Chapitre 23
Je ne sais pas quand il compte passer à l'acte, mais cela ne devrait pas tarder. Et je ne sais pas du tout comment l'arrêter.
J'ai eu peu de relations amoureuses. Certaines n'étaient que passagères et ne duraient à peine qu'un mois, mais une se démarquait des autres, puisque je suis restée deux ans avec cette personne.
C'est moi qui l'aie quitté, puisque l'on ne s'entendait plus sur les projets communs. J'avoue avoir été détruite par cette séparation mais je n'avais pas le choix. Et aujourd'hui, je remercie l'ancien moi d'avoir osé passer le cap.
Le fait de savoir que cet homme est juste là pour me faire passer à la casserole, et que d'ici demain, il aura déjà fuit, me fout la gerbe. Je ne suis pas consentante !
Je le vois passer de mes yeux à mes lèvres sans arrêt. Je ne sais pas s'il a cramé que je ne suis pas très à l'aise, mais ce genre de gars doit s'en foutre royalement de mes états d'esprits.
— Et vous avez combien de réserves en tout ?
— Mais qu'est-ce que ça peut te foutre... souffle-t-il en se rapprochant d'un coup de moi.
Je ne comprends pas bien ce qu'il fout jusqu'à ce que je sente quelque chose d'humide sur mon oreille. Oh bordel, il est vraiment en train de me lécher l'oreille ? T'as des gens qui trouvent ça sexy ?!
Je le repousse gentiment, et je vois passer un regard d'étonnement dans ses yeux. Je souris timidement en lui expliquant doucement que je veux qu'on y aille moins vite.
Il semble obtempérer, puisqu'il recule un peu, mais reste proche de moi. Je le remercie avec un sourire que je veux chaleureux, et il me le rendit.
Bordel, mais quelle est cette situation.
— Si tu es intéressée par mon métier, sache que l'on recrute. Ça paye plutôt bien ce boulot, tu pourrais vite y être satisfaite.
— Oh non, je suis bien dans mon métier ne t'en fais pas.
— Nos réserves se trouvent essentiellement à Santa Cruz. Tous nos cartels ennemis sont dans la région, alors nous avons préféré les éloigner au maximum.
— C'est très stratégique, rigolé-je.
— Tu n'imagines pas le nombre de réunions pour que nous soyons tous d'accord. J'ai cru que certains aller passer par la fenêtre.
Je rigole de bon cœur, enfin, j'essaye, et il continue de me barber de leurs réserves, mais également de me faire l'éloge de leur chef, qu'il qualifie de génie.
— Tu connais Aedan Ventura ?
Heureusement que j'ai contrôlé ma bouche, car j'ai senti le « oui » partir sans que je puisse le contrôler. Je fais mine de réfléchir, et fais semblant de tilter.
— Oh, ce n'est pas le plus puissant baron du pays ?
— Tu en as mis du temps, rit-il.
— Je connais beaucoup de monde, j'ai dû mettre du temps pour mettre de l'ordre dans ma tête, m'expliqué-je en souriant.
— Et bien cet enfoiré ne mérite même pas ce titre. Il a fait quoi sérieux ? Tout l'argent lui revient de droit grâce à ses parents. Le plus grand est notre chef, tu ne penses pas ?
— Je ne peux rien te dire, dis-je simplement en frottant sur ma robe. Je ne les connais pas du tout, et je ne m'intéresse pas réellement à cela de base !
— Oui, c'est vrai, mais bon, ça me fait du bien de l'affirmer à quelqu'un qui ne me jugera pas. Beaucoup de gens sont du côté de cet enculé, alors il vaut mieux que je ne révèle rien.
Il commence à se rapprocher de moi, avec un regard rempli de désir. Je crois qu'il ne parlera pas davantage si je ne lui donne pas un peu de ce qu'il veut.
Alors qu'il s'approche de plus en plus de moi, j'entends un grand fracas dans mon dos. Je me retourne, affolée, et croise le regard de Cristina, qui porte un chandelier.
Sur le coup, je crois que je ne saisis pas la situation. Elle se précipite vers le mec, et l'assomme d'un coup. À en croire son pouls, il se réveillera.
— Mais qu'est-ce qu'il t'arrive ? T'es pas bien ? J'étais sur le point de conclure pas mal de choses.
— Conclure quoi ? T'allais coucher avec lui ? On n'a pas le temps Nayeli, une organisation est là.
En éteignant mon boîtier, je me fige immédiatement. Comment ça une organisation est là ? Ce n'est pas possible, pas maintenant.
