Chapitre 25
Je tourne en rond depuis maintenant dix minutes, sans trouver d'occupations. J'ai bien essayé de reparler avec l'homme, mais il n'a pas voulu ouvrir sa bouche. J'avais l'impression d'être le diable en personne.
J'ai très envie d'aller faire mes besoins d'autant plus, mais utiliser ses toilettes improvisées ne me dit rien qui vaille, et je préfère ne pas tenter l'expérience.
J'ai réussi à m'endormir par terre, même si cela n'était pas très confortable. Mon manque d'heures a suffit, et j'ai pu profiter de quelques heures de repos.
Bien sûr, je me suis réveillée avec des muscles tout contractés, et j'ai encore mal de partout. Je suis ravie.
Il doit être environ treize heures, et ils sont venus m'apporter un repas, contre toute attente. Je ne sais pas qui a bien pu me l'envoyer, peut-être les filles qui ont insistés.
Mais j'ai vu le regard déchirant de ce monsieur de l'autre côté, qui regardait la nourriture avec envie. Il devait en avoir besoin bien plus que moi.
Alors j'ai attrapé le long bout de pain qui allait me servir de sandwich, et j'ai essayé de lui envoyer. Il est arrivé devant les barreaux, et il s'est empressé de le récupérer pour éviter qu'il soit sali.
Il m'a regardé bizarrement, comme si il était étonné de mon geste, mais j'ai simplement haussé les épaules. J'avais pris à manger dans la voiture ce matin, alors je n'étais pas complètement affamée.
J'ai continué à le nourrir en lui donnant les ingrédients de mon panier-repas. J'ai mangé un peu tout de même, mais je suis heureuse de savoir qu'il a pu se régaler.
Et maintenant, je m'ennuie comme un rat mort. Je cherche quelque chose à faire, histoire que je fasse passer le temps, mais décidément, rien ne me vient à l'esprit.
Je suppose qu'Aedan a refusé les visites car personne n'est venu me voir depuis que je suis ici. Hors connaissant Cristina, elle n'aurait pas tardé à venir prendre de mes nouvelles, afin de s'assurer de ma santé.
J'entends alors des pas qui se rapprochent de là où je suis. Par peur, je commence à me diriger vers le fond de ma cellule. Et si c'était encore un de ces hommes qui venaient me faire du mal ?
À mon grand soulagement, c'est la tête d'Hadès que je vois apparaître devant les barreaux. Il ouvre la porte, et rentre, en la fermant soigneusement.
— Bonjour Nayeli. J'espère que ça va et que tu as pu mangé à ta guise ce midi.
— Oui oui, aucun soucis. Que fais-tu là ?
— Je suis là pour mettre au clair le comportement d'Aedan. Car ce n'est vraiment pas cool de t'enfermer pendant un voire deux jours dans une cellule alors que tu n'as rien fait.
— Ah ça, je ne te le fais pas dire ! Tu n'as pas essayé de l'en dissuader ? Je m'ennuie comme c'est pas permis ici.
— Les filles s'en sont chargés avant moi. Elles le harcèlent depuis ce matin pour au moins venir te voir, mais il décline toutes leurs propositions. Je pense qu'il va finir par être dingue avec leurs bêtises.
Je ne réponds rien, et essaye d'analyser la venue d'Hadès. Je ne sais pas si il est venu de lui-même, ou si c'est Aedan qui l'a envoyé pour s'expliquer, afin de ne pas trop briser son égo.
— Enfin bref, je dois te parler de ce qui s'est passé en Argentine. Car tout ne s'est pas passé comme prévu, et c'est pour cela qu'il est légèrement à cran depuis son retour.
Je tends l'oreille et le regarde attentivement. Il est arrivé quelque chose, et je sens que ce ne sera vraiment pas drôle.
— En bref, nous avons des ennemis au cartel. Les Péruviens et les Mexicains. Ce sont vraiment les pires et ils cherchent tout le temps quelque chose pour nous faire chier.
— C'est bête pour vous, les Mexicains ne sont-ils pas réputés pour être de très bons barons de drogue ?
— Si. Clairement. C'est pour cela que nous sommes en guerre avec eux. Un cartel en particulier avait voulu récupérer le cartel de Caya par la force, en attaquant tout le monde.
Je réfléchis à la situation. Donc un cartel a tenté de faire couler celui-là, pour tenter de le récupérer et de contrôler la Bolivie ? Quelle histoire barbante.
— Les Péruviens nous attendaient en Argentine.
Cette phrase attire tout de suite mon attention, me sortant de ma léthargie. Comment ça ? Cela était programmé également ?
