarde de nouveau droit dans les yeux. Et nous repartons vers un autre monde, comme tout à l'heure. J'ai l'impression de voir tout le passé d'Aedan, tout ce qu'il a enduré, mais que les gens ne savent pas. Je vois sa peine, sa colère contre le monde entier.
Lui doit également voir tout ce que contient ma vie. Il est facile de lire en moi et j'ai l'impression que nos esprits ne font plus qu'un.
— Dommage de ne pas avoir ouvert ta bouche. Tu vas très vite le regretter crois-moi. Tu es à moi maintenant Nayeli, et tu le resteras jusqu'à ce que j'ai le sang de ta sœur sur mes mains.
— Je ne vous laisserai pas faire.
— Essaye donc, m'intimide-t-il avec un faux sourire. Je suis très curieux de savoir ce que tu as à offrir, Nayeli Toledo.
Aedan se relève et discute de quelque chose avec Hadès, dans le creux de son oreille. Pour ma part, je suis toujours aussi perdue qu'avant. Toutes ces informations ne font que me donner la migraine, ma soif et ma faim jouant certainement à quelque chose.
— Ah, et une dernière chose, Nayeli.
Je relève la tête et croise les prunelles d'Aedan. Il passe sa vie à me scruter ou c'est comment ?
— Tu vas m'être très utile par la suite.
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