— Comment ça ?
— Ils savaient que nous serions là. Quelqu'un a dû leur communiquer bordel. Ils savent que trois secrètes du cartel de Caya sont là. C'est leur chance de nous capturer afin d'avoir des informations sur le cartel qu'ils rêvent d'arrêter.
Je suis complètement perturbée. Cristina est obligée de me prendre le poignet, de m'entraîner à travers le couloir. Je vois Victoria débouler et venir rapidement à notre rencontre.
— J'ai pu communiquer rapidement avec Hadès. Des hommes sont en route pour venir nous chercher et arrêter le massacre si besoin.
— Mais comment ils vont venir ? Il y a je ne sais combien d'heures de route ! paniqué-je.
— Apparemment, des hommes sont venus dans la journée pour contrôler que tout se passerait bien. Ils arrivent dans une dizaine de minutes. On doit juste être caché en attendant.
— Bonjour, avez-vous repéré trois jeunes femmes qui ressemblent à ça ?
Cette voix lointaine provient du rez-de-chaussée, et nous l'entendons assez, car nous sommes proches des escaliers. Je tourne mon regard vers les filles, et je ne peux m'empêcher de sentir mon cœur s'accélérer.
— Ils sont là. Il faut que l'on se cache, nous presse Cristina.
Victoria se saisit de nos mains, et nous avançons rapidement, mais pas trop pour éviter de faire du bruit. Nous arrivons au fond du couloir, où réside une chambre vide avec une large fenêtre.
Profitant des gémissements de certaines filles, Victoria repère un extincteur, qu'elle prend, et je viens directement l'aider. Ensemble, nous arrivons à le porter, et reculons de quelques mètres.
Nous fonçons alors vers la fenêtre, et le balançons du plus fort que nous pouvons. Une fois lâché, on se réfugie rapidement le plus loin possible.
La vitre se brise en milliards de morceaux, et le bruit que cela a fait est immense. Les gémissements ont cessé, et des voix commencent à se faire plus fortes.
— Oh bordel, ils nous ont entendus quand même !
Je prononce cette phrase, et ma voix ne manque pas de faillir à de nombreux instants, trahissant ma nervosité. Pourtant, ce n'est pas la première fois que nous nous retrouvons dans la merde comme cela.
Les pas se font de plus en plus bruyants, et les bruits métalliques de l'escalier se font entendre. Ça y est, ils sont en train de monter !
Un vacarme assourdissant prend alors place dans le couloir. Les gens qui prenaient du bon temps sortent de leurs chambres sans trop comprendre ce qu'il se passe.
Victoria nous ramène à la réalité en nous tirant vers la fenêtre brisée. Nous enjambons en essayant de ne pas nous couper, et posons les pieds sur le toit.
Face à nous s'offrent le rond-point de la ville que nous avons pu visiter dans l'après-midi. Certaines personnes s'arrêtent sans trop comprendre ce qu'il se passe.
Je retire rapidement mes chaussures, et je suis suivie par les filles qui font de même. C'est pour plus de pratique, car je ne suis pas sûre d'arriver à m'enfuir avec des talons de dix centimètres.
À l'entrée de la boîte de nuit se trouvent six voitures. Ils sont si nombreux que cela ?
J'attrape inconsciemment la main de Cristina qui la sert en retour, et nous suivons Victoria à travers les tuiles.
Un grand fracas nous fait toutes nous retourner. Trois hommes viennent de franchir la vitre, et leurs regards sont rivés sur nous, armes aux mains.
Victoria nous fait basculer sur le côté, pour être protégées au cas où des balles venaient à arriver. Elle sort trois flingues de son petit sac, et nous les donne.
D'un seul regard, j'ai compris. Je dois m'occuper des trois hommes, et Cristina me fait implicitement comprendre que je dois tirer sur celui du milieu.
Alors ni une ni deux, nous sortons rapidement de notre cachette, et sans même qu'ils puissent réagir, nous visons leurs têtes et tirons.
Ce n'est pas la première fois que je tue quelqu'un, mais savoir qu'il avait une vie, une famille à côté, des activités me fendent le cœur. Des gens vont apprendre la mort de ces hommes, et seront dévastés pour le reste de leurs vies.
Victoria attrape mon poignet et nous continuons sur le toit. Malheureusement, arrive un moment où il n'y en a plus, et où nous devons nous arrêter.
— La voiture arrive dans cinq minutes. Nous allons descendre par là, pas le choix ! s'écrit Victoria.