— Ils savaient qu'Aedan et quelques hommes allaient discuter avec un cartel allié pour régler quelques affaires. Ils ont fait un massacre, Aedan et un homme sont les seuls survivants.
Je baisse la tête, attristée. Alors c'est pour cela qu'il réagit comme ça. Cela n'excuse en rien son comportement et le pourquoi du comment, mais je peux comprendre un peu mieux son humeur.
— C'est pour ça qu'il est relativement à cran. Alors quand je t'ai demandé si tu savais pourquoi c'était ta soeur qui était sur les lieux, il a complètement viré.
— Oui, j'ai bien vu cela. J'ai cru qu'il allait me frapper !
— Il ne l'a pas fait. Il a préféré déchirer des livres de collection dans sa bibliothèque plutôt que de te frapper.
Il se rapproche de moi, avec un regard indescriptible. Je ne comprends pas pourquoi il arrive vers moi. Qu'est-ce qu'il lui passe par la tête ?
— Tu ne comprends pas ? Il n'a jamais fait ça pour personne. D'habitude, il n'a aucune pitié à massacrer ses hommes, même si c'est plus rare quand cela concerne les filles. Mais toi, il n'a pas eu une once d'hésitation dans ces gestes, et il a immédiatement reculé quand il a compris ce qu'il faisait.
Je ne saisis pas bien le sens de ses paroles. Où veut-il en venir ? Que je l'ai manipulé ? Je ne comprends vraiment rien, et ma migraine n'ajoute rien.
— Qu'est-ce que tu as fait à mon Aedan ?! s'écrit-il en jouant un air dramatique.
Je ne peux m'empêcher d'exploser de rire. Cela ne fait aucun doute, Hadès n'est pas affecté par ce qu'il s'est passé et reste le même.
— Non pour être plus sérieux, Aedan va vraiment mal Nayeli. Il n'accepte pas le fait que ses hommes soient morts pour le protéger, et qu'ils n'aient pas pu créer vengeance.
— Il compte faire un hommage ? demandé-je d'une voix encore un peu faible.
— Oui c'est prévu demain après-midi. Normalement tu seras sortie, alors tu pourras venir avec les filles. Monica viendra également pour l'occasion.
Je ne sais pas quoi penser sur le fait qu'Aedan soit blessé pour ses hommes. D'un air extérieur, on ne le pense pas du tout comme ça. On le pense juste tortionnaire, et je pensais que la vie de ses hommes importait peu pour lui.
C'est là que je me rends compte que ce n'est pas vraiment le personnage dont tout le monde a peur. C'est avant tout un être humain, avec des émotions et des sentiments. Certes, il a fait des choses qui sont impardonnables, et il en fait encore à l'heure actuelle. Mais il fait tout pour ses hommes et pour les protéger.
Ils ne sont pas comme les autres. Personne ne l'est dans ce cartel. Ils sont tous ici pour tuer des ennemis, et faire de l'argent. Mais derrière, ces êtres ont une histoire, une famille, un avenir.
Quelle est l'histoire d'Aedan ? A-t-il eu une enfance joyeuse ? Comment expliquait qu'il soit aussi froid, aussi distant avec les autres humains ? Qu'a-t-il bien pu vivre pour être dans ce vortex d'émotions néfastes ?
Un raclement de gorge dans le fond du couloir me fige instantanément. Hadès se retourne en haussant un sourcil, et je peux voir Aedan s'approcher.
— Ah tu es là, je te cherche depuis un moment, s'enquit Aedan en ayant le regard par terre.
Pourquoi il n'ose pas lever les yeux ? Il ne veut pas me regarder ? Non c'est impossible, Aedan n'est pas comme ça, il s'en fout.
— Bah alors mon vieux, il t'arrive quoi ? s'amuse Hadès en lui passant le bras sur les épaules, sur la pointe des pieds.
Les cheveux d'Hadès se mêlent n'importe comment puisqu'il ne fait que bouger dans tous les sens. Il s'en rend compte, attrape une mèche pour la mettre devant lui, et pousse un cri d'effroi.
— Mes cheveux ! Pourquoi sont-ils aussi sales ? Oh non, ça ne va vraiment pas le faire. Il faut que j'aille les laver. À plus !
Sans même nous laisser le temps d'ouvrir la bouche, il ré-ouvre la cellule et se barre en courant, me laissant avec un Aedan qui regarde ses pieds, et moi, apeurée.
— Euh, salut.
Je ne réponds même pas. À vrai dire, je n'en ai vraiment rien à foutre qu'il soit là. Je suis plutôt rancunière, et je ne vais pas le pardonner pour m'avoir foutue dans cette cellule miteuse !