— Descendre ? s'étonne Cristina. On ne peut pas descendre par là Victoria, comment veux-tu qu'on y arrive ?
— Il y a des tubes sur les côtés. On peut faire une descente par là et atterrir sur un balcon du premier étage déjà.
— J'espère que tu sais ce que tu fais, annoncé-je.
Nous courons presque vers ces fameux longs tubes que l'on retrouve facilement sur les maisons, ou autre bâtiment.
Je jette mes chaussures sur le balcon que nous visons, et je suis Cristina qui vient déjà de commencer.
Je ne sais pas du tout comment m'y prendre, alors je pose mes mains sur le mur qui maintient le tube, et je pose mes pieds sur le tube.
Le fait que le tube glisse, je sens que je perds le contrôle, et j'ai tout à coup peur de descendre le tube d'un coup, et de me brûler gravement.
Heureusement pour moi, à peine ai-je descendu un peu que je suis réceptionné par Cristina, qui l'aide à me calmer un peu. Elle aide Victoria, et nous voilà maintenant sur un balcon, où je récupère mes chaussures, un peu abîmés.
— Et désormais, qu'est-ce qu'on fait ? demandé-je, alarmée.
Pas mal de gens se sont arrêtés dans la rue pour constater ce qu'il se passe, mais ils ne bougent pas d'un poil. De toute façon, je ne suis pas sûre de pouvoir faire confiance à des inconnus.
Victoria ne répond rien, et fouille de nouveau dans son sac. Elle en sort une corde, et je comprends tout de suite : une descente en rappel.
— Mettez un caillou sur la corde, je vous en supplie !
Une jeune femme remue directement, sous le regard médusé des autres personnes, et revient avec un gros caillou qu'elle a pu récupérer sur le centre-ville.
Victoria sourit, et lui tend le bout de la corde, que la jeune femme s'empresse de récupérer pour fixer la corde.
Cristina sort des gants, et nous explique que c'était au cas où nous aurions à faire du rappel. Ils sont vraiment trop organisés dans ce cartel, c'est abusé.
Pendant que je mets mes gants, Victoria s'occupe de placer l'autre bout de la corde autour d'une barre du balcon. Elle tire plusieurs fois pour tester la solidité.
Cristina est la première à s'engager, et elle descend d'un coup, ce qui lui vaut un petit cri de douleur, car ç'a dû lui faire mal même à travers les gants.
Je n'ose imaginer ce que moi, je vais devoir ressentir. Mais Victoria me presse d'y aller, étant donné que des voix impatientes se font entendre, signe qu'ils nous cherchent désespérément.
Je range les chaussures dans mon sac, et enjambe le balcon pour m'asseoir dessus. Je respire assez difficilement, mais Cristina m'explique qu'elle est là au cas où ça ne va pas.
Je saute d'un coup sans réfléchir, et attrape facilement la corde, mais sans me laisser le temps de réaliser, me fait descendre d'un seul coup.
En arrivant en bas, Cristina me réceptionne pour éviter que je me fracasse le coccyx par terre, et je retire immédiatement mes gants.
Deux marques bien rouges figurent sur mes mains, mais cela ne ressemblent pas forcément à une brûlure grave.
Je relève la tête pour voir Victoria descendre, tout en ayant sorti son flingue, et en tuant celui qui s'apprêtait à la menacer.
Les cris des habitants se font entendre, et ils se mettent à tous courir autour de nous, et d'autres à appeler la police.
Je m'empresse d'aller voir la jeune femme pour la remercier, et lui remets quelques billets, qu'elle prend avec un regard rempli de courage, et elle s'enfuit à l'autre bout de la rue.
Les filles commencent à courir vers le rond-point, et nous nous prenons des klaxons de la part de beaucoup de voitures.
Un coup de feu retentit, ce qui nous fait sursauter, et Victoria nous plaque immédiatement sur le sol. Parfois, je me demande ce que nous ferions sans elle. C'est elle qui mène clairement la mission.
Je regarde derrière moi pour regarder ce qu'il vient de se passer. Deux hommes s'approchent rapidement de nous, et d'autres sortent de la boîte de nuit.
Cristina nous hurle de courir, et nous nous dépêchons d'aller à l'emplacement sur lequel la voiture est censée être.
— Arrêtez-vous !
Quelqu'un apparaît devant nous sans que nous nous y attendions, et Victoria nous arrête. Cet homme me fait penser à quelqu'un, mais je n'arrive plus à penser à qui.
— Bien joué Carlos, belle prise.