Remarquant que je ne compte pas lui parler, il soupire en se passant la main dans ses cheveux qui sont légèrement bouclés.
— Je sais que tu m'en veux pour ce aue je t'ai fait. Je n'avais pas vraiment le choix, tente-t-il.
— Bah oui, c'est sûr que de me jeter dans une cellule, entourée de pauvres personnes qui se font torturer toute la journée est un lieu confortable !
— Je ne sais pas encore comment ta soeur a su que vous seriez là-bas à cette heure. En ce moment, tous nos ennemis foutent nos plans en l'air, et je ne sais même pas pourquoi.
— Une taupe ?
Je jette cette phrase sans réfléchir, ce qui a pour conséquence de faire relever la tête a Aedan. Je crois que j'ai toute son attention, et qu'il n'avait pas vraiment envisagé cette possibilité.
— Pourquoi tu me regardes avec cet air ahuri ? Je ne vois pas d'autres hypothèses. Quelqu'un dans le cartel avertit tous vos ennemis pour que vous ne puissiez rien faire. Sinon, comment ?
— C'est impossible, réfléchit-il à voix basse. J'ai confiance en tous mes hommes, aucun ne pourrait me trahir comme ça.
— T'es bien naïf, ricané-je sournoise en partant m'asseoir par terre. Tu ne sais jamais vraiment le visage des gens. Ils peuvent paraître adorable et serviable devant toi, mais te foutre de véritables coups de couteau dans le dos.
Il ne répond pas, semblant être perturbé de ma réflexion. Il n'y avait sérieusement pas pensé ? Pourtant, il n'y a que comme ça que le cartel peut foutre en l'air toutes ses missions.
— Sinon, où est Adriel ?
Aedan me regarde, l'air interrogateur. Je soupire. Il faut vraiment tout leur expliquer à ces hommes. Ils comprennent rien à mes questions.
— C'est pas compliqué, je te demande où se trouve Adriel. Je ne l'ai pas vu depuis un petit moment.
— Il est parti rejoindre quelques temps sa famille. Sa mère est gravement malade, et il m'a demandé si il pouvait rester un peu avec elle. Il devrait revenir demain normalement pour l'hommage.
Je me contente de hocher la tête. Sa réponse me convient. Pourtant, même si j'ai coupé court à la conversation, il reste dans ma cellule.
— Pourquoi tu ne pars pas ?
Ma question semble le réveiller, et il ne bronche pas en quittant la cellule, n'oubliant pas de la refermer en me regardant les yeux. Espèce de crétin.
Je passe une nouvelle fois quelques heures toute seule. J'ai dû, malheureusement, utiliser ces satanés toilettes car je ne pouvais pas rester plus longtemps.
Ça m'a complètement dégouté. J'ai cru que tout le monde pouvait m'entendre faire mes besoins et qu'en plus le gars en face de ma cellule pouvait me voir.
D'autant plus que les toilettes ne sont absolument pas lavés, c'est une vieille cuvette avec une trappe en bois.
Je suis installée contre un des murs, et je tente de trouver le sommeil pour faire passer le temps. Manque de bol, je n'y arrive absolument pas.
Tout à coup, j'ai la sensation que quelque chose dégouline dans ma culotte. Je me précipite vers les toilettes, croyant que ma vessie ait fait des siennes, mais ce que je vois me fige.
Du sang. Oh bordel, j'ai mes règles ! Et je n'ai absolument pas de quoi me protéger, ça va me dégoûter réellement.
J'enfile de nouveau mon pantalon, et court vers les barreaux de ma cellule. Il faut que j'appelle quelqu'un. Il me faut de quoi me protéger.
Je tambourine contre les barreaux de ma cellule, je hurle le prénom des filles, de Hadès ou de Aedan en espérant que quelqu'un vienne me voir.
J'entends alors des pas déboulés, et se précipiter vers ma cellule. Cristina entre dans mon champ de vision, complètement paniquée et me regarde.
— Qu'est-ce qu'il y a Nayeli ? On t'as touchée ? On t'as fait du mal, ou tu t'es fait mal ?
— Respire Cristina je vais bien. J'aurai juste besoin d'une serviette, si tu peux.
— Ne bouge pas.
C'est pas comme si je pouvais de toute façon. Je la vois courir dans l'autre sens, et décide d'attendre devant mes barreaux, sous l'oeil amusé du mec en face.
Elle revient rapidement, et je la remercie. Elle se tourne de l'autre côté, respectant mon intimité et je me dépêche de l'enfiler.
Nous parlons encore quelques instants, et elle se rappelle qu'elle a des choses à faire, me laissant de nouveau dans cette pénombre macabre.
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