Carlos. Mais évidemment. C'est le chef d'Inaya.
Inaya ?
Mon cerveau percute soudainement. C'est l'organisation d'Inaya qui est ici et qui veut nous faire arrêter ! C'est pour ça que Cristina disait qu'ils rêvent de nous arrêter.
Je vois alors quelqu'un qui me glace le sang. Je pense que c'est la pire trahison possible. Je ne savais pas qu'un jour cela pourrait arriver, et je me sens profondément blessée que ce jour soit finalement maintenant.
Inaya est en face de moi, et vient se positionner à côté de Carlos, arme à feu pointé sur moi. Mais qu'est-ce qu'elle fabrique bordel ?
— Inaya, tenté-je de commencer.
Ma voix se meurt en prononçant son prénom. Je vois Victoria me regarder bizarrement, et je sais qu'elle vient d'avoir un éclair de lucidité. Elle sait que c'est elle.
Elle sait que c'est non seulement ma sœur, mais que c'est aussi elle qui menace de faire couler le cartel à cause d'Adriel.
Victoria s'approche de moi, et pose sa main sur mon épaule. Je ne sais pas pourquoi elle fait ça, mais je sais qu'elle tente de me rassurer.
Mais comment être rassurée alors que ma sœur, la personne que j'admirais le plus au monde, se tient devant moi, prête à me tuer en appuyant seulement sur la gâchette ?
Ne comprend-elle pas que je suis emprisonnée ici, à devoir faire ces missions sans avoir mon mot à donner ? Même si ces deux filles sont adorables, et que tout le monde me traite normalement au cartel, cela va de soi que je ne suis pas chez moi !
— Je vois que tu as trouvé ta nouvelle maison Nayeli. Évidemment, tu as choisi le mauvais côté. Honnêtement, je ne te reconnais plus. Tu as préféré choisir un cartel sanglant, où ils tuent des gens pour leurs simples plaisirs, plutôt que de venir avec moi ?
— Ce n'est pas ce que tu crois.
Une nouvelle fois, cette phrase décède dans ma gorge. Je n'ose même pas la regarder dans les yeux. Cette emprise qu'elle a sur moi est beaucoup trop forte, et je sais qu'elle est capable de me faire culpabiliser plus que je ne le devrais.
— Alors qu'est-ce que je ne comprends pas Nayeli ? hurle-t-elle en se rapprochant de moi. Tu es avec deux salopes du cartel, tu côtoies les pires personnes de ce pays tous les jours. Et tu n'as même pas tenté de t'échapper ou de négocier ?
— Et comment je dois faire ça abrutie ? Je suis surveillée en permanence, et si je m'échappe comme la dernière fois, c'est ma tête qui va y passer. En attendant, tu n'as pas fait beaucoup d'efforts pour me retrouver Inaya. Quand j'étais venue te voir, tu m'as laissé sortir sans aucune protection, alors que tu savais très bien qu'ils seraient capables de venir me chercher !
Je lève la tête et croise ses yeux, remplis de fureur. Son doigt menace d'appuyer sur la détente, et je sens pour la première une haine envers elle.
Comment ma sœur, la chair de ma chair, peut-elle me faire ça ? Comment cela est même humainement possible ? Je ne compte pas à ce point ?
— Assez parlé. Embarquez-les.
Carlos a l'air tellement ennuyé de la situation qu'il a décidé d'arrêter Inaya dans sa course. Mais au moment où je pensais que nous étions foutues, deux voitures klaxonnent et s'engagent sur le rond-point, manquant d'écraser toutes les personnes.
Le temps qu'ils réagissent, Victoria me pousse à l'intérieur de la voiture, et les chauffeurs des voitures partent aussitôt, pour rentrer à la maison.
Elles esquivent les quelques balles qu'ils essayent encore d'envoyer, et nous arrivons à les semer.
Toute la pression évacue, et je laisse les larmes couler abondamment sur mes joues. Cristina prend ma main et la serre du mieux qu'elle peut.
J'ai été trahie. De la pire des façons. Je ne lui pardonnerai jamais. Et je sens que maintenant, quelque chose a changé.
Ce n'est plus l'Inaya que je connaissais et avec qui j'ai passé mon enfance. Elle ne vit plus que pour son organisation, tellement qu'elle serait capable de me tuer.
En repensant à elle, je n'arrive même pas à apprécier tous les bons moments que nous avons pu passer. Mon cœur est rempli de rancœur, et je ne laisserai plus jamais cela arriver.
Inaya, je te déteste.
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